Notes Eneide/Livre VI

Traduction par divers traducteurs sous la direction de Charles Nisard.
Lucrèce, Virgile, Valérius Flaccus - Œuvres complètesFirmin Didot (p. 477).
◄  V
VII  ►

LIVRE VI.

v. 1… Sic fatur lacrimans, classique immittit habenas… Virgile a soin de rassembler toutes les traditions nationales ; il n’omet rien de ce qui peut illustrer les fleuves, les villes, les ports, et tous les lieux d’Italie. Ce n’est pas sans raison que les larmes d’Énée honorent la mémoire du pilote qu’il a perdu. « Les Troyens, selon Denys d’Halicarnasse, arrivèrent d’abord en Italie, au port de Palinure : un de leurs principaux pilotes y perdit la vie, et ce lieu en reçut le nom. De là Énée vint dans un autre port de la Campanie, où mourut Misène, l’un de ses plus illustres compagnons ; et le promontoire voisin s’appela Misène. » (Antiquités rom., liv. I. chap. II.)

v. 229. Idem ter socios pura circumtulit unda. Plusieurs de ces usages religieux se sont conservés dans le christianisme, qui leur donne encore une fin plus noble et plus touchante. Les anciens regardaient avec raison les cérémonies funèbres comme le point le plus important de la police sociale et de la science des mœurs ; et c’est pour cela que les honneurs rendus aux tombeaux tiennent tant de place dans les poëmes grecs et romains.

v. 720. Spiritus intus alit, etc. Cette magnifique idée de l’âme universelle, dont chaque être animé reçoit une faible partie, appartenait à l’école des stoïciens. Ce n’est point là le système de Spinosa, qui confond Dieu et la nature. Virgile distingue fort clairement deux substances.

v. 727. Mens agitat molem, et magno se corpore miscet. C’est l’esprit ici qui donne le mouvement à la matière. L’auteur de Telémaque a très-bien expliqué ce vers de Virgile, en faisant dire à Mentor : « L’âme universelle du monde est comme un grand océan de lumière : nos esprits sont comme de petits ruisseaux qui en sortent, et qui y retournent pour s’y perdre. » (Liv. IV.)

Non tamen omne malum miseris, nec funditus omnes
Corporeæ excedunt pestes : penitusque necesse est
Multa diu concreta modis inolescere miris.

On voit par ces vers que la doctrine du purgatoire est très-ancienne ; elle accorde parfaitement la justice à la miséricorde divine. Le christianisme a fait un dogme fondamental de cette opinion consolante ; il enseigne que la prière des vivants abrège le temps de l’expiation pour les morts, et c’est ainsi qu’il établit des rapports continuels entre le monde présent et le monde futur. C’est un des dogmes les mieux assortis à la nature du cœur humain, et les plus propres à justifier la Providence. Les sectaires qui l’ont rejeté dans le seizième siècle ont donc méconnu à la fois les besoins de l’homme et la bonté de Dieu.

v… Tum se ad Caietæ recto fert litora portum. De Cumes à Gaëte le rivage est en effet en ligne droite.