Mathilde, Mémoires d’une jeune femme/Partie I/12

Gosselin (Tome Ip. 305-323).
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Première partie


CHAPITRE XII.

LA LETTRE.




En remontant chez moi, quelle fut ma surprise ? je trouvai dans mon cabinet d’études une énorme corbeille de jasmins et d’héliotropes, mes deux fleurs de prédilection.

Nous étions au mois de février. C’était depuis le matin seulement que Gontran avait pour ainsi dire le droit de m’offrir des fleurs ; je ne pus concevoir comment en si peu de temps il avait pu réunir cette masse de fleurs plus rares encore que précieuses dans cette saison.

Je fus profondément touchée de cette prévenance. Blondeau m’attendait. Je lui dis tout mon bonheur, toutes mes espérances. Après m’avoir écoutée attentivement, cette excellente femme me répondit :

— Sans doute, Mademoiselle, je crois que M. le vicomte de Lancry est bien aussi charmant que vous le dites ; un jour il sera duc et pair… c’est possible ; mais permettez-moi de vous faire observer qu’avant de se marier, il est toujours prudent de prendre des informations.

— Comment ! des informations ? tu es folle ! Est-ce que M. le duc de Versac, son oncle, n’en a pas donné à ma tante…

Blondeau secoua la tête.

— Les informations des parents, mademoiselle, sont toujours bonnes ; ce n’est pas à celles-là qu’il faut croire, ni même souvent à celles du monde.

— Où veux-tu en venir ?

— Tenez Mademoiselle, si vous vouliez me le permettre, je trouverais moyen, en faisant causer les gens de M. le vicomte à l’office, de savoir bien des choses.

— Ah ! c’est indigne !… Et c’est vous qui osez me parler d’un vil espionnage !… Rappelez-vous bien une chose, — m’écriai-je, — c’est que si vous faites le moindre cas de mon attachement pour vous, vous me promettrez à l’instant même de ne pas faire la moindre question aux gens de M. de Lancry.

— Mais, Mademoiselle, c’est votre tante qui, à bien dire, a arrangé ce mariage ! Oubliez-vous donc toutes ses méchancetés ? la haine qu’elle portait à cette pauvre madame la marquise votre mère, qu’elle a fait mourir de chagrin !… Au moment de vous lier pour jamais, réfléchissez bien, Mademoiselle… Pardonnez-moi si je vous parle ainsi. Je ne suis qu’une pauvre femme, mais je vous aime comme mon enfant ; ce sentiment-là me donne des idées au-dessus de ma position et le courage de vous le dire. Pauvre Mademoiselle, vous êtes si confiante, si bonne, si généreuse, que vous ne vous défiez de personne. C’est comme pour Mademoiselle Ursule, je ne la crois pas franche, malgré ses soupirs et ses airs de victime…

— Écoutez-moi, Blondeau : je comprends qu’une sorte de jalousie d’affection vous porte à parler injustement de mademoiselle d’Orbeval, aussi j’excuse ce sentiment ; mais je vous prie de ne pas vous permettre la moindre allusion à une union que je veux contracter, parce qu’elle est honorable et belle. Je sais ce que je fais ; je ne suis plus une enfant. Ce n’est pas mademoiselle de Maran qui m’a parlé de ce mariage ; c’est moi qui lui en ai parlé… D’ailleurs, je le sens là… ma mère vivrait encore qu’elle approuverait le choix de mon cœur…

— Mademoiselle, une dernière observation. Si, comme vous n’en doutez pas, les renseignements qu’on peut avoir sur M. le vicomte sont bons, qu’est-ce que cela vous fait que ?…

— Écoutez, — dis-je à Blondeau d’un ton très ferme, — je ne puis vous empêcher d’agir à votre tête ; mais quoi qu’il doive m’en coûter, oui, m’en coûter beaucoup, de me priver de vos services… je vous déclare que si vous me dites encore un mot à ce sujet, j’assure votre sort et je vous éloigne pour toujours de moi…

— Ah ! Mademoiselle, ne me regardez pas ainsi. Mon Dieu ! c’est comme lorsqu’étant toute petite et égarée par les méchants conseils de votre tante, vous m’avez dit que j’aimais mieux l’argent que tout.

Et la pauvre femme se mit à fondre en larmes.

— Ah ! — lui dis-je avec une impatience chagrine et presque durement, — j’étais si heureuse ! faut-il qu’avec vos ridicules visions vous veniez me distraire de ce bonheur ?

Puis, ne voulant laisser à personne le soin de toucher à la précieuse corbeille de fleurs que Gontran m’avait envoyée, je la pris et je l’emportai dans ma chambre. De ce jour, je m’habituai à avoir des fleurs près de moi sans rien en ressentir qu’une sorte de légère torpeur qui n’est pas sans charme.

Peu à peu l’impatience que m’avait causée Blondeau se dissipa sous le charme de mes souvenirs de la journée. Mes préoccupations avaient été si puissantes, que je n’avais pas encore ouvert la lettre d’Ursule, qui m’annonçait son mariage.

J’ai gardé cette lettre ainsi que plusieurs autres… la voici.

On remarquera en la lisant que le style en est un peu prétentieux et romanesque. Je querellais quelquefois ma cousine sur cette manière d’écrire sans pouvoir l’en corriger.

En me rappelant maintenant toutes les phrases de mon amitié pour Ursule et les suites de son mariage, je ne puis retenir un sourire d’amertume en lisant ces lignes éplorées, gémissantes, où elle se pose si lugubrement en victime.

Mais alors les temps n’étaient pas changés, j’avais toutes mes illusions, et je fus cruellement navrée du malheur d’Ursule.

Pour tout dire, cette lettre, d’une écriture parfaitement correcte et posée, était cachetée de noir avec une pierre gravée, représentant une tête de mort ; cachet bizarre qu’Ursule affectionnait beaucoup.

« Saint-Norbet, février 1840.

« C’en est fait, Mathilde, ta pauvre Ursule est sacrifiée ; elle n’a plus qu’à vouer sa vie tout entière aux larmes et au deuil. C’est à peine si au milieu du sombre avenir qui l’attend, elle entrevoit quelques lueurs de consolation, qu’elle devra, sans doute, à ton amitié chérie… Mais, mon Dieu ! pourquoi m’étonner du nouveau coup qui me frappe ! depuis longtemps ne suis-je pas habituée à souffrir ! Victime résignée au malheur, je ne puis que courber le front et pleurer !…

« Pardon, mon amie, ma sœur, de venir attrister tes joies par ces plaintes qui s’exhalent de mon âme désolée : car, j’en ai le pressentiment, tu seras heureuse, tu es heureuse selon ton cœur ; tu épouseras celui que tu aimes… Si belle, si riche, si charmante, pour plaire tu n’as qu’à paraître !…

« La pauvre Ursule, au contraire, sans charmes, sans attrait, sans fortune, a été en naissant presque vouée au malheur… Que veux-tu ? c’est sa destinée… Mais, que dis-je ?… non, non, je suis injuste ; ne t’ai-je pas rencontrée sur ma route ? n’as-tu pas tendu la main à la petite abandonnée ? n’a-t-elle pas dû à ta générosité, à ta touchante amitié, le plus précieux des biens, une éducation brillante, comme me le répète toujours avec raison mademoiselle de Maran ?

« Ne t’ai je pas dû… ne te dois-je pas le sentiment le plus doux, le plus cher à mon cœur ? Hélas ! sans cela… sans l’espoir involontaire qu’il me donne… je serais déjà morte de désespoir… tu n’aurais qu’à pleurer ton amie.

« Écoute, Mathilde ; c’est une folie, diras-tu… soit… mais c’est une douloureuse et triste folie, je t’assure… J’ai de funèbres pressentiments, je ne sais quel est le sort qui m’attend… en tout cas… je voudrais te donner mes livres et cette petite parure de corail que tu sais.

« Hélas ! je suis sans fortune, je n’ai rien… Pardonne la pauvreté de ce présent ; mais au moins il te rappellera nos journées de travail et notre innocente coquetterie de jeunes filles, n’est-ce pas, Mathilde ? Tu pleureras ton amie ! n’est-ce pas qu’un vague souvenir d’elle viendra quelquefois traverser ta pensée au milieu des fêtes brillantes dont tu seras la reine ?…

« Je voudrais avoir ici mon dernier asile. Je suis allée souvent dans le modeste cimetière du village ; il n’a rien de repoussant ; c’est une pelouse verdoyante, entourée d’une haie de sureau et d’aubépine qui au printemps doivent être couverts de fleurs. On y voit çà et là de simples croix de bois… Oh ! qu’il me serait doux d’être là confondue avec les humbles créatures qui reposent dans ces tombes ignorées, car j’aurai passé comme elles, inaperçue dans ce monde…

« Pardon, Mathilde, de ce triste commencement de lettre ; mais j’ai l’âme si profondément navrée que je me suis laissée aller à l’amertume de mes impressions.

« Il faut pourtant t’apprendre le sujet de mes larmes…

« Je me marie !

« Quel mariage ! mon Dieu !… Adieu mes rêves de jeune fille ! adieu mes vagues espérances ! adieu surtout cette vie de dévoûment de tous les instants que je voulais passer près de toi !

« Un moment j’ai pensé à lutter contre l’inébranlable et terrible volonté de mon père ; mais j’ai senti que j’aurais vite usé mes forces dans ce combat inégal, que je serais brisée dans la lutte ; et puis une bien plus puissante raison me faisait un devoir de la résignation. J’ai obéi ; tu sauras bientôt pourquoi.

« Il y a huit jours, le jour même où je t’avais écrit, sans savoir ce qui m’attendait, mon père me fit venir dans son appartement. Tu n’as jamais vu mon père que dans le monde, ou devant mademoiselle de Maran qui lui impose beaucoup ; il n’a dû te paraître que grave et compassé. Ici il est habitué à dominer, à parler en maître inflexible ; sa figure a une expression toute différente ; elle est dure, presque menaçante.

— « Vous n’avez pas de fortune » — me dit-il, — « il faut songer à vous marier. J’ai trouvé pour vous un parti inespéré, un jeune homme qui a plus de soixante mille livres de rentes, sans les espérances, et ce qu’il peut gagner encore ; car il gère sa fortune à merveille, et entend parfaitement les affaires. Il viendra ici, demain, avec sa mère. Arrangez-vous pour lui plaire ; car, si vous lui plaisez, le mariage est conclu. Surtout soyez simple et gaie, car M. Sécherin est un garçon de bonne humeur, tout rond et sans façons. Réfléchissez à cela ; je vous laisse. Il faut que j’aille à ma ferme des Sanlaies. En vérité, cette malheureuse propriété me coûte plus qu’elle ne me rapporte, et vous avez besoin de faire un bon mariage pour ne pas être, après ma mort, dans une position pire que médiocre. »

« Sans me donner le temps de lui répondre un mot, mon père me laissa seule.

« Oh ! mon amie, je ne saurais te dire dans quel abîme je crus tomber en entendant ces fatales paroles, moi qui, tu le sais, avais toujours rêvé comme toi cette ravissante union des âmes qui tôt ou tard se rencontrent, parce qu’elles se cherchent involontairement !!

« Je passai la nuit dans les larmes… Tu me demanderas peut-être, bonne et tendre sœur, si j’avais oublié la généreuse promesse que tu m’avais faite de partager ta fortune avec moi pour me faciliter un mariage selon mon cœur, ou bien de me garder près de toi si je ne trouvais pas un parti qui me convînt. Non, Mathilde, non, je ne l’avais pas oubliée, cette promesse ! Je savais que ton cœur était assez grand, assez noble pour la tenir… C’est pour cela que j’ai voulu rendre impossible le sacrifice que tu voulais faire à notre amitié.

« Dans ton dévouement, aussi admirable qu’irréfléchi, tu n’avais pas songé à l’avenir ; quoique considérables, tes biens ne sont pas assez grands pour pouvoir ainsi se diviser ; avec ta fortune entière, tu es une très riche héritière, et tu peux prétendre aux plus brillants partis. En la partageant, tu diminues tes chances de moitié.

« Sans doute, rester éternellement près de toi a été un de mes plus doux rêves de jeune fille. Mais qui sait si cet arrangement conviendrait à celui que tu choisiras pour mari ? Grand Dieu ! plutôt mourir mille fois que d’être la cause du plus léger dissentiment entre vous ! Je me suis donc résignée, Mathilde. J’ai trouvé la force de cette résignation dans mon amitié, dans mon dévouement pour toi. Je bénirai toujours le sacrifice que je me suis imposé, en songeant qu’il a peut-être pu contribuer à assurer ton bonheur à venir.

« Hélas ! il m’en a bien coûté, j’ai pleuré, amèrement pleuré pendant la nuit qui précéda ma première entrevue avec M. Sécherin…

« Oserai-je tout te dire, tout t’avouer ? Un moment une pensée impie suspendit mes larmes… La maison de mon père est entourée de fossés profonds et remplis d’eau… je me levai… j’ouvris ma fenêtre… je mesurai la hauteur ; la lune était voilée, il faisait une triste nuit d’hiver, le vent gémissait, je m’avançai hors du balcon… je me dis : Mieux vaut une mort criminelle, sans doute, que la vie qui m’attend. Un vertige me saisit ; j’allais peut-être céder à une funeste inspiration, lorsqu’en donnant un dernier adieu à tout ce qui m’était cher, c’est-à-dire à toi, ton souvenir m’arrêta… Grâce encore te soit rendue, Mathilde ! car ce souvenir m’a retenue au bord du précipice, il m’a empêchée de commettre un crime, je me suis résignée à vivre…

« Hélas ! cette vie que je dispute si faiblement aux chagrins qui m’accablent, cette vie ne s’usera-t-elle pas bientôt ? Oh ! si cela était… si cela était ! je bénirais Dieu de me retirer de cette terre, j’accepterais la mort comme la douce récompense de tant de sacrifices que j’ai eu le courage de m’imposer.

« Le jour fatal arriva ; le matin mon père me renouvela les plus sévères recommandations. J’attendis avec autant d’accablement que de morne indifférence le moment où l’on me présenterait M. Sécherin.

« Malgré les ordres, malgré la colère de mon père, je n’avais mis aucun soin à ma toilette. Comment en aurais-je eu le courage, mon Dieu ! j’avais une robe noire, véritable emblème des pensées qui navraient mon cœur. Mes cheveux tombaient en longues boucles autour de mon visage pâli par la douleur ; je me tenais si courbée sous le poids du malheur qui m’accablait, que mademoiselle de Maran m’aurait bien certainement cette fois et avec raison reproché d’être contrefaite.

« Mon père eut beau me gronder durement, m’ordonner de me tenir mieux, de prendre un air souriant, je ne pus vaincre les pénibles émotions qui m’agitaient ; c’est à peine si je tournai la tête lorsqu’on annonça M. Sécherin et sa mère.

« M. Éloi Sécherin est, m’a dit mon père, intéressé dans de très grandes entreprises, et il augmente chaque jour la fortune que lui a laissée son père. Je ne puis rien te dire de sa figure, de ses manières… car je vois tout à travers un nuage de larmes.

« Il faut que M. Éloi Sécherin ne soit pas difficile à séduire ; car après son départ, mon père est venu me complimenter en m’assurant que j’avais été parfaitement bien, simple, sans prétention, et que M. Sécherin et sa mère étaient partis enchantés de moi.

« Je suis comme une pauvre prisonnière dont les yeux n’ont pas encore pu percer les ténèbres glacées qui l’environnent. J’ai bien vu vaguement M. Sécherin et sa mère ; mais il ne m’en reste qu’une idée indécise. J’ai entendu plutôt qu’écouté quelques paroles. J’ai répondu machinalement. Aujourd’hui même on signe le contrat, et mon mariage doit avoir lieu demain ou après demain, je crois.

« Quand tu me reverras à Paris dans quelques jours, tu ouvriras tes bras à la pauvre victime obéissante et résignée…

« Pardon, pardon, Mathilde, d’être venue ainsi attrister ton bonheur ; car un secret pressentiment me dit que tu es heureuse, qu’il t’aime. Tu le sais depuis le jour de l’ambassade. Je te l’ai dit. — Tu l’aimeras, — et je suis sûre qu’il s’est rendu digne de cet amour en le partageant.

« Heureuse, heureuse Mathilde, il me faut la certitude de ta félicité pour m’aider à supporter la vie que je vais misérablement traîner, jusqu’à ce que le fardeau de mes souffrances soit trop lourd ; alors je quitterai cette terre de douleur, en jetant un dernier regard de regret sur les années passées près de toi…

« Adieu, adieu, bien tristement adieu ! Un moment j’avais songé à te supplier à genoux de venir assister à mon mariage pour me donner du courage ; mais j’ai bientôt réfléchi que ta vue, en me rappelant tout ce que je perds en me séparant de toi, m’ôterait le peu d’énergie qui me reste… Adieu encore ! Quand tu reverras ta pauvre Ursule, tu auras, j’en suis sûre, bien de la peine à la reconnaître.

« Adieu… oh ! adieu ! la force me manque ; j’ai tant pleuré ! À toi de cœur, du plus profond de mon cœur.

« Ursule d’Orbeval. »

Après la lecture de cette lettre, je fus atterrée.

La pensée qui domina toutes les autres fut qu’Ursule, ainsi qu’elle me le disait, s’était littéralement sacrifiée pour moi, dans la crainte de nuire à mon mariage avec M. de Lancry.

Je fis ensuite presque un reproche à ma cousine d’avoir si peu compté sur mon affection et sur celle de Gontran. Il régnait dans sa lettre une tristesse si profonde, un abattement si désespéré, que je fus sérieusement inquiète, redoutant pour elle une maladie de langueur.

Il me restait un espoir. Le mariage d’Ursule pouvait être retardé. Je me décidai le lendemain à prier Gontran de partir aussitôt pour la Touraine : il devait supplier ma cousine de rompre cette union, et l’assurer lui-même que l’exécution de mes promesses ne pouvait apporter la moindre difficulté à notre mariage.

Je passai une nuit très agitée. Le lendemain j’attendis avec la plus grande anxiété l’arrivée de Gontran. Il n’hésita pas un moment à aller trouver Ursule ; il comprit, il partagea mes craintes, mes espérances avec une adorable bonté. Il ne devait pas parler de ce voyage à mademoiselle de Maran, et partir à l’instant même. Nous causions de ce sujet si intéressant pour moi, lorsqu’on m’apporta une lettre de Tours…

Le mariage d’Ursule était accompli. Sa lettre de la veille avait eu plusieurs jours de retard.

Cette nouvelle m’accabla. J’étais si heureuse de mon amour pour Gontran que je comprenais mieux encore combien le sort d’Ursule devait être cruel.

Ma cousine m’annonçait qu’elle arriverait sous peu de jours avec son père et son mari, et qu’elle passerait la fin de l’hiver à Paris.

Je remontai chez moi pour écrire à ma cousine, pour me plaindre de son manque de confiance, pour la consoler, pour l’encourager, pour faire enfin ressortir à ses yeux les avantages que sa douleur l’empêchait peut-être d’apercevoir dans cette union qui la désespérait.

Je trouvai Blondeau dans mon cabinet d’étude ; elle me dit qu’une femme, qui venait me solliciter pour une bonne œuvre, demandait à me parler.

Je lui dis de la faire entrer.

Je vis une femme enveloppée d’un manteau, et dont les traits étaient absolument cachés par un voile noir très épais.

Blondeau sortit.

Cette femme laissa tomber son manteau, releva son voile.

C’était madame la duchesse de Richeville.