Odes (Horace, Leconte de Lisle)/III/11
Traduction Leconte de Lisle, 1873
Mercurius, (car Amphion apprit de toi, son maître, à remuer les pierres en chantant), et toi, Lyre, ardente à résonner des sept cordes,
Muette autrefois et déplaisante, maintenant chère aux tables des riches et aux temples des Dieux, dites-moi les modes auxquels Lydé prêtera ses oreilles obstinées.
Comme une cavale de trois ans qui bondit dans les larges plaines, elle craint d’être touchée, ignorante des noces et farouche encore pour l’amant qui la recherche.
Tu peux mener avec toi les tigres et les forêts,
et arrêter les cours d’eau rapides. Le portier de la
demeure inhumaine cède à tes caresses,
Cerbérus, bien que les cent couleuvres des Furies hérissant sa tête, et que le souffle noir et l’écume impure sortent sans cesse de sa triple gueule.
Ixion et Tityos ont ri malgré eux ; et, tandis que tu charmais par un chant agréable les filles de Danaüs, leur urne est restée vide un moment.
Que Lydé apprenne le crime et les châtiments célèbres de ces vierges, et le tonneau d’où l’eau se perd par le fond, et les destinées tardives
Qui attendent les fautes dans l’Orcus. Les impies ! Que pouvaient-elles de plus ? Les impies ont osé tuer leurs époux à l’aide du fer cruel !
Une seule, entre toutes, digne de la torche nuptiale, mentit noblement, parjure envers son père,
vierge illustre dans tous les âges :
« Lève-toi, dit-elle à son jeune mari, lève-toi, de peur qu’un sommeil éternel ne vienne d’où tu ne l’attends pas. Fuis ton beau-père et mes sœurs scélérates
« Qui, telles que des lionnes tueuses de veaux, déchirent leurs époux. Plus clémente qu’elles, je ne te frapperai point et je ne te retiendrai point dans cette demeure.
« Que mon père me charge de lourdes chaînes, parce que j’ai eu pitié d’un époux malheureux et l’ai épargné ; qu’il me relègue, sur sa flotte, dans les plaines lointaines des Numides !
« Va où tes pieds et les vents t’emporteront, pendant que la nuit et Vénus te sont favorables ; va sous un heureux auspice, et grave un jour mon triste souvenir sur mon sépulcre ! »