Mémoires extraits des recueils de l’Académie de Turin/Solution d’un Problème d’Arithmétique


SOLUTION
D’UN
PROBLÈME D’ARITHMÉTIQUE.


(Miscellanea Taurinensia, t. IV, 1766-1769.)

Le problème que j’entreprends de résoudre dans ce Mémoire est celui-ci :

Étant donné un nombre quelconque entier et non carré, trouver un nombre entier et carré tel, que le produit de ces deux nombres augmenté d’une unité soit un nombre carré.

Ce problème est un de ceux que M. Fermat avait proposés, comme une espèce de défi, à tous les Géomètres anglais, et particulièrement à M. Wallis, qui a été le seul, que je sache, qui l’ait résolu, ou au moins qui en ait publié la solution (voyez le Chapitre XCVIII de son Algébre et les Lettres XVII et XIX de son Commercium Epistolicum) : mais la méthode de ce savant Géomètre ne consiste que dans une espèce de tâtonnement, par lequel on n’arrive au but que d’une manière assez incertaine, et sans savoir même si l’on y arrivera ; d’ailleurs il faut démontrer surtout que la solution du problème est toujours possible, quel que soit le nombre donné, proposition qui est généralement regardée comme vraie, mais qui n’a pas encore été établie, que je sache, d’une manière solide et rigoureuse ; il est vrai que M. Wallis a prétendu la prouver, mais par un raisonnement que les Mathématiciens trouveront bien peu satisfaisant, et qui n’est, ce me semble, dans le fond qu’une espèce de pétition de principe (voyez le Chapitre XIX de son Algèbre). Il s’ensuit de là que le problème dont il s’agit n’a pas encore été résolu d’une manière suffisante et qui ne laisse rien à désirer ; c’est ce qui m’a déterminé à en faire l’objet de mes recherches, d’autant plus que la solution de ce problème est comme la clef de tous les autres problèmes de ce genre.

1. Soit le nombre donné non carré, le carré cherché et un autre carré quelconque, la question se réduit à satisfaire à cette équation : en ne prenant pour et que des nombres entiers ; ainsi il s’agit de trouver deux nombres entiers et tels que

Qu’on tire la racine carrée de par approximation, et l’on aura une fraction décimale qu’on pourra changer, par les méthodes connues, en une fraction continue, laquelle ira nécessairement à l’infini, à cause que est une quantité irrationnelle par l’hypothèse.

Pour cela il n’y aura qu’à diviser d’abord le numérateur de la fraction trouvée par son dénominateur, ensuite le dénominateur par le reste, et ainsi de suite, en pratiquant la même opération, par laquelle on cherche la plus grande commune mesure de deux nombres, et nommant les quotients qui résultent de ces différentes divisions, on aura

Or cette fraction continue étant interrompue successivement au premier terme, au second, au troisième, etc., donnera une infinité de fractions particulières que je désignerai par auxquelles ajoutant la fraction on aura cette suite infinie de fractions :

qui seront telles que

Ces sortes de fractions ont plusieurs propriétés qui sont connues depuis longtemps des Géomètres, mais que nous croyons devoir rappeler ici en peu de mots, parce que nous en ferons un grand usage dans la suite.

1o Les numérateurs

forment une série qui va continuellement en augmentant ; et il en est de même des dénominateurs

2o Les fractions

sont toutes plus petites que la valeur de la fraction continue d’où elles résultent, valeur qui dans notre cas est mais elles s’en approchent toujours de plus en plus. Au contraire, les fractions

sont toutes plus grandes que la même valeur, vers laquelle elles sont aussi constamment convergentes. Et chacune de ces fractions en particulier, soit qu’elle soit plus grande ou plus petite que approche davantage de cette quantité que ne fait aucune des fractions précédentes, ni que pourrait faire aucune fraction quelconque dont le dénominateur serait plus petit.

3o Si l’on multiplie en croix toutes les fractions voisines, et qu’on retranche les produits l’un de l’autre, on aura dans toute l’étendue de la série

d’où l’on voit que les nombres ne peuvent avoir d’autre diviseur commun que l’unité, et qu’ainsi les fractions dont il s’agit sont toutes réduites à leurs moindres termes.

2o Cela posé, puisque et si l’on fait on aura et donc à cause de donc et comme on aura à plus forte raison En supposant de même

on prouvera que

Pareillement, à cause de et si l’on fait on aura et donc aussi, à cause de et l’on prouvera de la même manière qu’en faisant

on aura

3. Considérons maintenant la formule et substituons successivement dans cette formule les nombres à la place de et les nombres correspondants à la place de en nommant les quantités qui en résultent ; nous aurons d’abord

mais donc

donc, puisque et on aura aussi et on aura de même


et par conséquent

et l’on prouvera de la même manière que

Mais les fractions forment une suite décroissante et convergente vers donc les nombres qui résultent de la substitution de à la place de et de à la place de dans la formule et qui sont par conséquent tous entiers, seront aussi nécessairement tous positifs et moindres que Or ces nombres sont en nombre infini, parce que le nombre des fractions est infini ; donc, puisqu’il n’y a qu’un

nombre fini de nombres entiers positifs, et moindre qu’un nombre donné, il faudra nécessairement qu’une infinité de ces nombres soient égaux entre eux.

Ainsi l’on aura par ce moyen une infinité de nombres différents à substituer au lieu de et de dans la formule de manière qu’elle ait toujours une même valeur positive, et moindre que

Si au lieu de substituer à la place de et de les nombres et on y substituait les nombres et et qu’on nommât les valeurs résultantes de on aurait

ou, en mettant à la place de

d’où l’on voit que sera négatif, et qu’à cause de on aura

On trouvera de même

et par conséquent

et ainsi de suite à l’infini.

D’où l’on conclura, comme ci-dessus, qu’il y a nécessairement une infinité de ces nombres et qui, étant substitués à la place de et de dans la formule la rendront égale à un même nombre entier négatif, et compris entre zéro et

4. Nous dénoterons en général par et par tous les nombres qui étant substitués dans la formule la rendent égale à un même nombre quelconque entier positif ou négatif, que nous appellerons en sorte que l’on ait les équations

dont le nombre sera infini.

5. Lemme. — Le produit de ces deux quantités et est car

D’où l’on voit que le produit de deux quantités de cette forme étant une quantité donnée, est toujours aussi de la même forme, et qu’ainsi le produit d’autant des quantités de cette forme qu’on voudra sera encore de la même forme.

Donc on aura

et ainsi des autres.

6. Supposons d’abord que et soient premiers entre eux, et multipliant ensemble deux quelconques des équations du no 4, on aura (Lemme)

(A)

De plus, les mêmes équations donneront celle-ci :

savoir, à cause de

(B)

Or : 1o soit un nombre premier quelconque ; il faudra, en vertu de l’équation (B), que ou soit divisible par soit donc

et l’équation (A) deviendra

d’où l’on voit que est divisible par et que par conséquent est divisible par donc faisant et divisant ensuite toute l’équation par on aura

7. 2o Soit et étant des nombres premiers, il faudra, en vertu de l’équation (B), que ou soit divisible par ou bien que l’une de ces deux quantités soit divisible par et l’autre par

Le premier cas rentre évidemment dans celui du numéro précédent, et donne par conséquent le même résultat.

Dans le second cas on aura

n’étant point divisible par et l’équation (A) deviendra

de sorte que sera aussi divisible par donc faisant

et divisant toute l’équation par on aura

(C)

Or, comme n’est pas divisible par et que ne l’est pas non plus par hypothèse, ne le sera pas, de sorte que et seront premiers entre eux.

Qu’on prenne maintenant une autre quelconque des équations du no 4, comme et qu’on la combine avec l’équation en opérant sur ces deux équations comme nous venons de faire sur les équations et on aura des résultats analogues aux précédents, dont on tirera par conséquent des conclusions semblables. Ainsi il faudra que l’une ou l’autre de ces quantités soit divisible par ce qui se réduit au cas du no 6 ; ou bien que l’une le soit par l’autre par Donc, faisant dans ce dernier cas

et ensuite

on parviendra de même à l’équation

(D)

dans laquelle et seront aussi premiers entre eux.

Or les deux équations (C) et (D) donneront ces deux-ci :

(E)
(F)

Ainsi, à cause que est un nombre premier, il faudra, en vertu de l’équation (F), que l’une ou l’autre des quantités soit divisible par ou bien que l’une et l’autre soient divisibles en même temps par mais alors il faudrait aussi que leur somme fût divisible par ce qui ne peut être, à cause que ni ni n’est divisible par à moins que ne soit égal à

Supposons d’abord que soit différent de et l’on aura nécessairement

ce qui réduit l’équation (E) à celle-ci :

par laquelle on voit que doit aussi être divisible par de manière qu’on aura

et par conséquent, en divisant toute l’équation par

Si était égal à alors, comme et sont premiers à ils seraient tous deux impairs ; par conséquent leurs carrés seraient chacun un multiple de augmenté d’une unité ; de sorte que la différence de ces carrés serait nécessairement un multiple de on aurait donc

et l’équation (F) deviendrait, à cause de

ainsi il faudrait nécessairement que l’une ou l’autre des quantités fût divisible par c’est-à-dire par comme dans le cas précédent.

8. 3o Soit étant des nombres premiers, il faudra donc, en vertu de l’équation (B), que l’une ou l’autre des quantités soit divisible par ce qui rentre dans le cas du no 6 ; ou bien que l’une soit divisible par et l’autre par Soit donc

et l’équation (A) deviendra

de sorte qu’il faudra aussi que soit divisible par donc,

faisant

et divisant toute l’équation par on aura

Si l’on combine de même l’équation avec l’équation (no 4), et que ni l’une ni l’autre des quantités ne soit divisible par on parviendra, par la même méthode, à une équation de cette forme :

étant l’un des facteurs de Donc, si on aura deux équations qu’on traitera comme on a fait ci-dessus pour les équations (C) et (D). Si on combinera les équations et et si cette combinaison ne donne pas le cas du no 6, elle donnera nécessairement une équation de cette forme :

étant l’un des trois facteurs de

Donc, si ou on aura deux équations analogues aux équations (C) et (D) ; mais, si il faudra prendre une quatrième équation telle que et la combiner avec quelqu’une des précédentes pour avoir ou le cas du no 6, ou au moins une nouvelle équation de cette forme :

étant égal à ou à ou à ainsi, quel que soit on aura nécessairement deux équations analogues aux équations (C) et (D), par lesquelles on pourra résoudre le problème (no 7).

En général il est évident, par tout ce que nous avons démontré jusqu’ici, qu’en multipliant ensemble deux quelconques des équations du no 4, on aura nécessairement ou une équation de cette forme : comme dans le no 6, ou au moins une équation de cette autre forme : étant l’un des trois facteurs de Donc, si l’on prend quatre des équations du no 4, et qu’on en forme quatre produits différents, on parviendra nécessairement à l’équation

ou au moins à deux équations de la forme

qu’on traitera ensuite comme on a fait plus haut pour les équations (C) et (D).

9. 4o Soit étant des nombres premiers, il faudra, en vertu de l’équation (B), que l’une ou l’autre des quantités soit divisible par ou que l’une soit divisible seulement par et l’autre par ou enfin que l’une le soit seulement, par et l’autre par ce qui donne trois cas différents.

Dans le premier cas on aura d’abord, comme dans le no 6,

Dans le second cas on aura, comme dans le no 7, en mettant au lieu de

Dans le troisième cas on fera

et l’équation (A) deviendra

de sorte qu’on aura aussi

et par conséquent, en divisant toute l’équation par

Qu’on prenne donc cinq des équations du no 4, et qu’on les multiplie ensemble deux à deux pour avoir sept produits différents (on pourrait à la vérité en avoir dix, mais il suffit ici d’en considérer sept), on aura nécessairement par ce moyen ou une équation de cette forme :

laquelle résout le problème ; ou au moins deux équations de cette forme :

( étant l’un quelconque des facteurs de ), et le problème se résoudra comme dans le no 7 ; ou enfin deux équations de la forme

( et étant deux quelconques des quatre facteurs de ) ; et, dans ce dernier cas, on prouvera aisément que les quatre quantités et seront premières à et

Or, les équations

donnent ces deux-ci :

(G)
(H)

Et il faudra, en vertu de l’équation (H), que l’une ou l’autre des quantités soit divisible par ou que l’une le soit seulement par ou par et l’autre par ou par ou que l’une et l’autre le soient par ou enfin que l’une le soit seulement par et l’autre par ce qui donne, comme l’on voit, quatre cas différents.

Dans le premier cas on fera

et l’équation (G) deviendra

donc on aura aussi

et, divisant toute l’équation par on aura

À l’égard du second cas, il est clair que si les deux quantités étaient divisibles en même temps par ou par il faudrait que leur somme le fût aussi, ce qui ne peut être (à cause que et sont premiers à et ), à moins que l’on n’ait ou mais alors et seraient nécessairement impairs, ce qui donnerait de sorte que l’équation (H) deviendrait (en supposant )

donc, puisque l’une des deux quantités est supposée divisible seulement par il faudra que l’autre le soit par et par conséquent aussi par ce qui se réduit au premier cas.

Le troisième cas ne peut point avoir lieu du tout, à cause que la somme des quantités n’étant point divisible par il est impossible que chacune de ces quantités le soit.

Reste le quatrième cas, dans lequel on aura n’étant point divisible par on aura donc, dans ce cas, au lieu de l’équation (G), celle-ci :

par conséquent, on aura aussi

et, divisant toute l’équation par on aura

et comme et ne sont point divisibles par ne le sera pas non plus, de sorte que et seront premiers à

Ayant l’équation il faudra encore en avoir une autre semblable pour pouvoir résoudre le problème. Pour la trouver, on continuera à multiplier ensemble deux à deux les autres équations du no 4, et il est facile de voir, par ce que nous venons de montrer, que si ces combinaisons ne donnent pas quelques-uns des cas qui ont déjà été résolus, elles donneront nécessairement à la fin deux équations de cette forme :

étant l’un des quatre facteurs de et et étant premiers à

En effet, puisque le nombre des équations du no 4 est infini, et que le nombre des cas qui peuvent arriver est limité, il est évident que le même cas devra arriver une infinité de fois ; de sorte que, si l’on ne trouve pas quelques-uns des cas que nous avons déjà résolus, on trouvera nécessairement deux, et même une infinité de cas tels que,

mais il suffira d’en avoir deux pour que le problème soit résoluble.

On aura donc, par le moyen des deux équations dont il s’agit,

(I)
(K)

Donc il faudra, en vertu de l’équation (K), que l’une ou l’autre des quantités soit divisible par ou que toutes les deux soient divisibles à la fois par mais, dans ce dernier cas, il faudra aussi que leur somme soit divisible par ce qui ne peut être à moins que ne soit égal à Or, supposant on aura ce qui réduira l’équation (K) à

d’où l’on voit que si l’une des quantités est divisible seulement par l’autre le sera nécessairement par et par conséquent aussi par

Le cas où et seraient toutes deux divisibles par ne saurait avoir lieu, à cause que leur somme ne peut jamais être divisible par de sorte qu’il ne restera que le cas où l’une ou l’autre de ces quantités sera divisible par ainsi on aura toujours

ce qui réduira l’équation (I) à celle-ci :

par laquelle on voit que sera aussi divisible par Faisant donc

et divisant toute, l’équation par on aura

On voit par là comment il faudrait s’y prendre si le nombre était composé de cinq nombres premiers, ou d’autant de nombres premiers qu’on voudrait ; et on voit en même temps que, pourvu que et soient premiers entre eux, on parviendra toujours à une équation de cette forme :

qui contient la solution du problème proposé ; la difficulté ne consistera que dans la longueur du calcul, mais on pourra souvent l’abréger par les considérations suivantes.

10. Si le nombre était une puissance quelconque d’un nombre premier, il ne serait pas nécessaire de le regarder comme le produit d’autant de nombres premiers qu’il y a d’unités dans l’exposant de la puissance donnée.

Car, soit étant premier et différent de je dis qu’il faudra, en vertu de l’équation (B), que l’une ou l’autre des quantités soit divisible par en effet, si l’une de ces quantités était divisible seulement par une puissance de moindre que il faudrait que l’autre fût divisible par le complément de cette puissance ; de sorte que les deux quantités dont il s’agit seraient divisibles en même temps par par conséquent leur somme le serait aussi ; donc, à cause de premier et différent de il faudrait que ou fût divisible par mais, si était divisible par il faudrait, en vertu de l’équation que le fût aussi, étant, par hypothèse, premier à ainsi et ne seraient pas premiers entre eux, ce qui répugne à la nature de ces quantités (no 1).

On prouvera de même, par l’équation que ne saurait être divisible par Donc il faudra nécessairement que l’on ait

ce qui réduira l’équation (A) à

par laquelle on voit que sera aussi divisible par ainsi, faisant

et divisant l’équation par on aura sur-lechamp

Si était égal à alors, puisque et ne sont pas divisibles par ils seront nécessairement impairs ; de sorte qu’on aurait et l’équation (B) deviendrait

or, les quantités ne peuvent être divisibles en même temps par parce qu’il faudrait que leur somme le fût aussi, et que, par conséquent, ou fût divisible par ce qui ne se peut. Donc il faudra nécessairement que l’une de ces quantités soit divisible par et par conséquent aussi par donc, etc.

On pourra abréger et simplifier de la même manière l’analyse des cas où

étant des nombres premiers.

11. Si l’on avait ces trois équations :

et que et fussent des nombres premiers quelconques, et on pourrait aussi par leur moyen résoudre le problème.

Car les équations et donneront ces deux-ci :

(L)
(M)

donc, à cause que est premier, il faudra, en vertu de l’équation (M), que l’une ou l’autre des quantités soit divisible par donc, faisant

l’équation (L) deviendra

d’où l’on voit que, sera aussi nécessairement divisible par de sorte qu’en faisant on aura, en divisant par

et il ne s’agira plus que de combiner cette équation avec l’équation

suivant la méthode du no 6.

On pourrait traiter de la même manière les cas où l’on aurait

étant des nombres premiers, et ainsi des autres.

12. Il est bon de remarquer encore que si les nombres dans les différentes équations du no 4, étaient de signes différents, pourvu qu’ils fussent d’ailleurs égaux entre eux, les méthodes des numéros précédents réussiraient de même ; il n’y aurait d’autre différence dans les résultats sinon qu’au lieu d’arriver toujours à une équation de cette forme : on arriverait quelquefois à une équation de cette autre forme : mais alors il n’y aurait qu’à élever cette dernière équation au carré, et l’on aurait (no 5)

13. Au reste, si l’on avait ou une seule équation suffirait pour résoudre le problème.

Soit : 1o

on aura, en prenant les carrés,

mais donc et, divisant par

2o Soit

on aura, en carrant,

mais donc, en substituant cette valeur et divisant toute l’équation par on aura

Cette équation étant multipliée par l’équation on aura (no 5), en prenant le signe

c’est-à-dire

mais donc, en substituant et divisant par on aura

Or, puisque est premier à et que est ici un nombre pair, sera nécessairement impair ; donc l’équation ne pourra subsister à moins que et ne soient tous deux pairs ou impairs ; mais ils ne peuvent être tous deux pairs, parce qu’ils sont supposés premiers l’un à l’autre ; donc ils seront nécessairement tous deux impairs ; donc sera impair, et par conséquent et seront tous deux pairs ; donc, faisant et et divisant l’équation précédente par on aura celle-ci :

donc, lorsque on aura

et, lorsque on aura

d’où, en prenant les carrés, il viendra

14. Nous avons supposé jusqu’ici que les nombres et étaient premiers l’un à l’autre ; voyons maintenant comment il faudra s’y prendre lorsque ces nombres auront un diviseur commun.

Soit le plus grand diviseur commun de et de en sorte que et et étant premiers entre eux, et l’équation

deviendra

(ce que nous disons de cette équation doit s’appliquer en général à toutes les équations du no 4) ; d’où l’on voit qu’il faut nécessairement que le carré soit divisible par

Supposons : 1o que ne soit ni carré, ni multiple d’un carré, il est évident que la racine devra être elle-même divisible par de sorte qu’en faisant et divisant toute l’équation par on aura

Qu’on élève cette équation au carré, et l’on aura

savoir

équation dans laquelle et seront premiers entre eux.

Or, dans l’équation est nécessairement premier à autrement serait divisible par la plus grande commune mesure de ces deux quantités, et par conséquent et ne seraient plus premiers entre eux, contre l’hypothèse ; donc et seront aussi premiers à donc, dans l’équation et seront aussi premiers entre eux ; autrement il faudrait que fût divisible par leur plus grande commune mesure, ce qui ne se peut à cause que et sont tous les deux premiers à donc, puisque est premier à et à il est clair que sera nécessairement premier à donc, dans l’équation

et seront premiers entre eux ; car, s’ils ne l’étaient pas, il faudrait que fût divisible par leur commune mesure ; ainsi et ne seraient plus premiers l’un à l’autre.

Donc, si est un nombre impair, on prendra, au lieu de l’équation celle-ci :

dans laquelle et seront premiers entre eux, aussi bien que et

Et, si est un nombre pair, alors sera aussi pair, et l’on aura l’équation

dans laquelle et seront premiers entre eux, comme aussi et

2o Supposons maintenant que ait un facteur carré en sorte que n’étant ni carré ni multiple d’un carré ; en ce cas l’équation deviendra

d’où l’on voit que le carré sera nécessairement divisible par et que par conséquent sa racine le sera par ainsi, faisant on aura, après avoir divisé par

Donc, si c’est-à-dire si est carré, on aura l’équation

dans laquelle et seront premiers entre eux, aussi bien que et de sorte qu’à l’aide de cette équation et des autres semblables, on parviendra, par les méthodes des nos 6 et suivants, à une équation de cette forme :

Si n’est pas égal à on élèvera l’équation au carré, et l’on aura

et l’on prouvera, comme ci-dessus, que sera premier à et que et seront premiers entre eux.

De sorte que, si est impair, on aura, au lieu de l’équation. celle-ci :

et seront premiers entre eux aussi bien que et

Et, si est pair, on aura l’équation

et seront premiers entre eux aussi bien que et

Donc, par le moyen de ces équations et des autres semblables, on parviendra aussi à une équation de cette forme : c’est-à-dire, à cause de de cette forme-ci :

Or, connaissant deux valeurs quelconques de et qui satisfassent à l’équation étant quelconque, il est toujours possible de trouver par leur moyen deux autres valeurs de et qui satisfassent à la même équation, et qui soient telles que la valeur de soit multiple d’un nombre quelconque donné, comme nous le verrons plus bas (no 21) ; donc on pourra toujours déterminer et de manière que soit divisible par de sorte qu’on aura

comme le problème le demande.

15. Nous avons donc démontré, avec, toute la rigueur et la généralité possibles, qu’un nombre quelconque entier et non carré étant donné, il est toujours possible de trouver deux nombres et tels, que et nous avons en même temps donné les moyens de trouver ces mêmes nombres.

Or, comme le carré, le cube, et en général toute puissance d’une quantité de cette forme est toujours aussi de la même forme (no 5), il s’ensuit qu’en élevant l’équation à une puissance quelconque, on aura une infinité d’autres équations semblables, de sorte qu’ayant trouvé par les méthodes précédentes, ou par quelque autre méthode que ce soit, une seule solution du problème, on pourra par son moyen en trouver d’autres à l’infini.

Pour renfermer toutes ces solutions dans une formule générale, supposons que et soient les valeurs trouvées de et de en sorte que l’on ait en élevant les deux membres de cette équation à une puissance quelconque on aura

équation qu’il s’agit de réduire à la forme de celle-ci :

Pour cela je remarque que

de sorte que l’on aura

Or

donc, si l’on fait

on aura

et, prenant le radical en on aura de même

donc

de sorte que l’on aura en général

en prenant pour un nombre quelconque entier et positif.

Au reste, les équations

donneront

expressions qui reviennent au même que les précédentes, mais qui ont l’avantage d’être sous une forme finie ; ainsi, prenant successivement pour tous les nombres naturels, on aura une infinité de solutions du problème proposé.

16. Les dernières expressions de et de font voir que ces quantités forment deux suites récurrentes, dont l’échelle de relation est ou bien (à cause de ) de sorte qu’en dénotant par et les valeurs de et de qui répondent à on aura les séries suivantes :

et en général, lorsque l’exposant est

et de même

et en général, lorsque l’exposant est

On peut mettre encore les expressions générales de et de sous une autre forme beaucoup plus simple ; mais il faut pour cela distinguer les cas où est pair ou impair.

Soit : 1o impair, on aura

et en général

le signe supérieur étant pour le cas de multiple de plus et l’inférieur pour celui de multiple de plus

Ensuite

et en général

où l’on observera, à l’égard des signes ambigus, la même règle que ci-dessus.

Soit : 2o pair, et l’on aura

et en général

Ensuite

et en général

À l’égard de l’ambiguïté des signes, on prendra le signe supérieur lorsque est un multiple de et l’inférieur lorsque est un multiple de plus

De plus, puisque on pourra substituer dans les formules précédentes au lieu de et l’on aura celles-ci :

1o Pour le cas de impair,

et en général

Ensuite

et en général

2o Pour le cas de pair,

et en général

Ensuite

et en général

Ces dernières expressions de et de ont l’avantage de n’être composées que de termes tous positifs, ce qui les rend beaucoup plus simples et plus commodes pour le calcul.

17. Nous allons démontrer maintenant que si et sont les plus petites valeurs de et qui satisfassent à l’équation

toutes les autres valeurs possibles de et de seront nécessairement renfermées dans les formules générales des deux numéros précédents.

Pour cela nous remarquerons d’abord que si l’on a

et que on aura aussi car retranchant la première équation de la seconde, on a

donc si est positif, il faudra que le soit aussi ; donc ….

Supposons maintenant que et soient les plus petites valeurs de et dans l’équation

et que et soient les valeurs de et de qui sont immédiatement plus grandes que celles-là, en sorte qu’il n’y ait point de nombres plus petits que et qu’on puisse prendre pour et autres que et Cela posé :

Qu’on multiplie ensemble les deux équations

et l’on aura (no 5), en prenant seulement le signe inférieur,

d’où l’on voit que sera aussi une des valeurs de et une des valeurs de qui satisfont à la même équation

Or je dis que est et Car 1o soit on aura

mais les équations

donnent

donc

et tirant la racine carrée,

d’où l’on voit que

de sorte que sera toujours une quantité positive : par conséquent sera aussi un nombre positif.


2o Soit on aura

or

donc

mais donc et à plus forte raison donc

donc sera nécessairement une quantité négative ; par con-

séquent sera aussi négative ; donc

Donc il faudra par l’hypothèse que l’on ait et comme

il faudra aussi que l’on ait

Mais

donc, à cause de on aura donc sera positif ; de sorte qu’il faudra supposer

Nous aurons donc ces deux équations :

d’où l’on tire

c’est-à-dire, à cause de

ou bien, ce qui revient au même,

d’où l’on voit que les valeurs de et sont contenues dans les formules générales du no 15, en y faisant

Soient ensuite et les valeurs de et de qui sont immédiatement plus grandes que et en sorte qu’entre toutes les valeurs possibles de et de dans l’équation il n’y ait que et qui soient moindres ques et et qui soient moindres que

Multipliant l’équation par et prenant dans cette multiplication le signe (no 5), on aura

de sorte que sera aussi une des valeurs de et une des valeurs de et l’on prouvera ici par une méthode semblable à la précédente que et et et d’où il s’ensuit que l’on aura nécessairement

Or les équations

donnent, à cause de

ce qui est contre l’hypothèse ; et les équations

donnent

c’est-à-dire, en mettant pour et leurs valeurs,

Ainsi les valeurs de et sont encore renfermées dans les formules du numéro cité, en y faisant

On prouvera par des raisonnements semblables que les valeurs de et de qui sont immédiatement plus grandes que et et que nous désignerons par et seront exprimées ainsi :

et ainsi des autres à l’infini ; d’où l’on conclura en général que les valeurs de et dont le quantième sera à commencer des premières valeurs et seront exprimées de la manière suivante :

comme dans le no 15.

Ainsi ayant trouvé les premières valeurs et on sera assuré d’avoir par ces formules toutes les valeurs possibles de et de propres à satisfaire à l’équation

18. Je dis maintenant que tous les nombres et qui satisfont à l’équation

se trouvent nécessairement parmi les nombres et qui forment les fractions convergentes vers la racine de mais toujours plus grandes que cette racine (no 1) ; c’est-à-dire que chacun des nombres est nécessairement égal à quelqu’un des termes de la série et que le nombre correspondant y est égal au terme correspondant de la série en sorte que la fraction sera toujours une de celles dont nous venons de parler.

Pour pouvoir démontrer cette proposition, je commencerai par prouver que si est égal à un terme quelconque de la série sera nécessairement égal au terme correspondant de la série Car soit (on. fera le même raisonnement pour tous les autres termes de la série et de sa correspondante ), en sorte que l’on ait si n’est pas il sera nécessairement à cause que la quantité est toujours (no 2) ; ainsi l’on aura

savoir, à cause de (no 1),

mais, par l’équation on a et par conséquent et par le no 1 on a donc donc

ce qui est contradictoire.

Supposons maintenant que ne soit égal à aucun des termes de la série comme cette série commence par zéro et s’étend à l’infini (no 1), il est clair que le nombre se trouvera nécessairement entre deux quelconques des termes voisins de la même série ; supposons donc que ce soit entre et (le raisonnement sera le même pour tous les autres termes), en sorte que l’on ait et je considère les trois fractions consécutives dont les numérateurs vont en augmentant aussi bien que les dénominateurs et qui sont de plus convergentes vers la valeur de mais de façon que la première et la troisième sont plus grandes que cette valeur, et la seconde en est plus petite (no 1), et je vais démontrer d’abord que doit nécessairement être Car, puisqu’on a on aura mais étant par le no 2 ; donc aussi donc, comme et que ou on aura nécessairement et par conséquent

donc approchera plus de que l’une et l’autre de ces deux quantités étant d’ailleurs plus grandes que à cause de et donc aussi approchera plus de que mais se trouve entre et (no 2) ; donc se trouvera aussi entre et donc on aura

donc on aura :

1o
2osavoir

donc, puisque est d’ailleurs un nombre entier, il faudra nécessairement que l’on ait

et par conséquent

Soit donc et puisque l’on a, par l’équation

et par le no 1

on aura nécessairement

de plus, on a par le même numéro

et par conséquent
or

donc, à cause de on aura

or je dis que doit nécessairement être égal à en effet, puisque on aura d’abord

donc

mais si ou on aura pour lors

et comme se trouve entre et (no 1), elle se trouvera aussi nécessairement entre et mais beaucoup plus près de que de parce que donc se trouvera aussi entre et mais plus près de que de donc on aura

savoir, à cause de

mais donc et à plus forte raison ce qui ne peut être, à cause que est toujours nécessairement un

nombre entier négatif (no 2), et par conséquent un nombre entier positif. Donc il faudra nécessairement que l’on ait

On aura donc et comme on a aussi (no 1) on aura

savoir

donc, prenant un nombre quelconque entier on aura

et de là

donc, substituant ces valeurs dans l’équation on aura

or est un nombre positif, est un nombre négatif (no 2), et je dis que est un nombre négatif ; en effet, comme et on aura

et sera à cause que doit approcher plus de que (no 1) ; donc

Donc, si l’on fait

exprimeront des nombres positifs, et l’on aura

Soit, en général, en sorte que

en regardant comme une quantité variable qui commence par zéro, et qui augmente à l’infini, on aura d’abord, lorsque ensuite augmentera jusqu’à ce que après quoi diminuera continuellement jusqu’à devenir infini négatif. Donc, si l’on donne à une valeur quelconque telle que la valeur correspondante de soit positive et égale à il est clair que toutes les autres valeurs de comprises entre et donneront pour des valeurs positives et plus grandes que la plus petite des deux quantités et qui répondent à et à

Or nous avons trouvé

donc : 1o comme on aura 2o on a, par le no 1,

donc

donc, puisque il faudra que ainsi les limites de seront et c’est-à-dire que sera comprise entre et mais, en faisant on a

et, en faisant on a et par conséquent

donc, en donnant à des valeurs intermédiaires, les valeurs correspondantes de savoir de seront toutes plus grandes que la plus petite de ces deux quantités et mais l’une et l’autre

de ces quantités sont nécessairement égales ou plus grandes que l’unité (no  2) ; donc il est impossible de trouver une valeur convenable de qui rende ce qui est contre l’hypothèse.

Donc il est impossible que tombe entre et et l’on prouvera de la même manière qu’il est impossible qu’il tombe entre deux autres termes voisins quelconques de la série donc il faut nécessairement que coïncide avec le terme correspondant de la série comme nous l’avons démontré ci-dessus.

Ainsi, pour trouver les valeurs de et de qui satisfont à l’équation il n’y aura qu’à substituer successivement, dans la formule à la place de les numérateurs, et, à la place de les dénominateurs des fractions qui conversent vers la valeur de mais qui sont toutes plus grandes que cette valeur, et l’on poussera cette substitution jusqu’à ce qu’elle donne pour la valeur de ce qui arrivera nécessairement en conséquence de ce que nous avons démontré jusqu’ici ; mais comme il faudrait quelquefois pousser cette substitution très-loin, ce qui serait assez incommode, on pourra souvent se servir avec avantage des méthodes que nous avons données plus haut, comme on le verra dans les exemples suivants.

Au reste, comme les termes des deux séries vont en augmentant, il est clair qu’en substituant successivement tous ces termes dans la formule jusqu’à ce qu’elle devienne égale à on aura par ce moyen les plus petites valeurs possibles qui satisfassent au problème ; et ces valeurs étant ensuite substituées pour et dans les formules des nos 15 et 16, on aura alors toutes les valeurs possibles de et de (no  17).

19. Soient, comme dans le no  15,

je dis que, si est un nombre premier, et seront toujours divisibles par

En effet, si l’on développe ces expressions, on aura, à cause que est impair,

Or les coefficients jusqu’à sont nécessairement divisibles par lorsque est premier, parce que ce nombre multiplie, comme l’on voit, tous les numérateurs, et ne multiplie aucun des dénominateurs, de sorte qu’il est impossible qu’il s’en aille par la division de chaque numérateur par son dénominateur ; division qui doit d’ailleurs se faire toujours exactement, à cause que les coefficients dont il s’agit sont, comme on sait, des nombres entiers. Donc tous les termes de la valeur de à l’exception du premier seront nécessairement divisibles par et tous ceux de la valeur de à l’exception du dernier le seront aussi ; donc et seront divisibles par

Maintenant on sait que, lorsque est premier, est toujours divisible par quel que soit pourvu que ce soit un nombre entier ; donc sera aussi divisible par de même, étant divisible par le sera aussi ; donc sera divisible par Donc : 1o si est divisible par et le seront aussi ; 2o si n’est point divisible par comme est nécessairement divisible par il faudra que le soit aussi ; donc, à cause que est premier, il faudra que l’un ou l’autre des facteurs de savoir et soit divisible par

Soit d’abord divisible par et le sera aussi ; donc et seront divisibles par

Soit ensuite divisible par le sera aussi ; donc et seront divisibles par

Or, en multipliant ensemble les deux équations

on a celle-ci :

dans laquelle

ou bien, en substituant pour et leurs valeurs,

savoir, à cause de

Donc, en premier lieu, si est divisible par en sorte que et le soient aussi, et qu’on prenne, dans les expressions de et de le signe supérieur, on aura

ou bien

donc, à cause de et seront aussi-divisibles par


En second lieu, si est divisible par en sorte que et le soient aussi, et qu’on prenne, dans les expressions de et de le signe inférieur, on aura

ou bien

d’où il s’ensuit que et seront encore divisibles par

Donc, en général, si est le reste de la division de par (reste qui ne peut être que ou ), et qu’on fasse

les nombres et seront d’abord tels que et de plus sera toujours divisible par et ou le sera aussi, suivant que sera ou ne sera pas nul.

20. Supposons à présent

si l’on développe ces expressions suivant les dernières formules du no 16,

on verra que est toujours divisible par et que ou l’est aussi, suivant que est pair ou impair ; or est toujours divisible par (numéro précédent), donc sera toujours divisible par et ou le sera aussi, suivant que sera impair ou pair, quel que soit d’ailleurs le nombre pourvu qu’il soit plus grand que l’unité.

Or, soit un nombre premier quelconque, et désignons par le reste de la division de par (reste qui sera nécessairement ou ou bien ), si l’on fait dans les formules précédentes on prouvera, comme dans le numéro précédent, que sera toujours divisible par et que ou le sera aussi, suivant que sera ou ne sera pas nul ; mais, lorsque est nul, est impair, et lorsque est est pair ; donc sera toujours divisible par et ou le sera aussi, suivant que sera ou ne sera pas nul.

De plus, lorsque est nul, est divisible par et, si l’on développe l’expression de du numéro précédent, suivant les dernières formules du no 16, on verra que ou sera divisible par suivant que sera impair ou pair, c’est-à-dire suivant que sera ou ne sera pas nul ; d’où, et du numéro précédent, il s’ensuit que si, étant nul, l’est aussi, sera divisible par et, si n’est pas nul, sera divisible par

D’où je conclus : 1o que sera toujours divisible par 2o que, si les deux restes et sont nuls à la fois, sera divisible par et que s’ils ne sont pas tous les deux nuls, alors sera divisible par

Or

donc, faisant, pour abréger, on aura

et, par conséquent,

où l’on remarquera que sera toujours pair lorsque et ne seront pas nuls à la fois, et qu’au contraire sera pair lorsque et

On pourra poursuivre ces opérations et ces raisonnements aussi loin qu’on voudra.

21. Donc, en général, étant donné un nombre quelconque impair, dont les facteurs premiers soient si l’on nomme les restes des divisions de par de par de par et ainsi de suite, et qu’on fasse

les expressions suivantes :

satisferont d’abord à l’équation et de plus elles seront telles, que sera toujours divisible par et que ou le sera aussi, suivant que sera impair ou pair.

Les mêmes choses auront lieu aussi en faisant

étant un nombre quelconque entier positif, comme il est facile de le voir par ce que nous avons enseigné dans les numéros précédents.

Je dis de plus que, si l’on fait

étant un nombre entier positif quelconque, la quantité sera divisible par et la quantité le sera aussi.

Pour démontrer cette proposition, il suffit de faire voir que et seront toujours divisibles par Or, si l’on fait, pour abréger, on aura

Qu’on suppose : 1o

on aura

d’où

mais on a aussi

donc

Donc et seront divisibles par

Supposons : 2o

on aura

d’où

ainsi sera divisible par de même, en faisant

on trouvera que sera divisible par et ainsi de suite.

Donc, si et seront divisibles par si et seront divisibles par si ces quantités seront divisibles par donc, en général, et seront toujours divisibles par

Par le moyen de ces théorèmes on peut résoudre le cas du no 14 ; car quel que soit le nombre donné, il est clair qu’on pourra toujours le réduire à cette forme : étant impair ; par conséquent, en connaissant deux nombres et qui satisfassent à l’équation on pourra toujours en trouver deux autres, et même une infinité tels que et qui y satisfassent aussi, et dont l’un y soit multiple d’un nombre quelconque donné ; au reste, ces théorèmes nous seront encore fort utiles dans la suite.

Appliquons maintenant les méthodes précédentes à quelques exemples.

Exemples.

22. Exemple I. — Soit proposé de trouver deux nombres et tels, que

Je commence par extraire la racine carrée de en fractions décimales, et je trouve, en poussant l’approximation jusqu’à neuf caractères, ce qu’on fera aisément à l’aide des grandes Tables de logarithmes d’Ulacq ; je trouve, dis-je,

Je divise le numérateur de cette fraction par son dénominateur, ensuite le dénominateur par le reste, et ainsi de suite, comme si je voulais trouver la plus grande commune mesure entre le numérateur et le dénominateur, et ces différentes divisions me donnent ces quotients : à l’aide desquels je forme, en commençant par les fractions suivantes :

où l’on voit que le numérateur de chaque fraction est égal à la somme du numérateur de la fraction précédente multiplié par le nombre qui est au-dessus (ces nombres ne sont autre chose que les quotients dont il s’agit écrits de suite, et suivant l’ordre dans lequel on les a trouvés), et du numérateur de la fraction qui est avant celle-ci ; et il en est de même des dénominateurs, ce qui s’accorde avec ce que l’on a dit dans le no 1.

Je substitue maintenant les numérateurs de ces différentes fractions à la place de et les dénominateurs correspondants à la place de dans la formule j’ai

Je remarque ici deux valeurs de et de savoir : et lesquelles donnent également qui est un nombre premier ; ainsi je puis faire usage de la méthode du no 6.

J’aurai donc

donc qui est divisible par de sorte que j’aurai d’abord ensuite qui est aussi divisible par d’où je tire ainsi les nombres cherchés seront et en effet, le carré de est et celui de est lequel étant multiplié par donne de sorte qu’on aura

On aurait pu trouver d’abord ces mêmes valeurs de et de à l’aide de la supposition qui donne et qui est par conséquent dans le cas de la méthode du no 11. En effet, puisque et on aura, en prenant le signe inférieur,

et par conséquent

Au reste, en continuant la série des fractions on trouvera celle-ci : d’où l’on aura

d’où l’on voit que les nombres et sont les plus petits qui satisfassent à l’équation proposé (no 18) ; de sorte qu’en substituant ces nombres à la place de et dans les formules du no 16 ou 17, on trouvera toutes les autres valeurs possibles de et de ainsi désignant ces valeurs par et par on aura

et l’on pourra être assuré qu’il n’y a pas d’autres nombres plus petits que ceux-ci qui résolvent le problème (no 17).

23. Exemple II. — Soit proposé de trouver deux nombres et qui satisfassent à l’équation

La racine carrée de se trouve par les grandes Tables de logarithmes : en sorte qu’on a d’où l’on tire, par l’opération indiquée dans l’Exemple précédent, les quotients lesquels fournissent ces fractions :

dont les numérateurs étant substitués pour et les dénominateurs pour dans l’équation on aura

d’où l’on voit que et sont les plus petits nombres qui satisfassent à l’équation proposée, et par le moyen de ceux-ci on pourra trouver tous les autres nombres possibles qui résolvent la question.

24. Exemple III. — On demande deux nombres et qui satisfassent à cette équation

Je trouve d’abord d’où je tire les quotients suivants : à l’aide desquels je forme ces fractions :

dont les numérateurs étant substitués pour et les dénominateurs

pour dans l’équation j’aurai

Ici il faudrait pousser la série assez loin pour trouver les valeurs de et de qui donnent  ; ainsi il vaudra mieux se servir des méthodes des nos 6 et suiv.

Pour cela j’observe qu’il y a deux suppositions, dont l’une donne et l’autre de sorte qu’à cause que est un nombre premier, on pourra faire usage de la méthode des nos 6 et 12.

J’aurai donc

donc

qui, étant divisible par j’aurai d’abord

ensuite

qui, étant aussi divisé par donnera

Or, comme dans les équations et la quantité a des signes différents, le produit de ces deux équations sera, en prenant le signe

de sorte qu’en divisant par on aura

d’où l’on voit que les valeurs trouvées de et ne satisfont pas à l’équation proposée ; mais en prenant le carré de l’équation on aura

de sorte que les valeurs de et de qui résolvent le problème sont

savoir

et ces valeurs sont en même temps les plus petites qui satisfassent à l’équation comme on peut facilement s’en convaincre en poussant la série des fractions jusqu’à ce que l’on en trouve une qui soit formée de ces mêmes nombres, et en calculant toutes les valeurs de la formule qui répondent à ces mêmes fractions.

Ces exemples sont suffisants pour faire connaître l’usage et l’esprit de nos méthodes ; nous ajouterons seulement quelques remarques qui pourront mériter l’attention des Géomètres.

Remarques.

25. Remarque I. — En examinant les valeurs de des deux premiers Exemples, on voit que dans le premier les mêmes nombres se trouvent successivement avec les signes et au lieu que dans le second, les nombres qui ont le signe sont tous différents de ceux qui ont le signe

Pour trouver la raison de cette différence, supposons en général

ce qui est le cas de l’Exemple I, et l’on aura

d’où l’on voit que doit être divisible par Or, on sait que la somme de deux carrés n’est divisible que par les nombres qui sont aussi la somme de deux carrés ; donc, pour que les deux équations dont il s’agit aient lieu en même temps, il faut nécessairement que le nombre donné a soit la somme de deux carrés ; c’est ce qui a lieu dans l’Exemple I, où au lieu que dans l’Exemple II qui n’est point la somme de deux carrés. Ainsi, toutes les fois que ne sera point la somme de deux carrés, ce qui arrive, comme on sait, lorsque quelqu’un des facteurs premiers de est de cette forme on pourra être assuré qu’aucun nombre ne pourra être en même temps de la forme et de celle-ci quels que puissent être et et

Mais on ne peut pas dire réciproquement que lorsque est la somme de deux carrés tout nombre qui est de la forme de est aussi de la forme de au moins je n’ai pu parvenir jusqu’à présent à m’assurer en général de la vérité de cette proposition, quoique je l’aie d’ailleurs trouvée vraie dans un grand nombre de cas particuliers.

Au reste, il est évident que si est de la forme de tout nombre positif qui sera de la même forme sera aussi de la forme de car soient

on aura, en multipliant ensemble ces deux équations, et changeant les signes des deux membres,

Or, si l’on trouve dans deux seuls cas particuliers

et que soit un nombre premier, alors on parviendra toujours à cette équation

comme nous l’avons vu dans l’Exemple III ; de sorte qu’on en pourra conclure d’abord que tout nombre qui sera de la forme de sera aussi de la forme de

26. Remarque II. — Supposons maintenant que l’on ait l’équation

en prenant les carrés, on aura

d’où l’on voit que est une des valeurs de qui satisfont à l’équation

et que est la valeur correspondante de mais nous avons démontré (no 17) que toutes les valeurs de et de qui satisfont à cette équation sont renfermées dans ces formules :

étant un nombre quelconque positif, et étant les plus petites valeurs qui satisfassent à la même équation donc il faudra que l’on ait

équations qui se réduisent à celle-ci :

Or je dis d’abord que ne saurait être un nombre pair ; car, soit on aura

et, extrayant la racine carrée,

or se réduit à cette forme : en faisant (no 15)

donc, puisque et sont, par hypothèse, des nombres positifs, et que et le sont aussi, on aura et mais, à cause de on aura aussi donc on aurait ce qui est contradictoire ; donc doit nécessairement être un nombre impair.

Soit donc et l’on aura

d’où l’on voit que doit être un carré ; or, quelle que puisse être la racine carrée de il est clair, à cause de la quantité irrationnelle , qu’elle ne peut être que de cette forme de sorte que l’on aura

et, par conséquent,

Ainsi, à moins que les quantités et ne soient de cette forme, il est impossible que l’équation ait lieu ; or, connaissant les valeurs de ces quantités, il est facile de vérifier si elles sont de la forme dont il s’agit ; car, premièrement, il faudra que soit un nombre pair ; ensuite il est évident que et ne peuvent être que les facteurs de la moitié de de sorte qu’il ne s’agira que de chercher tous ces facteurs, et de les substituer à la place de et dans l’équation

Si l’on peut par ce moyen trouver deux valeurs de et alors, comme

on aura

et faisant

on aura

d’où

et

Or il est facile de voir que les valeurs de et sont les plus petites lorsque auquel cas on a et donc les plus petites valeurs de et de seront et donc et seront les plus petites valeurs qui satisfassent à l’équation

Usage des méthodes précédentes pour la résolution des équations
du second degré à deux inconnues, par des nombres entiers.

27. Soit proposée l’équation

dans laquelle et sont des nombres donnés entiers positifs ou négatifs, et et sont deux nombres inconnus qu’il s’agit de déterminer de manière qu’ils soient rationnels et entiers.

Qu’on multiplie toute l’équation par et qu’on la mette sous cette forme :

Soient, pour abréger,

et l’équation précédente deviendra

Cette équation étant multipliée para peut se mettre sous la forme suivante :

ou bien, en faisant

sous celle-ci

d’où l’on voit d’abord que le nombre donné doit être de cette forme : pour que le problème admette une solution rationnelle.

J’ai donné ailleurs[1] la méthode de reconnaître si un nombre donné est de la forme de étant aussi donné ; et j’ai fait voir que pour qu’un nombre quelconque soit de cette forme, il faut que chacun de ses facteurs premiers que je désignerai par soit tel, que soit divisible par si cette condition n’a pas lieu, on peut assurer hardiment que n’est pas de la forme dont il s’agit, et qu’ainsi le problème n’admet aucune solution rationnelle.

28. Supposons maintenant qu’on ait reconnu que le nombre est en effet de la forme de et qu’on ait trouvé en même temps deux nombres et tels, que en ce cas le problème sera résoluble eh nombres, et il pourra même l’être de plusieurs manières ; c’est ce que nous allons examiner.

Il est d’abord clair que, puisque

il n’y aura qu’à supposer et ce qui donnera

et, par conséquent,

Or je remarque :

1o Que les nombres et peuvent être pris positivement ou négativement à volonté, ce qui donnera quatre solutions différentes ;

2o Si le nombre est le produit de deux ou de plusieurs nombres de la forme de il sera aussi plusieurs fois de cette même forme ; de sorte qu’on pourra trouver différentes valeurs de et de

En effet, si est le produit de deux facteurs tels que et on aura (no 5)

ainsi on pourra supposer

ou

En général, si est exprimé par étant des nombres de la forme de mais qui ne soient qu’une fois de cette forme, le nombre sera (comme je l’ai démontré ailleurs) de la même forme autant de fois, ni plus ni moins, qu’il y a d’unités dans la moitié de ce nombre s’il est pair, ou dans la moitié de ce même nombre augmenté de l’unité s’il, est impair. Ainsi les quantités et auront chacune autant de valeurs différentes qu’il y a d’unités dans ou dans et chacune de ces valeurs fournira par conséquent quatre solutions du problème.

29. Examinons séparément le cas où est un nombre positif, et celui où est un nombre négatif.

1o Soit un nombre négatif en sorte que soit positif, et la forme du nombre sera donc, puisqu’il est impossible que l’unité soit de cette forme, le nombre des facteurs (numéro précédent) qui sont supposés être de cette forme sera nécessairement limité ; donc le nombre des valeurs de et de le sera aussi ; par conséquent le problème ne pourra avoir qu’un certain nombre de solutions rationnelles, qu’il sera aisé de trouver par la méthode précédente, et s’il arrive qu’aucune de ces solutions ne donne des nombres entiers pour les valeurs des inconnues et on en devra conclure que le problème n’admet point de solution en entiers.

2o Supposons que soit un nombre positif ; dans ce cas, comme l’unité est toujours de la forme de quel que soit le nombre il est clair que le nombre des facteurs de de la forme dont il s’agit sera infini, parce qu’on peut toujours regarder le nombre comme multiplié par une puissance quelconque de l’unité ; ainsi, ou le problème n’admettra point de solution du tout, ou bien il en admettra nécessairement une infinité.

Pour comprendre toutes ces solutions dans deux formules générales, soient et deux nombres tels, que et, multipliant cette équation par l’équation on aura

d’où l’on voit qu’ayant trouvé deux nombres et qui satisfassent à l’équation on pourra mettre dans les formules du no 28 à la place de et à la place de ce qui donnera en faisant abstraction de l’ambiguïté des signes, à cause que les nombres

et peuvent toujours être pris positivement ou négativement,

Or nous avons démontré (no 17) que si et sont les plus petits nombres qui satisfassent à l’équation tous les autres nombres possibles sont renfermés dans ces formules :

en prenant pour tous les nombres naturels à l’infini ; donc, si l’on substitue ces valeurs de et dans les formules précédentes, on aura

Donc, si l’on met dans ces formules les différentes valeurs de et qui naissent des facteurs de qui sont de la forme de et qui sont plus grands que l’unité, et qu’on fasse successivement on aura absolument toutes les solutions rationnelles possibles de l’équation proposée.

3o Soient, pour plus de simplicité,

et l’on aura

donc, à moins que les numérateurs de ces deux fractions ne soient divisibles exactement par leurs dénominateurs, les inconnues et ne pourront être des nombres entiers.

Supposons

et nous aurons

Or je dis que l’on peut toujours prendre l’exposant dans les valeurs de et tel que et soient des nombres entiers.

Pour cela on décomposera le nombre en ses facteurs premiers, en sorte que l’on ait étant des nombres premiers ; ensuite on divisera par et l’on nommera le reste on divisera de même et l’on nommera le reste et ainsi de suite ; ces restes étant trouvés, on fera égal à un multiple quelconque de car, par ce que nous avons démontré plus haut (no 21), il est clair que et seront divisibles par de plus il est facile de voir par les formules du no 16 que sera aussi divisible par à cause que est pair ; par conséquent et seront nécessairement des nombres entiers.

Donc, si les quantités et sont des nombres entiers, on pourra trouver une infinité de valeurs de et de en nombres entiers ; or ces quantités ne sont autre chose que les valeurs de et de qui répondent à ce qui donne

c’est-à-dire les mêmes valeurs de et de que nous avons trouvées d’abord (no 28) ; d’où il s’ensuit que si l’on trouve une seule solution du problème en nombres entiers, dans le cas de positif, on pourra par nos formules en trouver une infinité d’autres en prenant pour et les nombres qui répondent à la solution donnée, et pour un multiple quelconque de

Au reste, il est bon de remarquer encore qu’il ne sera pas toujours nécessaire que soit un multiple de ce nombre pour que et soient des nombres entiers ; car il est visible, par exemple, que si et étaient divisibles par il suffirait alors que fût un multiple de c’est-à-dire un nombre pair, et ainsi des autres cas semblables.

  1. On trouvera dans le Tome II le Mémoire auquel Lagrange fait ici allusion ; ce Mémoire a été inséré dans le Recueil de l’Académie de Berlin.(Note de l’Éditeur.)