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GUERRE DE SAXE

ne s’acheva que lorsque les Saxons eurent accepté les conditions imposées par le roi : abandon du culte des démons et des cérémonies nationales, adoption de la foi et des sacrements de la religion chrétienne, fusion avec le peuple franc en un peuple unique.

[8.] Au cours de cette guerre, malgré sa longue durée, Charles ne livra en personne que deux fois bataille à l’ennemi[1] : la première fois, près du mont Osning, au lieu dit Detmold ; la seconde fois sur les bords de la Haase[2]. Les deux batailles furent d’ailleurs livrées le même mois[3] et à peu de jours d’intervalle ; et le désastre des ennemis fut tel qu’ils n’osèrent plus désormais ni provoquer le roi ni résister en rase campagne aux armées qu’il commandait. Cette guerre n’en coûta pas moins la mort à plus d’un représentant de la noblesse franque comme de la noblesse saxonne et même à quelques-uns de ceux qui occupaient les plus hautes charges[4]. Elle s’acheva enfin au bout de trente-trois ans, durant lesquels tant et de si grandes guerres éclatèrent dans les diverses parties du monde contre les Francs et furent conduites par le roi avec tant d’habileté qu’on ne sait ce qu’il faut le plus admirer ou de son endurance ou de sa bonne fortune. Car, quoique la guerre de Saxe, commencée deux ans avant celle d’Italie[5], ait été poursuivie sans arrêt[6], aucune de celles qui durent être menées ailleurs ne

  1. Inexact. Éginhard a lu si distraitement les Annales royales qu’il a omis d’y relever les deux succès remportés par Charlemagne, l’un en 775, après la surprise d’une de ses armées à Lübbecke, l’autre en 779 dans les environs de Bocholt (éd. Kurze, p. 43 et 55).
  2. Détails empruntés aux Annales royales, 2e rédaction, ann. 783 : « Cumque Saxones in eo loco qui Theotmelli vocatur ad pugnam se praeparare comperisset… commisso eum eis proelio, tanta eos caede prostravit ut de innumerabili eorum multitudine perpauci evasisse dicantur. Cumque de loco proelii ad Padrabrunnon se cum exercitu recepisset… audivit Saxones… super fluvium Hasam ad hoc congregari ut ibi cum eo… acie confligerent, etc. » (éd. Kurze, p. 65).
  3. Éginhard s’avance beaucoup quand il affirme que les deux batailles eurent lieu le même mois. Les Annales royales — sa source — n’en disent rien.
  4. Allusion discrète à certains épisodes peu glorieux des guerres de Saxe indiqués dans les Annales royales. Voir le récit de ces guerres dans nos Études critiques sur l’histoire de Charlemagne.
  5. Non : un an seulement avant celle d’Italie. Voir les Annales royales, années 772 et 773.
  6. Inexact. Éginhard lui-même atténue cette affirmation au début du § 9 ; mais peut-être un mot — tel que pene, « presque » — a-t-il été omis ici dans les manuscrits.