Martin l’enfant trouvé ou les mémoires d’un valet de chambre/VIII/10

X


CHAPITRE X.


basquine.


Basquine, très-surprise à la vue de Leporello, lui dit :

— J’avais défendu absolument ma porte… que voulez-vous ?

— Je demande bien pardon à Madame, — répondit Leporello, — mais c’est une lettre très-pressée, très-importante, a-t-on dit, et j’ai cru pouvoir… malgré les ordres de Madame…

— Donnez cette lettre, — dit Basquine, et elle la prit.

Une légère rougeur couvrit aussitôt le pâle visage de la jeune fille, qui parut d’abord en proie à une vive inquiétude ; puis, après un moment de réflexion, elle sembla non seulement rassurée, mais triomphante, et s’adressant à Leporello :

— Vous pouvez laisser entrer la personne qui vous a remis ce billet.

Leporello sortit.

— C’est insupportable, — dit Scipion en frappant du pied, — on ne peut pas être seul avec vous…

— Vite, vite, — dit Basquine en se levant et allant ouvrir la porte d’un petit boudoir qui communiquait au salon.

— Entrez là…

— Moi ? — dit Scipion stupéfait, — et pourquoi ?

— Voulez-vous être présent à mon entretien avec votre père ?

— Mon père ?…

— Cette lettre est de lui, elle est on ne peut plus pressante, il demande à me voir à l’instant.

— Ah !… tu me crois, à présent, — s’écria Scipion avec une expression d’orgueil et de joie ! et il voulut enlacer Basquine entre ses bras.

— Vous êtes ce qu’il y a de plus diabolique au monde — dit Basquine, en poussant doucement Scipion dans le boudoir. — Avoir réellement amené votre père à cette démarche… c’est inouï, étourdissant !

— J’ai tenu ma parole, — s’écria Scipion, l’œil et la joue en feu, saisissant les deux mains de Basquine, — maintenant à ton tour.

— Est-ce que je n’ai pas encore plus envie que toi… de la tenir, cette parole… mauvais démon ? — murmura Basquine à l’oreille de Scipion, et si près que ses lèvres effleurèrent la joue et les cheveux du jeune homme ; puis elle ajouta :

— Vite, cache-toi… c’est ton père.

Et elle referma brusquement la porte du boudoir sur le vicomte.

La brusque arrivée du comte Duriveau, quoiqu’elle l’attendît prochainement d’après la promesse de Scipion, avait d’abord alarmé Basquine… en cela que cette rencontre du vicomte et de son père pouvait amener de fâcheux résultats pour les projets qu’elle méditait ; aussi fut-elle un moment sur le point de refuser de recevoir M. Duriveau, chose fort simple et parfaitement possible ; mais, réfléchissant bientôt que quelque issue, ou quelque caractère qu’il dût avoir, cet entretien, auquel Scipion assisterait invisible, pouvait peut-être admirablement servir ses idées de vengeance et de haine, elle s’empressa de recevoir le comte.

Au moment donc où elle venait de refermer Scipion dans le boudoir, M. Duriveau fut annoncé par Leporello.

À un coup d’œil furtif, investigateur, que le comte jeta autour de lui en entrant, Basquine se dit :

— Il croit que son fils est ici…

Puis, voyant le regard de M. Duriveau s’arrêter une seconde sur la porte du boudoir, elle se dit encore :

— Il se doute que Scipion est là… Tant mieux.

Elle ne se trompait pas. Le père de Scipion était venu ce jour-là et à cette heure-là, parce qu’il savait son fils chez Basquine, car, le suivant de loin, il l’avait vu entrer chez elle.

La physionomie du comte avait une expression si sévère, si hautaine, si dure, que Basquine comprit soudain qu’il cachait quelque arrière-pensée sous l’apparente condescendance dont il faisait preuve en subissant pour ainsi dire l’audacieuse volonté de son fils.

Le comte, loin de paraître sensible à l’éblouissante beauté de Basquine, ne put retenir, en la voyant, un tressaillement d’aversion… presque de terreur… car, malgré lui, il se rappela la prophétique menace de Claude Gérard, et la haine infernale dont Basquine était possédée contre Scipion et ceux de sa race, révélations que le comte devait aux Mémoires de Martin ; mais bientôt il se rassura, en songeant qu’il venait dans cette maison avec la certitude de sauver son fils de l’influence de cette femme dangereuse.

Basquine jeta un imperceptible regard sur la porte du boudoir où elle venait d’enfermer Scipion, montra du geste un siège au comte, et lui dit avec une tranquillité parfaite :

— Veuillez vous donner la peine de vous asseoir, Monsieur.

Le comte ne prit pas de siège, s’approcha de la cheminée, où il se tint debout, et, de là, dominant Basquine de toute sa hauteur, il lui dit d’une voix qu’il tâchait de rendre égale et calme :

— Vous vous attendiez sans doute à ma visite. Madame, car j’ai pu arriver jusqu’à vous ?

— En effet, Monsieur… j’espérais avoir le plaisir de vous voir.

— Expliquons-nous clairement, Madame, — dit rudement le comte, — j’ai voulu que mon fils épousât Mlle Wilson… mon fils m’a déclaré hier encore qu’il se refusait positivement à ce mariage, si je ne venais pas… moi… son père… (et le comte appuya sur ces mots avec un courroux amer) m’entendre avec vous

— Mais oui, Monsieur, — dit Basquine, d’un ton sardonique et altier, — j’ai cette prétention-là…

— Ah ! vous avez cette prétention-là… — reprit M. Duriveau, en se contenant à peine, — ainsi ce sont des conditions… que vous comptez m’imposer ?

— Nécessairement, Monsieur, et vous venez vous en informer de si bonne grâce… que j’éprouve un véritable plaisir à vous les faire connaître… les voici… D’abord je…

— Assez, Madame ! — s’écria impétueusement le comte, — assez ! Puisque vous me supposez assez lâche, assez vil pour accepter une telle ignominie… j’ai hâte de vous détromper.

— Alors… Monsieur… — reprit Basquine avec un sang-froid parfait, — tout en appréciant comme je le dois, l’honneur de votre visite… puis-je savoir ce qui me vaut cette faveur ? car je ne m’explique plus votre présence chez moi.

Le comte, dominé par l’ironique impassibilité de Basquine, tâcha de conserver du calme et reprit :

— Pour vous expliquer le but véritable de ma visite, Madame, il faut reprendre les choses… d’un peu loin.

— Je vous écoute, Monsieur.

— Madame, j’étais l’ami intime d’un homme que vous avez poussé au désespoir, à la mort… terrible extrémité… où vous voudriez sans doute jeter mon fils…

— Je ne me répète jamais… Monsieur, — répondit Basquine avec un accent d’effrayante raillerie.

— Je crois, en effet, Madame, à l’abondance de votre imagination… Je reprends… j’étais donc l’ami intime d’une de vos victimes : c’est vous nommer le malheureux marquis d’Henneville…

— Et c’est dire, — reprit Basquine en interrompant le comte, — que vous êtes mon ennemi…

— Implacable… Madame.

— Cette franchise… me plaît…

— Ce qui vous plaira peut-être moins, Madame, c’est d’apprendre que je sais de quelle haine acharnée vous poursuivez mon fils… Cette haine, — ajouta le comte en haussant la voix, afin d’être entendu de Scipion, — cette haine date de bien des années déjà…

— Elle date de l’enfance, n’est-ce pas ? — dit Basquine le plus indifféremment du monde. — L’enfant mendiant de la forêt de Chantilly… la petite chanteuse de Sceaux… la pauvre figurante des Funambules… c’était moi. Est-ce là ce terrible secret ?

Le comte resta déconcerté. Il s’attendait à écraser Basquine sous cette révélation… elle la prévenait, pressentant ce qui allait suivre ces paroles de M. Duriveau, et regardant comme plus adroit d’aller au devant de ce reproche, quoiqu’elle ignorât de quelle manière le comte était instruit de ces particularités.

Basquine poursuivit donc, profitant du désappointement de M. Duriveau :

— Votre fils ne m’a pas reconnue dans nos diverses rencontres, n’est-ce pas ? Mais moi, qui ai probablement la mémoire… de la haine… je n’ai pas oublié ce méchant petit vicomte… et dès que l’occasion s’est présentée… j’ai traîtreusement enlacé dans mes filets ce pauvre cher enfant, qui est l’innocence et la candeur même, comme chacun sait..... afin d’en tirer quelque vengeance… féroce… inouïe… Est-ce bien cela, Monsieur ? Ne sont-ce pas là mes détestables projets ?

— C’est parfaitement cela, Madame, — dit M. Duriveau en reprenant son sang-froid.

— Eh bien… Monsieur ?

— Eh bien ! Madame, je ne veux pas que vous exaltiez davantage l’espèce de monomanie de dépravation dont mon fils est possédé, et dont je le guérirai, moi, radicalement et rudement…

Ce disant, le comte haussa la voix afin d’être entendu de Scipion, et poursuivit d’un accent aussi élevé :

— En un mot, Madame, je ne veux pas que mon fils soit votre victime, pas même votre dupe… malgré ses précieuses dispositions pour ce rôle ridicule…

À ces mots de M. Duriveau, un éclair de joie diabolique illumina les yeux de Basquine, qu’elle tourna malgré elle vers le boudoir où était enfermé Scipion.

Puis elle reprit :

— Je crains, Monsieur… que votre fils ne soit pas parfaitement d’accord avec vous sur le rôle… peu flatteur… que, selon vous, il joue auprès de moi…

— C’est probable. Madame ; mon fils est très-dépravé, sans doute ; mais il est malheureusement aussi très-crédule, très-aveugle… et très-niais à votre endroit. Mais, je me charge de lui ouvrir les yeux, et de le déniaiser… toujours à votre endroit…

— Scipion crédule ? aveugle ? niais ? — reprit Basquine en souriant, — mais savez-vous. Monsieur, que vous me rendriez très-fière ? Circé l’enchanteresse ne transformait pas plus complètement ses amoureux… Cependant, malgré les sollicitations de mon amour-propre, je ne puis accepter votre bienveillante accusation et la toute-puissance que vous m’accordez ; je demeurerai persuadée, si vous le permettez… que Scipion est resté, malgré moi… ce que je l’ai toujours vu, le plus charmant, le plus hardi, le plus spirituel jeune homme que je connaisse. Peut-être allez-vous prétendre à votre tour, Monsieur, que je m’aveugle sur lui… c’est possible… selon vous… il s’aveugle bien sur moi !

— Vous, aveuglée ?… non, non, Madame, — reprit le comte avec une ironie amère, — vos yeux sont aussi perçants qu’ils sont beaux… Vous saviez parfaitement où vous conduisiez mon fils, en exigeant de ce malheureux fou qu’il eût l’audace de me déclarer que je devais vous considérer comme l’unique arbitre de mon mariage et du sien… Eh bien ! Madame, mon mariage et celui de mon fils auront lieu… ils auront lieu… malgré vous… malgré lui… s’il le faut… en un mot, Scipion vous échappera malgré vous… et malgré lui, s’il osait me désobéir.

— Voyons, Monsieur le comte, — dit Basquine avec un accent finement railleur, digne de notre immortelle Célimène, — vous qui êtes un homme de bonne compagnie, un homme d’infiniment de tact et d’esprit…

— Madame…

— Rassurez, de grâce, votre modestie effarouchée, je vais terminer par quelque chose de moins flatteur… peut-être… Comment, vous dirai-je ? un homme de bon goût et qui sait son monde comme vous le savez, peut-il venir parler de mariage forcé ? pourquoi, je vous prie, ces airs de Géronte éperdu venant réclamer son fils chez quelque Cidalyse, ou plutôt, pour monter à votre lugubre diapason… dirait-on pas que je veux sacrifier ce candide Scipion sur l’autel de quelque divinité infernale ? Voyez un peu combien je suis vaniteuse, — ajouta Basquine en riant à demi, — il me semble à moi… qu’en me sacrifiant Scipion… je ferais beaucoup de jaloux. Croyez-moi… vous aurez peine à me faire passer pour quelque terrible Barbe-Bleue. Vrai, je n’épouvante pas trop… le monde… Allons, Monsieur le comte, allons, ne dérogez donc pas en faisant ainsi le bourgeois… redevenez ce sceptique et spirituel jeune-père qui, vraiment grand seigneur, a galamment élevé son fils comme M. le duc de Richelieu avait élevé M. de Fronsac.

— Il ne s’agit ici, Madame, ni de M. de Richelieu ni de M. de Fronsac… je ne suis pas un grand seigneur… mon père était un aubergiste enrichi, mon fils est le petit-fils d’un aubergiste enrichi.

— Eh bien ! Monsieur, qu’à cela ne tienne ; c’est vous qui, par vos grandes manières, faites de M. votre père un grand seigneur. Dans votre famille, au lieu de descendre… la noblesse remonte… comme dans je ne sais plus quel pays… voilà tout… Mais, de grâce, ne compromettez plus cet esprit moqueur, sceptique et brillant dont vous avez si généreusement donné le secret à votre fils… et surtout plus de ces imaginations bourgeoises, n’est-ce pas ?

— Il me sera difficile, Madame, d’accéder à votre désir, — reprit le comte, presque mis hors de lui par la doucereuse insolence de Basquine. — Mon fils a pu rêver qu’il était le fils d’un grand seigneur… Moi, aussi… j’ai pu faire ce sot rêve… Mais, depuis quelques jours, — ajouta gravement le comte, — je me suis éveillé… et je me charge de réveiller aussi mon fils un peu en sursaut… sans doute ; mais, du moins, je charmerai son réveil par un bon et honnête mariage…

— Et Scipion consentira ?

— Oui, Madame…

— J’en doute.

— Moi, j’en suis certain.

— Vous possédez, Monsieur, quelque miraculeux talisman, quelque philtre prodigieux ?

— En effet… et ce talisman, ce philtre… le voici, — dit le comte en tirant un papier de sa poche, qu’il montra à Basquine avec un sourire de dédain et de triomphe.

— Et cet inestimable talisman, quel bon génie, quelle fée tutélaire est descendue de son empyrée pour vous faire ce don, Monsieur ?

— Ce génie tutélaire, Madame, est tout simplement un magistrat.

— Un magistrat ?

— Mon Dieu ! oui… vous voyez que je deviens bourgeois effréné. J’ai donc… bourgeoisement avoué à ce magistrat les craintes sérieuses que m’inspirait l’avenir de mon fils, et les actions indignes qu’il avait déjà commises, à l’instigation d’une femme exécrable… Usant alors de mon droit de père j’ai obtenu de ce magistrat qui a conféré de ma demande avec le procureur du roi, j’ai obtenu l’autorisation nécessaire pour faire enfermer mon fils… Cette autorisation est ce talisman que je viens de vous montrer. Si mon fils ose se refuser d’obéir aveuglément à tout ce que j’exigerai de lui… aujourd’hui… tout-à-l’heure… demain… quand je voudrai… il sera conduit dans une maison de correction.

À ce coup imprévu, Basquine tressaillit ; puis reprenant bientôt son sang-froid sardonique, elle dit :

— C’est fort bien joué… j’en conviens, Monsieur ; Scipion n’est pas de force à lutter contre vous… le trait est piquant.

— Vous le voyez, Madame, — reprit le comte triomphant. — J’avais raison de vous dire que je vous arracherais mon fils malgré vous… et, s’il le fallait, malgré lui.

— Vous m’aviez dit aussi que son mariage et le vôtre…

— Seraient assurés en même temps. Certainement… et toujours par la grâce de mon talisman… car je dirai à mon fils : Ou vous épouserez Mlle Wilson sans condition… ou demain vous irez en prison… et vous concevez, Madame, que de sa part l’hésitation ne sera guère possible. En tous cas, d’ailleurs, mes précautions sont prises… parfaitement prises… Qu’il se marie ou non… moi, Madame, je me marie, et puisque vous avez cité M. de Richelieu, je ferai une dernière fois le grand seigneur, pour dire à mon fils ce que le père de M. de Fronsac disait à ce mauvais sujet.

— Et que disait M. de Richelieu à son fils, Monsieur ?

« — Monsieur de Fronsac, — lui disait-il, — je me marie dans l’espérance d’avoir un fils qui ne vous ressemblera pas du tout. »

— De mieux en mieux… Encore une fois, Monsieur, ce pauvre Scipion trouve en vous un rude jouteur… vous l’écrasez… Mais maintenant pourrai-je savoir… quel est le but de votre visite ? Vous avez des sentiments trop élevés, vous êtes trop généreux… pour venir seulement ici afin de triompher à mes yeux, et de vous manifester à une humble fille comme moi dans l’éclat olympien de votre toute-puissance paternelle… dont un des plus beaux privilèges me paraît être celui de faire emprisonner les gens… ou de les marier de force. Cela sent bien un peu son cadi… Mais enfin, le tour est cruel et bien joué… Cependant, Monsieur, si bien joué qu’il soit, ce n’est pas, je pense, pour me le voir applaudir que vous me faites l’honneur de venir chez moi.

— En effet, Madame… il m’a fallu un motif fort grave, pour m’amener chez vous… pour m’abaisser jusqu’à vous donner, même pendant un instant, la pensée que j’étais assez misérable pour venir écouter vos insolentes prétentions…

— Et ce motif, Monsieur ?

— Madame… — reprit le comte sans répondre à cette question, — mon fils est ici.

— Monsieur… — répondit Basquine en feignant la surprise et l’embarras.

— Je vous dis que mon fils est ici…

— Mais, Monsieur…

— Il est là, — dit M. Duriveau, en faisant un pas vers la porte du boudoir, — il est là… j’en suis certain.

— Oui… il est là, — dit Basquine à voix basse et simulant une grande frayeur, — mais silence… je vous en conjure… je tremble qu’il ne vous ait entendu…

— J’ai parlé haut… afin qu’il m’entendît, — ajouta le comte en faisant un nouveau pas vers la porte, — je le savais là depuis le commencement de cet entretien.

— Monsieur ! — s’écria Basquine en paraissant de plus en plus épouvantée, et se jetant au devant du comte, — Scipion… doit être… dans une irritation profonde…

— Vraiment ?…

— Oh !… prenez garde… Monsieur…

— Que je prenne garde à l’irritation de M. Scipion ? — dit M. Duriveau en souriant avec dédain.

— Je vous dis, Monsieur… qu’à votre vue, il ne se possédera plus…

— Madame, laissez-moi ouvrir cette porte…

— Ah ! Monsieur… arrêtez !! — dit Basquine en joignant ses mains tremblantes et paraissant éperdue. — Scipion serait déjà là s’il ne redoutait pas la violence de son premier mouvement.

— J’aurai, si vous le permettez, Madame, le courage de braver ce terrible premier mouvement.

— Monsieur, de grâce !

— Madame… une dernière fois…

À ce moment, la porte du boudoir s’ouvrit brusquement.

Scipion y parut.

Il resta un instant sur le seuil, comme s’il eût voulu vaincre et refouler les terribles ressentiments qu’il éprouvait à la vue de son père.

— Les voilà en présence, — se dit Basquine, en jetant un regard de joie féroce sur le comte et sur son fils, — Scipion la révolte et la haine au cœur… son père, la menace à la bouche… Ils sont à moi !