Les Ailes d’or : poésies nouvelles, 1878-1880Bibliothèque-Charpentier (p. 195-197).

MIMOSA

Connaissez-vous la fleur légère
Bordant le flot bleu qui s’endort ?
On dirait que, sur la fougère,
Le soleil tombe en neige d’or.

Comme un panache de fumée
Que le couchant teint de safran,
Comme une poussière embaumée
Que pousse la brise en errant,

Elle monte dans l’air humide
Où le flot roule un souffle amer,
Et mêle son parfum timide
Aux âcres senteurs de la mer.

Elle flotte parmi l’espace
Où l’oranger tend ses bras lourds ;
L’aile du papillon qui passe
Y met son fragile velours.

Mimosa ! presque un nom de fée !
Quelque naïade assurément,
S’en étant autrefois coiffée,
Parut plus belle à son amant.

Mimosa ! presque un nom de femme,
Doux aux lèvres comme le miel
Et qui pour ses chansons réclame
Le luth enchanté d’Ariel !

J’aime cette fleur parfumée
Au souffle furtif et coquet,
Pour ce qu’une main bien-aimée,
Un jour, m’en offîrit un bouquet.