Oeuvres de Walter Scott, trad Defauconpret/Tome I/5/7

Traduction par Auguste-Jean-Baptiste Defauconpret.
Œuvres de Walter Scott, tome 1Furne, Libraire-éditeurTome I. — Ballades, etc (p. 455-464).

NOTES


CHANT PREMIER.

Note i. — Paragraphe iv.

Uam-var ou Vaig-neor est une montagne située au nord-est du village de Callender, dans le comté de Menteith; elle tire son nom, qui signifie la grande Caverne, d’une espèce de retraite parmi les rochers, où la tradition prétend qu’un géant faisait jadis sa demeure. Plus récemment cette caverne était devenue le refuge d’une troupe de voleurs et de bandits, qui n’en ont été expulsés que depuis une quarantaine d’années.

Note 2. — Paragraphe xiv.

Avant que la route actuelle fût pratiquée dans le passage romantique que l’auteur a essayé ici de décrire, il n’y avait aucun moyen de sortir du défilé appelé Trosach, si ce n’est par une espèce d’échelle faite avec des branches et des racines.

Note 3. — Paragraphe xvii.

Les clans qui habitaient les contrées qui environnent le lac Katrine étaient encore, il n’y a pas très-long-temps, dans l’ancienne habitude de faire des excursions sur les basses terres ou Lowlands.

Note 4. — Paragraphe xxv.

Les Chefs celtes, dont la vie était assaillie par des périls continuels, avaient communément dans la partie la plus reculée de leurs domaines quelque retraite, comme une tour, une caverne ou une demeure rustique. Ce fut dans une semblable retraite que Charles Edouard se cacha après la malheureuse bataille de Cullodea.

Note 5. — Paragraphe xxviii.

Ces deux fils d’Anak sont fameux dans les livres de chevalerie; le premier est bien connu des admirateurs de l’Arioste, sous le nom de Ferrau; il fut un des antagonistes de Rolland, et tué par lui dans un combat singulier. Le roman de Charlemagne lui attribue des formes ou ne peut pas plus gigantesques.

Ascapart ou Ascabart joue un rôle important dans l’histoire de sir Bevis de Hampton, par qui il fut vaincu. Son effigie peut être vue encore sur un côté de la porte de Southampton, dont l’autre est occupé par sir Bevis lui-meme.

Note 6. — Paragraphe xxix.

Les montagnards, très-scrupuleux dans l’exercìce des devoirs de l’hospitalité, auraient cru se rendre coupables de grossièreté en demandant à un étranger son nom ou sa famille avant qu’il eût plus quelques raſraichissemens. Les inimitiés étaient si fréquentes parmi eux, qu’une règle contraire aurait pu faire priver un hôte du bon accueil qui lui était destiné.

CHANT II.

Note i. — Paragraphe vi.

L'ancienne famille des Graham possédait des domaines considérables dans les cantons de Dumbarton et de Stirling. La mesure nous a fait presque une loi d’écrire ce nom d’après la prononciation écossaise. Il est peu de familles qui puissent prétendre à plus de renommée historique; trois célèbres héros des annales d’Écosse lui assurent l’immortalité. Le premier fut sir John the Grœme, fidèle compagnon d’armes de Wallace, et mort à la bataille de Falkirk en 1298; le second de ces grands hommes fut le marquis de Montrose; dans lequel le cardinal de Retz ; vit se réaliser l’idéal qu’il s’était formé des héros de l’antiquité. Malgré la sévérité de son caractère et la rigueur avec laquelle il exécuta La terrible mission des princes qu’il servit, je n'hésite pas a nommer comme le troisième John Grœme de Glaverhouse , vicomte de Dundee, dont la mort héroïque dans le sein de la victoire doit atténuer la cruauté qu’il montra envers les non-conformistes pendant les règnes de Charles II et de Jacques II.

Note 2. — Paragraphe xii.

La situation de cette famille, si puissante avant son exil, n’est point exagérée ici. La haine que Jacques portait au nom de Douglas était si invétérée, que quels que fussent le nombre de leurs alliés et le mépris qu’on faisait alors de l’autorité royale, aucun de leurs amis n’osait les accueillir que sous le plus grand secret.

Note 3. — Paragraphe xix.

Outre son nom et son surnom, chaque Chef des montagnes avait une épithète, pour exprimer sa dignité patriarcale comme chef de son clan , qui lui était commune avec ses devanciers et ses successeurs : tel était le titre de Pharaon pour les rois d’Egypte, et d’Arsace pour ceux d’Assyrie. C’était ordinairement un nom patronimique, exprimant la descendance du fondateur de la famille. Le duc d’Argyle, par exemple, s'appelait Mac-Callum-More, ou fils de Collin-le-Grand. Quelquefois ce nom était encore tiré d’une distinction d’armoiries. La chanson des rameurs est une imitation des jorams écossais, adaptée parfaitement aux mouvemens de l’aviron.

Note 4. — Paragraphe xx.

Lennox était particulièrement exposé aux incursions des montagnards. La bataille de Glen-Fruin est fameuse par le sang qui y fut répandu avec tant d’atrocité (1602).

Les suites de cette bataille furent terribles pour le clan des Mac-Gregor, qui y avait figuré, et qui passait déjà pour une tribu rebelle. Les veuves des Colguhoums qui avaient été égorgés vinrent, au nombre de soixante, trouver le roi à Stirling ; elles étaient toutes montées sur des palefrois blancs, et portaient les chemises sanglantes de leurs maris au bout d’une pique. Jacques VI fut si touché de leur douleur, qu’il exerça sur les Mac-Gregor une terrible vengeance. On proscrivit jusqu’au nom de ce clan; tous ceux qui lui avaient appartenu étaient passés au fil de l’épée ou livrés aux flammes, et chassés avec des limiers comme des bêtes féroces.

Nous renvoyons nos lecteurs au chef-d’œuvre de Rob-Roy, qui nous autorise à abréger cette note.


CHANT III.

Note i. — Paragraphe i.

Quand un Chef voulait convoquer son clan dans un pressant danger, il tuait une chèvre, et taillait une crois de bois dont il brûlait les extrémités pour les éteindre dans le sang de l’animal : c’était ce qu’on appelait la crois du feu, et aussi Crean Tarigh, ou croix de la honte, parce qu’on ne pouvait refuser de se rendre à l’invitation qu’exprimait ce symbole, sans être voué à l’infamie. La croix était confiée à un messager fidèle, et agile à la course, qui la portait sans s’arrêter jusqu’au village voisin, où un autre courrier le remplaçait aussitôt : par ce moyen, elle circulait dans la contrée avec une célérité incroyable.

Note 2. — Paragraphe v.

Le ruban des filles écossaises, appelé snood, était un emblème de la virginité, que les femmes mariées remplaçaient par la coiffe, curch ou toy : mais si la jeune fille avait le malheur de perdre des droits au titre de vierge sans obtenir celui d’épouse, il ne lui était plus permis de porter le snood et elle ne pouvait porter la coiffe. Les vieilles ballades écossaises fout souvent de malicieuses allusions à cette circonstance.

Note 3. — Paragraphe vi.

En adoptant la légende concernant la naissance du fondateur de l’église de Kilmalie, l'auteur a essayé de retracer les effets qu’une semblable croyance devait produire, dans un siècle barbare, sur celui qui l’entendait raconter. Il est probable qu’il devait, devenir un fanatique ou un imposteur, ou plutôt le mélange de ces deux caractères, qui existe plutôt que l’un ou l’autre séparément. Dans le fait, les personnes exaltées sont fréquemment plus jalouses de graver dans le cœur des autres la croyance en leurs visions, qu’elles ne sont, elles-mêmes convaincues de leur réalité; de même qu’il est difficile à l’imposteur le plus de sang-froid, de jouer long-temps le rôle d’enthousiaste sans croire lui-même un pouce qu’il veut persuader. Il était naturel qu’un personnage tel que l’ermite Brian ajoutât foi aux superstitions des montagnards. Cette stance VI fait allusion à quelques-unes de ces superstitions locales.


Note 4. — Paragraphe vii.

La plupart des grandes familles de l’Ecosse étaient supposées avoir un génie tutélaire, ou plutôt domestique, qui leur était attaché exclusivement, s’intéressait à leur prospérité, et les avertissait par ses cris plaintifs quand quelque malheur les menaçait. Celui de Grant s’appelait May-Moullach, et lui apparaissait sous la forme d’une jeune fille qui avait un bras velu. Un autre Grant de Rother-mucus avait aussi à ses ordres un de ces esprits, nommé Bodach-an-dun ou l’esprit de la colline.

La Banchie était la fée dont les gémissemens précédaient toujours, dit-on, la mort d’un Chef, Quand cet esprit femelle est visible, c’est sous la forme d’une vieille femme aux cheveux flottans et couverte d’un manteau bleu.

La mort d’un chef de famille est aussi quelquefois,annoncée par une chaîne de lumières de diverses couleurs , appelée Dreugh, ou la mort du Druide, qui se dirige vers le lieu de la sépulture.

Note 5. — Paragraphe vii.

Ce bruit entendu sur le Benbarow fait allusion à un présage semblable , qui an- nonce toujours, assure-t-on, la mort à l’ancienne famille de M. Lean : c’est l’esprit d'un de ses ancêtres, tué jadis dans une bataille, qui galope sur une montagne.

Note 6. — Paragraphe viii.

Inch-Caillach, l’ile des Nonnes ou des Vieilles Femmes, est une Île délicieuse à l'extrémité du loch Lomond. Il reste à peine quelques ruines de l’église ; mais on y trouve encore le cimetière, qui continue de recevoir les dépouilles mortelles des clans voisins. Les monumens les plus remarquables sont ceux des lairds de Mac-Gregor, qui prétendent descendre de l’ancien roi écossais du nom d’Alpine.

Les montagnards sont très-jaloux de leurs droits de sépulture, comme on doit l'attendre d’un peuple dont les lois et le gouvernement (si ce nom peut être donné aux institutions d’un clan) reposent sur le principe de l’union des familles.

Que ses cendres soient jetées à l'eau! était une des imprécations les plus terribles qu'un montagnard pût adresser à un ennemi.

Note 7. — Paragraphe xiii.

Le bogle, chaussure actuelle des montagnards, est fait de cuir, avec des trous pour laisser l'eau pénétrer et s’écouler; car on ne peut espérer de traverser les marécages a pied sec. L’ancienne bottine était encore une chaussure plus grossière que le bogle; les poils de la peau étaient en dehors.

Note 8. — Paragraphe xvi.

Nous répéterons seulement, au sujet et du coronach des montagnards, que c’est l'aluloa des Irlandais et l’ululatus des Romains.

Note 9. — Paragraphe xix.

Ceux qui voudront connaître les pays que parcourt la croix de feu envoyée par Roderic, doivent le suivre sur la carte.

Note 10. — Paragraphe xxiv.

Il est bon d’informer le lecteur que l’on met souvent le feu aux bruyères d’Ecosse, pour que les troupeaux puissent brouter l’herbage nouveau qui les remplace.

Note 11. — Paragraphe xxiv.

D’autre serment que celui qu’ils avaient prononcé par le bras de leur Chef. Le respect aveugle que les hommes du clan portaient à leur Chef rendait ce serment très-solennel.

Note 12. — Paragraphe xxv.

Coir-Nan-Uriskin est une caverne pratiquée dans le mont de Ben-Venu ; elle est entourée d’énormes rochers, et ombragée par des bouleaux et des chênes, production spontanée de la montagne, là même où les rochers sont totalement nus. Un lieu aussi bizarrement situé près du loch Katrine, et dans le voisinage d’un peuple dont tous les penchans sont romantiques, n’est pas resté sans avoir ses divinités locales.

Le nom de Coir-Nan-Uriskin veut dire la caverne de l’homme sauvage ; et la tradition attribue à cet Urisk , qui lui donne son nom, une forme qui tient à la fois du bouc et de l’homme : et bref, dût le lecteur classique en être encore plus surpris, tous les attributs du satyre grec.

Note 13. — Paragraphe xxvii.

Aucun site ne peut être comparé au sublime spectacle qu’offrent les environs de Beal-nam-Bo ou le Passage du bétail.


CHANT IV.

Note i. — Paragraphe iv.

Comme tous les peuples grossiers, les montagnards avaient différentes manières de consulter l’avenir. Une des plus remarquables était le Taghairm, dont il est question dans le texte. On enveloppait un homme dans la peau d’un taureau nouvellement égorgé et on le déposait près d’une cascade, au fond d’un précipice, ou dans quelle autre lieu sauvage dont l’aspect ne put lui inspirer que des pensées d'horreur. Dans cette situation, cet homme devait repasser dans son esprit la question proposée, et toutes les impressions que lui fournissait son imagination exaltée passaient pour l’inspiration des habitans imaginaires du lieu où il était exposé.

Note 2. — Paragraphe v.

Il y a un rocher nommé le Bouclier du Héros, dans la foret de Glenfinlas; il a servi de refuge à un proscrit pendant plusieurs années, etc. etc.

Note 3. — Paragraphe v.

Tout ce qui avait rapport à la chasse était une chose sérieuse chez nos aïeux; mais rien n’était plus solennel que le partage du gibier : le garde forestier avait sa portion, les chiens la leur, et les oiseaux eux-mêmes n’étaient pas oubliés. C’est ce que 1 on voit dans le roman de Tristrem , ce chevalier sans pareil, si expert dans les règles de la chasse.

Note 4. — Paragraphe vi.

La victoire est à celui des deux partis qui le premier fera couler le sang. Cet oracle du Taghairm a été souvent un augure qui a décidé, dans l’imagination des combattant du succès d’une bataille. Les soldats de Montrose égorgèrent sous ce prétexte un pauvre berger, le matin de la bataille de Tippermoor.

Note 5. — Paragraphe iv.stance 2.

On a déjà observé que les fées, sans être positivement malveillantes, sont capricieuses, aisément offensées, et jalouses de leurs droits de vert et de venaison, comme tous les propriétaires de forêts.

Les nains du Nord, dont les fées participent beaucoup, avaient les mêmes prétentions et les mêmes caprices; leur malice était encore plus rancuneuse.

Note 6. — Paragraphe xiii.stance 2.

Comme les hommes de paix avaient des habits verts , ils étaient très-irrités quand un mortel portait leur couleur favorite.

Note 7. — Paragraphe xv.

Il n’est rien de plus connu dans l’histoire de la féerie que la nature illusoire et fantastique des plaisirs et de la splendeur des habitans de ces royaumes enchantés.

Note 8. — Paragraphe xv.stance 23.

Les sujets du royaume de féerie étaient recrutés dans les régions terrestres, comme les familles des Bohémiens ; mais les esprits volaient et les enfans et les adultes. Plus d’un chevalier qu’on croyait dans sa tombe était devenu un citoyen du pays des fées.

Note 9. — Paragraphe xxv.

Nous avouons de bonne ſoi que nous avons cru impossible de traduire cette ballade de Blanche, qui exprime à la fois le délire de ses pensées et l’avis qu’elle donne au chevalier de Snowdonn. L’espèce de petite fable que nous lui avons substituée est trop suivie pour être mise dans la bouche d’une folle. Nous allons donner la traduction littérale du texte; mais nous doutons qu’on puisse y deviner le charme et l’harmonie bizarre de l’original : du moins ou jugera de la difficulté d’une traduction fidèle en vers.

Les filets sont dressés, les pieux sont disposés :
Chantez toujours gaîment, gaiment!
Ils tendent les arcs, et aiguisent les couteaux;
Les chasseurs vivent si joyeusement !...

C’était un cerf, un cerf dix cors,
Portant ses rameaux fièrement :
Il descendit avec majesté dans le vallon.
Chantez toujours hardiment, hardiment.

Ce fut là qu’il rencontra une chevrette blessée;
Elle était blessée mortellement :
Elle l’avertit que les filets étaient tendus...
Oh! si fidèlement! fidèlement!

Il avait des yeux, et il put voir
Chantez toujours prudemment, prudemment;
il avait des pieds, et il put fuir...
Les chasseurs veillent de si près!

Au lieu de ces lourdes consonnances en ment, il n’y a dans le texte que des sons gracieux, comme merrily, warily, etc. etc.

Note 10. — Paragraphe xxx.

Les montagnards écossais avaient jadis une manière si expéditive de préparer la venaison, qu’elle surprit beaucoup le vidame de Chartres, qui, pendant qu’il était en otage en Angleterre, reçut d’Edouard VI la permission de parcourir l’Ecosse, et pénétra, Selon son expression, jusqu’au fin fond des sauvages.

Après une grande partie de chasse, il vit ces sauvages d’Ecosse dévorer leur gibier tout cru, sans autre préparation que de le presser fortement entre deux bâtons, de manière à en exprimer tout le sang et à rendre la venaison extrêmement dure. Le vidame sut se rendre populaire en ne se montrant pas plus difficile qu’eux.


CHANT VI.

Note i. — Paragraphe vii.

Note i . — Paragraphe vu,

Les anciens montagnards vérifiaient dans leurs mœurs ce que dit Cray dans ses vers :

« Les rochers des montagnes nourrissent une race de fer, ennemie du génie plus doux de la plaine ; car il faut des membres infatigables pour labourer la terre pierreuse et détourner les flots impétueux du torrent. Qu’y a-t-il d’extraordinaire si, élevés par la patience et la valeur, ils conservent avec audace ce qu’ils ont conquis par la force? Qu’y a-t-il d’extraordinaire si, en voyant leurs remparts de rochers renfermer dans leur enceinte la pauvreté et la liberté, ils attaquent les habitans les plus riches des plaines ?»(Gray, Fragment sur l’alliance du gouvernement et de, l'éducation.)

Un creag, ou une excursion, était si loin d’être regardé comme une expédition honteuse, que l’on attendait toujours d’un jeune Chef qu’il débuterait dans le commandement par une entreprise heureuse de ce genre, soit contre ses voisins, soit contre les habitans des basses terres, appelés Sassenachs ou Saxons.

Les montagnards, très-versés dans l’histoire par tradition, n’oubliaient jamais que les Celtes, leurs ancêtres, avaient jadis possédé toute la contrée, et que toutes les captures qu’ils pouvaient faire dans les plaines étaient un recouvrement légitime. Quant à leurs invasions sur les clans voisins, il y avait toujours des prétextes suffisans pour justifier l’attaque.

Note 2. — Paragraphe xii.

Le torrent qui sort du lac de Vennachar traverse une vaste bruyère appelée Bochastle.

Sur une petite éminence appelée the aun of Bochastle, et dans la plaine aussi, on trouve les traces d’un ancien camp qu’on regarde comme romain.

Note 3. — Paragraphe xv.

Un bouclier rond, recouvert d’un double cuir et garni de plaques d’airain ou de fer, était une partie nécessaire de l’équipement des montagnards : quand ils chargeaient des troupes régulières, ils recevaient sur le bouclier le coup de la baïonnette, qui se tordait en le rencontrant, et ils employaient la claymore contre le soldat culbuté. (Voyez les Antiquités militaires du capitaine Grose, t.I , pag. 164.)

Note 4. — Paragraphe xvi.

Je n’ai point rendu ce combat singulier aussi terrible que celui qui eut lieu entre le fameux sir Evau de Lochiel et un officier anglais de la garnison d’Inverlochy, aujourd’hui fort William, dans la grande guerre civile. ( Voyez les Mémoires du temps. )

Note 5. — Paragraphe xx.

Stirling fut souvent teint du sang le plus noble. Voici l’apostrophe que lui adresse J. Johnston :

Discordia tristis
Seu quoties procerum sanguine tinxit humun!
Hoc uno infelix, et felix cetera; nusquàm
Tutior aut cæli frons geniusve soli.

Le sort de William, huitième comte de Douglas, est connu de tous ceux qui ont lu l’histoire d’Ecosse; il fut poignardé dans le château de Stirling , de la propre main de Jacques II, malgré le sauf-conduit royal qu’il avait obtenu.

Murdac, duc d’Albanie, Duncan , comte de Lennox, son beau-père, et ses deux fils Walter et Alexandre Stuart, furent exécutés à Stirling en 1425. On les décapita sur une éminence d’où ils pouvaient voir dans le lointain le château-fort de Doune et leurs vastes domaines.

Note 6. — Paragraphe xxi.

Chaque bourg d’Ecosse, mais surtout les villes considérables, avaient leurs jeux solennels : on y distribuait des prix à ceux qui excellaient à tirer de l'arc, à la lutte, et dans tous les exercices gymnastiques de cette époque.

Jacques V aimait particulièrement les amusemens populaires, ce qui contribua sans doute à lui faire donner le surnom de roi des communes, ou rex plebeicrum, comme Lesly l’appelle en latin.

Note 7. — Paragraphe xxii.

La représentation de Robin Hood et de sa bande était le spectacle favori de ces fêtes populaires. Ces espèces de pièces, dans lesquelles des rois n’avaient pas dédaigné de jouer un rôle, furent prohibées en Ecosse par un statut du sixième parlement de la reine Marie, Une émeute sérieuse força les magistrats à renoncer à la répression de ceux qui continuèrent cet amusement. Robin Hood se maintint aussi contre les prédicateurs de la réforme.

Note 8. — Paragraphe xxiii.

Le Douglas du poëme est un personnage imaginaire, oncle supposé du comte d’Angus; mais la conduite que tint le roi avec le laird de Kilspendie, un des Douglas bannis, suivant l’historien Hume de Godseroft, prouve que je n’ai rien exagéré.

« La haine implacable du roi contre les Douglas se montra encore dans la manière dont il accueillit Archibald de Kilspendie, qu’il avait tant aimé pendant son enfance, et qu’il appelait alors son Gray-Stel ( Gray-Stel était un des héros de l’ancienne chevalerie écossaise ). Archibald avait été banni en Angleterre ; mais il ne put sympathiser avec une nation qui réunit à un orgueil insupportable et à la plus haute opinion d’elle-même le mépris des autres peuples.

«Il se hasarda donc de revenir en Ecosse, pour essayer do fléchir la rancune du roi, et fut se jeter à ses genoux dans le parc de Stirling ; mais Jacques le reconnut, et ne fit pas semblant de le voir. Archibald se retira désolé : il demanda un verre d’eau à la grille ; mais on le lui refusa , de peur que le roi ne s’en offensât. Le prince le sut, et en fit des reproches aux gens de sa maison, ajoutant que, s’il n’avait pas juré qu’aucun Douglas ne le servirait jamais, Archibald serait rentré en grâce, etc., etc.»

( Hume de Godscroft )
Note 9. — Paragraphe xxiv.

Le prix de la lutte était un bélier et un anneau.



CHANT VI.


Note I. — Paragraphe iii.

Les armées écossaises étaient composées de la noblesse et des barons avec leurs vassaux, qui étaient tenus au service militaire. L’autorité patriarcale des chefs de clans dans les montagnes et sur les frontières était d’une nature différente, et quelquefois peu d’accord avec les principes de la féodalité ; elle était fondée sur la patria potestas exercée par le Chef, qui représentait le père de toute la tribu, et à qui on obéissait souvent contre son supérieur féodal.

Il paraît que Jacques V fut le premier qui introduisit dans les armées écossaises une compagnie de mercenaires, qui formaient une garde pour le roi, et qu’on appelait les gardes à pied.

Le poète satirique sir David de Lindsay ( Ou l’auteur du prologue de la comédie The Estates ) a choisi pour un de ses personnages un certain Finlay, des gardes à pied, qui, après beaucoup de rodomontades, est mis en fuite par le fou, qui lui fait peur avec une tête de mouton au bout d’une perche. J’ai donné à mes soldats les traits grossiers des mercenaires de ce temps-là, plutôt que ceux de ce Thraso écossais; ils venaient beaucoup du caractère des aventuriers de Froissart, ou des condottieri d'Italie.

Note 2. — Paragraphe v.

Nous allons donner ici une idée de la chanson du soldat, telle qu’elle est dans l’original : peut-être la trouvera-t-on déplacée dans un poëme ; c’est l’opinion de quelques critiques. Cependant elle se chante dans un corps-de-garde ; ce n’est peut-être pas le cas de dire : Non erat hic locus.

«Notre vicaire prêche toujours que Pierre et Paul ont maudit le verre plein; il prétend qu’il n’y a que colère et désespoir dans un broc, et que tous les sept péchés mortels sont renfermés dans un flacon de vin des Canaries : mais, Barnabé, verse ta liqueur; buvons sec; et au diable le vicaire!

«Notre vicaire dit que c’est se damner que de pomper la rouge rosée qui colore la jolie bouche d’une femme : il dit que Béelzébut se cache en tapinois sous son fichu et qu’Apollyon lance des traits par son œil noir : mais, Jacques, n’en donne que plus vite un baiser à Gillette , jusqu’à ce qu’elle fleurisse comme une rose, et au diable le vicaire !

«Notre vicaire ne cesse de prêcher..... Et pourquoi ne précherait-il pas? il reçoit les honoraires de sa cure pour prêcher. C’est son devoir de blâmer les laïques qui violent les lois de notre mère l’Eglise. Allons, mes braves, vidons nos brocs , buvons à la tendre Madeleine; et au diable le vicaire ! »—Ed.

Note 3. — Paragraphe vi.

Les jongleurs avaient plusieurs aides pour rendre leurs spectacles aussi attrayans que possible. La fille de joie ( the glee-maiden ) jouait toujours un rôle nécessaire; c’était elle qui dansait et sautait; aussi la version anglo-saxonne de l’évangile de saint Marc dit qu’Hérodias exécuta des danses devant le roi Hérode. Il paraît que ces pauvres filles ont été, jusqu’à une époque récente, les esclaves de leurs maîtres : voici une pièce qui semble le prouver ; elle est rapportée par Fountainhall.

« Reid le jongleur poursuivait Scott de Harden et sa femme, pour lui avoir dérobé une petite fille appelée la sauteuse, qui dansait sur sou théâtre. Il réclamait des dommages, et il produisit un contrat qui certifiait qu’il l’avait achetée à la mère pour trente scots (monnaie d’Ecosse). Mais nous n’ayons point d’esclaves en Ecosse, les mères ne peuvent vendre leurs enfans. La jeune fille risquait de périr dans son métier de sauteuse, d’après les consultations des médecins et elle refusait de retourner auprès de son maître.

«Supposé qu’elle fût seulement apprentie, on aurait pu citer la loi de Moïse, qui dit : — Si un serviteur vient vous demander un refuge contre la cruauté de son maître, vous ne le livrerez pas. — Les juges, renitente canceliario, donnèrent gain de cause à Scott de Harden. »

Les grimaces du singe le rendirent bientôt un acteur indispensable dans la troupe ambulante du jongleur. Dans son Introduction à la Foire de Saint-Barlhélemy Ben Johnson annonce qu’il n’a dans sa foire ni bateleur ni singe bien élevés comme ceux qui dansent sur la corde, pour le roi d’Angleterre, et s’asseyent sur leur derrière, pour le pape et pour le roi d’Espagne.

Note 4. — Paragraphe xiv.

Il y a plusieurs exemples de personnes tellement attachées à des airs particuliers, qu’elles ont demandé à les entendre sur leur lit de mort. C’est ce qu’on raconte d’un certain laird écossais, d’un barde du pays de Galles , etc.

Mais l’exemple le plus curieux est celui que Brantôme nous fournit au sujet d’une fille d’honneur de la cour de France, appelée mademoiselle de Limeuil.

«Durant sa maladie, dont elle trespassa, jamais elle ne cessa : ainsi causa toujours; car elle estoit fort grande parleuse, brocardeuse, et très-bien et fort à propos , et très-belle avec cela.

« Quand l’beure de sa fin fui venue , elle fit venir à soy son valet ( ainsi que les filles de la cour en ont chacune un), qui s’appeloit Julien , et sçavoit très-bien jouer du violon : Julien, luy dit-elle, prenez votre violon, et sonnez-moy toujours, jusqu’à ce que vous me voyiez morte (car je m’y en vais), la défaite des Suisses , et le mieux que vous pourrez ; et, quand vous serez sur le mot Tout est perdu, sonnez-le par quatre ou cinq fois le plus piteusement que vous pourrez. — Ce que fit l’autre, et elle-même luy aidoit de la voix ; et quand ce vint, Tout est perdu, elle le réitéra par deux fois, et, se tournant de l’autre costé du chevet, elle dit à ses compagnes : — Tout est perdu à ce coup, et à bon escient. — Et ainsi décéda. Voilà une morte joyeuse et plaisante. Je tiens ce conte de deux de ses compagnes, dignes de foy, qui virent jouer ce mystère, » ( Œuvres de Brantôme, III, 507. )

L’air que cette dame choisit pour faire sa sortie de ce monde fut composé sur la défaite des Suisses à Marignan. Le refrain est cité par Panurge dans Rabelais, et se compose de ces mois, qui sont une imitation du jargon des Suisses, avec un mélange de français et d’allemand :

Tout est velore,
La tintelore :
Tout est velore, bigot!

Note 5. — Paragraphe xv.

Un combat qui eut lieu dans le défilé des Trosachs, sous Cromwell, fut célèbre par le courage d’une héroïne qui m’a fourni le trait de la veuve de Duncan : elle s’appelait, Hélène-Stuart.

Note 6. — Paragraphe xxviii.

William de Worceser, qui écrivait au milieu du quinzième siècle, appelle Stirling le château Snowdoun.

Le véritable nom que prenait Jacques dans ses excursions était celui du fermier de Ballanguish[1]; j’ai préféré y substituer celui de chevalier de Snowdoun, comme plus propre à la poésie, et parce que l’autre aurait annoncé trop tôt le dénouement à plusieurs de mes compatriotes qui sont familiers avec toutes les traditions que je viens de citer.

FIN
  1. Batianguish est le nom d’un sentier escarpé qui conduit au château de Stirling.