Méthode d’équitation basée sur de nouveaux principes/Piaffer

XXV

DU PIAFFER.



Tous les chevaux peuvent piaffer régulièrement ; mais ils ne peuvent, tous, avoir la même élévation, la même élégance. Je distingue trois genres de piaffer : le piaffer lent, le piaffer précipité, le piaffer dépité. Le piaffer est régulier, lorsque chaque bipède diagonale se lève et retombe sur le sol à des intervalles égaux. L’animal ne doit pas se porter plus sur la main que sur les jambes du cavalier, afin de conserver la justesse de la balance hippique.

Lorsque le cheval est préparé par le rassembler, il suffit, pour amener un commencement de piaffer, de communiquer au cheval, avec les jambes, une vibration légère d’abord, mais souvent réitérée. J’entends par vibration une surexcitation de forces, que le cavalier doit toujours régler.

Une fois la mobilité des jambes obtenue, on pourra commencer à en régler, à en distancer la cadence. Ici encore, je chercherais vainement à indiquer avec la plume le degré de délicatesse nécessaire dans les procédés du cavalier, puisque ses effets doivent se reproduire avec une grande justesse et un à-propos sans égal. C’est par l’appui alterné des deux jambes qu’il arrivera à prolonger les balancements du corps du cheval, de manière à le maintenir plus longtemps sur l’un ou l’autre bipède. Il saisira le moment où le cheval se préparera à prendre son appui sur le sol, pour faire sentir la pression de sa jambe du même côté et augmenter l’inclinaison de l’animal dans le même sens. Si ce temps est bien saisi, le cheval se balancera lentement, et la cadence acquerra cette élévation si propre à faire ressortir toute sa noblesse et toute sa majesté. Ces temps de jambes sont difficiles et demandent une grande pratique ; mais leurs résultats sont trop brillants pour que le cavalier ne s’efforce pas d’en saisir les nuances.

Le mouvement précipité des jambes du cavalier accélère aussi le piaffer. C’est donc lui qui règle à volonté le plus ou moins de vitesse de la cadence. Le travail du piaffer n’est brillant et complet que lorsque le cheval l’exécute sans répugnance, ce qui a toujours lieu quand l’harmonie du poids et des forces, utile à la cadence, se conserve.



XXVI

DIVISION DU TRAVAIL.


Je viens de développer tous les moyens à employer pour compléter l’éducation du cheval ; il me reste à dire comment l’écuyer devra diviser son temps pour lier entre eux les divers exercices et pour passer du simple au composé. 50 jours de travail à 2 leçons par jour d’une demi-heure, trois quarts d’heure au plus suffiront pour amener le cheval le plus neuf à exécuter régulièrement tous les exercices qui précèdent. Je tiens à deux courtes leçons, l’une le matin, l’autre dans l’après-midi ; elles sont nécessaires pour obtenir d’excellents résultats. On dégoûte un jeune cheval en le tenant trop longtemps sur des exercices qui le fatiguent d’autant plus que son intelligence est moins préparée à comprendre ce qu’on exige de lui.

Je conseille de donner deux courtes leçons par jour, parce que, selon moi, un intervalle de vingt-quatre heures entre chaque leçon est trop long pour que l’animal puisse bien se rappeler le lendemain ce qu’il a appris la veille.

En établissant l’ordre du travail tel qu’il se trouve dans le tableau annexé ci-après, il est bien entendu que je me base sur les dispositions des chevaux en général ; un écuyer, doué de quelque tact, comprendra bien vite les modifications qu’il devra apporter dans la pratique, suivant la nature particulière de son élève. Tel cheval, par exemple, exigera plus ou moins de persistance dans les flexions ; tel autre dans le reculer ; avec le cheval froid et apathique, il faudra employer l’éperon avant le temps que j’ai indiqué. Tout ceci est affaire d’intelligence ; ce serait offenser mes lecteurs que de les supposer incapables de suppléer aux détails qu’il est d’ailleurs impossible de préciser. On comprend facilement qu’il existe des chevaux irritables et mal conformés dont les dispositions défectueuses ont été accrues par l’influence d’une mauvaise éducation première. Avec de tels sujets, on devra nécessairement mettre plus de persistance dans le travail des assouplissements et du pas. Bans tous les cas, quelles que puissent être les modifications légères que nécessitent les différences dans les dispositions des sujets, je persiste à dire qu’il n’est pas de chevaux dont l’éducation ne puisse être faite, en un mois et demi, deux mois. Ce temps suffira toujours pour donner aux forces du cheval l’aptitude nécessaire à l’exécution de tous les mouvements ; le fini de l’éducation dépendra ensuite de la justesse de tact du cavalier.