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5. De même dans ce livre de la Genèse, quand Emmor vient parler à Jacob et lui demander sa fille Dina pour son fils Sichem, les fils du patriarche, qui étaient absents, étant arrivés, Emmor dit à tous : « Mon fils Sichem a choisi votre fille par affection : donnez-la-lui donc pour épouse[1]. » La personne du père étant la plus vénérable, il dit : votre fille par synedoche, et dans cette expression il comprend les frères eux-mêmes, dont certes elle n’était pas la fille. On explique de même ce passage : « Cours vers les brebis, et rapporte m’en deux chevreaux. » Les brebis et les chevreaux paissaient ensemble ; mais comme les brebis étaient la portion principale du troupeau, l’interlocuteur a compris en même temps les chèvres sous le nom des brebis. Ainsi, parce que le nombre des onze enfants de Jacob, qui naquirent en Mésopotamie, était le plus considérable, l’Écriture, après avoir parlé d’eux, fait entrer dans ce nombre Benjamin, qui n’y était pas né, et elle dit : « Ce sont là les enfants de Jacob, qui naquirent en Mésopotamie de Syrie. »


CXVIII. (Ib. 36, 1.) Comment est-il parlé de la postérité d’Esaü après le récit de la mort d’Isaac ? – Si après le récit de la mort d’Isaac, il est dit quelles femmes eut Esaü et quels enfants il engendra, il faut considérer que l’Écriture reprend ici les événements de plus haut. Car ceux-ci n’arrivèrent pas après la mort d’Isaac, quand Esaü et Jacob étaient âgés déjà de cent-vingt ans. En effet Isaac était âgé de soixante ans, quand il eut ses deux fils, et sa vie entière fut de cent quatre-vingts ans.
CXIX. (Ib. 36, 6-7.) Comment Esaü se retira deux fois sur le mont Séïr.
– Comment l’Écriture dit-elle qu’après la mort de son père Isaac, Esaü s’éloigna de la terre de Chanaan, pour habiter sur le mont Séïr ; tandis qu’à l’époque où son frère Jacob revint de Mésopotamie, il habitait déjà sur cette montagne ? Il est facile d’expliquer comment l’Écriture n’est ni trompée ni trompeuse. Esaü, après le départ de son frère pour la Mésopotamie, ne voulut plus demeurer avec ses parents, soit à cause de la douleur qu’il éprouvait au souvenir de la bénédiction dont il avait été frustré, soit à cause de sa femme qu’il voyait exposée à l’aversion de ses parents, soit pour tout autre motif. C’est alors qu’il habita pour la première fois le mont, Séïr. Dans la suite, quand son frère Jacob fut de retour, la paix s’étant rétablie entre eux, il revint auprès de ses parents, et après qu’ils eurent ensemble enseveli leur père, comme ils étaient très riches et que ce pays, suivant la remarque de l’Écriture, ne pouvait les contenir, il se retira de nouveau à Séïr, et y propagea la race Iduméenne.
CXX. (Ib. 36, 21.) Sur le pays d’Edom, autrement l’Idumée.
– « Voici les princes Chorréens, fils de Seïr, dans le pays d’Edom. » L’écrivain parle ici comme au temps où il vivait. Lorsque le père de ces princes habitait Séïr, Esaü n’étant pas encore arrivé dans ce pays, il ne s’appelait point évidemment le pays d’Edom. Car ce nom lui vient d’Esaü, qui se nommait à la fois Esaü et Edom et de qui sont issus les Iduméens, en d’autres termes le peuple d’Edom.
CXXI. (Ib. 36, 31-32.) Sur les rois d’Edom.
— Voici les rois qui régnèrent à Edom, avant « qu’un roi régnât en Israël. » Il ne faut pas entendre ce passage, comme s’il contenait le dénombrement de tous les rots, d’Edom, jusqu’au temps où la royauté commença en Israël, dans la personne de Saül. Il y eut beaucoup de rois à Edom avant l’avènement de Saül, au temps des Juges, qui précédèrent la royauté ; mais parmi ces rois, Moïse n’a pu nommer que ceux qui ont vécu avant sa mort. Et qu’on ne s’étonne pas de trouver, depuis Abraham jusqu’au dernier roi nommé par Moïse, en passant par Esaü, père du peuple d’Edom ; par Raguël, fils d’Esaü ; par Zara, fils de Raguël ; par Jacob, fils de Zara, et par Balac, son successeur, qui est donné comme le premier roi d’Edom, plus de générations qu’on n’en compte par Jacob depuis Abraham, jusqu’à Moïse. Là effectivement se trouvent presque douze générations, et ici sept à peine jusqu’à Moïse. Il a pu se faire que là où on en compte le plus, il y ait eu plus de rois pour se succéder, parce que la mort les enlevait plus rapidement. C’est ainsi qu’en suivant un ordre différent, saint Mathieu compte deux générations, depuis Abraham jusqu’à Joseph[2] ; saint Luc, suivant un autre ordre et comptant les générations, non point par Salomon, comme lui, mais par Nathan, en énumère cinquante-cinq depuis Abraham jusqu’à Joseph[3]. Dans la ligne où l’on compte le plus de générations, la mort a été plus prompte, que dans celle où on en compte le moins. Et dans la crainte qu’on ne s’étonne de ce que Balac, fils de Béor, est mis au nombre des rois d’Edom, et qu’en raison de la ressemblance

  1. Gen. 34, 6-8
  2. Mat. 1, 1-17
  3. Luc. 3, 23-38