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pas dans l’affaire de Maximien au point de ne pouvoir vous en tirer, vous renoncerez aux idées de votre parti sur la participation aux fautes d’autrui, sur la séparation d’avec les méchants, sur ce qu’il faut prendre garde à ne pas toucher celui qui est impur et souillé, sur la corruption de la masse avec un peu de levain, et autres choses que vous avez également coutume d’interpréter à votre manière ; mais vous affirmerez, vous observerez ce que la saine doctrine recommande, ce que la vraie règle établit par les exemples des prophètes et des apôtres, savoir ; que mieux vaut supporter les méchants, de peur que les bons ne soient abandonnés, que d’abandonner les bons, de peur que les méchants ne soient séparés ; et qu’il suffit de nous séparer des méchants par la différence de la vie et des mœurs, en, ne pas les imitant, en ne pas consentant à ce qu’ils font ; croissant ensemble, mêlés aux mêmes épreuves, réunis à eux jusqu’au temps de la moisson et du vanneur, jusqu’à ce que les filets soient tirés sur le rivage. Quant à là persécution, comment justifierez-vous tout ce que votre parti a fait par voie judiciaire pour chasser les maximianistes de leurs sièges, sinon en disant que, vos sages l’ont, fait dans, la pensée de les ramener par des peines modérées et non pas dans la ; pensée de leur nuire ? Ne direz-vous pas que s’il y a eu des excès, comme dans les violences.commises à l’égard de Salvius de Membres, et attestées par la ville entière, ces excès ne doivent pas être imputés à.tous, que la paille et les bons grains se trouvent dans la communion des mêmes sacrements, mais que la différence de la vie les sépare ?

17. Cela étant ainsi, j’embrasse, cette défense devenue la vôtre ; car c’est celle que vous ferez si vous vous appuyez sur la vérité, sinon la vérité vous confondra. J’embrasse, dis-je, cette défense ; mais volis voyez qu’elle est aussi la mienne. Pourquoi ne travaillons-nous pas à être ensemble le froment dans l’unité de l’aire du Seigneur, et pourquoi ne supportons-nous pas ensemble la paille ? Pourquoi pas, dites-le moi, je vous en prie, dans quel but, à quoi bon, dans quelle utilité ? On fuit l’unité, pour que les peuples rachetés par le sang de l’Agneau unique, s’enflamment les uns contre les autres de sentiments contraires ; pour que les brebis soient partagées, comme si elles étaient à nous et non pas au père de famille qui a dit à son serviteur : « Paissez mes brebis[1], » et non pas : Paissez vos brebis ; qui a dit encore :[2] « Afin qu’il n’y ait plus qu’un seul troupeau et un seul pasteurErreur de référence : Balise <ref> incorrecte : les références sans nom doivent avoir un contenu. ; » qui crie dans l’Évangile : « Tous sauront que vous êtes mes disciples par le véritable amour que vous aurez les uns pour les autres[3] ; » et encore : « Laissez croître l’un et l’autre jusqu’à la moisson, de peur que par hasard en voulant arracher l’ivraie, vous n’arrachiez aussi le froment[4]. » On fuit l’unité, pour que le mari aille d’un côté et la femme de l’autre ; pour que celui-là dise : Gardez l’unité avec moi, car je suis votre mari., et que la femme réponde : Je mourrai là où est mon père. Nous aurions horreur qu’ils n’eussent pas le même lit ! et ils n’ont pas le même Christ ! On fuit l’unité, pour que les parents, les concitoyens, les amis, les hôtes, tous ceux que rapprochent les besoins humains, attachés au même christianisme, soient d’accord dans les festins, les mariages, les relations de commerce, les conventions mutuelles, les politesses, les entretiens, et pour qu’ils se séparent à l’autel de Dieu ! C’est là pourtant que devrait finir toute querelle, quelle qu’en soit d’ailleurs l’origine ; car, selon le précepte du Seigneur, il faut d’abord se réconcilier avec ses frères avant d’offrir ses dons à l’autel[5] ; mais d’accord partout ailleurs, ici ils se divisent !

18. On fuit l’unité, pour que nous soyons obligés à nous défendre par les lois publiques contre les iniquités de ceux de votre parti, je ne veux pas dire contre vos iniquités, et pour que les circoncellions s’arment contre ces mêmes lois, qu’ils méprisent avec la même fureur qui vous les a attirées en punition de leurs brigandages. On fuit l’unité, pour que les paysans s’insurgent audacieusement contre leurs maîtres ; pour que les esclaves fugitifs, contrairement au précepte des apôtres, non-seulement désertent, mais menacent leurs maîtres, les attaquent, les pillent ; ils ont pour chefs dans ces entreprises violentes vos confesseurs, ceux-là même qui vous font cortège en chantant les louanges de Dieu et qui mêlent les divins cantiques à l’effusion du sang des catholiques. Craignant d’encourir l’animadversion des hommes, vous avez fait rechercher parmi les vôtres ce qui avait été dérobé, et vous avez promis de restituer les dépouilles.

  1. Jean, XXI, 17.
  2. Ibid. X, 16.
  3. Ibid. XIII, 35.
  4. Matth. XIII, 30.
  5. Ibid. V, 24.