Notice chronologique sur les œuvres d’Arago/2

Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciencesGide ; WeigelXIII : Tables (p. xiv-xxxvi).

II. — l’Astronomie populaire.

La création du cours d’astronomie de l’Observatoire a été décidée par le Bureau des longitudes, dans sa séance du 11 novembre 1812. Ce cours fut confié à M. Arago.

L’illustre professeur fit sa première leçon le 3 février 1813.

Depuis cette dernière année jusqu’à 1846, M. Arago recommença dix-huit fois des leçons qui ont eu un succès immense. Les auditeurs de son cours ouvrirent en 1843 une souscription pour lui offrir une médaille qui fut gravée par Bovy.

Pour répondre à l’empressement du public, un amphithéâtre spécial dut être construit ; il a été détruit après la mort de M. Arago ; aucune voix n’a osé se faire entendre dans l’enceinte où la mâle éloquence d’un savant maître avait passionné pour l’astronomie toutes les classes de la société.

Le nom d’Arago est resté, jusque dans les rangs les plus obscurs du peuple des campagnes, le représentant de la science rendue utile sans avoir rien perdu de sa noblesse.

M. Arago n’écrivit pas d’abord ses leçons ; il se contentait d’en faire un canevas. Il nous a laissé les programmes de quelques-uns de ses cours.

Un mot était destiné souvent à lui rappeler toute une série d’idées sur lesquelles il avait l’intention d’insister principalement ; rarement une phrase entière s’y trouve écrite, si ce n’est pour servir d’introduction, parce que l’exorde, comme la péroraison, était toujours ce qui lui paraissait le plus difficile, Du reste, il avait pour principe qu’une préparation attentive était indispensable pour qu’une leçon fût bonne. Cependant, vers 1832, ayant reçu des propositions de la part de plusieurs éditeurs pour la publication d’un Traité d’astronomie, M. Arago commença à écrire quelques chapitres relatifs à des questions qu’il avait plus particulièrement approfondies. Il fut ainsi conduit à insérer, dans l’Annuaire du Bureau des longitudes, des Notices extraites de son ouvrage, notices déjà amenées à un grand état de perfection ; par exemple, en 1832, sur les comètes ; en 1833, sur la Lune ; en 1834, sur les étoiles multiples ; en 1836, sur la comète de Halley. Mais ces publications ne pouvaient plus suffire pour lui garantir la propriété de travaux importants, dont il faisait connaître libéralement les résultats dans son cours. Il dut profiter de la publication qu’il résolut de faire d’une Notice sur la vie et les travaux de William Herschel, pour y introduire le développement des idées auxquelles il attachait le plus d’importance. Plus tard, il reprit dans cette Notice sur Herschel, publiée en 1842, de longs chapitres, pour les remettre à leur place dans son Traité d’astronomie, dont ils avaient été momentanément distraits. Il était d’autant plus fondé à agir ainsi, qu’une condamnable spéculation de librairie avait fait recueillir quelques-unes de ses leçons et avait fait composer, avec des notes informes et agencées sans discernement, un volume audacieusement intitulé : Leçons d’astronomie professées à l’Observatoire par M. Arago, recueillies par un de ses élèves. Vainement M. Arago protesta contre cet ouvrage et démontra qu’il fourmille de bévues incroyables[1]. Cette odieuse contrefaçon ne se vendit pas moins à un grand nombre d’exemplaires et eut plusieurs éditions. Sur un exemplaire de la quatrième édition, que j’ai entre les mains, se trouvent en marge quelques-unes des réflexions de l’illustre professeur ; elles témoignent de l’indignation qu’il ressentait d’avoir été si mal compris par un homme qui se prétendait son élève, et qui osait présenter au public, comme ayant été professées à l’Observatoire, des élucubrations aussi informes. L’énergique concision avec laquelle s’exprime M. Arago ne permet pas de reproduire la plupart des notes manuscrites de ce précieux volume. Fatigué de sa lecture, M. Arago finit par écrire : « L’auteur ne peut pas dire deux mots de suite avec exactitude, » et qualifie de « galimatias triple, infâme, burlesque, idiot, » quelques-uns des passages qui ont mis sa patience aux plus rudes épreuves.

Préparés de longue main, corrigés un grand nombre de fois, tous les chapitres de l’Astronomie populaire ont été revus et complétés par M. Arago, pendant les trois dernières années de sa vie.

Aucune des nombreuses figures des pages dictées à M. Goujon n’était faite. Chose singulière et bien remarquable, M. Arago, devenu à peu près aveugle, traçait dans son imagination les figures les plus compliquées, désignait les lignes par des lettres, ainsi qu’on a l’habitude de le faire, puis dictait comme si les figures existaient réellement, sans se tromper jamais. C’est avec le texte seul, ainsi mélangé de lettres désignant des courbes ou des droites qui n’étaient pas dessinées, que j’ai dû reconstituer les figures de l’Astronomie populaire, de manière à représenter réellement les choses telles que l’illustre auteur eût voulu les peindre lui-même s’il n’avait pas perdu la vue.

Ainsi qu’on le lit dans l’introduction au cours professé en 1846 (Astronomie populaire, t. I, p. xii), M. Arago a toujours pensé qu’on pouvait acquérir des connaissances astronomiques assez étendues si l’on possédait seulement un très-petit nombre de principes empruntés aux sciences mathématiques et physiques. Aussi a-t-il commencé son Traité par cinq livres consacrés à des notions préliminaires sur la géométrie, la mécanique et l’horlogerie, l’optique, les instruments astronomiques, la vision. Ces livres ont été écrits presque entièrement de sa main, antérieurement à 1845 ; il n’a fait que dicter à M. Goujon quelques corrections et additions dans les derniers temps de sa vie. Il ne se dissimulait pas que c’était commencer un cours d’astronomie d’une manière aride, et j’en trouve la preuve suivante, écrite de sa main, parmi les notes de ses cours qu’il m’a laissées.

« Cette leçon, je n’hésite pas à l’annoncer dès ce moment, dit-il, paraîtra quelque peu difficile et sévère aux personnes qui n’ont jamais jeté les yeux sur un traité de mathématiques. J’ajouterai, d’autre part, qu’elle me conduira aux méthodes les plus usuelles, les plus fécondes de la science. Ceux qui s’approprieront les notions de géométrie et d’optique que je présenterai aujourd’hui et jeudi prochain n’éprouveront plus aucun embarras dans la suite du cours. Je puis, sans faire preuve de hardiesse, leur donner cette assurance. »

M. Arago avait même eu l’intention de joindre des éléments d’arithmétique aux autres notions de mathématiques qu’on trouve dans le premier volume de son Astronomie populaire ; il avait commencé a dicter à M. Goujon quelques définitions sur le carré, le cube, les puissances supérieures, les racines carrées et les racines cubiques, les progressions. Il n’a pas donné suite à ce projet. J’ajouterai encore que plusieurs des chapitres sur les connaissances physiques ou mathématiques préliminaires que M. Arago a mises dans l’Astronomie populaire avaient paru en tête des Notices consacrées aux comètes que contient l’Annuaire du Bureau des longitudes (1832 et 1836). Cependant les notions d’optique n’avaient encore été publiées nulle part, et elles sont exposées d’après une méthode absolument nouvelle.

Les six premiers chapitres du livre VI de l’Astronomie populaire, relatif au mouvement diurne, ont été dictés à M. Goujon ; les manuscrits des autres chapitres du même livre sont de la main de M. Arago.

Le premier chapitre du livre VII, relatif au mouvement apparent du Soleil, a paru dans l’Annuaire du Bureau des longitudes de 1851, en tête de la Notice sur le calendrier que renferme cet Annuaire. M. Arago avait dû, pour rendre intelligibles quelques-unes de ses démonstrations, commencer cette belle exposition de tout ce qui concerne la mesure du temps par diverses notions astronomiques indispensables. À cet égard, l’illustre astronome s’est exprimé en ces termes :

« J’avais eu d’abord le projet de consacrer la seconde partie de ce petit volume à des études historiques et expérimentales sur le phénomène, si complexe et si mal expliqué jusqu’ici, de la scintillation des étoiles ; mais, en examinant de nouveau la Notice scientifique que j’avais rédigée à ce sujet depuis assez longtemps, il m’a paru que, pour rendre le travail complet, il serait indispensable d’y joindre les résultats de mesures micrométriques qui ne pourront être terminées que dans le courant de l’hiver prochain. Je me suis rappelé alors que le calendrier n’avait jamais été dans l’Annuaire l’objet d’un article détaillé. L’extrait de l’Exposition du système du monde, de Laplace, intitulé : Du Temps, de sa mesure, etc., qui a figuré dans les volumes de 1811 à 1823, laisse entièrement de côté une foule de questions intéressantes ; divers points, il est vrai, y sont traités avec une grande supériorité, mais non pas, si une telle observation m’est permise, par des raisonnements à la portée des personnes dépourvues des connaissances mathématiques.

« J’ai donc essayé de remplir cette lacune, en détachant d’un Traité d’astronomie populaire, que j’espère mettre très-prochainement sous presse, l’article où j’ai réuni l’indication abrégée des méthodes diverses mises en usage chez les anciens et les modernes pour la mesure du temps. Je me suis trouvé ici en présence d’une difficulté réelle. Le calendrier est un des derniers chapitres de mon livre ; en le rédigeant, je pouvais supposer le lecteur familiarisé avec les théories astronomiques exposées auparavant et nécessaires aux explications. La destination nouvelle que j’allais lui donner m’imposait l’obligation de mêler aux principes du calendrier proprement dit des notions précises sur toutes les parties de la science qui devaient contribuer à la clarté des démonstrations. Il est résulté de là que je n’ai pu me servir de l’article primitif sans y faire de nombreux changements.

« Je me rappelle avoir eu dans les mains une volumineuse dissertation sur une question importante de sciences appliquées que l’auteur avait voulu mettre à la portée de tout le monde. Pour atteindre ce but, il s’était cru obligé de s’interrompre dans son exposé toutes les fois que des propositions de géométrie lui étaient indispensables : ici des éclaircissements concernant la théorie des triangles semblables ; là le carré de l’hypoténuse ; plus loin le théorème relatif à la surface du cercle, etc. Cette marche paraissait très-naturelle ; mais il en résultait que le lecteur, se perdant au milieu de ces digressions sans fin, fermait de dépit, sans l’achever, le savant ouvrage.

« En racontant ce qui est arrivé à un auteur ancien et célèbre, n’aurais-je pas tracé mon horoscope ? Certains journaux quotidiens s’empresseront de lever mes doutes à cet égard. »

M. Arago n’a fait que reprendre à sa Notice sur le calendrier, pour les remettre dans l’Astronomie populaire, aux places qui leur convenaient, les pages qu’il avait dû en distraire afin de rendre complétement claire l’explication du calendrier.

Les chapitres ii, iii, iv, viii, ix, x du livre VII sur le mouvement apparent du Soleil, ont été dictés à M. Goujon ; les chapitres v, vi, vii, xi, xii, xiii, xiv avaient paru dans la Notice sur le calendrier.

Dans le livre VIII, consacré aux constellations, les manuscrits des chapitres vii, viii, ix, x et xi sont de la main de M. Arago ; ils ont été écrits de 1841 à 1845 ; les chapitres i, ii, iii, iv, v et vi ont été dictés à M. Goujon en 1851.

Une partie du livre IX, consacré aux étoiles simples, avait déjà paru en 1842 dans la Notice sur Herschel ; mais en le reprenant à cette Notice en 1851, M. Arago l’a revu avec beaucoup de soin, y a introduit plusieurs chapitres écrits de sa main antérieurement, notamment les chapitres iii, xii, et xxxiv, et enfin a dicté de nombreuses additions qui en ont fait une œuvre tout à fait nouvelle. Les chapitres xxxii et xxxiii, relatifs aux parallaxes annuelles des étoiles, ont été entièrement dictés en 1852.

Les étoiles multiples ont été l’objet des recherches de M. Arago dès 1824. Il publia sur ce sujet, en 1825, dans la Connaissance des Temps pour 1828, un Mémoire qui est inséré dans le tome II des Mémoires scientifiques (tome XI des Œuvres), p. 181 à 200. Il consacra à cette même étude un article de l’Annuaire du Bureau des longitudes pour 1834. C’est de cet article sur lequel il était revenu en un très-petit nombre de pages en 1842, dans la Notice sur Herschel, qu’il a fait le livre X de l’Astronomie populaire, après une révision attentive et de nombreuses additions.

Le livre des nébuleuses, qui termine le premier volume de l’Astronomie populaire, est extrait en très-grande partie de la Notice sur Herschel. Toutefois, les chapitres xxi, xxii, xxiv et xxv sont nouveaux et ont été dictés en 1852.

M. Arago a repris aussi, dans la Notice sur Herschel, ce qu’il avait dit sur la Voie lactée, pour former le livre XII, par lequel commence le tome II de l’Astronomie populaire : il a ajouté en 1852 les chapitres i et vi.

Le livre XIII, sur les mouvements propres des étoiles et la translation du système solaire, est entièrement nouveau et a été dicté en 1851.

M. Arago avait préparé un Mémoire sur les micromètres, en 1814 et 1820. Ce Mémoire, qui est écrit de sa main, n’ayant pas été publié, il l’a repris, l’a développé, et il en a fait le deuxième chapitre du livre XIV de l’Astronomie populaire, consacré au Soleil. Les autres chapitres de ce livre contiennent, avec de très-grands développements nouveaux, les 54 pages que l’illustre astronome avait consacrées à la constitution physique du Soleil, dans la Notice sur Herschel. La matière a été à peu près doublée par les nouveaux détails ajoutés. Les chapitres relatifs à l’intensité lumineuse comparative des diverses parties du disque solaire, l’examen de la théorie des taches, d’après les phénomènes de polarisation, forment des parties tout à fait neuves. J’ai été chargé par M. Arago d’élucider la question des relations qui peuvent exister entre les taches solaires et les températures terrestres ; M. Arago s’était occupé de ce problème dès 1816, dans les Annales de chimie et de physique.

Le livre XV, consacré à la lumière zodiacale, a été dicté en 1852 ; il contient, entre autres choses nouvelles, les résultats des observations faites à l’Observatoire de Paris en 1843.

Le livre XVI, consacré à l’exposition des mouvements des planètes, aux lois de ces mouvements, à la découverte de la translation de la Terre et des autres planètes autour du Soleil, a été dicté en 1851 à M. Goujon. Les tables relatives aux éléments des orbites des planètes sont dressées de telle façon que, au fur et à mesure de la découverte d’une petite planète, on peut les compléter sans rien changer au texte. M. Arago ouvrait en quelque sorte un chapitre qui ne devait pas être fermé ; il croyait à l’existence de corps planétaires que l’on enregistrerait en nombre d’autant plus considérable que les instruments astronomiques seraient plus parfaits et que les observations seraient plus attentives. Nous avons retrouvé, sur ce sujet, les lignes inédites suivantes, écrites de la main du savant astronome avant 1845, et qui complètent sa pensée telle qu’elle est exprimée dans l’Astronomie populaire :

« Les premiers noms des planètes paraissent avoir été relatifs à l’éclat ou à la nature de la lumière dont ces astres brillent. Ainsi, Saturne, comparativement peu lumineux, fut nommé Phénon (qui paraît) ; Jupiter, Phaéton (le brillant) ; Mars, Pyroïs (couleur de feu) ; Mercure, Stilbon (l’étincelant) ; Vénus, Phosphore (porte-lumière).

« Artémidore d’Éphèse (environ 400 ans avant J.-C.) soutenait que les planètes étaient sans nombre, et que leur peu de lumière et l’excentricité de leurs orbites avaient seules empêché de les voir.

« Ce passage est remarquable depuis qu’on a fait la découverte d’Uranus, Cérès, Pallas, Junon et Vesta, et aussi depuis qu’on a constaté la chute des aérolithes, qui sont, suivant toute apparence, de très-petites planètes.

« Démocrite, au dire de Sénèque, croyait qu’il y a beaucoup plus de planètes que nous n’en voyons.

« Un des hommes qui ont fait le plus d’honneur à notre pays par le savoir et le caractère, Daunou, disait dans ses leçons de chronologie :

« Les anciens s’étaient figuré qu’il y avait, ni plus ni moins, sept planètes, parmi lesquelles on comprenait le Soleil au lieu de la Terre. On divinisa ces astres et, peu s’en fallut, leur nombre même ; car le nombre sept reçut une sorte de culte dans l’antiquité ; on lui attribuait des vertus surnaturelles, une perfection suprême. Malheur à qui, en Égypte, à Rome, en Grèce même, à certaines époques, eût soupçonné qu’il pouvait exister d’autres planètes : le zèle des pontifes, des devins, des poëtes, des musiciens, peut-être aussi de quelques astronomes, eût éclaté contre un si téméraire attentat à un nombre antique et sacré. »

« Sans la restriction, concernant la Grèce, sur laquelle j’ai appelé l’attention par des caractères italiques, on aurait pu soutenir que, dans le passage qui précède, le savant historien traitait les anciens avec une trop grande sévérité. Nous trouvons, en effet, dans tout ce qui nous a été conservé des opinions, des systèmes de Démocrite, que ce célèbre philosophe croyait a l’existence d’un nombre infini de planètes,

« Ainsi qu’on le verra bientôt, la plus heureuse conjecture des modernes concernant les régions où il devait exister des planètes inconnues, des planètes inobservées, se fondait sur cette supposition gratuite et vague, que la matière ne pouvait manquer d’être répartie dans l’espace avec une certaine uniformité. La supposition, au reste, n’était pas aussi neuve qu’on se l’imaginait. Quelques anciens y rattachèrent leurs théories : témoin ces astronomes dont parle Copernic et qu’il réfute, lesquels faisaient mouvoir en tous temps Mercure et Vénus au-dessous du Soleil, se fondant sur le trop grand intervalle vide qui, sans cela, aurait existé entre le Soleil et la Lune.

« Bientôt cependant, Kepler, ayant conçu la pensée que les distances des planètes au Soleil devaient être réglées par les dimensions des cinq corps réguliers circonscriptibles à la sphère, n’eut plus besoin des planètes inconnues et y renonça. Au surplus, disait-il, je n’étais pas content de l’audace, de la témérité qui m’avait porté à créer ainsi de nouveaux astres. »

Dès 1832 M. Arago avait publié, dans l’Annuaire du Bureau des longitudes, sous la forme de Notice scientifique sur les comètes, une partie du livre XVII de son Traité d’astronomie populaire. En 1852 il a complété ce travail par de nombreuses additions. Les chapitres i et ii, ix, x, xiii, xxi à xxviii inclusivement, sont nouveaux ; ils ont été dictés à M. Goujon. J’ai rassemblé, d’après les indications de M. Arago, les éléments des chapitres xv à xvii. Le chapitre xiv, sur la comète de 1843, est extrait de l’Annuaire dit Bureau des longitudes pour 1844. Dans les chapitres nouveaux de ce livre, M. Arago a fait connaître ses idées sur la constitution physique des comètes ; on doit les considérer comme une partie du grand travail qu’il avait voulu exécuter sur la forme et la constitution physique des astres dont notre système solaire est formé ; de ce travail M. Arago n’a pu composer que le Mémoire sur Mars, qui est inséré dans le tome II des Mémoires scientifiques (t. XI des Œuvres, p. 243 à 304).

Les livres XVIII et XIX de l’Astronomie populaire, relatifs à Mercure et à Vénus, à l’exception de deux pages prises à la Notice sur Herschel, ont été dictés à M. Goujon, en 1852.

Les huit premiers chapitres du livre XX, qui présente l’histoire astronomique et physique de la Terre, sont entièrement nouveaux et ont été dictés en 1852 ; ils sont consacrés à la description et à la théorie des mouvements de notre planète. Les chapitres ix, x et xii de ce même livre, sur l’ancienneté relative des différentes chaînes de montagnes, l’action des courants aqueux et les bouleversements des terrains modernes, sont une nouvelle édition, revue et corrigée, des Notices insérées dans l’Annuaire du Bureau des longitudes pour 1830 et pour 1831, sur le beau Mémoire où M. Élie de Beaumont a donné sa célèbre théorie du soulèvement des montagnes. Les chapitres xi et xxxi, qui traitent de la rencontre possible de la Terre et des corps cométaires, sont extraits de la Notice publiée en 1832 sur les comètes. Dès 1824, M. Arago s’était occupé de l’histoire des volcans encore enflammés ; ce travail est réédité avec de nombreux développements dans le chapitre xiii. Dans le chapitre xiv, relatif à l’atmosphère, M. Arago a placé la description complète du baromètre qu’il a imaginé et dont il avait publié la première idée en 1826, dans les Annales de chimie et de physique ; le reste de ce chapitre concerne les réfractions et est entièrement nouveau. L’Annuaire du Bureau des longitudes a commencé en 1813 a donner des tableaux concernant les hauteurs comparatives des points les plus remarquables du globe au-dessus du niveau de la mer ; le chapitre xv contient la réunion de tous les détails fournis par l’Annuaire et par la Connaissance des Temps, et est consacré en outre au dépouillement des documents les plus récents sur cette question. Les chapitres xvi à xxvii présentent une étude de la constitution physique et de la mesure de la Terre ; elle est presque entièrement nouvelle ; cependant M. Arago y a placé quelques notes publiées déjà dans l’Annuaire du Bureau des longitudes, les Annales de chimie et de physique, et les Comptes rendus de l’Académie des sciences. À l’égard de pareilles reproductions, il professait cette opinion de Fontenelle : « A quoi bon changer de tours et d’expressions, quand on ne change pas de pensée. » Les chapitres xxviii, xxix et xxx donnent une histoire complète des méthodes employées pour déterminer la distance de la Terre au Soleil ; ils ont été dictés en 1851.

Le vingt et unième livre de l’Astronomie populaire est consacré a la Lune : il ne contient pas moins de quarante et un chapitres, dont trente-trois ont été dictés en 1851 et 1852. M. Arago a seulement repris, dans la Notice sur le calendrier publiée dans l’Annuaire du Bureau des longitudes de 1851, les chapitres v et vi sur l’âge de la Lune et les noms des mois de l’année solaire donnés aux lunaisons. Les chapitres xxvi et xxvii, où sont discutées les questions de savoir si la Lune a été une comète ou si elle a jamais été heurtée par un astre chevelu, sont extraits de l’Annuaire du Bureau des longitudes pour 1832. Quatre ou cinq pages de la Notice sur Herschel, relatives aux montagnes et aux volcans lunaires et à l’atmosphère du satellite de la Terre, ont été placées dans les chapitres où ces questions sont traitées. Enfin, dans les trois chapitres relatifs à la Lune rousse et à la question de savoir si la Lune exerce une action sur l’atmosphère terrestre, M. Arago a introduit quelques pages de ses Notices de l’Annuaire du Bureau des longitudes pour 1828 et 1833, mais en les fondant avec beaucoup de considérations nouvelles. Les observations citées dans le chapitre xxiv, sur la polarisation de la lumière de la Lune, sont écrites de la main de M. Arago ; il en est de même de quelques pages relatives à la lumière cendrée, aux points brillants qu’on a cru voir sur la Lune, aux pronostics et à l’action prétendue de la Lune sur les êtres animés. Ces pages remontent à des époques diverses et même à l’année 1811.

Quoique M. Arago ait consacré plusieurs Notices de l’Annuaire du Bureau des longitudes aux éclipses de Soleil, le livre XXII de l’Astronomie populaire, intitulé Éclipses et Occultations, est nouveau, sauf quelques pages des quatre premiers chapitres, sur la théorie générale des éclipses, et un petit nombre de passages purement descriptifs, déjà imprimés en 1842 et 1846. L’époque tardive de la rédaction est digne de remarque pour les phénomènes de la couronne lumineuse et des protubérances rougeâtres sur lesquels l’illustre astronome a fait tant d’observations ; il a en quelque sorte voulu attendre le dernier moment pour exposer ses idées définitives sur ce sujet, car les pages qu’il y a consacrées ont été dictées seulement dans les premiers mois de 1853, alors qu’il savait que la maladie ne le laisserait plus vivre qu’un petit nombre de jours.

Le livre XXIII, qui commence le quatrième volume de l’Astronomie populaire, a été composé par M. Arago en 1853 ; il a été dicté en partie à M. Goujon, notamment pour ce qui concerne la masse des planètes. J’ai recueilli ses paroles pour tout ce qui est relatif à la Terre. Quelques pages seulement sur l’éther universel, sur la mesure de la Terre, sur les perturbations, sont extraites de ses Notices insérées dans l’Annuaire du Bureau des longitudes en 1832 sur les comètes, et en 1846 sur les travaux de Laplace.

Le livre XXIV, sur la planète Mars, a été dicté à M. Goujon en 1852 ; en rapprochant de ce livre la Notice sur Mars, insérée dans le tome II des Mémoires scientifiques (t. XI des Œuvres), on a l’histoire la plus complète qui ait jamais été faite d’un corps du systeme solaire.

Le livre des petites planètes a été composé par M. Arago en 1851, de manière à rester en quelque sorte ouvert, et à recevoir successivement son complément par de nouveaux chapitres consacrés a chaque petite planète qui serait nouvellement découverte. C’est cette intention de M. Arago que j’ai remplie pour tous les chapitres du livre XXV, à partir du dix-septième jusqu’au quarante-quatrième. Les conjectures sur l’origine des petites planètes ont été reprises à un chapitre de la Notice publiée dans l’Annuaire de 1832 sur les comètes.

Dans l’Annuaire du Bureau des longitudes pour 1826, M. Arago a inséré un nouveau catalogue chronologique des chutes de pierres ou de fer, de poussières ou de substances molles, sèches ou humides, que Chladni lui avait adressé ; il a reproduit ensuite ce catalogue dans le tome xxxi de la deuxième série des Annales de chimie et de physique ; depuis cette époque, il n’a cessé d’insérer soit d’abord dans les Annales de chimie et de physique, soit ensuite dans les Comptes rendus de l’Académie des sciences, toutes les chutes d’aérolithes dont il a pu avoir connaissance. M. Arago a pris le même soin pour les apparitions de bolides et pour celles des étoiles filantes. En 1852, il m’a chargé de réunir tous les documents qu’il avait ainsi parsemés dans un grand nombre de volumes, d’y joindre quelques notes manuscrites qu’il avait conservées dans ses cartons, de compléter le tout en compulsant diverses publications françaises ou étrangères, et d’en faire les catalogues qui sont insérés dans le livre XXVI de l’Astronomie populaire, consacré aux météores cosmiques. Il a en outre dicté les quelques pages dans lesquelles il discute l’origine des aérolithes et expose l’histoire des chutes ou des apparitions de corps rencontrés par la Terre dans sa course autour du Soleil.

Le livre XXVII contient une étude complète sur Jupiter. Ce livre a été dicté par M. Arago en 1852 ; il renferme le résumé d’observations photométriques et de plusieurs mesures micrométriques dues à l’illustre astronome. Les détails de ces observations se trouvent dans les Mémoires scientifiques (tomes X et XI des Œuvres).

La description des procédés à l’aide desquels on a pu mesurer la vitesse de la lumière vient naturellement après l’étude de Jupiter et de ses satellites. Le livre XXVIII de l’Astronomie populaire est consacré à cette question ; il a été presque entièrement dicté en 1852. Le manuscrit du chapitre iv, qui expose un exemple familier destiné à faire comprendre les considérations qui ont conduit à la détermination de la vitesse de la lumière par l’observation des satellites de Jupiter, est entièrement de la main de M. Arago : il a été écrit vers 1846. Ce même livre renferme la théorie de l’aberration, quelques considérations sur l’égalité de la vitesse de la lumière émanant de divers corps, et la description du procédé si ingénieux suivi par M. Fizeau, pour mesurer la vitesse de la lumière par des observations faites sur la Terre a de courtes distances. Le dernier chapitre seul, relatif à l’emploi que l’on peut faire de l’observation des phases d’Algol pour déterminer directement la vitesse de la lumière, avait été publié précédemment en 1842 dans Notice sur Herschel.

Sauf quelques courts passages de la Notice sur Herschel, et le dernier chapitre sur la question de savoir si l’anneau n’aurait pas été forme aux dépens de la queue d’une comète qui, dans sa course, serait venue à passer très-près de la planète, le livre XXIX de l’Astronomie populaire, sur la planète Saturne, est nouveau ; il a été dicté au commencement de 1853. On y trouve un résumé de toutes les observations faites jusqu’en 1852 par les astronomes sur les bandes, sur l’anneau et sur les satellites du corps le plus étrange du système planétaire.

La découverte de la planète Uranus est une conquête qui fait trop d’honneur à William Herschel pour ne pas occuper une grande place dans la Notice que M. Arago avait consacrée, en 1842, à, l’illustre astronome de Slough. Cette partie de la Notice de l’Annuaire du Bureau des longitudes était tellement achevée, que M. Arago n’a eu qu’à la reprendre à peu près textuellement pour en former le livre XXX de son Astronomie populaire. Il a seulement ajouté quelques pages relatives à la grandeur et à l’orbite de la planète, ainsi qu’à la découverte des deux nouveaux satellites, que M. Lassell a faite en 1851, découverte qui porte à huit le nombre des petits astres qu’Uranus entraîne à sa suite dans son mouvement de translation autour du Soleil. Ces additions ont été dictées par M. Arago à la fin de 1852.

Lorsque, le 23 septembre 1846, M. Galle eut trouvé à Berlin, au bout de sa lunette, et à peu près à la place qu’indiquaient les calculs de M. Le Verrier, fondés sur les perturbations qu’Uranus éprouvait de la part d’un astre inconnu, la planète à laquelle on a donné le nom de Neptune, un grand enthousiasme éclata dans le monde savant. Plus tard il y eut une réaction ; on alla jusqu’à nier que la planète découverte par les observations de M. Galle, grâce aux indications que cet habile et loyal astronome avouait avoir trouvées dans les résultats des calculs qu’il venait de recevoir de Paris, fût réellement celle dont la théorie due à M. Le Verrier annonçait l’existence et décrivait la marche. M. Arago est demeuré l’impassible rapporteur de la vérité, dans le livre XXXI de l’Astronomie populaire. Il m’a chargé de reprendre, dans les Comptes rendus de l’Académie des sciences, les diverses communications qu’il avait faites à ce corps savant sur la découverte de la planète Neptune ; après une lecture attentive, il en a maintenu les termes en insistant sur l’heureuse coïncidence de l’existence entre les mains de M. Galle de la carte de M. Bremiker pour la 21e heure du ciel, et des résultats des calculs théoriques de M. Le Verrier. Sans ce bonheur, pour employer une expression de M. Encke, M. Galle n’eût pu arriver à constater qu’un astre nouveau, non figuré sur la carte de M. Bremiker, se trouvait dans la partie du ciel dont l’exploration était recommandée par M. Le Verrier comme le lieu probable de la présence, à la fin de 1846, d’une planète encore inaperçue, expliquant le désaccord, démontré par les observations, entre la marche réelle d’Uranus et le chemin que cette planète eût suivi d’après les lois de l’attraction, s’il n’y avait eu, dans notre système solaire, que les corps planétaires connus jusqu’à cette époque. M. Arago n’a fait d’ailleurs que dicter en outre quelques courts passages relatifs à l’aspect de Neptune, à son orbite, à sa grandeur et à ses satellites.

Le livre XXXII, consacré aux saisons et aux climats, est un des plus importants de l’Astronomie populaire. Sur les vingt-six chapitres qu’il renferme, deux seulement avaient déjà été publiés ; ce sont ceux relatifs à la question de savoir si les comètes peuvent modifier les climats ou le cours des saisons ; ils ont été repris à la Notice de 1832 sur les comètes, et ils ont subi, à la fin de 1852, plusieurs corrections et additions dictées par M. Arago. Les chapitres vi, viii, ix, xiii, xix, xx, xxi et xxvi ont été écrits par l’illustre astronome en 1846 ; les autres ont été dictés à M. Goujon en 1851. J’ai été d’ailleurs chargé de faire toutes les recherches nécessaires pour assurer l’exactitude des données numériques que présente ce livre.

Le livre XXXIII, consacré au calendrier, a été reproduit par M. Arago dans l’Annuaire du Bureau des longitudes pour 1851 ; il en a seulement élagué les chapitres qu’il avait été obligé, ainsi qu’on l’a vu plus haut, d’y intercaler, pour rendre intelligibles aux lecteurs de l’Annuaire du Bureau des longitudes les passages qui exigeaient des connaissances astronomiques préalables. De temps à autre, quelques additions et corrections ont été faites. Le dernier chapitre seul est nouveau ; il est relatif à la détermination de l’heure par les instruments employés soit sur terre, soit sur mer.

Dans le livre XXXIV et dernier de l’Astronomie populaire, M. Arago transporte successivement le lecteur sur le Soleil, sur Mercure, Jupiter, Saturne, la Lune, et lui montre les aspects divers sous lesquels apparaîtraient les phénomènes du système solaire, si de tels voyages à travers les espaces célestes pouvaient tout à coup se réaliser. En quelques pages, il fait voir ensuite combien de préjugés l’étude de l’astronomie a fait disparaître depuis qu’elle s’appuie uniquement sur l’observation exacte et judicieuse des faits matériellement tangibles ; ces quelques pages sont presque entièrement écrites de sa main. L’ouvrage se termine par un tableau des observatoires disséminés à la surface de la Terre, et dans lesquels tant d’hommes éminents, appartenant à toutes les nationalités, parlant toutes les langues, animés du seul désir de connaître, ont les yeux fixés sur la voûte étoilée pour arracher de nouveaux secrets à la nature. Enfin, une table chronologique des découvertes faites jusqu’à l’année 1851 donne la mesure des progrès accomplis et de ceux qu’on peut espérer encore.

Telle est l’histoire fidèle de la composition de l’Astronomie populaire. Pour l’illustre auteur, « un cours était un livre parlé. » Tout ce qu’il disait si éloquemment à ses nombreux auditeurs s’est retrouvé sans peine sous sa plume à l’avance toutes ses pensées étaient fixées et la forme de leur expression était arrêtée.

Si une mort trop prématurée n’avait pas enlevé M. Arago au travail assidu dont l’histoire de son Traité d’astronomie révèle l’extraordinaire persévérance, à une époque où la maladie et les infirmités l’accablaient si cruellement, l’illustre savant eût certainement ajouté de précieuses considérations à toutes celles que son livre renferme. Il m’eût guidé aussi dans la correction des épreuves ; mais je dois cette réponse à ceux qui se figureraient que son œuvre n’était pas achevée ; je n’ai eu à faire que ce que tout élève dévoué a un tel maître eût pu faire à ma place.

  1. Voir une de ces protestations dans la Notice sur la prédiction du temps, t. V des Notices scientifiques, t. VIII des Œuvres, p. 3.