Traduction par A.-I. et J. Cherbuliez.
(Contes, volume Ip. 54-78).
◄  II
IV  ►


CHAPITRE III.

____

Le voyage de Lisbeth fut la plus malheureuse de toutes les démarches inutiles faites par Kohlhaas dans cette affaire ; car peu de jours après, Sternbald entra dans la cour de Kohlhaasenbruck, conduisant au pas la voiture dans laquelle sa maîtresse était étendue, presque mourante d’une blessure dans la poitrine. Kohlhaas apprit du fidèle Sternbald que le castellan ne s’étant pas trouvé chez lui, ils avaient été obligés de descendre dans un hôtel tout voisin du château. Le lendemain Lisbeth avait quitté la maison, lui ordonnant de garder les chevaux, et le soir elle était rentrée dans cet état. Il paraissait qu’elle avait voulu s’approcher du prince, et que, sans l’ordre de celui-ci, et par le zèle grossier d’un des gardes qui l’entouraient, elle avait reçu un coup de lance dans la poitrine. C’était ainsi du moins que les gens qui l’avaient rapportée le soir avaient expliqué les choses ; car pour elle, elle n’avait pu parler, à cause du sang qui lui sortait de la bouche. Sternbald ajouta que son intention avait été de partir aussitôt à cheval pour venir lui apprendre ce malheureux accident, mais que sa maîtresse avait insisté, malgré les représentations du chirurgien, pour être ramenée sans délai.

Kohlhaas la porta sur un lit, où elle reprit ses sens pour quelques jours. Mais il chercha vainement à apprendre d’elle ce qui lui était arrivé ; elle restait l’œil fixe, et la bouche close à toutes ses questions. Ce ne fut qu’un instant avant sa mort qu’elle sembla recouvrer la mémoire. Elle se tourna tout-à-coup vers le ministre luthérien, qui lisait l’Évangile à côté de son lit, et prenant la Bible de ses mains, elle se mit à la feuilleter rapidement, comme si elle y cherchait quelque chose ; puis montrant à Kohlhaas le verset suivant : « Pardonne à tes ennemis ; fais du bien à ceux qui te maudissent, etc., » elle lui serra la main, le regarda avec tendresse, et expira.

« Que Dieu ne me pardonne jamais si je pardonne au gentilhomme ! » pensa Kohlhaas ; puis après avoir fermé les yeux de sa femme chérie en versant un torrent de larmes amères, il sortit de la chambre.

Prenant les cent écus d’or que son voisin lui avait déjà remis sur la propriété de Dresde, il alla faire préparer pour Lisbeth une tombe aussi riche que celle d’une princesse. Le cercueil de chêne était doublé de métal, et garni de coussins de soie, ornés de galons d’or ; la fosse, de huit brassées de profondeur, fut creusée sous ses yeux, tandis qu’il se promenait à l’entour avec ses pauvres petits enfans.

Lorsque le jour de l’enterrement fut arrivé, on transporta le corps, blanc comme la neige, dans une salle tendue de noir ; le ministre prononça sur le cercueil un discours touchant ; ensuite on le plaça sur un char, et on le porta en terre. Kohlhaas, après avoir congédié les amis qui étaient venus rendre les derniers devoirs au cadavre de Lisbeth, alla se jeter encore une fois sur ce lit vide maintenant, et prononça de nouveau le serment de la vengeance.

Rentré dans son cabinet, il écrivit un acte par lequel il sommait le gentilhomme de Tronka, en vertu de son droit naturel, de ramener en personne ses chevaux à Kohlhaasenbruck, sous le délai de trois jours, et le condamnait à les nourrir dans leur écurie jusqu’à ce qu’ils fussent redevenus aussi gras qu’ils étaient lorsqu’il les avait laissés à Tronkenbourg.

Il envoya ce billet ; et les trois jours s’étant écoutés sans qu’il eût reçu aucun message de Tronkenbourg, il appela Herse, lui dit ce qu’il avait écrit au seigneur, et lui demanda s’il voulait l’accompagner au château, pour enseigner au gentilhomme à s’acquitter de son devoir.

Herse le comprit aussitôt, et jetant son bonnet en l’air, il s’écria : « Partons, mon maître, partons aujourd’hui même. »

Kohlhaas ayant terminé la vente de sa ferme et fait partir ses enfans pour la frontière, appela le reste de ses domestiques qui étaient au nombre de sept, tous d’une fidélité éprouvée ; il les arma, et sur le soir il partit à leur tête pour Tronkenbourg.

Au commencement de la troisième nuit ils pénétrèrent dans la cour, et après avoir mis le feu aux dépendances du château, Herse se précipita dans la tour, et tomba à l’improviste sur le châtelain et sur l’intendant qui, à moitié déshabillés, étaient établis autour d’une table de jeu.

Le gentilhomme Wenzel de Tronka, qui était précisément à rire avec ses jeunes amis de la sommation que lui avait envoyée le marchand, n’entendit pas plutôt résonner sa voix, qu’effrayé comme si l’ange de la justice fût descendu du ciel, il pâlit, et se levant, il s’enfuit en criant à ses amis : « Sauvez-vous ! »

Kohlhaas, repoussant tous ceux qui voulaient s’opposer à son passage, entra en demandant le gentilhomme, et voyant que l’on cherchait à lui cacher une porte qui conduisait dans une autre aile du château, il s’y précipita.

Après avoir parcouru tout le bâtiment sans trouver le gentilhomme, Kohlhaas courut dans la cour. Le feu avait gagné, et le château se trouvait entouré d’une épaisse fumée et de flammes ardentes s’élevant jusqu’aux nues. Sternbald, aidé de trois valets, venait de jeter par la fenêtre les cadavres ensanglantés du châtelain et de l’intendant, aux cris de triomphe de Herse et aux plaintes confuses des femmes et des enfans de ces misérables.

Un jeune garçon de Tronkenbourg, voyant le feu prêt à atteindre les écuries, se hâtait d’y courir pour en faire sortir les chevaux du gentilhomme, lorsque Kohlhaas, se mettant sur son chemin, lui arracha la clef qu’il jeta par-dessus les murs, et le força, aux acclamations et à la risée de tous ses domestiques, de sauver les deux haridelles dont le couvert était déjà la proie des flammes. Le jeune homme, se retirant avec peine des ruines fumantes, présenta les bêtes à Kohlhaas, qui, le repoussant avec un violent coup de pied, alla s’asseoir sans rien dire à la porte du château, où il attendit le point du jour.

Lorsqu’il parut, le château n’offrait plus que des ruines, et personne ne s’y trouvait que Kohlhaas et ses sept domestiques.

Le marchand, accablé de tristesse, alla chercher dans les environs quelques renseignemens sur le gentilhomme. Il revint plus calme, ayant appris qu’il y avait non loin de Tronkenbourg un couvent de femmes nommé Erlabrunn, sur les bords du Mulde, dont l’abbesse, Antonie de Tronka, était connue dans tout le pays pour une sainte. Il lui parut très-vraisemblable que le gentilhomme s’y était réfugié.

Montant à l’appartement du châtelain (la tour n’avait point souffert de l’incendie), il y écrivit un mandat où il sommait tout parent ou ami qui aurait caché le gentilhomme Wenzel de Tronka de le lui livrer sous peine de mort et de pillage. Il répandit aussitôt cette déclaration dans le pays, puis il en remit une copie à l’un de ses domestiques nommé Waldmann, pour qu’il la portât à dame Antonie.

Il prit à son service quelques-uns des hommes de Tronkenbourg qui avaient à se plaindre de leur maître, les arma, comme fantassins, de poignards et d’arbalètes, et les exerça à marcher derrière les cavaliers. Après leur avoir distribué de l’argent, il s’assit sur les ruines du château pour se reposer un instant de ses douloureuses fatigues.

Vers midi, Herse vint lui confirmer ce que son cœur lui avait fait pressentir, savoir, que le gentilhomme avait trouvé un asile à Erlabrunn chez sa tante la vieille dame Antonie.

Il paraissait qu’il avait fui du château par un escalier secret conduisant jusqu’au bord de l’Elbe.

Kohlhaas soupira à ce récit ; sa troupe s’étant mise en marche, arriva avant trois heures à Erlabrunn, armée de flambeaux pour mettre le feu au couvent.

Un sombre orage murmurait dans le lointain.

Waldmann, qui vint à la rencontre de son maître, lui ayant dit qu’il avait remis le mandat à l’abbesse, Kohlhaas ordonna à ses gens de sonner la cloche du couvent ; alors l’abbesse portant un crucifix d’argent, descendit la rampe, suivie de toutes ses nonnes, et vint se jeter aux pieds du cheval du maquignon.

Celui-ci demanda durement où était caché le gentilhomme.

« Il est à Wittemberg, honnête Kohlhaas, » répondit-elle d’une voix tremblante.

Kohlhaas, retombant dans la torture d’une vengeance non accomplie, allait ordonner à sa troupe d’avancer et de mettre le feu, lorsque la foudre, tonnant avec violence, vint arrêter sa voix.

« N’avez-vous pas reçu mon mandat ? demanda-t-il à l’abbesse.

— Oui, répondit la dame d’une voix presqu’inintelligible, à présent même, trois heures après le départ de mon neveu : aussi vrai que Dieu existe. »

Waldmann répondit au sombre regard de son maître que c’était la pure vérité, les mauvais chemins l’ayant empêché d’arriver plus tôt.

Une effroyable averse vint en ce moment éteindre les mèches destructives, et Kohlhaas sentit en même temps se calmer dans son triste cœur toute colère contre de pauvres femmes. Saluant dame Antonie, il tourna le dos au couvent en s’écriant : « Suivez-moi, mes frères, le gentilhomme est à Wittemberg ; » et donnant de l’éperon, ils furent bientôt à une grande distance.

Au point du jour, ils entrèrent dans une auberge sur la grande route, où, vu la fatigue des chevaux, il fallait s’arrêter quelques heures. Kohlhaas réfléchissant qu’il lui serait impossible d’attaquer avec dix hommes une place comme Wittemberg, écrivit un second mandat dans lequel, après un court récit de tout ce qui lui était arrivé dans le pays, il invitait tout bon chrétien, sous la promesse d’une paie et d’un riche butin, à prendre parti dans sa guerre contre le gentilhomme de Tronka.

Le fanatisme et le mécontentement autant que l’attrait du gain lui attirèrent bientôt une bande de misérables que la paix avec la Pologne avait laissés sans ressources, en sorte qu’il se trouvait à la tête de trente hommes lorsqu’il arriva sur la rive droite de l’Elbe dans l’intention de réduire en cendres la ville de Wittemberg.

Il se retira avec sa troupe sous un vieux hangar ruiné dans la solitude d’une sombre forêt, et lorsqu’il eut appris par un de ses hommes, qu’il avait envoyé déguisé à la ville, que son mandat y était déjà connu, il partit avec ses gens pour mettre le feu aux faubourgs, pendant que les habitans de Wittemberg étaient encore livrés au sommeil.

Tandis que ses soldats, profitant du trouble que causait l’incendie, se livraient au pillage, il placarda contre la porte d’une église une déclaration contenant que lui Kohlhaas avait allumé l’incendie, et que si on ne lui livrait aussitôt le gentilhomme, il le propagerait dans toute la ville jusqu’à ce qu’il n’y restât pas une muraille derrière laquelle il pût se cacher.

L’effroi des habitans fut inexprimable. Le feu, qui dans une courte nuit d’été n’avait heureusement brûlé que dix-neuf maisons, dans le nombre desquelles était une église, ne fut pas plutôt éteint, que le vieux préfet Otto de Gorgas envoya un bataillon de cinquante hommes à la poursuite de l’incendiaire.

Mais le chef de ce bataillon, nommé Gerstenberg prit si mal ses mesures, que l’expédition de Kohlhaas, loin d’en être arrêtée, en acquit une plus grande gloire.

Ce premier, divisant ses forces comme il le pensait pour cerner Kohlhaas et le faire prisonnier, fut lui-même cerné et battu, de telle sorte que le soir du jour suivant il ne restait pas un seul des hommes auxquels la ville avait confié sa défense.

Kohlhaas mit de nouveau le feu aux faubourgs, qui cette fois furent réduits en cendres, puis il afficha encore son mandat jusque sur l’hôtel-de-ville, y ajoutant le récit du sort que venait d’éprouver le capitaine de Gerstenberg.

Le préfet, indigné de l’audace de cet homme, se mit lui-même avec plusieurs cavaliers à la tête de deux cents hommes, et, après avoir donné au gentilhomme une garde qui devait le préserver de la fureur du peuple, jusqu’à ce que l’on pût le faire évader, il sortit le jour de Saint-Gervais pour repousser la fureur de l’hydre menaçante qui désolait le pays.

Mais le maquignon fut assez prudent pour éviter une rencontre ; il fit semblant de fuir, jusqu’à ce qu’il eût attiré le préfet à quelques milles de la ville, faisant courir le bruit qu’il se jetait sur le Brandenbourg ; puis, se retournant subitement, il revint en toute hâte à Wittemberg, et y mit le feu pour la troisième fois.

L’incendie, poussé par le vent du nord, se propagea avec une inconcevable rapidité ; en moins de trois heures, quarante-trois maisons, deux églises, plusieurs couvens, des écoles et la préfecture furent réduits en cendres.

Le préfet, apprenant le piége dans lequel il était tombé, retourna au point du jour à marche forcée sur la ville, qu’il trouva dans le plus grand désordre.

Le peuple, armé de poutres et de haches, rassemblé devant l’habitation du gentilhomme, demandait avec des cris de rage qu’on le fît sortir de la ville.

Les bourgmaistres, en habits de cérémonie, à la tête de toute la magistrature, s’étaient transportés sur la place, et cherchaient vainement à obtenir que l’on attendît tranquillement le retour d’un messager qu’ils avaient envoyé à Dresde pour y demander les ordres de la cour à l’égard du gentilhomme. La populace furieuse, ne tenant nul compte de leurs discours, allait suivre le conseil des plus violens, qui était d’assiéger et de démolir la maison qui renfermait le gentilhomme, lorsqu’Otto de Gorgas rentra à la tête de sa troupe.

Ce digne homme, dont le seul aspect inspirait toujours au peuple la confiance et le respect, réussit à le calmer en lui montrant deux des complices de Kohlhaas, qu’il ramenait chargés de chaînes, et en lui faisant espérer de tenir bientôt leur chef entre ses mains.

Ensuite il pénétra dans l’appartement du gentilhomme, qu’il trouva tombant d’évanouissement en évanouissement entre les bras de deux médecins qui le rappelaient à la vie avec des essences et des cordiaux. Sentant bien que ce n’était pas le moment de lui faire des reproches, il se contenta de jeter sur lui un regard de mépris, en lui disant de s’habiller et de le suivre pour sa sûreté dans le palais de justice.

Lorsqu’on eut revêtu le gentilhomme d’un pourpoint et d’un casque, en ayant soin de laisser sa poitrine découverte, à cause des fréquens étouffemens dont il était saisi, il parut dans la rue, appuyé sur le bras du comte de Gerschau, son beau-frère. Le peuple, contenu avec peine par les gens d’armes, l’accabla de mille imprécations, il le nomma le fléau du pays, la malédiction de la ville de Wittemberg, et le malheur de la Saxe.

Cependant, après un trajet pénible au milieu des décombres de l’incendie, il atteignit sans accident le palais de justice, où il fut enfermé dans une tour occupée par une forte garde.

Le retour du messager avec la résolution de la cour vint mettre le préfet dans un nouvel embarras ; la bourgeoisie de Dresde ayant adressé à celle-ci une pressante supplique, elle ne voulait aucunement recevoir le gentilhomme, de crainte d’attirer dans la capitale la guerre et l’incendie. Elle ordonnait au préfet de le laisser où il était, l’avertissant qu’elle allait envoyer contre Kohlhaas, pour venger la bonne ville de Wittemberg, une troupe de cinq cents hommes, sous le commandement du prince Frédéric de Meissen.

Le préfet vit bien que cette résolution n’était pas de nature à contenter le peuple ; car la guerre que le maquignon faisait dans les ténèbres, avec la poix, la paille et l’allumette, aurait rendu vaine une force plus considérable que celle du prince de Meissen. Il se décida à cacher la résolution de la cour, et se contenta de faire publier la croisade du prince contre Kohlhaas.

Le lendemain au point du jour une voiture fermée sortit du palais de justice, accompagnée de quatre cavaliers bien armés, qui prirent la route de Leipzig, et le bruit se répandit qu’ils conduisaient le gentilhomme à Pleissembourg. Le peuple, satisfait à son égard, se réunit en foule à la troupe du prince de Meissen.

Cependant Kohlhaas se trouvait dans la plus étrange situation, à la tête d’une centaine d’hommes, menacé d’un côté par le préfet, de l’autre par le prince.

Sa troupe étant bien armée et d’une vaillance éprouvée, il se décida à marcher courageusement au-devant de ce double orage. Le soir du même jour, il attaqua le prince de Meissen dans une rencontre nocturne à Muhlberg, où il eut le chagrin de voir tomber le fidèle Herse, qui combattait à ses côtés. Aigri par cette perte, Kohlhaas redoubla de vaillance, et au bout de trois heures de combat, le prince était hors d’état de rallier sa troupe, soit à cause du désordre qui y règnait, soit à cause de ses blessures.

Après cette première action, Kohlhaas se retourna sur le préfet, qu’il attaqua en plein jour et en rase campagne. La perte fut égale des deux côtés ; mais il est probable que le préfet eût été défait s’il n’eût profité de la nuit pour retourner à Wittemberg avec le reste de sa troupe.

Cinq jours après, Kohlhaas était devant Leipzig, mettant le feu à trois points de la ville. Il se nommait, dans le mandat qu’il répandit en cette occasion, un représentant de l’archange Michel, qui était venu, armé du glaive de la justice, livrer une guerre à feu et à sang à l’injustice et à la fausseté des hommes. Du château de Lutzen, dont il s’était emparé, il appelait le peuple à se joindre à lui pour réformer le monde, et cette feuille était signée avec une sorte d’égarement : « Du siége de notre gouvernement provisoire, le château de Lutzen. » Le bonheur des habitans voulut qu’une pluie abondante vînt déjouer les projets de l’incendiaire, et qu’il n’y eût de brûlé qu’une boutique voisine du château de Pleissembourg.

L’effroi et le trouble s’emparèrent de tous les cœurs, lorsqu’on apprit à Leipzig que le gentilhomme devait se trouver au château de Pleissembourg, et que l’on vit s’approcher une bande de deux cents cavaliers envoyés à sa recherche.

Ce fut en vain que les magistrats firent répandre dans les environs la déclaration que le gentilhomme n’était point à Pleissembourg ; le maquignon, dans de semblables feuilles, soutint qu’il s’y trouvait, et que, s’il était vrai qu’il n’y fût pas, il ne s’éloignerait que lorsqu’on lui aurait nommé le lieu de sa retraite.

Le prince de Saxe, instruit de la détresse où se trouvait sa ville de Leipzig, déclara qu’il allait marcher en personne contre Kohlhaas, à la tête de deux mille hommes. Il fit reprocher sévèrement au préfet Otto de Gorgas le perfide mensonge par lequel il avait rejeté sur Leipzig toute la fureur de l’incendiaire.

Mais il serait impossible de décrire le trouble de toute la Saxe et principalement de la résidence, lorsqu’on y eut connaissance d’une nouvelle affiche où l’on déclarait à Kohlhaas, que le gentilhomme Wenzel s’était enfui à Dresde chez ses cousins Hinz et Kunz de Tronka.

_____