Mémoires posthumes de Braz Cubas/Chapitre 142

Traduction par Adrien Delpech.
Garnier Frères (p. 447-448).


CXLII

Je n’irai pas


Tandis qu’il remettait le livre sur le rayon, je relisais le billet. Au dîner, voyant que je parlais peu, que je mâchais les mets sans me décider à avaler les bouchées, que je considérais le coin de la salle, le bout de la table, une assiette, une chaise, une mouche invisible, il me dit :

— Tu as quelque chose ? Je parie que c’est cette lettre ?…

Et réellement j’étais furieux de cette demande de Virgilia. J’avais donné à Dona Placida cinq contos de reis. Je doute que personne eût été aussi généreux que moi, cinq contos ! Et qu’en avait-elle fait ? Naturellement elle les avait jetés par la fenêtre en faisant la noce, et maintenant, en route pour l’hôpital ! Elle pouvait bien y aller toute seule. On meurt partout. De plus je ne savais où trouver cette impasse des Escadinhas. Mais le nom seul indiquait un coin obscur de la ville. Il me fallait aller là, attirer l’attention des voisins, battre à la porte, etc. Au diable ! Je n’y vais pas.