Nouveaux contes berbères (Basset)/114

Ernest Leroux, éditeur (Collection de contes et de chansons populaires, XXIIIp. 153-154).

114

La cruauté punie (212).
(Zénaga).

On raconte qu’un individu partit un jour, monté sur un chameau, pour chasser les gazelles. Il arriva dans le désert près d’une ville peuplée et se dit en lui-même : « Peut-être y trouverai-je quelque chose jusqu’à ce que Dieu m’accorde de prendre des gazelles. » Peu après, pendant la nuit, il sortit de l’endroit où il était pour chercher à voler. Un homme qui passait la nuit en prières le vit, le saisit, le garrotta et le garda jusqu’au lendemain. Alors il lui dit : « Qui es-tu ? D’où viens-tu ? » Le voleur répondit : « Je suis d’un endroit appelle Lâneisat ; il n’y a chez nous d’autre ressource que le vol. »

Alors se leva un homme à grande barbe et dont on ne pouvait regarder le visage sans prendre la fuite de peur. Il lui coupa les mains, les lui donna et lui dit : « Mange ce que je te donne. » Il en mangea une et refusa l’autre, mais l’homme le frappa avec une barre de fer. Alors il mangea l’autre. Puis le même lui coupa une oreille et lui dit : « Mange ce que je te donne. » Il refusa. Le fils de cet homme le frappa avec son sabre. Il mourut.

Alors le père lui coupa un pied qu’il mit dans une caisse ; cela se passait entre midi et le milieu de l’après-midi. Le lendemain matin, il alla au marché afin de vendre le pied et acheter du vin pour boire. Il vit une belle esclave et lui dit : « Où vas-tu ? — Je veux un mari affreux. — Regarde-moi, je suis laid ; il n’y en a pas d’aussi affreux que moi. — C’est bien ce que je veux. » Ils s’en retournèrent à sa demeure et il l’épousa.

La mère de sa femme lui dit : « Je voudrais que tu me donnes un peu d’argent. — Je n’ai que le pied d’un homme, je vais le vendre sur-le-champ pour te donner ce que tu voudras. » Le lendemain, quand elle vint pour réveiller sa fille, elle trouva qu’elle était morte avec son mari.