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d’incisions sur ton corps, à l’occasion d’une âme. » A l’occasion d’une âme, c’est-à-dire, à l’occasion des funérailles d’un mort : car cette âme qui s’en va est la cause de la douleur. Le deuil en est l’expression, et plusieurs nations ont l’habitude de se faire alors des incisions sur la chair. Dieu s’élève contre cet usage.

LXXII. (Ib. 20, 5.) Sur l’adoration des princes. – « Au point qu’ils commettront la fornication envers les princes, du milieu de leur peuple. » Cela ne veut pas dire : les princes du peuple; mais que les coupables commettront la fornication parmi leur peuple. L’Écriture parle ici des princes auxquels on rendait les honneurs divins. C’est ainsi que l’Apôtre dit : « Selon le prince de la puissance de l’air [1] », et le Seigneur dans l’Évangile : « Maintenant, le prince de ce monde est jeté dehors[2]; » et encore : « Voici le prince de ce monde qui vient, et il ne trouvera rien en moi[3]. »
LXXIII. (Ib. 20, 10.) Sur le châtiment des adultères. « Quiconque commettra un adultère avec la femme d’un autre homme, ou quiconque commettra un adultère avec la femme de son prochain, il faut qu’ils meurent: « ces derniers mots, sont au pluriel : qu’ils meurent : c’est-à-dire, celui qui a abusé, et celle dont on a abusé. L’Écriture a voulu mettre ici quelque différence entre l’homme en général et le prochain, quoique, en beaucoup d’endroits, elle entende par le prochain tout homme quel qu’il soit. Mais que signifie cette locution, puisque l’Écriture dit du prochain ce qu’elle vient de formuler en parlant de l’homme ? Si l’on doit.respecterla femme d’un homme quelconque, la logique ne veut-elle pas qu’on respecte bien plus encore la femme du prochain ? S’il avait été question d’abord du prochain, il aurait fallu, qu’on ne se crût pas autorisé à commettre l’adultère avec la femme de celui qui n’est pas notre prochain, parler ensuite de l’homme en général ; mais dans ce cas, le moindre mal n’étant pas permis, à combien plus forte raison, un mal plus grave ? Car s’il est défendu d’abuser de la femme d’un homme quelconque, combien plus de la femme du prochain ? Cette répétition ne serait-elle pas l’explication de ce qui précède, et l’Écriture n’aurait-elle pas pour but de nous faire comprendre combien grave est l’adultère commis avec une femme mariée, puisque celui qui s’en rend coupable, abuse de la femme de son prochain ? Car tout homme est notre prochain.
LXXIV. (Ib. 20, 16.) Sur le péché d’une femme qui se livre à une bête. – « Si une femme se prostitue à une bête, vous tuerez la femme et la « bête ; qu’ils meurent : ils sont coupables. » On demande comment un animal peut-être coupable, puisqu’il est privé de raison et ne peut être soumis à aucune loi. Il y a une figure, appelée métaphore par les Grecs, qui attribue à un être inanimé ce qui convient à un être animé ; c’est ainsi qu’il est permis de dire : un vent mauvais une mer en courroux : n’est-ce pas par un tour de phrase semblable que l’on prête à l’être privé de raison ce qui n’appartient qu’à l’être raisonnable ? La vraie cause pour laquelle la loi commande de tuer l’animal, c’est que la vue de cet être devenu abominable perpétue la mémoire d’un fait qui doit être à jamais oublié.
LXXV. (Ib. 20, 17.) Sur le péché commis avec une sœur unilatérale, et le châtiment de ce péché. – « Quiconque aura pris sa sœur de père ou de mère, et aura vu sa honte ; c’est une abomination : ils seront exterminés en présence de leur nation. Il a découvert la honte de sa sœur, ils porteront leur péché. » Que veut dire : « il a vu » dans ce passage, sinon qu’il l’a connue en dormant avec elle ? C’est ainsi qu’il est dit dans l’Écriture : « Il connut sa femme [4] », pour ; il s’unit à elle. Et que signifient ces mots : « Ils porteront leur péché », quand il est parlé de leur châtiment ? L’Écriture n’a-t-elle pas voulu désigner sous le nom de péché, le châtiment même du péché ? V 20
LXXVI. (Ib. 20, 20.) Sur le mariage avec les parents aux degrés prohibés. – « Quiconque a dormi avec sa parente, a découvert la honte de sa parenté : ils mourront sans enfants. » Jusqu’où doit s’étendre cette parenté, puisqu’il est permis, et l’a toujours été, de contracter mariage avec une parente d’un degré éloigné ? Cette défense doit s’entendre des degrés prohibés par la Loi, et c’est à ces degrés qu’il est fait allusion dans ces paroles : « Quiconque aura dormi avec sa Parente ; » l’Écriture a même omis de mentionner certaines parentes, dont il faut tenir compte, par exemple, la sœur de père et de mère, et la femme du frère de la mère, autrement de l’oncle maternel. Elle a néanmoins défendu le mariage avec la femme de l’oncle paternel,

  1. Eph. 2, 2.
  2. Jn. 12, 31
  3. Id. 14, 30
  4. Gen. 4, 1, 17, 25.