Modorf-les-bains/26

Imprimerie Joseph Beffort (p. 111-113).

Congestion et Apoplexie cérébrales.

Ces deux états, dont l’un est le corollaire de l’autre, sont éminemment justiciables du traitement de Mondorf, puisqu’il s’agit d’un côté de prévenir l’apoplexie et de l’autre d’en faire disparaître les effets, la paralysie hémiplégique, une fois qu’elle aura eu lieu.

La congestion cérébrale est assez connue du public, et par ses symptômes, et par ses causes. On n’ignore point que, très souvent, c’est un héritage de famille, et qu’on doit redouter cet accident au fur et à mesure qu’on avance en âge. On connaît tout aussi bien les signes du tempérament sanguin, de la constitution apoplectique, qui paraît reposer sur une disproportion entre le développement du système vasculaire de la tête et celui des membres. On observe chez beaucoup de ces individualités typiques un caractère d’une gaieté heureuse et l’intolérance pour les boissons alcooliques ; les chaleurs de l’été, ou bien le séjour dans une pièce surchauffée, leur donnent régulièrement des embarras sérieux. La constipation est leur plus grand ennemi, et les pieds froids leur plainte habituelle.

La sobriété la plus stricte est nécessaire pour prévenir des accidents fâcheux. La cure de Mondorf, avec son eau purgative, les douches révulsives sur les pieds, les bains de siège, les demi-bains, procure des avantages réels et bien appréciés.

L’apoplexie elle-même, qui réclame une intervention immédiate et énergique, n’est pas de notre cadre. C’est pour l’hémiplégie plus ou moins prononcée, qui en est le résultat, qu’on vient aux eaux. Il faut naturellement attendre que le molimen sanguin, l’orage vasculaire se soit dissipé, avant de pouvoir entreprendre une cure comme celle de Mondorf, qui développe une excitation circulatoire et nerveuse. C’est cependant, à un autre point de vue, le moyen d’agir sur la résorption du caillot sanguin et d’anéantir les conséquences physiques et physiologiques que la compression, produite par ce dernier, exerce sur les fonctions du système nerveux. Il est un fait d’expérience que les eaux chlorurées sodiques, administrées intus et extra, favorisent et accélèrent la résorption des exsudats sanguins. Mon prédécesseur, M. Marchai, a publié à ce sujet, en 1873, une brochure[1]) où il relate 21 cas d’hémiplégie par cause cérébrale qu’il a traités à Mondorf, la plupart avec un résultat favorable. Il est remarquable de constater la guérison radicale de quatre de ces patients, qui ont été soumis au traitement thermo-minéral, peu de semaines seulement après l’accident. Il serait donc en tout cas désirable, et M. Marchai plaide pour cette façon d’agir, qu’on instituât avec prudence le traitement thermal, du moment que le patient n’éprouve plus aucun trouble nerveux, sauf sa paralysie. L’apparition des contractures est toujours un signe fâcheux, et indique des modifications profondes, souvent irréparables de la substance qui entoure le foyer. Cela est surtout vrai pour les cas d’embolie. L’électricité, ce puissant excitant du système nerveux, devra naturellement trouver une application aussi énergique que possible dans tous ces cas. On emploie avant tout le courant induit, pour empêcher la dégénérescence des muscles frappés de paralysie. Le courant

  1. Etudes sur l’action des eaux de Mondorf dans les paralysies cérébrales, par le Dr Marchai de Mondelange. (Luxembourg, Th. Schröll, 1873)
constant ou galvanique agira peut-être avec plus de

promptitude ; mais comme il faut lui faire traverser la masse cérébrale, la plus grande circonspection est de rigueur dans son emploi. Les bains thermaux, modérément chauffés, sont ordinairement employés contre ces paralysies ; puis, au fur et à mesure que la faiblesse musculaire disparaît, le traitement devient plutôt révulsif, et s’identifie avec celui que nous venons d’indiquer pour la congestion cérébrale.

L’admission aux bains des patients atteints d’aliénation mentale, de délire alcoolique, d’épilepsie, de ramollissement etc. est toujours fort inopportune, malgré que ces affections puissent parfois être favorablement influencées par un bain prolongé ou par une douche dérivative. J’ai toujours dû remarquer, aussi souvent que je me suis laissé octroyer des cas pareils pour des raisons d’humanité, que ces maladies ne faisaient que troubler la tranquillité des baigneurs, sans le moindre profit pour leur triste situation, bien au contraire.

La chorée fait une exception ; j’entends particulièrement la grande chorée, celle qui se montre rebelle aux traitements habituels, et qui offre des symptômes plus graves. La vue de ces pauvres malades est toujours pénible, et affecte bien des personnes nerveuses. Néanmoins, comme il y a toujours une grande probabilité de guérison, leur présence aux bains est plus facilement tolérée, surtout quand les symptômes s’amendent sous les yeux du public, toujours bienveillant pour le malheur. Aussi avons-nous vu guérir à Mondorf un cas, ou l’altération nerveuse avait rendu la déglutition très difficile, la parole impossible ; un autre cas, où les symptômes étaient moins intenses, mais duraient depuis huit années, y a trouvé sa guérison définitive.