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évidence ! Que ces œuvres luisent devant les hommes pour qu’ils voient, pour qu’ils se réjouissent et glorifient Dieu qui est dans les cieux[1] ! Que ce soient là vos joies dans le Seigneur. Puisse-t-il vous exaucer, priant pour vos prêtres, ce Dieu que vous écoutez parlant par leur bouche ! Qu’on aille, qu’on marche, qu’on coure dans la voie du Seigneur ; que les petits soient bénis avec les grands et comblés de joies dans ceux qui leur disent : « Nous irons dans la maison du Seigneur[2] ! » Que les uns s’avancent les premiers et que les autres suivent, devenus leurs imitateurs comme les premiers sont les imitateurs du Christ. Que les saintes fourmis hâtent leur marche, que les ouvrages des saintes abeilles exhalent leur parfum, qu’on porte des fruits de patience avec la grâce de continuer jusqu’à la fin. Que le Seigneur ne permette pas que nous soyons tentés au-delà de nos forces, mais qu’il nous « fasse tirer un avantage de la tentation même afin que nous puissions persévérer[3] ! » Priez pour nous, ô vous qui êtes digne d’être exaucé ! Car vous approchez de Dieu avec un grand sacrifice de sincère amour et de louange dans vos œuvres. Priez pour que ces mêmes œuvres luisent en nous ; celui que vous priez sait quelle joie nous éprouvons à les voir luire en vous. Ce sont là nos vœux, ce sont là « les consolations qui, en proportion, de nos douleurs, réjouissent notre âme[4]. » Cela est ainsi, parce que cela a été promis ; le reste arrivera aussi, parce que la promesse nous en a été faite. Nous vous conjurons, au nom de celui qui vous a accordé ces grâces et qui a ainsi béni par vous votre peuple, de nous faire envoyer, à votre choix, les sermons de vos prêtres après qu’ils auront été écrits et corrigés. Je ne néglige point, quant à moi, ce que vous m’avez commandé, et j’attends ce que vous aurez à me dire touchant les sept règles ou clefs de Tichonius[5], comme je vous l’ai souvent demandé. Nous vous recommandons beaucoup notre frère Hilarin, médecin et premier magistrat d’Hippone. Nous savons la peine que vous vous donnez pour notre frère Romain, et nous n’avons rien à demander, si ce n’est que le Seigneur vous aide pour lui. Ainsi soit-il.

LETTRE XLII.

(Année 397.)

Saint Augustin souhaite d’obtenir quelques écrits de saint Paulin.

AUGUSTIN A SES HONORABLES ET TRÈS-SAINTS FRÈRES ET SEIGNEURS EN JÉSUS-CHRIST PAULIN ET THÉRASIE, SALUT DANS LE SEIGNEUR.

Aurait-on pu croire que ce serait par notre frère Sévère que nous vous demanderions une réponse, depuis longtemps si désirée et si inutilement attendue ? Pourquoi nous forcer à avoir soif, en Afrique surtout, durant deux étés ? Que dirai-je de plus ? O vous qui donnez chaque jour ce qui vous appartient, payez votre dette ! Vous avez peut-être tant différé de m’écrire parce que vous vouliez achever et m’envoyer ensuite l’ouvrage contre les païens, dont j’avais entendu dire que vous vous occupiez, et que je vous avais vivement demandé. Plût à Dieu qu’après m’avoir privé de vos écrits, vous admissiez mon long jeûne à un si riche festin ! Si ce festin n’est pas encore prêt, je continuerai à me plaindre, à moins qu’en attendant vous me donniez de temps à autre de quoi me soutenir. Saluez nos frères, surtout Romain et Agile. Ceux qui sont avec moi vous saluent : pour qu’ils fussent moins fâchés que moi, il faudrait qu’ils vous aimassent moins.

LETTRE XLIII.

(Année 397 ou commencement de l’année 398.)

Le schisme des donatistes. – Exposé des faits par des témoignages irrécusables. Les donatistes mis en contradiction avec eux-mêmes ; leurs prétentions et leur attitude condamnées par les saintes Écritures. La vérité est démontrée contre eux jusqu’à l’évidence la plus palpable. Des traits d’éloquence se rencontrent dans la dernière partie de cette lettre. Les personnages à qui elle est adressée habitaient Tubursi[6].

AUGUSTIN A SES BIEN-AIMÉS ET HONORABLES SEIGNEURS ET FRÈRES GLORIUS, ÉLEUSIUS, LES DEUX FÉLIX, GRAMMATICUS, ET A TOUS CEUX QUI VOUDRONT BIEN LIRE CECI.

1. L’apôtre Paul a dit : « Évitez l’hérétique « après l’avoir averti une première et une seconde

  1. Matt. V, 16
  2. Ps. CXXI, 1
  3. I Cor. X, 13
  4. Ps. XCIII, 19
  5. Tichonius avait composé un ouvrage intitulé : le Livre des Règle ; il y établit des règles au nombre de sept qui sont comme autant de clefs pour pénétrer le sens des saintes Écritures. Saint Augustin les expose une à une dans son rue livre de la Doctrine chrétienne ; il les juge utiles, mais pas d’une aussi universelle sûreté que le prétend l’auteur. Tichonius était donatiste, il eut assez d’intelligence pour combattre victorieusement les erreurs du parti de Donat et pas assez de logique pour s’en séparer tout à fait.
  6. Nous rencontrons plus d’une fois dans les lettres de saint Augustin le nom de l’ancienne cité de Tubursi ; grâce à de précieuses communications, nous pouvons en déterminer l’emplacement ; Tubursi était situé sur la route de Çalame à Madaure, à peu près à égale distance de l’une et de l’autre ; ses vestiges forment un énorme monceau de ruines ; ce lieu se nomme aujourd’hui Sremica. Dans cette XLIIIe lettre, nous trouvons une autre cité dont nous aurions aimé à marquer la position précise, c’est Tigisis ; nous savons seulement que cette ville était située au sud de Constantine, sur la route de Théveste, aujourd’hui Tebessa.