N’es-tu qu’un rêve ?

N’es-tu qu’un rêve ?
Cahiers de la quinzaine (1p. 99).

N’ES-TU QU’UN RÊVE ?


Ignorance, fléau du monde,
À ton joug on veut nous plier ;
Aux traits de la presse féconde
Le fisc oppose un bouclier.
Le droit de penser et d’écrire
Dans son essor est arrêté ;
Bientôt l’on ne pourra plus lire :
N’es-tu qu’un rêve, ô liberté !

De tout républicain sincère
Faisant un vil conspirateur,
Chaque journal du ministère
Se transforme en accusateur.
Déjà commencent les poursuites…
Puis, on met l’Université
Sous l’éteignoir des bons Jésuites,
N’es-tu qu’un rêve, ô liberté !

Au travailleur, au prolétaire,
On remet le bât sur le dos,
Loin de soulager la misère,
On forge de nouveaux impôts.
Et le peuple, qui sert d’enclume,
Voyant son espoir avorté,
Redit, hélas ! plein d’amertume :
N’es-tu qu’un rêve, ô liberté !