Ces humbles que vous méprisez,
Vous, les puissants, devraient vous plaire.
Ces gueux aux corps martyrisés,
Cette tourbe patibulaire
Qui rame dans votre galère,
Les reins nus, le chef ruisselant,
C’est vos aïeux. La chose est claire,
Ô grand chêne : tu sors d’un gland.
Sur son vieux dos que vous brisez
Le peuple indulgent vous tolère.
Mais quand aux rois fleurdelysés
Il montre ses yeux en colère,
Les rois vont se faire lanlaire.
Devant ce regard aveuglant,
Tout sang, même bleu, tourne en glaire.
Ô grand chêne, tu sors d’un gland.
C’est ce gland que vous arrosez,
Pleurs de la sueur populaire,
Qu’on blague, et qu’avec des baisers
Comme un trésor miraculaire
On devrait mettre en scapulaire.
Le peuple est le ventre sanglant
D’où naît le grand homme stellaire.
Ô grand chêne, tu sors d’un gland.
ENVOI
Prince, tu vas en vexillaire
De ta noblesse, et, te gonflant,
Tu te compares, séculaire,
Au grand chêne. Tu sors d’un gland.
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