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CHAPITRE XIII


La loi naturelle et la loi écrite. — Des gens équitables.


I. Établissons, maintenant, des divisions parmi les actes injustes et les actes justes, en partant de ce point que la définition du juste et de l’injuste se rapporte à deux sortes de lois, et que leur application à ceux qu’elles concernent a lieu de deux manières.

II. Je veux parler de la loi particulière et de la loi commune. La loi particulière est celle que chaque collection d’hommes détermine par rapport à ses membres, et ces sortes de lois se divisent en loi non écrite et en loi écrite. La loi commune est celle qui existe conformément à la nature. En effet, il y a un juste et un injuste, communs de par la nature, que tout le monde reconnaît par une espèce de divination, lors même qu’il n’y a aucune communication, ni convention mutuelle. C’est ainsi que l’on voit l’Antigone de Sophocle déclarer qu’il est juste d’ensevelir Polynice, dont l’inhumation a été interdite, alléguant que cette inhumation est juste, comme étant conforme à la nature.

Ce devoir ne date pas d’aujourd’hui ni d’hier, mais il est en vigueur de toute éternité, et personne ne sait d’où il vient[1].

Pareillement Empédocle, dans les vers suivants, s’explique sur ce point qu’il ne faut pas tuer l’être animé ; car ce meurtre n’est pas juste pour certains et injuste pour certains autres.

  1. Soph., Antig., v. 450., plus loin, chap. XV, § 6.