Notes Argonautiques/Livre VII

Traduction par divers traducteurs sous la direction de Charles Nisard.
Lucrèce, Virgile, Valérius Flaccus - Œuvres complètesFirmin Didot (p. 608-609).

LIVRE VII. modifier

v. 76. An tibi Cadmei. Les dents du dragon tué par Cadmus, que Valérius fait plus loin semer par Jason, sous la protection de Médée, l’ont été par Cadmus lui-même. Voici cette histoire. Jupiter ayant enlevé Europe, Cadmus eut ordre d’Agénor, son père, d’aller la chercher et de ne point revenir sans elle. Il consulta l’oracle de Delphes, qui, au lieu de le satisfaire sur sa demande, lui ordonna de bâtir une ville à l’endroit où un bœuf le conduirait. Il partit, résolu de parcourir le monde. Arrivé en Béotie, il fit un sacrifice aux dieux, et envoya ses compagnons à la fontaine de Dircé pour y puiser de l’eau ; mais ils furent dévorés par un dragon. Minerve lui conseilla d’attaquer le monstre et de le tuer. Cadmus y réussit. Il sema ensuite les dents du dragon, d’où naquirent des hommes tout armés qui s’entretuèrent sur-le-champ, à la réserve de cinq qui l’aidèrent à bâtir la ville de Thèbes, là où le bœuf dont l’oracle lui avait parlé, le conduisit. Voyez les Métamorphoses d’Ovide, livre iv.

v. 113. Phariæque vocant. Voyez, sur la fable d’Io, notre auteur, l. iv, v. 400-418, et la note du vers 417, même livre : sur l’Égypte, qu’on appelait Pharia tellus, voyez la note du vers 408, même livre.

v. 147. Turbidus ut Pœnis. Voyez la note du vers 840 du liv. i.

v. 148. Agmina matris. La troupe des Furies qui accompagnait Clytemnestre.

v. 179. Tu face luciferæ. Lucifera était un des surnoms sous lesquels Diane était adorée. On trouve plusieurs médailles antiques avec cette inscription Dianæ luciferæ.

v. 232. Et nunc Ausonii. Picus était fils de Saturne et roi d’Ausonie. Valérius le donne pour époux à Circé. Il a suivi une autre tradition qu’Ovide, qui ( Métam., xiv, fab. vi, v. 335) fait épouser Picus à Canente, et changer ce roi en pivert par Circé. La déesse était irritée de ce que Picus, qui aimait tendrement sa jeune épouse, avait refusé de condescendre à ses vœux. Voy. Ovide, à l’endroit indiqué.

v. 276. Si Pelopis. Hippodamie était fille d’Œnomaüs. Son père la chérissait tellement, qu’il ne la voulait donner qu’à celui qui la vaincrait à la course, parce qu’il était assuré que personne ne la surpassait dans cet exercice. Il massacrait tous ceux qui en sortaient vaincus, et il tua jusqu’à treize princes. Il faisait placer Hippodamie sur son char, de manière à ce qu’ils pussent bien la voir, et que sa beauté les empêchât d’être attentifs à leurs chevaux. Mais Pélops, quelques-uns disent Pirithoüs, entra dans la lice, vainquit Hippodamie et l’épousa.

v. 279. Minoia virgo. Ariadne, fille de Minos, roi de Crète. Elle fut cause de la mort du Minotaure, son frère, parce qu’étant amoureuse de Thésée, elle facilita à celui-ci la sortie du labyrinthe, après que Thésée eut vaincu et tué le monstre.

v. 301 et suiv. Sævus Echionia. Echionia, pour Thebana, d’Échion, l’un des cinq compagnons de Cadmus qui survécurent au massacre général des guerriers issus des dents du dragon.

Valérius, dans cette comparaison, a suivi la tradition d’Euripide, dans la tragédie des Bacchantes, où le poëte grec introduit Penthée faisant jeter Bacchus dans les fers. Mais le dieu brise ses entraves, sort de prison, souflle ses fureurs à Penthée, le revêt d’un habit de femme, lui donne les attributs d’une bacchante, le pousse au milieu d’une troupe de Ménades, et l’y abandonne à leurs fureurs. Par l’épithète de pudibunda, Valérius fait voir que, comme Euripide, il attribue aussi la modestie aux Bacchantes. Ovide (Métam., v, 708 et suiv.) a peint à sa manière, mais sous les couleurs les plus vives et les plus propres à émouvoir, la mort infligée à Penthée par sa mère Agavé.

v. 330. Et quæ sanguinea. Rien de si commun dans les poëtes anciens que ces descriptions d’enchantements, de magiciennes qui forçaient la lune de descendre, afin que, plus près de la terre, elle versât son écume sanglante sur les herbes destinées aux opérations magiques. Cette écume était, selon eux, l’effet de la rage que faisait éprouver à la lune la violence des enchantements.

v. 364. Harpen. L’harpé était une épée recourbée en faux ou faucille, que les poëtes ont donnée à Persée et à Mercure. Voyez la note du v. 390 du livre iv.

v. 391. Lumina. Tous les manuscrits portent Numina. Les commentateurs ont, bien entendu, proposé chacun sa conjecture ; mais aucun d’eux n’a vu le rapport qui existe entre cette phrase : monstrataque condere vultus Lumina et cette autre : Stupet ipsa gravi non tardior umbra. Il est en effet naturel de penser que la nuit devenait d’autant plus lente que les astres restaient arrêtés plus longtemps par la vertu des enchantements de Médée. On pourrait seulement trouver étrange le mot vultus appliqué aux astres. Mais cette métaphore un peu hardie n’est pas sans exemple dans Valérius, qui en emploie souvent de plus hardies encore, et d’un goût bien plus équivoque.

v. 462. Erinnys. En Grèce, comme dans l’Orient, le sang de l’homme tué criait vers le ciel, et la vengeance en était confiée au bras des Érinnys. Dans l’origine, elles ne vengèrent que les deux crimes les seuls connus de l’antiquité, le parjure et le meurtre des proches parents. C’est ainsi qu’on les trouve dans Homère et dans Hésiode. Ce sont les divæ ultrices des poëtes romains. Elles poursuivent les criminels comme des chasseresses et comme des chiens, disent les tragiques grecs. Lorsqu’Athènes eut plus tard, dans son aréopage, des vengeurs du meurtre, les déesses irritées devinrent les déesses expiées, Ευμένιδες. Alors elles se retirèrent dans les enfers, où les poëtes leur attribuèrent les fonctions de bourreaux. Elles ne reviennent sur la terre que lorsqu’il faut inspirer à quelqu’un de la fureur, ou des projets de meurtre. C’est ainsi qu’on les voit dans le cercle mythique des poëtes romains, depuis Virgile. Bientôt Ποίνη, , qui signifia la rançon du meurtre, comme le pœna des Latins, servit à désigner Érinnys qui venge les crimes de meurtre ; de là Ποινῆτις Ἑριννυς. Voyez la note du v. 849 du livre i.

v. 509. Meritis perjuria pœnis Despondet, pour despondet perjuriis meritas pœnas. C’est un de ces renversements de construction, appelés hypallages par les rhéteurs, et qui sont très-familiers aux poëtes, particulièrement à Virgile.

v. 604. Non aliter medio. Valérius compare ici Jason, vainqueur, des taureaux, aux Lapithes, les premiers qui domptèrent les chevaux. Le cheval dont parle le poëte est sans doute celui que Neptune fit sortir de terre, d’un coup de son trident.

v. 624. Agmina Palladios. Hyginus dit que ce fut avec le secours de Minerve qu’Hercule parvint à détruire l’hydre de Lerne. Elle lui donna le conseil d’employer le feu au lieu du fer.

v. 636. Comatos. Ce mot indique les Galles, prêtres de Bellone ainsi que de Cybèle, et qui, descendus de ces Gaulois transplantés dans l’Asie Mineure, où ils prirent le nom de Gallo-Grecs, avaient la longue chevelure de leur nation.