Manuel des principes de musique (Fétis)/01

G. Brandus et S. Dufour (p. 3-4).

CHAPITRE PREMIER.

DES SONS.


1. Quand un homme, ou une femme, ou un enfant, ou un oiseau chantent ; quand on frotte les cordes d’un violon ou d’un autre instrument avec un archet ; quand on souffle dans une flûte, une clarinette, etc. ; quand on pince les cordes d’une guitare ou d’une harpe ; enfin, quand on frappe une cloche avec son battant ou avec un marteau, l’oreille de tout individu qui n’est pas sourd entend de certains bruits qu’on appelle sons.

2. L’habitude qu’on a d’entendre chanter, ou jouer d’un instrument quelconque, fait qu’on parvient à discerner une voix d’une autre, un violon d’une flûte ou d’une clarinette, une guitare d’une trompette. La différence qui sert à faire distinguer la nature des voix ou des instruments qui rendent des sons s’appelle le timbre des sons[1]

3. Mais ce n’est pas seulement par le timbre que les sons se distinguent ; car une même voix, un même instrument en produisent un assez grand nombre qui ne se ressemblent pas. Ainsi, quand quelqu’un chante ce qu’on appelle un air, la Marseillaise, par exemple, il ne fait pas toujours entendre le même son, comme ferait une cloche, qui n’a en effet qu’un son, et par laquelle on ne saurait faire entendre un air.

La grosse voix de certains hommes rend des sons bien différents de ceux de la voix d’une femme ou d’un enfant, et la voix d’un enfant ou d’une femme en produit aussi de très-différents de ceux de la voix d’un rossignol. Les sons d’une grosse et longue corde de basse ne ressemblent pas à ceux d’une corde mince et courte de violon.

4. Les sons d’une grosse voix d’homme sont graves en comparaison de ceux d’une voix de femme ou d’enfant ; les sons des voix de femmes ou d’enfants sont aigus à l’égard de ceux des voix d’hommes. Les sons d’une voix de rossignol sont beaucoup plus aigus que ceux des voix de femmes et d’enfants.

5. Entre le son le plus grave d’une voix d’homme et le plus aigu d’une voix de femme, il y a une multitude de sons plus ou moins graves, plus ou moins aigus.

6. Les différences entre les sons plus ou moins graves et plus ou moins aigus s’appellent intonations des sons. La suite de tous les sons, depuis le plus grave jusqu’au plus aigu, se nomme l’échelle des sons.

7. Les combinaisons des sons plus ou moins graves ou plus ou moins aigus composent ce qu’on appelle la musique.

8. Les combinaisons de la musique sont de deux espèces : dans la première, les différentes intonations des sons se succèdent dans de certaines conditions de convenance pour l’oreille : cette combinaison s’appelle mélodie.

Dans la deuxième espèce de combinaison, plusieurs sons se font entendre ensemble, et forment des accords dont les suites produisent l’harmonie.

9. Quand quelqu’un chante un air ou une chanson quelconque, on entend de la mélodie. Si la voix est accompagnée par un instrument ou par plusieurs qui font entendre des accords combinés d’une manière agréable avec elle, on a la réunion de la mélodie et de l’harmonie, c’est-à-dire la musique proprement dite.



  1. Le timbre des instruments se diversifie par leur mode d’ébranlement de l’air, par leur forme, leurs proportions, et aussi par la manière dont on en joue. Par exemple, une corde qu’on pince a un autre timbre que celle qu’on joue avec un archet.