Traduction par Jean Cohen.
G. C. Hubert (4p. 141-169).


CHAPITRE XXI.



Durant sept matinées consécutives et durant autant de soirées, Immalie parcourut le rivage de son île solitaire sans revoir l’étranger. Elle se rappelait toujours, pour se consoler, l’assurance qu’il lui avait donnée qu’elle le reverrait dans le monde des souffrances, et elle ne cessait de répéter en elle-même ses dernières paroles. Dans l’intervalle, elle s’efforça de former son éducation pour ce monde où elle allait entrer, et rien ne pouvait être plus admirable et plus intéressant que de voir les tentatives qu’elle faisait pour tirer du règne végétal ou animal quelque analogie qui pût lui donner une idée de l’incompréhensible destinée des hommes. Tantôt, elle regardait la fleur, et se disait : « Cette fleur, si brillante aujourd’hui, sera fanée demain ; mais elle ne ressent point de douleur ; elle meurt patiemment, et celles qui l’avoisinent n’éprouvent point de chagrin en perdant leur compagne : sans cela leurs couleurs ne seraient pas si resplendissantes. Mais peut-il en être ainsi dans le monde qui pense ? Pourrais-je le voir se faner et mourir, sans me faner et mourir avec lui ? Oh, non ! Quand cette fleur se fanera, je chercherai, comme la rosée, à la ranimer par mes pleurs. »

Elle essaya ensuite d’agrandir la sphère de ses idées, en observant le règne animal. Un jeune loxia était tombé mort de son nid suspendu. Immalie, regardant par l’ouverture que ces oiseaux intelligens font à l’extrémité inférieure de leur nid, pour le mettre à l’abri des oiseaux de proie, aperçut les vieux loxia avec des porte-lanternes dans leurs becs, tandis que le jeune gisait mort devant eux. À cette vue, Immalie fondit en larmes.

« Ah ! vous ne pouvez pleurer ! » s’écria-t-elle, « quel avantage j’ai sur vous ! Vous mangez, quoique votre petit, votre enfant soit mort ! » (Nous n’avons pas besoin d’observer que, dans sa conversation avec Immalie, l’étranger lui avait donné quelque idée des liens de la parenté.) « Pourrais-je boire encore le lait de la noix de coco, si lui n’était plus en état d’en goûter ? Je commence maintenant à comprendre ce qu’il m’a dit… Penser est donc souffrir !… Et le monde des pensées doit être aussi le monde des souffrances ! mais que ces larmes sont délicieuses ! autrefois je pleurais de plaisir ; ah ! je vois maintenant qu’il y a une peine plus agréable encore que le plaisir, et cette peine, je ne l’avais jamais éprouvée avant de l’avoir vu. Oh ! qui pourrait, en renonçant à la pensée, renoncer au plaisir de pleurer ? »

Cependant Immalie ne passa pas uniquement dans les réflexions l’intervalle que l’étranger mit entre ses visites. Une nouvelle inquiétude commença à l’agiter ; et, dans les momens que lui laissaient ses méditations et ses larmes, elle recherchait avec avidité les plus brillans coquillages pour en orner ses bras et ses cheveux. Elle changea tous les jours sa robe de fleurs, et au bout d’une heure elles ne semblaient déjà plus assez fraîches. Puis elle remplissait une large coquille de l’eau la plus limpide, et posait les fruits les plus délicieux, qu’elle entremêlait de roses, sur le banc de pierre de la pagode ruinée. Mais le temps se passait sans que l’étranger vînt la voir. Le lendemain, en revoyant le banquet qu’elle avait préparé la veille, elle pleurait sur les fruits qui n’avaient plus de fraîcheur ; puis elle s’empressait d’essuyer ses yeux et d’en arranger un nouveau.

Telle était son occupation durant la huitième matinée, quand elle vit tout-à-coup l’étranger devant elle. La joie naïve et innocente avec laquelle elle courut à sa rencontre, excita pour un moment dans son cœur un sentiment de remords dont Immalie s’aperçut au ralentissement de ses pas et à ses yeux détournés. Elle s’arrêta, pleine d’une aimable timidité, comme paraissant lui demander pardon d’une offense involontaire, et sollicitant la permission d’approcher, par l’attitude même qu’elle avait prise pour s’en abstenir. Dans ses yeux brillaient des larmes prêtes à s’échapper s’il avait fait encore un seul mouvement pour la repousser. Cet aspect rendit à l’étranger son courage, et il pensa en lui-même : Il faut qu’elle apprenne à souffrir pour se rendre digne d’être mon élève.

« Vous pleurez, Immalie ! » ajouta-t-il en s’approchant d’elle.

« Oh, oui ! » répondit-elle en souriant à travers ses larmes, comme une matinée de printemps. « Vous devez m’apprendre à souffrir, et je serai bientôt préparée à entrer dans votre monde ; mais j’aime mieux pleurer pour vous, que sourire sur des roses. »

« Immalie, » reprit l’étranger, repoussant les sentimens de tendresse qui l’amollissaient malgré lui, « Immalie, je viens vous montrer quelque chose de ce monde des pensées que vous désirez tant d’habiter, et où vous ne tarderez pas en effet à fixer votre demeure. Montez sur cette colline où vous voyez un bosquet de palmiers. »

« Mais je voudrais le voir tout entier à la fois, » dit Immalie avec l’avidité naturelle d’une intelligence ardente qui croit pouvoir tout embrasser.

« Tout entier à la fois ! » répéta l’étranger en souriant. « J’ai quelque idée que la portion que vous en verrez aujourd’hui sera plus que suffisante pour satisfaire votre curiosité, quelle qu’elle soit. »

En disant ces mots, il tira de dessous son justaucorps un tube, et lui dit d’y appliquer son œil. La jeune Indienne obéit ; mais au bout d’un instant elle s’écria vivement : « Suis-je là, où sont-ils ici ? » et elle se laissa aller à terre dans une extase inexprimable. Elle se releva au bout d’un moment, et, saisissant le télescope, elle voulut s’en servir seule ; mais elle porta le grand verre à son œil. N’apercevant plus rien, elle dit avec tristesse : « Tout est parti ! Ce monde si beau n’a vécu qu’un instant ! Tout ce que j’aime meurt ainsi. Mes roses les plus chéries ne vivent pas aussi long-temps que celles que je néglige. Vous êtes resté absent pendant sept jours, et ce monde superbe n’a vécu qu’un moment ! »

L’étranger dirigea encore le télescope vers le rivage de l’Inde, dont ils n’étaient pas très-éloignés, et Immalie, enchantée, s’écria de nouveau : « Ah ! tout revit, et plus beau que jamais ! Je vois partout des êtres vivans et pensans. Mais que sont donc ces superbes rochers que j’aperçois, et qui ne ressemblent pas aux rochers de mon île ? Leurs côtés sont polis ; leurs sommets sont découpés comme des fleurs. Oh ! que ce monde doit être beau ! Est-ce la pensée qui a fait tout cela ? »

« Attendez, Immalie, » dit l’étranger en lui ôtant le télescope des mains ; « pour jouir de ce spectacle, il faut que vous le compreniez. »

« Sans doute, » répondit Immalie, chez qui le monde sensible perdait peu à peu ses attraits en comparaison du monde spirituel nouvellement découvert pour elle. « Oh ! oui… laissez-moi penser ! »

« Immalie, avez-vous de la religion ? » dit pour lors l’inconnu, tandis qu’une sensation de douleur inexprimable ajoutait à la pâleur de son front.

Immalie, dont l’intelligence était prompte, et qui sympathisait avec toutes les sensations qu’elle voyait, le quitta avec vivacité, et revint un instant après tenant en main une feuille de bananier, avec laquelle elle essuya les gouttes de sueur qui découlaient de son front décoloré ; puis s’étant assise à ses pieds, dans l’attitude d’une attention avide et profonde, elle répéta : « De la religion ! qu’est-ce que c’est ? Est-ce une nouvelle pensée ? »

— « C’est la connaissance d’un Être supérieur à tous les mondes et à leurs habitans, puisque c’est lui qui les a faits tous, et qui sera leur juge ; d’un Être que nous ne pouvons voir ; mais dans le pouvoir et la puissance duquel nous devons croire, quoique invisible ; d’un Être qui est partout, sans qu’on le voie nulle part ; qui agit toujours, quoiqu’il ne soit jamais en mouvement ; qui entend tout, et ne se fait jamais entendre. »

Immalie l’interrompit avec une espèce d’égarement : « Arrêtez ! trop de pensées me tueront ; laissez-moi reposer un moment. J’ai vu la pluie qui tombait pour rafraîchir le rosier, et qui le couchait par terre. » Après un effort pénible, comme pour rappeler un souvenir éloigné, elle ajouta :

« La voix des songes m’a dit quelque chose de ce genre avant que je fusse née ; mais il y a si long-temps !… Quelquefois j’ai eu en moi des pensées qui ressemblaient à cette voix. Il me semblait que j’aimais trop les choses qui m’entouraient, et que j’aurais dû aimer des choses bien loin de moi : des fleurs qui ne se flétriraient point, et un soleil qui ne se coucherait jamais. Après de telles pensées, j’aurais voulu m’élever comme un oiseau dans l’air ; mais il n’y avait personne pour me montrer le chemin. »

« Il est juste, » reprit l’étranger, « non-seulement d’avoir des pensées sur cet Être, mais encore de les exprimer par des actes extérieurs. Les habitans de ce monde que vous allez voir, appellent cela adorer, et ils ont adopté divers modes d’adoration. » (En disant ces derniers mots, un sourire satanique parut sur ses lèvres.) « Ces modes sont si différens, qu’ils ne s’accordent que sur un seul point, celui de faire de la religion un tourment. »

« Cela n’est pas possible, » s’écria Immalie ; « ils doivent sentir que celui qui est toujours le même ne peut agréer des différences dans la manière de l’adorer. »

— « C’est aussi en cela que consistent leurs erreurs. »

Pendant qu’il parlait, Immalie avait repris le télescope.

« Eh bien ! que voyez-vous ? » dit l’étranger.

Immalie décrivait ce qu’elle voyait d’une manière très imparfaite, mais qui deviendra plus intelligible pour le lecteur, par les paroles explicatives de l’étranger.

« Vous voyez, » dit-il, « les côtes des Indes, les rivages du monde qui est près de vous. Cet édifice énorme sur lequel votre œil se fixe le premier, est la noire pagode de Juggernaut. À côté de cette pagode, vous voyez une mosquée turque ; elle se distingue par l’emblême d’un croissant qui surmonte le toit. Non loin de là est un bâtiment peu élevé, couronné d’un trident : c’est le temple de Mahadeva, une des anciennes déesses du pays. »

« Mais, que m’importent les maisons ! » dit Immalie ; « montrez-moi les êtres vivans qui s’y rendent. »

« C’est juste, » reprit le tentateur ; « mais ces maisons indiquent les différentes façons de penser de ceux qui les fréquentent. Si vous désirez examiner leurs pensées, il faut voir comment ils les expriment par leurs actions. Dans le commerce qu’ils ont les uns avec les autres, les hommes sont souvent de mauvaise foi ; mais ils sont assez sincères dans leurs adorations, conformément au caractère qu’ils prêtent à leurs dieux : si ce caractère est formidable, ils expriment la crainte ; s’il est cruel, ils s’infligent des souffrances ; s’il est triste, l’image du dieu se réfléchit fidèlement sur le visage de ses adorateurs. Voyez du reste et jugez. »

Immalie regarda, et vit une vaste plaine sablonneuse, à l’extrémité de laquelle se dessinait l’obscure pagode de Juggernaut. Cette plaine était jonchée de squelettes, tandis que des milliers d’êtres à peine vivans traînaient leurs corps à demi brûlés sur les sables, afin de périr à l’ombre du temple dont ils n’osaient espérer d’atteindre les murs. Une foule mouraient en chemin ; d’autres secouaient faiblement la main, pour éloigner les vautours, qui déjà s’apprêtaient à les dévorer.

À côté de cette scène effroyable, se présentait un spectacle magnifique. La statue de Juggernaut s’avançait sur un énorme char de triomphe, que traînaient une foule innombrable de prêtres, de victimes, de bramines et de faquirs. À mesure que la procession marchait, des malheureux se jetaient devant les roues du char, qui les écrasait en passant. D’autres, qui ne se croyaient pas dignes de périr d’une mort aussi illustre, se faisaient de larges blessures, et se contentaient de laisser couler leur sang sur la route du Dieu. Tel est le mélange de rites qui caractérise partout le paganisme. Moitié brillant, moitié horrible ; invoquant la nature en même temps qu’il l’outrage ; mêlant les fleurs avec le sang, et jetant devant le char de l’idole, tantôt un enfant en pleurs, et tantôt une guirlande.

Le temple de Mahadeva ne lui offrit pas un spectacle moins horrible ; nous épargnons au lecteur la description des mères sacrifiant leurs enfans, et des enfans exposant leurs parens décrépits aux tigres et aux crocodiles. Il suffira de dire, qu’après l’avoir contemplé pendant quelque temps, Immalie couvrant ses yeux de ses deux mains, resta muette de douleur et d’horreur.

« Tournez-vous par ici, » dit l’étranger ; « les cérémonies de toutes les religions ne sont pas également sanglantes. »

Immalie leva les yeux, et elle vit une mosquée turque, dans toute la splendeur qui accompagna la première introduction de la religion mahométane parmi les Hindous. Elle élevait ses dômes recouverts d’or, ses minarets artistement sculptés, et ses flèches couronnées de croissans ; elle était enrichie de tous les ornemens que l’imagination orientale prodigue à son architecture, à la fois légère et brillante, pompeuse et aérienne.

Un groupe de Turcs s’avançait gravement vers la mosquée. Leurs traits nobles et expressifs, leurs costumes majestueux et leurs tailles élevées, formaient un contraste remarquable avec les pauvres Hindous, à moitié nus, qui, assis par terre, achevaient un léger repas de riz cuit à l’eau. Immalie regardait les Turcs avec respect et plaisir, et commençait à penser qu’il pouvait y avoir quelque chose de bon dans la religion professée par des êtres d’un aspect aussi noble. Tout-à-coup elle les vit, avant d’entrer dans la mosquée, repousser avec mépris les Indiens, tranquilles et effrayés, et leur cracher à la figure. Ils les frappaient du plat de leurs sabres, et les traitaient de chiens d’idolâtres ; ils les maudissaient au nom de Dieu et du prophète.

Quoique Immalie ne pût pas entendre les mots qui accompagnaient cette action, elle n’en fut pas moins révoltée, et elle en demanda le motif.

« Leur religion, » dit l’étranger, « leur ordonne de haïr tous ceux qui n’adorent pas Dieu comme eux. »

« Hélas ! » observa Immalie, « cette haine que leur religion enseigne n’est-elle pas la preuve que cette religion n’est pas la véritable ? Mais pourquoi, » ajouta-t-elle avec étonnement, « ne vois-je pas parmi eux quelques-unes de ces créatures plus aimables, dont les habits diffèrent des leurs, et que vous appelez des femmes ? N’adorent-elles pas aussi Dieu, ou bien ont-elles une religion plus douce qui leur est propre ? »

« Cette religion, » répondit l’étranger, « n’est pas favorable à ces créatures dont vous êtes, sans contredit, la plus aimable. Elle enseigne que l’homme aura d’autres compagnes dans le monde des âmes, et elle ne dit pas bien clairement si jamais les femmes y arriveront. Aussi vous devez voir quelques-unes de ces créatures délaissées, errantes parmi les pierres qui marquent le lieu où reposent les morts ; elles répètent des prières pour les âmes qu’elles n’osent espérer de revoir. D’autres, âgées et dans l’indigence, assises aux portes de la mosquée, lisent à haute voix des passages d’un livre qu’ils appellent le Koran, non dans la vue d’exciter la dévotion, mais dans l’espoir d’obtenir une faible charité. »

À ces mots désolans, Immalie qui avait en vain cherché dans ces divers systêmes cette espérance et ces consolations, dont son esprit si pur et son imagination si vive lui démontraient également la nécessité, éprouva une invincible répugnance pour toute religion ; car on les lui peignait sous des couleurs qui ne lui offraient qu’un hideux tableau de sang et de cruauté, renversant tous les principes de la nature, et rompant tous les liens du cœur.

Elle se jeta par terre, et s’écria : « Il n’y a point de Dieu, s’il n’y en a point d’autre que le leur ; » puis s’étant levée pour jeter un dernier regard sur ce qu’elle venait de voir, dans l’espoir que ce ne serait qu’une illusion, elle découvrit un petit édifice obscur, ombragé de palmiers et surmonté d’une croix. Frappée de la simplicité de son apparence, ainsi que du petit nombre et de la conduite paisible de ceux qui s’en approchaient, elle s’écria que c’était sans doute là une nouvelle religion ; et elle en demanda le nom et les rites. L’étranger qui avait fait ce qu’il avait pu pour empêcher qu’elle n’aperçût ce temple modeste, montra beaucoup d’inquiétude à la découverte qu’elle venait de faire, et plus encore de répugnance à répondre aux questions que cette découverte lui suggérait ; mais elle insista si vivement, et mit une si aimable importunité à les réitérer ; elle passa si naïvement d’une douleur profonde et grave à une curiosité à la fois enfantine et intelligente, qu’il était impossible de lui résister.

Il se peut faire encore qu’une autre cause ait agi sur ce prophète de malheur, et l’ait forcé de prononcer une bénédiction, quand il aurait voulu maudire ; mais c’est un mystère qu’il ne nous est pas permis d’approfondir, et qui ne sera bien connu qu’au grand jour où tous les secrets seront dévoilés. Quoi qu’il en soit, il se sentit forcé de lui dire que cette religion dont elle voyait les rites et les serviteurs, était celle du Christ.

« Mais quels sont ces rites ? » demanda Immalie. « Font-ils aussi mourir leurs enfans ou leurs parens pour prouver qu’ils aiment leur Dieu ? Les suspendent-ils dans des corbeilles pour périr, ou les exposent-ils sur les bords des rivières pour être dévorés par des animaux féroces et hideux ? »

« La religion qu’ils professent, leur défend cela, » dit l’étranger, en prononçant à regret des paroles de vérité. « Elle leur ordonne, au contraire, d’honorer leurs parens, de soigner leur progéniture. »

— « Et pourquoi ne repoussent-ils pas de devant leur temple ceux qui ne pensent pas comme eux ? »

— « Parce que leur religion leur dit d’être charitables, bienveillans et tolérans. Ils doivent chercher à instruire ceux qui n’ont point encore atteint la pureté de sa lumière ; mais ils ne doivent ni les rejeter, ni les dédaigner. »

— « Ils n’immolent donc pas à leur Dieu des victimes humaines ? »

— « Non : car ils savent que Dieu ne peut être bien servi que par des cœurs purs, et des mains exemptes de crimes. Ils savent que la dévotion seule est préférable aux cérémonies les plus imposantes et les plus terribles, et que les temples les plus orgueilleux, élevés en l’honneur de sa divinité, seront réduits en poussière, tandis qu’un cœur simple et humilié brûlera éternellement sur son autel ; holocauste agréable, et dont les feux ne s’éteindront jamais. »

Pendant qu’il parlait, contraint peut-être par un pouvoir supérieur, Immalie inclinait, en rougissant, son visage contre terre, et puis le relevant avec le regard d’un ange nouveau-né, elle s’écria : « Le Christ sera mon Dieu ! Je veux être chrétienne ! » Elle s’inclina de nouveau avec cette profonde humilité qui indique à la fois la soumission du corps et de l’âme, et elle resta assez long-temps dans cette position. Quand elle se releva, elle chercha l’étranger… Il n’y était plus.