Mes paradis/Les Îles d’or/Une menotte vous serre


XII


Une menotte vous serre
La main dans l’ombre en passant,
Des cieux un aigle descend
Et l’on est tout dans sa serre.

Ces petits doigts gracieux,
Leur toucher furtif vous broie ;
L’aigle en déchirant sa proie
Remonte au gouffre des cieux.

On tremble, on pâme, on suffoque
Dans cet air qui va coupant
Le souffle tandis qu’on pend
Inerte comme une loque.


Sur les yeux clos passe un flux
De nuit, de sang et de larmes.
Le front est plein de vacarmes.
Au cœur, rien ! Il ne bat plus.

Et c’est d’une douceur telle
Dans l’évanouissement,
Qu’on voudrait de ce moment
Faire une mort immortelle.

Ô sentiments surhumains,
Ô trépas d’apothéose,
Qu’on a pour si peu de chose,
Pour l’étreinte de deux mains !