Meuse/p3/s3
SCÈNE III.
Les dames des Croisés.
Chant de cor anglais. Hautbois. Cors. Glas. Coup de gong sonore.
Le rideau se lève : fond et coulisses de velours gris et mauve.
Marche-les-Dames !
Où vint mourir sur une cime, Celui qui, sur une cime, avait hissé son âme et son peuple.
Meuse royale, fleuve de grâce et d’harmonie ; combien de cris douloureux noyés dans tes eaux paisibles, combien, dans tes flots, d’âmes à la dérive.
Combien de rêves brisés, dont les morceaux ont été roulés vers les lointains comme des pétales de roses effeuillées.
Meuse royale. Sur toi se sont penchées, au cours des temps, de grandes ombres. Meuse au nom de femme, si femme dans tes gestes arrondis et pleins de grâce, ce sont des noms de femmes qui, d’abord, nous viennent aux lèvres lorsque nous évoquons ton passé.
En fermant à moitié les yeux, nous voyons s’avancer vers nous, sur tes bords fleuris, les « Dames du temps jadis ».
Quand afin de venger la Croix
Tous les barons du Namurois,
à cent trente-neuf, s’en allèrent,
Leurs femmes en deuil ont juré
de fidèles leur demeurer
et de les attendre, en prières.
À présent, au fond du vallon,
Pour espérer leurs chers barons
On dit qu’il est encore des âmes
Que, dans les soirs, on voit errer,
à l’ombre mauve des rochers,
par le val de Marche-les-Dames.