Ornithologie du Canada, 1ère partie/Le Jaseur de Bohême

Atelier typographique de J. T. Brousseau (p. 218-219).

LE JASEUR DE BOHÊME.[1]
(Bohemian Chatterer.)


Il y a en Canada deux oiseaux de la même famille, semblables sous tous les rapports, excepté sous celui de la taille. Le plus rare est le Jaseur de Bohême, espèce européenne, qui habite aussi le nord du Canada ; il ne se montre que lorsque l’hiver est très froid. Cet oiseau est un de ceux qui a le plus alarmé l’antiquité. Les uns prétendent que c’est là l’effroyable volatile, l’incendiara avis dont l’apparition, au rapport de Pline, fut cause que Rome subit des lustrations réitérées. D’autres croient que c’est l’oiseau de la forêt d’Hercynie, dont le plumage, dit Pline, brillait la nuit comme le feu. Adrovande s’insurge avec raison contre ces idées, et soutient mordicus que le plumage du Jaseur de Bohème ne reluit pas la nuit ; qu’il en a gardé un trois mois et qu’il l’a observé à toute heure (quâvis noctis horâ contemplatus sum).

Serait-ce le gnaphalos d’Aristote ?[2]

Adrovande signale son apparition à diverses époques du moyen âge, en Allemagne et en Italie, comme précurseur de tremblements de terre et autres grands événements. Cet oiseau est un « accidentel » en France et en Angleterre, et assez rare dans le Bas-Canada ; on le rencontre plus fréquemment dans le Haut-Canada et dans la zone arctique. Le Prince de Musignano prête à l’espèce des mœurs fort douces. Leur vol est rapide et lorsqu’ils quittent un arbre, ils émettent un cri aigu, zi, zi, zi, sans autre ramage malgré leur nom de Jaseur. Ils recherchent avidement le fruit du Pimbina et du Masquabina, le raisin sauvage, les grains de genièvre, les pommes, les gadelles et autres fruits. Le Jaseur de Bohême consume une grande quantité de nourriture à chaque repas ; réduit en captivité, il devient fort docile et se baigne régulièrement chaque jour. Son plumage est sa seule recommandation. Il voyage quelquefois de concert avec le Jaseur du Cèdre, bien plus commun au Canada.

« Le mâle a le bec fort et noir, excepté à la base, dont la couleur est blanc-jaune ; les narines sont ombragées de petites plumes noires ; l’iris est rouge pourpre ; le menton et la gorge d’un noir velouté, ainsi que la bande noire (au centre de laquelle est l’œil) qui part du bec et finit derrière le cou ; le front d’un brun roux ; les plumes de la tête sont longues, soyeuses et forment une huppe d’un roux châtain que l’oiseau peut ériger ou abaisser à volonté. Les parties supérieures sont d’un roux pourpre, ou d’un brun vinacé, tacheté de gris ; le croupion moins foncé ; la poitrine et le ventre d’un gris pourpre, nuancé d’un roux pâle brunâtre ; les parties inférieures d’un jaune-brun inclinant au rouge-orangé ; les plumes des ailes noires, terminées de blanc et de jaune ; les primaires sont noires, avec une tache de jaune brillant à l’extrémité ; les secondaires sont grises, terminées de blanc, et sept à huit d’elles sont ornées de petites excroissances couleur de cire à cacheter. Les pieds, les tarses et les griffes sont noirs. »

Longueur totale, 9 , envergure, 16 .


  1. No. 232. — Ampelis Garrulus.Baird.
    Bombycilla Garrula.Audubon.
  2. Histoire Ancienne, Livre IX C. 16.