Mémoires de la vie de Henriette Sylvie de Molière

MEMOIRES
DE LA VIE
DE
HENRIETTE-SYLVIE
DE MOLIERE.

Premiere Partie.



A PARIS
Chez Claude Barbin, au Palais
sur le second Perron de la
Sainte Chappelle.

M. DC. LXXII.
Avec Privilege du Roy.

FRAGMENT
d’une Lettre.


……… I’amene avec moy une belle Dame que vous connoiſſez, & qui me menace de me faire aller bien loin : elle a une eſtrange demangeaiſon de ſe revoir à Paris ; mais je doute qu’elle puiſſe, obtenir ſur moy de me faire faire ces pas-là, outre que mes affaires me r’appelleront bien-toſt à Thoulouze. Ie ne vais pas ainſi dans une Ville où j’ay eu la folie de conſentir qu’on me fit imprimer. Comme vous avez plus de prudence que moy, je vous laiſſe l’arbitre de tout ce qu’il faudra encore retrancher. Mais parlons d’autre choſe : Que voſtre Libraire m’embaraſſe avec ce qu’il me demande ; eſt ce qu’il ne peut rien faire ſans celà ? & puis dequoy veut-il que je luy compoſe une Preface, je n’ay plus rien à dire aux Lecteurs, & j’ay tout dit en leur abandonnant la belle Hiſtoire que vous faites imprimer : D’ailleurs je ne vois pas que ſon Livre exige une grande juſtification ; & ſi je n’ay pû me diſpenſer d’y parler de quelques perſonnes vivantes, je croy qu’il n’y en a pas une, qui en un beſoin, ne me pardonnât volontiers la liberté que j’ay priſe, & à tout évenement je ſeray le garant de l’Ouvrage de ce coſté-là. Ie ſuis bien aiſe de ce que vous me mandez qu’on le doit faire corriger par d’habiles gens, prenez garde ſeulement que ces habiles gens-là ne ſoient pas trop ſerieux, car cela leur aideroit à y trouver beaucoup plus de fautes ; & on dit qu’il faut eſtre un peu badin pour lire des badineries, ou du moins, qu’il les faut lire en badinant pour y avoir plus de plaiſir. Ie finis, car on m’attend pour achever de déjeuſner : Adieu Monſieur, vous eſtes le plus obligeant du monde, & ſi j’avois du loiſir, je ne finirois cette Lettre que par de grands complimens que je vous ferois ſur toutes les bontez que vous avez pour

moy.

MEMOIRES
DE LA VIE DE
HENRIETTE-SYLVIE
DE MOLIERE.


CE ne m’eſt pas une legere conſolation, Madame, au milieu de tant de médiſances qui déchirent ma reputation par tout, que voſtre Alteſſe deſire que je me juſtifie. J’en ay les ſentimens que je doy, & pour n’en eſtre pas ingrate, j’obeïray volontiers au commandement qu’elle me fait de la divertir, par un recit fidelle de mes erreurs innocentes.

Non que j’eſpere jamais pouvoir arracher des eſprits les crüelles impreſſions que la calomnie a données de ma conduitte : Le Siecle ne permet pas que je me flatte de cette penſée. Mais pour me ſervir des termes de V. A. ; il viendra un temps, où les hommes ne pourront plus juger ſi criminellement par eux-meſmes de leurs ſemblables ; parce qu’ils n’auront plus les mœurs ſi corrompuës ny ſi criminelles ; & alors on ajoûtera, peut-eſtre, plus de foy à ce que j’auray écrit de l’innocence de mes actions, qu’à ce qu’en auront pû dire mes ennemis.

Je ne cacheray rien ; non pas même des plus folles aventures où j’auray eu quelque part ; afin que Vôtre Alteſſe en puiſſe rire, dans le même temps qu’elle me plaindra d’autre choſe ; Et il me ſemble que quand elle ne m’en auroit pas donné la permiſſion, je ne devrois pas laiſſer de le faire ; car ſans celà, Madame, voudrois-je les momens que vous emploiriez à la lecture d’une ſi ennuyeuſe hiſtoire, que celle de ma vie ?

Je m’y crois encore d’autant plus engagée, qu’aſſûrément on n’a incité Vôtre Alteſſe à m’honorer de ſes Lettres, que dans l’eſperance d’une réponſe qui ſeroit de ce caractere ; & c’eſt pourquoy je la ſupplie de prendre tout en bonne part.

Pour commencer : Je n’ay jamais bien ſçeu qui j’eſtois ? Je ſçay ſeulement que je ne ſuis pas une perſonne qui ait de communes deſtinées ; que ma naïſſance, mon education & mes mariages, ont eſté l’effet d’autant d’aventures extraordinaires ; & que ſi je voulois emprunter l’éclat de quelque Heroïne fabuleuſe, il ſe trouveroit des gens au monde (comme peut-eſtre il s’en eſt déjà trouvé) qui travailleroient à appuyer la fable de ma genealogie, pour en rendre l’hiſtoire plus obſcure.

Je fus nommée Henriette-Sylvie, par l’ordre de ma mere méme, à ce que l’on m’a dit. Henriette, ſans doute, pour quelque raiſon qui n’eſtoit connuë que d’elle ſeule, & Sylvie, apparamment, parce que j’eſtois venuë au monde à l’entrée d’un bois appellé le bois de Sylves ; j’ay receu le nom de Moliere, qui m’eſt demeuré par habitude de ceux qui ſe donerent le ſoin de m’élever, & qui le portoient eux-mémes.

Au reſte je ſuis grande & de bonne mine ; j’ay les yeux noirs & brillants, bien ouverts, bien coupez, & qui marquent aſſez d’eſprit, on jugera ſi j’en ay. Ma bouche eſt grande quand je ris, fort petite quand je ne ris point ; mais par malheur pour elle, je ris touſjours. J’ay les dents belles, le nez bien fait, la gorge comme le teint, c’eſt à dire admirable, & quand on devroit m’accuſer de preſomption, j’ajouteray, Madame qu’on en voit bien peu de pareilles. Mais je ſerois trop longtemps à faire mon Portrait en détail ; On peut s’imaginer que je ſuis quaſi une beauté achevée, depuis la teſte juſqu’aux pieds. Ceux qui ont veu ce que j’en laiſſe voir, témoigneront que je ne me farde pas. Ceux qui ne m’ont pas veuë croiront, s’ils le veulent, que je me peins ainſi à plaiſir, ils aimeront toûjours mieux l’idée d’une belle perſonne, que celle d’une laide, ou ils ſeront gens de mauvais gouſt ; je dis toutefois la verité à Voſtre Alteſſe.

Je me croy diſpenſée de nommer la famille dont je ſuis deſcenduë, apres ce que j’ay dit. Peut eſtre que mes parens m’ayant trouvée digne d’eux, apres avoir leu l’hiſtoire de ma vie, encheriront ſur le bien que de charitables perſonnes m’ont déjà fait, & déveloperont un jour le ſecret entier de ma naiſſance, pour l’ajoûter à mes autres fortunes ; Et ſi cela arrive, je promets quelque choſe d’illuſtre ; car je me ſens bien, & je ne puis croire qu’un mal-honeſte homme ſoit le pere d’une fille de ma ſorte.

Quoy qu’il en ſoit, on m’a aſſûré que je vis le jour dans un hameau ſitué à l’entrée d’un bois à deux ou trois lieuës de Montpelier, ſur le bord de la mer. Quatre hommes & deux femmes y amenerent Celle, qui m’a miſe au monde, au Mois de Juillet de l’année mil ſix cens quarante-ſept. Ils aborderent dans une chaloupe qu’on brûla ſur le rivage apres avoir pris terre : La raiſon ? Je ne la ſçay pas. On choiſit la premiere maiſon qui ſe trouva ; c’eſtoit celle d’une pauvre femme qui nouriſſoit ſon enfant. Ma mere, qui qu’elle ſoit, n’y fut pas une heure, qu’elle accoucha. On fit nourrir l’enfant de la païſanne par une autre, & on me mit entre ſes mains avec une ſomme d’argent, puis la nuit venuë, on diſparut ; la Païſanne qu’on avoit logée ailleurs pour cette nuit, trouva le lendemain qu’on avoit emporté ma mere à la faveur des tenebres ; ſi on me demande où ? je le ſçay encore moins que le reſte, je voudrois le ſçavoir, plus pour ma ſatisfaction que pour celle des autres ; je devois pourtant nommer celle de Voſtre Alteſſe toute la premiere.

Je fus eſlevée juſques à cinq ans dans ce hameau, ſans eſtre reclamée de perſonne, & environ ce temps-là Monſieur le Duc de Candale s’aviſa de venir chaſſer ſur cette coſte : il entra dans la cabane de ma Nourrice pour s’y mettre à couvert d’un orage. Mes petites façons luy plûrent ; il crût voir en moy quelque choſe qui n’eſtoit pas de Païſanne, il s’informa qui j’eſtois, apprit mon Avanture, puis ſe tournant avec un ſoûris, vers un Gentil-homme qui l’accompagnoit ; Voilà, luy dit-il, une grande cruauté d’abandonner ainſi un enfant ; cependant cette petite fille ſeroit un jour parfaitement belle ; je veux prendre ſoin de la faire élever, pour voir ſi je ne ſeray trompé. Et en effet dépuis ce moment-là, juſques à ſa mort, il ne me laiſſa mancquer d’aucune choſe neceſſaire à mon education ; méme il en fit tant, que quand on le ſçeut, cela fit dire à pluſieurs que je luy devois la vie, & quelques-uns l’entendoient malicieuſement. Toutesfois on m’a bien aſſûré qu’il n’eſtoit pas mon pere, & que ſa chaſſe l’avoit amené par hazard dans ce petit hameau ou l’orage luy avoit fait choiſir la maiſon de ma Nourrice entre toutes les autres, quoy qu’elle ne fût point la plus proche du coſté par où il arrivoit : Je m’en rapporte à ce qu’il en eſt, & ne ſeray point parente à Meſſieurs ſes heritiers s’ils ne le veulent : C’eſt aſſez parler de celà.

Le premier ſoin de ce genereux Duc fut de m’oſter à la Païſanne, pour me donner à quelqu’un qui pût m’élever avec plus de ſoin. Il y avoit à Pezenas un Financier dont la femme eſtoit de ſes amies, & cét homme luy avoit obligation de toute ſa fortune : On nourriſſoit à ces gens-là, en une de leurs métairies, une petite fille de mon âge, qui eſtoit abandonnée des Medecins, & on attendoit tous les jours l’heure qu’elle mouruſt : Il n’eſtoit pas mal-aiſé de me mettre en ſa place dés qu’elle ſeroit morte, & de faire accroire, en la changeant de main auparavant, qu’on l’auroit depuis guerie à force de bons remedes (Voyez un peu, Madame, par quel chemin la fortune me guidoit aux aventures ?) Cét échange ſe fit aſſez adroitement : Le Financier en uſa le mieux du monde : Je devins par ce moyen la cadette d’un fils qu’il avoit, & le denier conſiderable que le Duc luy donna en méme temps luy inſpira toute la tendreſſe qu’il faloit pour bien contrefaire une amitié paternelle.

Je ne fatiguerois peut-eſtre point Vôtre Altreſſe, en commençant mon hiſtoire par ce qui à pû rendre mon enfance auſſi ſurprenante que le reſte de ma vie. J’avois un petit air galant qui accuſoit quaſi ce Seigneur d’eſtre mon pere ; de l’eſprit, de la vanité, du courage, & une telle diſpoſition à bien prendre l’accent de toutes les langues, que comme le fils de mon Financier avoit des gens auprés de luy, pour les luy montrer ; j’en appris en peu de temps juſques à l’Alemand meſme, avec une merveilleuſe facilité. J’avois auſſi une grande paſſion pour la chaſſe, & enfin juſques-là on n’avoit guére veu de fille mépriſer, comme moy, dés l’âge de diz ans, tous les divertiſſemens du ſexe, pour monter à cheval, tirer un piſtolet, ou faire quelqu’autre ſemblable exercice. Et il ne ſeroit pas impoſſible que des inclinations ſi extraordinaires euſſent fait naiſtre quelques petites Aventures aſſez jolies ſi je voulois m’en reſſouvenir : mais mon deſſein eſt de ne parler icy que de ce qu’a veu le grand monde, & je n’avois alors que des témoins de peu d’importance.

Je diray ſeulement que je ne connoiſſois point d’autre pere & mere que les gens à qui l’on m’avoit donnée ; & que je n’en fus détrompée que bien tard, par une Aventure aſſez nouvelle.

La femme de mon Financier eſtoit bien faite, & avoit beaucoup d’eſprit. Un Marquis de Birague, homme de naiſſance, & tout plein de belles qualitez, tel enfin que (ſi je n’ay pas eu en ce temps-là aſſez de conſideration pour luy, parce qu’il eſtoit marié) je ſerois fort aiſe d’eſtre ſervie par un ſemblable Cavalier, maintenant qu’il eſt veuf. Ce galant homme, dis-je, voyoit ſouvent la belle Dame de Moliere, c’eſt ainſi que s’appelloit cette femme. Le mary les trouva tous deux endormis l’un prés de l’autre, dans un petit bois de l’une de ſes maiſons, à l’heure qu’ils le croyoient loin de là fort occupé à ſon employ. Je ne ſçay pas bien comment la Dame ſe démeſla de cette ſurpriſe ; mais enfin quelques jours apres, je reconnus que ce mary avoit deſſein de s’en venger, & que dans ſon ame, il avoit medité de me faire partager le ſoin de cette vengeance. Le détail de la maniere dont il ſe prit à me le faire connoiſtre, ſeroit ennuyeux. J’eſtois folaſtre & careſſante pour les gens à qui je croyois appartenir, quoy que je fuſſe la plus fiere des petites filles pour tout le reſte ; Et ainſi lors qu’il me témoigna de l’attachement, j’y répondis par cent careſſes. Mais apres que cela eut duré quelque temps, je luy plûs ſi fort par ces petites badineries auſquelles je m’abandonnois avec innocence ; que je le rendis ſans y penſer le plus amoureux de tous les hommes, & il ſe reſolut de pouſſer les affaires plus loin.

Il me mena à la chaſſe : c’eſtoit mon foible ; Et m’ayant écartée adroitement de ſa femme & du Marquis de Birague, qui peut-eſtre de leur coſté cherchoient auſſi une occaſion de s’écarter : Il fit tant que nous nous trouvâmes tous deux ſeuls aſſez loin dans la foreſt. Le lieu invitoit à mettre pied à terre, & eſtoit tout propre à favoriſer deux perſonnes qui euſſent eſté d’accord. Les arbres y formoient une eſpece de berceau, une ſource faiſoit entendre ſon murmure à deux pas de-là ; enfin, Madame, Monſieur de Moliere eſtoit un habile homme, & pour le deſſein qu’il avoit, le lieu n’eſtoit pas mal choiſi. J’y deſcendis de cheval à ſa priere, & le voyant s’y coucher de ſon long pour ſe repoſer, je m’allay mettre auprés de luy en la meſme poſture, ſans aucun ſoupçon de ce qui m’y devoit arriver. Alors mon prétendu pere s’approchant un peu & m’embraſſant tendrement commença à me découvrir un ſecret, auquel je n’euſſe jamais penſé, & me raconta l’hiſtoire de ma naiſſance. Il m’étala enſuite les obligations que je luy avois, de ce qu’en voulant bien paſſer toûjours pour mon pere, il m’aſſeuroit tous ſes biens, que la mort de ſon fils tué depuis peu, m’abandonnoit. Il ajoûta beaucoup d’autres choſes pour me faire valoir ſon amour ; Et le refrein de tout cela fut que je devois répondre à ſa paſſion pour éviter le vice d’ingratitude : qu’il m’aimeroit toûjours avec la plus grande diſcretion du monde, & que ce commerce n’empeſcheroit pas qu’il ne me trouvaſt bien-toſt un party conſiderable.

Si je dûs eſtre confuſe & bien eſtonnée en apprenant ces nouvelles, Voſtre Alteſſe en ſera le juge. Je me trouvay d’autant plus embaraſſée, que cét homme, apres avoir finy ſon diſcours, ſe mit en devoir d’encherir par deſſus ſes careſſes ordinaires, & que ma reſiſtance l’embraza d’avantage par la difficulté. Il ſe jetta à mes genoux : fit mille extravagances, & quoy que je luy euſſe répondu qu’un reſte de tendreſſe & de reſpect, que l’habitude retenoit dans mon cœur, eſtoit la ſeule choſe qui m’empeſchoit de me venger de ſes inſolences, il ne laiſſa point de les continüer, juſques à vouloir en venir à la force ; Ce fut alors que j’entray en furie, je me démeſlay de ſes bras, je courus à mon cheval, je pris un piſtolet à larçon de la Selle & le menaçay de le tuër, s’il ne me laiſſoit : Il n’en fit rien, & au contraire ſa brutalité ſe changeant en fureur, je le vis venir à moy comme un ſatyre, en jurant qu’il ſe ſatisferoit ; Je laſchay le piſtolet qui le bleſſa de deux bales dans le corps : Voilà, Madame, qu’elles furent mes premieres cruautez.

Cependant, l’embarras eſtoit conſiderable pour une fille de mon âge, de ſe voir ſeule dans un bois, d’y avoir étendu un homme ſur la place, d’avoir à ſe ſauver & ne ſe ſouvenir point de la route qui nous avoit conduits en cét endroit. Auſſi en fus-je tellement épouventée, que je penſay me laiſſer tomber à la renverſe en meſme temps que ce malheureux. Toutefois ce deſordre ne dura pas. La neceſſité rappella mon jugement. Je remontay à cheval. Le bleſſé qui eut plus de pitié de mon embarras, que je n’en avois eu du ſien, me cria de tourner à gauche, & j’abandonnay mon cheval à la courſe par cette route, par où en effet je me fuſſe bien-tôt éloignée ; mais j’allay rencontrer Monſieur de Birague, & la Dame de Moliere, qui s’eſtant entretenus là où il leur avoit plû ſans s’entretüer comme nous, venoient apparamment pour nous rejoindre, guidez par le bruit du piſtolet. O Dieu ! quelle fut alors mon affliction ? & quand, à cette diſgrace, il ſe méla encore la peur d’un ſanglier qui eſtoit chaſſé, & qui traverſa en meſme temps cette route preſque ſur les pieds de mon cheval ! Il me ſouvient que malgré toute ma ſurpriſe, je ne laiſſay pas de mettre la main au piſtolet qui me reſtoit, comme pour arreſter cet animal : Et je diray en paſſant que c’eſt à quoy je veux reconnoiſtre quelquefois le ſang genereux dont je pourrois bien eſtre née.

Monſieur de Birague qui vit de loin mon action, & qui crût que je n’eſtois là venuë à toute bride, qu’à deſſein d’y rencontrer la beſte au paſſage ; fit un grand cry pour me reprocher ma temerité, & s’avançant vers moy au grand galop, me demanda ſi Monſieur de Moliere ſe mocquoit de m’expoſer de la ſorte. Mais comme il ne s’imaginoit rien moins que la verité, & que je n’avois pas de temps à perdre ; je luy dis, ſans m’amuſer à l’éclaircir d’aucunes choſes, que je le connoiſſois pour un grave Gentil-homme, que j’avois des ſecrets d’importance à luy dire, & que tandis que je luy parlerois il donnât ſeulement avis à Madame de Moliere d’aller trouver ſon mary un peu plus loin où il eſtoit bien bleſſé. À peine avois-je finy ces paroles qu’elle-meſme nous joignit. Sur cette nouvelle elle ſe fit mener ſans retardement vers l’endroit par deux gardes de chaſſe, dont ils eſtoient ſuivis ; Et moy prenant ce temps-là pour dire à ce Gentil-homme que c’eſtoit moy qui avoit fait le coup, je le ſuppliay de me conduire en quelque lieu de ſeureté. Sa ſurpriſe & la penſée que le bleſſé fut mon veritable pere, luy arracherent d’abord quelques reproches qui marquerent l’excés de ſon eſtonnement ; mais eſtant ennemie de tout ce qui pouvoit alors eſtre inutile : Il n’eſt pas mon pere, luy repliquay-je avec chagrin, & ce n’eſt pas icy le lieu de vous expliquer ce myſtere. Si vous avez deſſein de me ſervir ; mettez-moy, luy dis-je, encore une fois, en quelque lieu où je ſois en ſeureté, & je vous contenteray aprés ſur toutes les queſtions que vous voudrez me faire. À ces mots il vit ſon Gentil-homme qui venoit encore au galop derriere luy, & il luy commanda de retourner pour me conduire dans ſon Château de Serſac auprés de la Marquiſe ſa femme, puis il pourſuivit ſon chemin pour rejoindre ſa Maîtreſſe.

Elle eſtoit arrivée au lieu fatal, & je ne ſçay pas ſi la maxime du temps eſt veritable, qu’on puiſſe avoir un galant & n’en aimer pas moins ſon mary ; mais on me dit qu’il n’y avoit jamais eu de deſolation pareille à celle de la Dame, lors qu’elle vit le ſien couché en terre ſur ſon ſang, & que s’eſtant penchée ſur luy pour le baiſer, il fut preſque impoſſible de l’en ſeparer. La médiſance qui n’épargne pas les plus ſaintes actions, ne put à la verité concevoir cét excés d’amour, & publia que c’eſtoit afin qu’on n’euſt pas ſi toſt le moyen d’étancher ſon ſang, & qu’en ayant perdu beaucoup, il en puſt moins réchaper ; mais quelque perſecution que cette Dame m’ait fait ſouffrir, & quoy que celà ait pû cauſer effectivement la mort à ſon mary je veux luy faire la juſtice de croire qu’elle fit tout de bonne foy.

On enleva ce pauvre bleſſé avec bien de la peine, & on l’emporta dans le plus prochain Village, pour luy mettre le premier appareil : puis on taſcha de luy faire nommer l’autheur de ſa bleſſure. Mais en vain on le luy demanda pluſieurs fois, il répondit que c’étoient trois hommes maſquez qui m’avoient voulu enlever ; Monſieur de Birague luy meſme, qui eſtant déja inſtruit par moy du principal, & le luy faiſant entendre, en eſperoit ſçavoir tout le ſecret, n’en put jamais tirer autre choſe. Cela fit que l’on ne s’obſtina point d’avantage à le faire parler, & que l’on ſongea ſeulement à le tranſporter dans la Ville.

Cependant, Madame, la diſcretion de ce malheureux, ſoit qu’elle fut un effet de honte ou de quelque reſte d’amour, me ſauvoit dans l’opinion de tous ceux à qui je n’avois rien confeſſé, ſi j’avois eu aſſez de force pour oſer paroiſtre aprés le coups ; car le Marquis de Birague me vint dire que tout le monde avoit pris ma fuitte pour un effet de la peur que ces raviſſeurs ſuppoſez m’avoient cauſée & luy-meſme qui appuyoit cette imagination, ne pouvoit penſer autre choſe de l’accident, ſi ce n’eſt que je pouvois avoir bleſſé le Financier en voulant tirer ſur eux ; mais il arriva un autre malheur qui découvrit bien-toſt le myſtere ; je le diray par ordre à Voſtre Alteſſe.

J’avois eſté miſe entre les mains de la Marquiſe de Birague, dans le Chaſteau de Serſac, le Marquis vint m’y retrouver, aprés avoir pris le ſoin de mettre auſſi ſa Dame de Moliere en quelque repos. Je vous avoüe que je fus touchée quand il m’apprit la conſideration que le bleſſé avoit eu pour moy, & qu’encore que je ne me repentiſſe aucunement d’avoir ſauvé mon honneur au prix de ſa vie, je ne pûs empeſcher quelques larmes de couler d’avoir eſté forcée d’en venir là : Je m’etendis ſur quelques plaintes que je donnay ſur l’heure à l’embaras où j’eſtois, & aprés je racontay bien au long à ce Marquis tout ce qui s’eſtoit paſſé avec l’hiſtoire que le Financier m’avoit faite ce qui le rendit bien eſtonné. Il avoit toûjours crû, comme moy & comme tout le monde, que j’eſtois la fille de cét homme ; & que Madame de Moliere ne luy avoit jamais confié ce ſecret, quoy qu’elle luy confiaſt ſouvent ſa perſonne meſme.

Au reſte la nouveauté de l’aventure m’acquit entierement le Cavalier, & il donna mille loüanges à mon action, au lieu de la blâmer, me fit cent proteſtations de ſervice, & enfin, Madame, il me parla comme un homme qui me trouvoit belle, & qui commençoit à ſçavoir que je n’eſtois plus la fille de ſa Maitreſſe ; je diray cela ſans luy faire tort.

Je m’en apperceus bien dés le moment ; mais la neceſſité de mettre quelqu’un dans mes intereſts, fit que je ne voulus pas faire un ſecond meurtre pour me venger des eſperances qu’il conceut peut-eſtre alors à mon deſavantage. Bien loin de celà, je le remerciay de ſa generoſité ; j’eus pour luy honeſtement toutes les complaiſances que je pûs ; & j’oſeray dire qu’une ſemblable rencontre eſtoit la ſeule qui pouvoit jamais m’accoûtumer à ſouffrir une declaration d’amour ſans colere, tant j’en eſtois ennemie mortelle auparavant.

Je demeuray deux jours dans ſon château, n’apprenant aucunes nouvelles de la Ville, que ce qu’il m’en envoyoit dire par ſon Gentil-homme ; & juſques à ce moment, il n’y avoit eu encore aucun danger pour moy : au contraire l’opinion que je fuſſe retombée entre les mains des gens maſquez redoubloit le deüil de la maiſon ; mais il n’en fut pas de meſme le lendemain que la fiévre avoit fait parler le malade dans ſes réveries, avant qu’il mourut. Il avoit preſque tout découvert, & prenant ſa femme pour moy, qu’il demandoit à toute heure, il luy avoit reproché le coup de piſtolet : On avoit compris à quelques autres diſcours interrompus, que c’eſtoit de moy qu’il parloit. L’allarme ſe mit auſſi-toſt dans la famille, on ceſſa de me plaindre pour m’accuſer, & avec d’autant plus de violence, que le fils de la maiſon, dont on me croyoit la cadette, eſtoit mort, comme j’ay déjà-dit, & que j’eſtois le ſeul obſtacle qui pouvoit empeſcher les parens du mary d’heriter d’un bien conſiderable. Madame de Moliere elle-meſme, quelque attachement qu’elle eut pour moy, en memoire du Duc qu’elle n’avoit point haï, & par la raiſon de quelques autres engagemens, crut que la bien-ſeance ne luy permettoit plus de me laiſſer paſſer pour ſa fille. Et peut-eſtre une autre politique luy fit conſiderer qu’elle ſeroit une veufve bien plus propre à remarier, quand on ſçauroit qu’elle n’auroit plus d’enfans ; Enfin elle s’eſtoit déja reſoluë à me laiſſer perdre. Et il n’y avoit rien plus aiſé que de me ruïner.

Monſieur de Candale eſtoit mort dés l’année mil ſix cens cinquanteſept, & ce galant Duc, dont la generoſité ſans doute, n’aimoit pas toûjours l’éclat, ne m’avoit pas fait connoiſtre à beaucoup d’autres gens, que le Financier & ſa femme, de peur, comme je croy, qu’on ne ſceut la charité qu’il avoit euë, en me traitant comme s’il eût eſté mon Pere. Toutefois ma bonne fortune ne m’abandonna pas encore, & Monſieur de Birague qui avoit envie que je luy euſſe beaucoup d’obligation, me rendit de ſi bons ſervices pendant quelques mois, dans cette affaire, & dans une autre qui m’arriva depuis, qu’il donna le temps au meſme hazard qui avoit conduit autrefois le Duc de Candale à la cabanne de ma Nourrice, d’amener encore une puiſſante Dame du fonds de la Flandre, pour prendre ſoin de moy en France, comme ſi elle eut eſté ma mere.

Au commencement donc que le ſoupçon fut tombé ſur moy, tout alloit eſtre en feu ; mais ce Marquis empeſcha l’orage de ſe former, & il repreſenta à ſa Dame qu’il luy ſeroit plus avantageux par mille raiſons d’intereſts & d’honneur, de me proteger que de me perdre ; raiſons que les charmes ſenſibles de la perſonne du Cavalier firent trouver ſolides à la belle veufve, ſi elles ne l’eſtoient point en effet. Ainſi aprés quelques jours & quelques aventures forgées, pour excuſer mon abſence & pour pretexter mon retour, Monſieur de Birague me vint annoncer que je pouvois ſortir du Chaſteau de Serſac, ce que je fis, & je m’allay jetter dans une Abbaye de filles à une lieuë de-là.

Il ſe ſervit de mille artifices pour m’y venir voir ſouvent ſans en donner de ſoupçon à ſa veufve ; Et l’hiſtoire meſme n’en ſeroit pas deſagreable, ſi je la racontois ; car comme j’ay déja dit, qu’il avoit un grand fonds ſur les obligations que je pourrois luy avoir avec le temps, il ne perdit aucune occaſion de me faire connoiſtre qu’il n’aimoit plus la Dame de Moliere, que pour meriter d’eſtre aimé de moy, en ménageant auprés d’elle, par ce moyen que toutes les choſes que j’avois à craindre, demeuraſſent étouffées à jamais ; il m’écrivit meſme quelquesfois des Lettres ſi plaiſantes là-deſſus, quand il n’avoit point de pretexte pour me viſiter ; que Madame l’Abbeſſe, avec qui j’avois contracté une étroite amitié, en partageoit avec moy le plus agreable divertiſſement du monde ; ſur tout lors qu’il nous mandoit que le chagrin que luy cauſoit mon indifference, luy attiroit des tendreſſes incroyables de ſa veufve, qui en faiſoit l’application à un redoublement d’amour qu’il avoit pour elle ; mais il faut paſſer outre, & dire ſeulement que je me perdis moy-meſme, par la folie que j’eus de complaire à cette Abbeſſe badine, qui avoit voulu que je luy fiſſe une réponſe. Ma lettre tomba je ne ſçay comment entre les mains de cette veufve. Elle reconnut en la liſant qu’elle avoit eu pitié d’une langueur dont elle n’eſtoit point coupable : Cette connoiſſance la mit en fureur, ſa jalouſie jura ma perte, & enfin elle ſe reſolut à punir ſon infidelle, en réveillant mon affaire qu’elle avoit aſſoupie. Il eut beau luy apporter des raiſons pour l’appaiſer, & pour luy oſter de l’eſprit qu’il m’aimaſt ſi fort ; Elle avoit eu la force de diſſimuler ſon déplaiſir juſques à ce qu’elle eut ſurpris la réponſe qu’il me feroit, & elle eſtoit bien pire que ma lettre : Il y avoit des railleries ſanglantes contre elle, qu’il y traittoit de plaiſante dupe, toute ſon amour fut convertie en une impatience extréme de ſe venger ; & pour y parvenir elle commença à publier le ſecret de ma naiſſance, & à donner des preuves que je n’eſtois point ſa fille ny celle de ſon mary. La nouveauté de l’hiſtoire fit auſſi-toſt un grand bruit dans la Ville, les parents du mort ſe raſſemblerent pour deliberer des moyens de me détruire, & tout ce que Monſieur de Birague pût faire pour moy en cet allarme, fut de monter promptement à cheval, & avant qu’on eut pû ſonger à s’aſſurer de ma perſonne, de s’en aſſurer luy-meſme ; il m’alla cacher dans une maiſon forte de Madame la Comteſſe d’Engleſac, ſœur de mon Abbeſſe, qui n’eſtoit éloignée du Convent que d’une petite demy lieuë.

Madame d’Engleſac eſt une veufve d’une haute vertu, & méme dans la devotion, quoy qu’elle ait l’humeur magnifique, & qu’elle aime à vivre avec ſes amis dans toutes ſortes d’honeſtes plaiſirs. Elle avoit alors deux de ſes filles auprés d’elle, & un fils le Chevalier le plus accomply du Royaume, les yeux beaux, la bouche plus belle ; un air de grandeur, la taille libre, haute & majeſtueuſe, une adreſſe incomparable à toutes choſes, un eſprit galant, une ame de Prince, & une valeur de Heros, ſont les moindres loüanges que je puis donner à ce Gentil-homme : Que Vôtre Alteſſe me le pardonne il me fut aſſez cher pour meriter bien d’autres emportemens, & c’eſt celuy qui doit avoir la meilleure part à toutes les choſes dont j’ay à parler dans la ſuite de ce recit.

Je receus dans cette maiſon toutes ſortes de ſecours & de bons traitemens, durant la plus chaude perſecution de mes ennemis ; Et tous ceux de cette famille ſe firent un honneur de me proteger dans une diſgrace ſi peu ordinaire, qu’ils nommoient l’effet d’une action heroïque, plûtoſt que d’un laſche aſſaſſinat, comme la Dame de Moliere le diſoit par tout ; Et enfin la Cour eſtant pour lors en Provence, ils m’obtinrent ma grace du Roy, avec toute ſorte d’avantages contre mes parties.

Mais la fortune qui n’avoit pas deſſein que je fuſſe long-temps ſans traverſes, afin d’avoir ſouvent le plaiſir de m’en relever, ne laiſſa point durer cette faveur. Birague qui m’en vouloit tout de bon, & qui eſtoit amy particulier du fils de Madame d’Engleſac, luy parla ſi ſouvent de moy, & du plaiſir qu’il y auroit à en eſtre aimé, que ce jeune Cavalier le crut, & me regarda pour luy-meſme. Ses yeux m’en parlerent, je n’y fus pas inſenſible ; & je puis l’avoüer ſans rougir, puiſque j’en ſeray juſtifiée par la ſuitte. Birague s’en apperceut, & en devint jaloux ; mais je dis jaloux à ne vouloir rien ménager pour me punir de luy avoir preferé ce Gentil-homme. Et je l’en excuſe bien ; un Amant qui perd n’eſt pas obligé d’en uſer plus civilement. Il fit connoiſtre ſous main à la Comteſſe les amours de ſon fils, & quelles dangereuſes ſuites elles pourroient avoir. La Dame qui avoit de l’ambition, & avec juſtice (leur famille eſt une des plus nobleſ & des plus riches du Royaume,) ne s’endormit point y donner ordre ; Elle me tira un jour dans ſon Cabinet pour m’en parler, & aprés m’avoir remontré avec beaucoup de douceur, qu’elle me croyoit trop ſage pour conſentir jamais à la moindre faute, & trop reconnoiſſante auſſi, pour vouloir profiter du fol amour de ſon fils ; elle me pria de luy oſter ſi bien toute eſperance, qu’il quittaſt le deſſein où elle ſçavoit qu’il s’eſtoit embarqué.

Et ne ſoyez point faſchée, me dit-elle voyant que ſon diſcours m’avoit fait rougir ; de ce que je vous parle avec cette franchiſe : c’eſt que je vous aime infiniment, & que je ſerois inconſolable, ſi par faute de vous en avoir avertie, vous vous eſtiez engagée dans une choſe qui me donnât lieu de vous éloigner de moy, & de me plaindre de vous.

Une douleur ſecrete, qui avoit ſuccedé à ma rougeur, m’avoit fait tenir les yeux toûjours beſſez juſques à ce qu’elle eut finy ſon diſcours. Et quoy que je previſſe que j’aurois bien de la peine à obſerver ce que je luy promettrois : je luy promis neanmoins de faire tout ce qu’elle me commandoit, afin qu’elle ne prit pas le party de m’éloigner. Ce ne fut pas ſans cauſer de grands chagrins au jeune Comte qui ne pouvoit deviner la cauſe de mon changement. Il voulut cent fois m’en demander le ſujet ; mais j’eſtois toûjours ſi bien obſervée, tantoſt par Birague, & tantoſt par la mere, que je n’oſay jamais luy en parler, quelque envie que j’en euſſe ; Et luy qui prenoit celà pour un mépris, en paſſa juſques à un tel deſeſpoir, qu’il en fut dangereuſement malade.

C’eſt icy ; Madame, que je me diſpenſerois volontiers de la loy que je me ſuis faite, de dire beaucoup de choſe en peu de mots ; pour étendre le recit de cét amour qui eſt encore cher à mon ſouvenir. Mais je crains que je ne m’imagine de donner à Voſtre Alteſſe comme une choſe agreable, qui peut-eſtre ne le ſera que pour moy, qui y ſuis encore intéreſſée.

Qu’une femme eſt folle quand elle aime ! ou qu’elle eſt malheureuſe quand elle a de la vertu & de l’amour ! que j’eus à ſouffrir, pendant ce peu de jours que cét Amant fut dans ſon lit, & qu’on ne me permit pas de luy faire viſite ! qu’il ſouffrit luy-meſme de ne me voir pas ! Je croy que le ſeul dépit qu’il en eut, le guerit par l’envie qu’il luy donna de venir au plûtoſt me reprocher cette dureté : il me ſouvient des meſmes paroles qu’il me dit un jour dans ce dépit, qui luy ſembloit le plus juſte du monde. Madame d’Engleſac eſtoit occupée à recevoir le Duc de Villars, & l’Eveſque d’Agde, qui l’eſtoient venu viſiter l’un & l’autre en meſme temps. Le Chevalier des Eſſars, Gentilhomme de merite, & le mieux fait de ſon Païs, les avoit accompagnez ; & comme j’ay déja dit, que le Comte d’Engleſac avoit deux ſœurs ; ce Chevalier eſtoit amoureux de l’aiſnée. Je penſe méme que le Duc de Villars n’eſtoit là venu que pour trouver un moyen d’en faire le mariage, & je ne ſçay ce qui empeſcha qu’il ne ſe concluſt : mais quoy qu’il en ſoit ; tandis que la Mere s’entretenoit avec luy dans un Salon, l’Eveſque avoit donné envie aux autres d’entrer dans la gallerie, & toute la compagnie s’alla mettre au bout ſur des bancs. Mon jeune Comte s’y vint aſſeoir auprés de moy, & aprés avoir jetté un grand ſoûpir de ce que je ne le regardois point ; (je ne l’oſois à cauſe que la plus jeune de ſes ſœurs me tenoit de l’autre coſté, & s’appuyoit en badinant ſur mon épaule) il me dit aſſez bas d’un ton de dépit ; Vous voulez que je meure crüelle, je le voy bien, ouy vous le voulez, & il eſt aiſé à connoiſtre que je vous euſſe fait plaiſir s’il eut dépendu de moy de mourir de ma maladie ces jours paſſez ; mais je vivray peut-eſtre encore aſſez pour vous reprocher voſtre inconſtance plus que vous ne le voudrez.

Je ne luy répondois rien, & au contraire de peur que fa fœur n’entendit ce qu’il me difoit, je luy tournois l’épaule, pour fare mine de badiner avec elle tandis qu’il parloit, de forte que cela irritant de plusen plus fi douleur ; ä continüa de : m’accabler de tant de reproches, que j’eus bien de la peine à empefcher mes larmes de paroiftre & de répondre pour moy. Je mis mon évential devant mon vifage, & ne letemps que le Chevalier des Effars avoit obligée la jeune d’Englefic à fe tourner vers luy, je dis à mon qu en le regardant de cofté ; Taifez-vous, ne m’affigez pas davantage, je ne fay rien que par force & par contrainte, je fuisla plus malheurcaf fille du monde, & je voudrois ne vous avoir ja- mais veu ; Là-deflus je me levay & emmenay fa fœur pour éviter la fuite d’un entretien qui eut pà nous eftre nuifible. ll

Il feroit mal-aifé d’exprimer Pembarras où cét amoureux Gen- til-homme fe trouva, aprés que je luy eus fut cette réponfe. ï fça- voit bien que j’eftois fincere, & qu’il faloit que j’euffe de grandes raifons de faire ce que je faifois, — pour luy avoir parlé de la forte ; mais je ne luy en avois pas aflez dit à fon gré il faloit une autre entreveuë pour s’éclaircir mieux : Que ne fit-il point pour lobtes nir

Celà eft incroyable, Madame, & ce fut encore une chofe digne de moy qui eftois deftinée à voir & à caufer des effets tout extra- ordinaires, car il mit le feu dans un endroit du Chafteau ; ne voyant pas de moyen de difperfer tous ceux qui Prabloieut eftre Res pour me gefher, qu’en les obli- geant à craindre quelque chofe de plus facheux que nos entre veués.

Madame d’Englefac s’eftonnee ra, peut-eftre, en apprenant par la leéture de cette hiftoire, la caufe de cét. accident, que fans ceh elle auroit toûjours ignorée. Mais enfin telle eftoit pour moy la paffion de fon fils ; & elle a . dit quelquefois plus vray qu’elle ne penfoit, quand pour dire que j’avois mis le trouble dans fa fa- mille, elle na accufée d’avoir

porté le feu dans fa maifon. _ Je ne fus jamais plus furprife que lors que je vis entrer cét Amant troublé dans mon apparte- ment, où il fe jetta à mes pieds, tandis que les autres fe fauvoient

  • prefque en chemife ; car Ceftoit

a nuit ; Et qu’en m’empefchant de les fuivre, ik me confefla qu’il

avoit caufé ce defordre à deflein. Necraignez-rien, me dit-il, il a un foffé entre le feu & nous. ous pourrez demeurer en feure- té dans cette chambre ; ne refufez pas de m’écouter un moment, Le je facrifie tout à une occasion fi chere. :

“Je fis ce qu’il voulut, & je lé. coutay en achevant de m’habiller, ne pouvant douter qu’un homme qui brûtoit fa maifon pour cela, n’eut un grand befoin de me parler. Je luy rendis conte de mes froideurs & de mes. feints mépris des difcours que Madame fa mere m’avoit tenus, & des promcffes que je m’eftois crû obligée de luy aire, de peur qu’elle ne refolut à nous feparer. Cét éclairciffement luy fictous les biens du monde ; & enfin, Madame, aprés que nous y eûmes ajoûté une legere confüitation fur les mefures qu’il nous faudroit prendre pour trom «  per nos furveillans à l’avenir, je vis mon homme fi content, que pour beaucoup de chofe il n’eut pas voulu m’avoir pas brûlé un aflez beau baftiment.

Cependant le feu avoit répendu Pallarme dans tous les Villages voifins. Le Marquis de Birague qui n’eftoit éloigné que d’une lieuë & demie, ne fut pas des, derniers à s’appercevoir que c’e= ftoit noftre Chafteau qui brüloit. Il f fitfller des cheveaux : Il vint en diligence : ne me trou vant point avec les autres femmes dans le Parc où elles s’eftoient retirées , il courut de tous coftez ur apprendre de mes nouvelles : Il s’avifà mefme de monter à ma chambre, en forte qu’l y penfa furprendre le Comte d’Englefac ; Mais comme ce Marquis (à qui vrayment j’eftois alors bien obligée ) m’appelloit par tout en paflant avec grand bruit, cela avoit donné Le temps au Comte de fe cacher, fi bien que j’en fus quitte pour contrefaire l’évanoüié, afin que cela m’excusât d’eftre demeurée là ; Et pour efluyer quelques baifers que le Marquis me donna pour la peine qu’il eut de m’emporter entre fes bras ; ce que je feignis de fouffrir fans revenir à moy, jufques à ce que je me vis un peu loin de ma chambre.

Depuis ce temps-là, le Comte d’Englefic & moy nous vefcûmes avec beaucoup de circonfpeétion, & pour. mieux déroberla connoiffince de noftre amour, nous fei- . gnîmes de’ nous haïr mortelle. ment. Nous ménageâmes cette feinte avec aflez de conduite, & nous en pretexrâmes les caufes les -plus apparentes qu’il nous fut ue fible. Éigue en fut fi aife qu’il s’y trompale premier : La mere d’En-L. le fuivit me à en faire le grandes reproches à fon fils, & à m’en confoler par mille nouveaux témoignages de fon amitié, & de fa proteétion ; Enfin nous £ftions heureux f nous nous fussions contenté de cette precaution. Mais un homme de qualité des environs de là fe rendit amoureux de moy en une vifite qu’il fit à Madame la Comtefle d’Enpris Le Comte voulut que je cignifle encore d’agréer fon. fervice, & c’eftoit trop de fincfle ; Cét ‘homme Sesberque fort avant à m’aimer, m’écrivit fouvent ; le Comte par une impru--dence de jeune homme s’avifa de luÿ faire une réponfe pour moy, & l’envie de railler le difpenfa à m’y faire parler un peu amoureu- ‘ fement. Ce rival indifcret ( comme il n’y a guere d’hommes qui

ne le foient lers qu’ils fe croyent favorifez , &’mefme quand ils ne croyent pas l’eftre) montra cette réponfe à P’Amy, & cét Amy le dit à un autre. Cr autre l’apprit à Birague, qui la crut de ma main, & m’en vint faire de grandes plaintes. Je m’en plaignis moy-mefme au Comte, voyant le tort que cela me fafoit : &. céluy-cy reconnoissant fa faute, & penfant la reparer par une plus grande, alla couvrir qué c’ftoit luy qui-en “eftoit Fauteur. ; & qu’il les avoit écrites pour fe mocquer de. fon ’tival. Pour conclufon il arriva un grand malheur de toutes ces folies.

Le Chevalier des Eflars dorinoit le Bal à la fille afhée de la

Comteffe d’Englefac, & il yavoit

belle compagnie, que le voifinage de la Cour avoit raffemblée chez la Marquife d’Ampus. Les deux Rivaux s’y trouverent, & s’y eftant querellez je ne fçay -eommént, noüerént une partie pour le lendemain au deflüs de Ville-neuve. Le combat fut fan- ’glant, deux feconds y furent ’tués, & lapartie du Comte bien bleffée ce qui produifit deux effets tres-fafcheux ; l’un que le Roÿ ayant renouvelé fes Edits contre les duëls,’iln’y ent plus de feureté pour mon-pauvre Amant à demeurer en France, & l’autre que Péclairciflement du fujet de ce duël’, fit connoiftre à la Dame d’Englefac :que la haïne d’entre fon fils & moy n’eftoit qu’un jeu concerté.

Et rien de pis ne me pouvoit ar river ; carconime j’eftois la caufe apparente de tout ce defordre, par ma defobeïffance : Elle me fit dés le lendemain enlever dans un Cloittre fc elle deffendit de m” laifler voir à perfonne, jufques { ce que je me fufle refolué d’y prendre l’habit. Ce que j’y trouva encore d’affigeant fut que ce n’étoit pas le mefme lieu dont fa fœur eftoit Abbeffe, où j’eufle pü du moins efperer quelque focieté ; C’eftoit un Convent, bon Dieu : de. Couvent ! qui fembloit plàtoff une affreufe prifon que toute autre chofc. J’y demeuray deux mois,&t cependant mon cher Comte d’Englefac fe fauvoit par le Piémont, où la plufpatt des Dames qui n’épargnoient rien pour s’en aire aimer ,‘juftifioient : le tendre penchant que j’avois pour luy.

Au bout de ces deux mois le Roy fe rendit à Avignon en res venant de Marfeille ; & comme il ÿ pafla quelques jours à l’occafeni de la Citadetle d’Orange qu’il ne de voir fortifiée au milieu de fon Royaume. Celafit que tous . les Galans de la. Çour fe répandis rentde cofté & d’autre, & queles parloirs des Dames Religieufes eurent part à cette inondation de Courtifans. Dans cette réjoüiffance univerfelle pour ce petit peuple de Dieu, quieftoit bien aife d’admirer la :galanterie de tant de bra= yes Cavaliers, & d’honoter leur Roy en leurs perfonnes ,on ne me tint plus de fi grandes rigueurs ; & quoy que Madame d’Englefac n’y consentit pas, on me laissa voir quelquefois le monde au parloir, afin que je n’eusse aucun sujet d’accuser les autres.

Je me souviendray méme toûjours de ce passage de la Cour à Avignon, qui donna tant de joye, aux plus jeunes de ces pauvres Recluses, qu’à toutes les fois qu’on leur disoit que le Gouverneur d’Orange rendroit la Place par composition, elles faisoient mille imprecations contre la lascheté de cét homme, & le jugeoient digne du dernier supplice, parce qu’il n’arrestoit point là le Roy un an entier, par une genereuse resistance.

Birague qui ne m’avoit pas oubliée, prit cette occasion pour continüer à me venir offrir ses services, & quelque temps aprés, par la voye d’un Gentil-homme à qui le Comte d’Englefac avoit adressé des lettres pour. moy ; je receus auffi des aflurances que j’eftois toûjours aimée. Mefine l’une des Recligieufes,. comme pour ajoûter une autre fujet de joye à celuy-là me prophetifaen mefme jour, que PAmour me tireroit dans peu de captivité. Il eft vray que je fus long-temps à. comprendre come ment cela fe feroit ;.me femblant que j’eftois fi : bien gardée, qu’à moins que mon Amant ne vint mettre le feu au Cloistre, comme il l’avoit mis à fon Châreau ; il eftoit. mal-aifé de faire un coup de certe importance. On pouvoit. bien franchir le mur d’un petit jardin, mais la Superiere en avoit toüjours les clefs, & qu’il eftoitimpoffible d’y entrer fans fa permiflion. Ce fut auffi ce que je répondis. à la Religieufe ; mais-elle ny repli. quoit rien, finon que la chofe ar- riveroit comme elle avoit dit, & que j’eufle feulement patience.

C “Trois 36 La vie dé Henriette

Trois jours aprés Monfieur de Lorane, dont on avoit fait le Traité à Saint Jean de Luth, vint joindre le Roy : en pofte dans

Avignon, Ce Prince er

dant qu’infortuné, & qui adore es belles qualitez du fexe aufi bien fous le voile qu’ailleurs quand elles s’y trouvent ; aprés fes com- pliments faits, groffit les aflaillans de nos Parloirs. Feu Monfieur le “Duc de Guife l’y fuivits & com- me ce dernier s’adreffa à moy plus qu’aux autres, om À tout d’a- bord m’imaginer que la prophetie avoit voulu parleride luy, & que ce feroit par fon moyen que j’ob- tiendrois ma liberté : Car, Ma- dame, il ne s’épargna point dés le ps jour à me faure l’amour le plus obligeäment du monde, à me donner lefperance de ma for- tie, & d’une toute autre fortune encore, fi j’avois la bonté de l’é- couter. Je crûs mefme en voir te — ct /

Sylvie de Maliete. : 57 fetbien-toft aprés dans Ie foin qu’il rit d’en parier à la Reyne Mere. ais la Comtefle d’Englefac en ayant eu le-vent par fes efpionss. avoit prevenu— ee.de cette. bonne : Princeffé : Elle luy avoit,

donné de pernicieufes impreffions !

de ma conduitte, en m’accufant de tout le malheur de fon fils ; La, Marquife des Effars, & mefme la Marquife d’Ampus, vint.dire en core qu’on ne, pouvoit faire yne, plus belle œuvre que de.me lai. fer enfermée. 11 n’en faloit pas da- vantage pour, mettre la Reyne. elle-méme contre moy. Auf le. Duc de Guïfe n’obrint rien, 1Sa Maijefté le refufa de bonne grace ; & dit qu’il eftoit un.intercefleur trop galant, pour m’expofer à luy avoir de telles obligations. Il re tourna à la charge.le fendemain, fortifié du fecoprs de Monfeur de Loraine, & d’une Princefle, qui. pour lobliger s’offrit d’eftre ma " C5 cau58 : Lavie di Henriette"

caution ; Mais la Reyne n’éh vou lut pas d’emordre ; ’Et fur ce qu’il fe forma alors un païty charitable enmafaveur, on dit que fi je-vou- lois fortir, il faloit du méihs : que

” ée fût pour époufer le vieux : Cas

brieres, qui avoit offert à Mada- me d’Englefac de me prendre en

mariage, " Le Ducde Guife fe fit lé meffa- er de cette nouvelle, prévoyant en que fi je la recevois d’une autre bouche que de la fienne, ma réponfe rendroit inutile tout ce qu’il auroit fait. Et à dire la ve- rité, il ne fe trompoit pas ; car j’eus fulement bien de la peine à me Penteñdfe annoncer par luy-mef- me. Et voyant qu’il employoit tout fon ferieux, pour me faire concevoir quel avantage c’eftoit fouvent pour une belle femme d’a- voir un mary qu’elle puft eftre dif- enfée d’aimer : mon humeur fo- aftre-me fit trouver plus de fie k e Sylvie dé Moliere. so de rire que de m’affliger, à voir les hautes efperances que j’avois concéuës de fa negociation, s’en ale ler en fumée ; & je luy répondis en riant qu’il fe mocquoit ; & que Le encore mieux lotir par- er pour luy-mefme, que pour le vieux mary qu’il m’offroit ; il fe prit à rire, comme moy ; trou- vant dans ma folie une efpece de … charme qui l’engagea davantage

m’aimer ; Et ainfi la chofeen dé- meura en ces termes, & la proi phetie n’eut aucun effet de ce co «  fté-là. \ + Ma Religieufe à qui je faifois éonfidence de tout ce qui pafloit, voyoit bien l’erreur où fes paroles m’avoient jettée, & n’avoit pas auf prétendu, quand elle avoit dit que PAmour me délivreroit, que ce dût eftre celuy de ce Prini ce. Mais comme prudente, elle. ne jugeoit pas à propos de me dé- couvrir rica de plus particulier,

’ C6 juf 69 La vie de Henriette jufques à ce qu’elle vift toutesles chofes difpofées à faire reüffir fa rediétion ; & quand il luy fem- la qu’il en eftoit le temps, elle men fit feulement part.

Durant les momens de liberté on fe difpenfoit de prendreaux ’arloirs contre la regle depuis

l’entrée du Roy ; & c’eftoit com- mg j’ay déja dit, pour honorer

ce Monarque par quelque chofe.

d’extraordinaire : Fouquet un jeun Genul-homme tres. fpintuel, avoit fait amitié avec cette Religieufe. Elle eftoit fille du deffunt Baron de Fontaine, qui füivant la maxi- me de la plus grande partie de la Nobiefle, en avoit fait un fa. crifice au Convent pour rendre © fon fils plus riche : Cette viétime avoit protefté plufieurs fois contre fes Vœux, fon frere eftoit mort depuis ; Et il luy fafchoit extréme- ’ment de voir un grand bien dont €lle pouvoit heriter, parents

es Syluit de Moliere. 6r les, mains de deux tantes. Fou- quet, dis-je, qui luy avoit trou- vé des charmes, eftoit entré fort avant avec elle dans la haïne de cette tyrannie, avoit promis de la fervir, &l’Amour faifant d’heure en heure des progrez d’autant plus confiderables en ces deux Armans, qu’une grille s’oppofoit à luy, Bi- rague foufant encore le feu ; car, cette partie ne fe faifoit pas à fon infceu ; ce Gentil-homme s’eftoit enfin refolu à enlever la Dame. Les mefures eftoient prifes, là clef du jardin, attrapée & contre. faite, & une Tourierc de l’intel. ligence ; car rien. n’eft impoñfible à l’Amour qui veut forur d’un Convent, & qui efpere fe relever du Vœu de Clofture. La Reli. gieufe me découvrit le foir tout. fon fecret, & me demanda fi je voulois par mefme moyen que Fouquet m’enlevât à ceux qui

me perfecutoient, D’abord la pro-

pof&@ La vie de Hengiètte

ofition me furprit, il me fem-

loit qu’il y avoit quelque chofe à redire à cette conduite ; mais pourtant. lors que j’eus fait re- flexion fur l’eftat où je me voyois, qui pourroit durer : longtemps fi je n’acceptois cette occañon de me mettre en liberté ; je confens tis à me rendre au jardin avec elle fur la my-nuit, ce que nous fifmes aflez fubtilement, Nous ny eûmes pas attendu un.demy quart-d’heure, que nous oüifmes le fignal de Fouquet, lequel aprés que nous y eûmes répondu, com- mença à enjamber ke mur ; & à defcendre Le long d’une treille defpalliers, qui même n’eftoit pas trop bonne, & fit du bruit en fe rompant. La crainte me fafifloit, & je puis dire que j’en âvois dix fois plus que : la : Reli- gieufe, quoy que je coüruffe bien moins de rifque. Fouquet qui s’en apperceut me raflura, & pour

ména“Sylvie de Moliere : 63 inénager le témps, commença à faire partir fa Lie raies

Mais je ne je poura bien radgter a étre Aleffe ù maniere tout-à-fait plaifante dont il fe fervit, pour nous porter juf- ques für le mur. Comme il n’y avoit point de feureté à prendre noftre chemin par la treille, qui s’eftoit déjà rompuë ; il fe courba en s’apuyant des deux mains con- tre ce mur, & nous fit monter FPune aprés l’autre fur fon dos. Nous ayant ainfi fur fon dos, il fe rehaufloit peu à peu, & nous montioris fur fes épaules. Tandis que nous nous tenions en céteftat à des chevilles de fer qui foûte. noient la treille, il montoit luy- mefme fur une grofle pierre qui eftoit à fes pieds : Aprés celà nous marchiohs für fa téfte, & de fa te- fte nousnous affeyions fur le mur, : d’où une cfpece de Valet de cham- bre, qui n’avoit pas fi haut à at-

ve teindre 64 La vie de Henriette teindre de fon cofté, parce que le terrain ÿ eftoit plus relevé, nous defcendoit fur des chevaux. Ils nous donnerent en fuitte des cha- peaux avec de grands manteaux couvroicnt toutes nos jupes, & dans cét equipage nous fortifmes cavalierement de la Ville, qu’on ne fermoit pas depuis la venuë du Roy. _ :

Nous fifmes quelque chemin, fans qu’il me fad poiBble de re, connoiftre où l’on me menoit, & je roulois dans mon efprit mille je tanioft plaifantes, tantoft acheufes, en faifant reflexion aux. effets que cét enlevement poure roit produire. Birague que je con- noiflois pour un intrigant fort a- lerte, ne caufoit pas le moindre de mes chagrins, & je difois à Fouquet & à fa belle, qui s’é- toient mis malicieufement à men parler : Vous verrez qu’il fera tant de tours, qu’il découvrira où nous

fe Sylvie de Moliere.” és ferons, il gatera toutes nos affai- res. Pourquoy, a a ? me répondoit la Religieufe, je croy. Monfieur de Birague un plus ga «  Jant homme que vous ne dites, & je me ficrois bien à luy. Fouquet qui me trahifloit comme elle, ajoü- toit qu’en effet Birague eftoit un honefte Cavalier, plus propre à fervir une Dame, qu’a luy donner du déplaifir, Oüy : repliquois-je, s’il n’eftoit pas fi intereflé, & ne vouloit pas eftre payé des moin «  dres obligations qu’on luy peut avoir ? mais je ne vis jamais un homme plus fatigant, & qui aille plus à fon but que luy.

C’eft ainfi que nous avancions chemin, eux en difant mille biens de ce Gentil-homme, & moyen ne cachant rien dece qui m’en dé- Plaifoit, dont ils fe tuoient de rire en fe retournant —à chaque mot versleur Valet de chambre qu’ils accufoient de dormir ; Et iNget

& à + ae 66 La vie de Henriette Madame, s’ils avoient raifon defe divertir, Ipuifque ce Valet de chambre eftoit le Marquis de Bi- rague luy-méme, qui avoit fait fecrettement cette partie avec Fouquet, & qui me menoit à une defes maifons. Je penfay ne leur jamais pardonner cette tromperies and nous fûmes arrivez, &t que la Religicufe qui craignoit moins les hommes que moy., pour com imencer à my accoûtumer, luy. cria : Allons noble Valet de cham- bre pied äterre, & qu’on aide à cette belle à defcendre de cheval. Jefis un cry qu’on pouvoit enten- dre de bien loin, en reconnoiffant le vifage de Birague, & on eut toutes les peines du monde à me remettre de ma frayeur. Mais quoy ! me dit ce pauvre Gentil— — homme, que ma façon d’agir affi- geoit ; En bonne foy aimeriez- vous mieux eftre encore dans le Convent expolée à tout cequela | 6 ven ’Sylvie de Moliere. : ë7 Vengeance de Madame d’Englefac feroit capable de faire contre vous, que de me fçavoir quelque gré de voftre liberté ? Fouquet & fa Da- me.luy aiderent à obtenir que je ferois moins l’effarouchée, & que je ne luÿ voudrois pas du mal, & enfuitte nous fongeâmes tous à prendre des mefures pour nous émpefcher de patir de cette efca-

de. Nous nous mifines au lit la

eligieufe 8 : moy ; & nos deux Chevaliers jugerent à propos de retourner avant le jour dans Avi- gnon, pour s’y. montrer le lende. main, & prendrelangue ; ce qu’ils freñten : y rentrant par une autre Porte :.

Cependant le jour fut à peine venu, que lalarme commença à eftre au Monaftere, & que Ha nouvelle s’enrépandit. Une tante de la Religieufe qui eftoit pour lors à la Cour, fit de grandes

plaintes contre les Nones, qu’elle

.. ACCU63 La vie de Henriette

accufñ d’avoir prefté leur confen- tement à l’evañon de fa Niece. Madame d’Englefac, pour’inte- reft de fon fils, de la grace duquet elle ne defefperoit pas, & qu’elle apprehendoit que je n’allafe épou- fer hors de la France, parla encore lus haut, & en demanda juftice à a Reyne Mere. Sa. Majefté faup- gonnant te Duc de Guife d’y.avoir contribué, luy.en : fit mauvaife mine tout ce jour là : Le Duc qui eftoit innocent de Pintrigue, pro- tefta qu’il n’y avoit aucunement trempé, & voulant ofter ce foup- çon à ta Reyne, mit des gensen campagne.pour nous fuivre ; de forte que nous n’étions pas embar- quezen une petite affaire. Il n’eut autre remede que de laiffer aflou- pir un peu les chofes par lc temps, de donner le loifir au Roy de pren «  dre Orange, & en attendant de fe confoler le mieux qu’on pourroit les uns les autres dans la maifon de Biraguc. On Sylvie de Molirre. 6) “On n’a point crû qué cesdeux Gentils5hommes y euflent efté auf fages que des Capucins, &c on a mieux aimé fe perfuader qu’ils “avoient ufé des biens que la fortu- ’ ne fembloit leur prefenter ; mais je leur rendray certe juftice, que jamais hommes n’eurent plus de refpeét ny plus de modeftie ; qu’en Peftat où je me voyois, & crainti- ve comme j’eftois alérs, je n’en attendois pas tans, &t : que ce fut en quoy je commençay à eftimer le Marquis de Birague, plus que je n’avois fait ; On nous rendra juftice à nous-mefmes fi lon veut.. Nous ne demeurafmes pour- tant guere dans cette maifon ; car le Roy obtint peu de jours aprés -tour.ce qu’il voulut ; & ayant fait mettre un nombre de pionniers pour. démolir la Citadelle d’Oran- ge, vint traverfer tout un cofté du bas Languedoc pour s’ache- . miner 70 Lavie de Henriette miner à l’Ifle de la Conference, où linfante d’Efpagne fe devoit rendre. Fouquet qui ne manquoit d’intrigne ny d’amis, jugea à pro- pos de fe fervir du pañlage de cet- + te petite Armée qui campafe d’or- dinaire la fuitte des Roys ; pour s’éloigner avec mains de foupçon, dans Fe meflée, d’un voifinage trop dangereux.il nous mit dans de chariots de bagape ; nous déguifa en femmes de. Marchands fuivants.la Cour ; Et le mot eftant donné : de prendre à droit au de là de Carcaf- fone, il nous fit conduire à Thou- . Joufe fous couleur d’y aller char-

er des provifions pour. Monfieur Frere unique du Roy ::— ” La Prefdente de… jencfçay ’plus fon nom ; bonne & vieille veu- ve ; qui eftoit coufine de la Reli- gieufe, & qui n’avoit jamais ape a qu’on luy eût fait faire pro-

fin de force, nous receut fa Maifon, & prenant aufl-toft le

, party party de ſa parente, commença à l’appuyer dans le Parlement, auquel elle demanda ſauve-garde & liberté de ſa perſonne pour ſolliciter la diſſolution de ſes Vœux. Elle en vint à bout avec le temps, & aprés bien des ſoins : Et Fouquet qui s’en eſtoit donné quaſi toute la peine, ne ſut pourtant pas celuy qui en eut le fruit. Mais je ne diray pas davantage de circonſtances de cette hiſtoire, qui n’a plus rien de commun avec la mienne. Eſtant arrivée chez cette Preſidente, je ne me crus guere plus en ſeureté dans ſon logis que dans la maiſon de Birague ; Au contraire la renommée, ce monſtre qui groſſit toûjours en chemin faiſant, avoit porté le bruit de mes affaires dans Thoulouze, m’y avoit dépeinte avec de pires couleurs que celles dont la Marquiſe d’Ampus & la Comteſſe d’Engleſac s’eſtoient ſervies pour me détruire 72 La vie de Henriette chez la Reyne Mere. On m’y ve- noit faire tous les jours, ſans me connoiſtre, des hiſtoires ou plûtoſt des fables de ma vie, qui me cha- grinoient fort ; d’ailleurs la Preſi- dente qui ſembloit ſe douter de quelque choſe, bien qu’on ne me fit paſſer que pour une fille qui ſervoit la Religieuſe, ne me voyoit chez elle qu’à regret ; ce fut bien pis quand ſa couſine crut me ſer- vir, en luy declarant le myſtere, l'aſſiduité de Birage luy déplut ; la jalouſie de la Marquiſe ſa fem- me, qui faiſoit éclater les ſoupçons qu’elle avoit de luy, vint encore charger là-deſſus. Les diligences de la Comteſſe d’Engleſac à me faire chercher, comblerent la me ſure : La pauvre vieille femme craignit qu’on ne vint s’informer de moy à la Religieuſe qui ne ſe cachoit plus, & avec laquelle je devois avoir ſauté les murs ; & tout cela fit qu’elle me conſeilla de sor- tir Sylvie de Moliere” 3 tir du Languedoc le plûtoft que je pourrois, fous une belle apparèn- ce de ne regarder en celà qu’à mon feul interet. fentendis ce qu’el= le vouloitdire ;.je meletins pour commandé ; je me vis reduite en unc étrange perplexite d’efprit, ne fçachant plus où donner de la tefte, à moins que de me mettre À le difcretion de Birague : Il s’offioit yeritablement de me conduire à Paris, & de ne me jamais abandon< ner ; mais la pédion en eftoit à craindre, & la compagnie foup-

neuf : Que faire ? ma bome ortune ordinaire y pourvût.

Lors que la Dame de Moliere avoit éclaté contre moy pour van= ger fon mary ; lanouvelle en avoit couru le monde, il s’eftoit fait un : article curieux dans les Gazettes : de l’hiftoire de ma naiffance. Un Duc de Candalle intrigué en tout celà, relevoit encore la chofe ; le bruit ’en avoit. paflé les. Frontie..

L. Partie, D res 74 La vie de Henriètte. es les plus reculées du Royau- me. Le Marquis de Saint Eftiene ne, Capitaine de Monfieur le Prin- ce, qui eftoit encôre à Bruxelles, en regala une charmante Dame du Pais, paflionnément amou- reufe des belles avantures ; & ce fe un acheminement à mon fa- ut,

La Marquife de Seville (c’eft le nom de cette Dame, dont la ruelle a efté remplie de tout temps de ce qu’il y a eu de plusgalant dans les Païs-bas) eftoitune fem. me de taille extrémement fine, qui avoit cfté autresfois tres-jeune & tres-belle, & en qui on remarquoit une HE de certaines Princefles. Elle avoit extraordi- nairement de ce bel efprit qui plai- foit tant en France, avant que ce : fut la. mode d’y eftre moins con- certé, &on ne luÿ pouvoit faire de plus grand plaifir, que de Pintes reflér en quelque intrigue. fpiri-

s ds tulle : ’Sylvie de Moliere 75 tuelle : Princes, Marquis, Comtes & Barons, luy. ont plû par-là, & jufques au frere du Secretaire des Commandemens de Monfeur le Prince ; il ya peu d’honneftes gens qu’elle-mefme. nait embarraflez en quelque avanture digne de fon bel efprit : Voftre Altefle jugerà cette defcription criminelle, lors qu’elle apprendra par la fuitte de ce difcours, que cette mefine Da »

_m’a fait de grands biens. Mais eut-on s’empefcher de faire part à fes amis d’une peinture fi rare ? il y auroit plûtoft du crime à l’en- fvelir, principatement quand la perfonne.mefme nven. fçauroit ré, bien loin de s’en fâcher fi els e eftoit encore vivante. J’adjoû. teray donc que le Duc de Candal- le, jeune & bien fait, fut fonpre- mier : Heros, : lors qu’elle eut per miflion de pafler : à Paris pour al. ler trouver fon enCatalogne ; que fix.ou fept an$ aprés. quand Le D 2 ce 76 Laviede Henriette ce Seigneur y eftoit Lieutenant General d’Armée, elle penfa en- core l’y accabler. d’avantures & de galanteries parmy l’embarras des armes : Ilnefe pafoit ’jour qu’elle ne luy envoyât de fes nouvelles avec des fubtilitez incroyables. Ellefé déguifoit fouvent pour Pal- ler trouver jufquesen fa tente ; & une fois entre-autres, elle s’y fit conduire fous le nom d’un efpion qu’on croyoit avoir pris. Le Duc ui n’avoit pas efté mal fatisfait elle en l’année 1645. ou 1646. n’eftoit pas ingrat à ces nouveaux témoignages d’une eftime fi parti- culiere ; on dit qu’il y répondoit ar toutes les complaifances qu’el- e en pouvoit attendre ; & ceux qui veulent trouver des’raifons à tout, afleurent mefme que fi ce ne fut point la chaffe & le hazard qui l’amenerent chez ma Nourrix ce.en mil fix cens cinquante-deux ; iln’y vint qu’à lapriere… Cet- 3 te Sylvie de Moliere. 7 té Marquife à quion avoit pû pars ler den naiflance en ’ & quien ayanteu pitié, avoit fans : douteengagé ce charitable Sei- gneur à mc faire du bien. Mais : @eft trop m’arrefter dans cette diéreihon, il faut revenir à mon

ets

"Le Marquis de Saint Eftienne regala donc cette Dame du recit : de mesaventures, & comme elle : avoit un cœur fenfible aux-belles’ infortunes, elle : conceut auf toft un jus deffein de me’ venir foulager ; foit que ce fût : une fuite de cette compañion qu’on l’accufe ’d’avoir : euë pour : moy en mil fix cens cinquante- deux, ou leffet d’une pitié pu- tement fortuite que luy donna le fort d’une celebre inconnuë, je : deûs tdusjours luy en etre obli- : gée. Pour cét effet elle fe fitune curiofité : qu’elle” n’äüroit ’point eué, qui eftoit— celle ’d’aflifter à :

D 3 l’en78 LaviédeHénrieité

Lentreveué des deux Rois la ris viere de Bidafle, & de voir la ce- remonie. du. Mariage de l’Infante avecLoüis Augufte ; Elle traver « . fa toute. la France, & pour venir : apprendre de mes nouvelles dans, le Comté Venaiflin elle prit. le :

retexte d’yaller joindre la Cour…

n ce mefme temps Fouquet & Birague nous enlevoient. Et elle : arriva à. Avignon le lendemain : dé ; cette expedition, qui luy danna : encore plus d’enyie de.me ren- : contrer ; parceque la noblefe de ; fon cœur mefuroit fon eftime au plus’ou moins d’ayentures qui ren- : doient les, gens récommandables.,

— Mon enjevemgnt : mefa toutes :

fois. beaucoup de ghagtin à cette, ’

joyé qu’elle eut de me trouver. par-là d’autant plus digne de fon artachement. ;. &.en. effet il eftoit. bien fafcheyx, qu’eftant venyë de. filoin, tout : exprés pout may, , cllesne fçeut plus où me prit,

6 à e Sylvie de Moliere. LE]

Elle fe mefla parmy ceux qui. avoient le plus d’intercft à tout ce qui venoit d’arriver, pour profi- ter dece qu’ilsen pourroient dé- couvrireux-mefmes. Elle fitami< tiéavecla Marquife d’Ampus pour la mefine raifon, la renouvella avec le Duc de Guife, qu’elle avoit connu aux Païs-bas, lors qu’il : faifoit l’amour ; & elle efpe= roit Pobliger à luy découvrir ce wil ne Rares pas luy-mefmc : Enfin elle em penfa faire defefpe- rer ce pauvre Princé : Mais tous ces foins luy fervirent dé peu de chofe, la Couf s’éloigna fans qu’on eut appris le route que : nous avions tenuë ; La Dame fuivit marche jufqu’à l’Ifle de la Confe- rence, k n’yapprit rien d’avanta= ge. Le Mariage du Roy m’eftoit pas une conclufion de Roman, où tous’les perfonnages heroïques fe duflent retrouver ; & au contrai- re celà fur eaufe qu’elle ne pût È D 47 point 80. La vie de Henriette joint s’avifer de me venircherciet : à Thoulouze, parce qu’elle n°e. ftoit plus dans le Païs lors qu’on fçeut la retraite de la Religeufe, & qu’on foupçonna que j’eftois. auprés d’elle, nfin elle.s’en revenoit confu-

fe & mal-farisfaite, racontans par :

les chemins tous venans, ma fu nefte hiftoire & le mauvais fuccés de fon re 3 tantoft faifant fai re cet 0 !

dant qu’elle repofoit, afin que ce- 1 fut moins commun ; lors qu’en- fin une avanture toute nouvelle luy donna toutes fortes de fatisfa-

étions. La Comtefle d’Englefac.

navoit pas. manqué d’envoyer À Thoulouze comme la vieille Pres fidente l’avait. préveu ; & fon En. voyé ayant montré un ordre de la Reyne Mere, portant que je fe- rois renfermée quelque part qu’on pûtme reprendre, il n’y avoit plus eu pour moy à balancer entre le

choix

€ à fon Efcuyer pen-,

|

= Sylvie de Moliere. Be choix des Offres dé Birague, ou d’effuyer cette difgrace : Je lesavois acceptées, &je l’eftois allée atten- dre à Bordeaux, fous la conduite de Madame du Prat, fa parente, er y avoit affaire. ds evois en

uite me confier à fa bonne fo ur me mener jufqu’à Paris, oi

je : voulois m’enfermer de moy- mefine dés le lendemain que j’ÿ ferois. Qu’arriva-t’il ? Madame du Prat & moy nous allämes nous lo- ger à Bordeaux, juffement où cet- té Marquife eftoit defcenduë un jour plûtoft que nous : Je la vis, un je ne fçay quoy queje ne puis ex- rime ; nous donna de l’émotion à la veuë l’un de Pautre ; & foit que ce fût un effet de la fympathie qui re eftre entrecelle qui eftoit le bat des aventures, & celle qui les avoit pour but ; ou bien qu’un mouvement plus caché nous fit ir : Nous commençâmes dés ce

moment à nous admirer & nous re-

; D $ cher82 La-vie deHénrietse

chercher ; je le dis à Madame du Prat, qui trouva encore queje luy reflémblois. Ces difpofitions à fai- re connoiflance furent caufe qu’en- fia nous rendimes vifite » & que la ame-qui avoit accouftumé, com me j’ay dit, de conter ou de faire £onter fon hiftoire devant tous ceux : qui portoient mine d’illuftres Eftrangers comme nous nous lai fa le foir fon Efcuyer pour nous €n inftruire. :  ; — — Jugez, Madanie ; quel deûteftre

mon eftonnement lors que jemy.

entendis mefler, & lors que cét Efuyer adjoûta qu’elle effoit ve nuë exprés de Bruxelles pour m’a- dopter & pour m’emencr en Flan : dre, & qu’elle donneroit la moitié de. fon bien à qui luy diroit de mes nouvelles ?

H me fembla d’abord que j’eftois découverte, & je ne pouvois con< cevoir la ceremonie avec laquelle Sa me venoit froidement parler

À 4 de sSylviedeMolieres 83 de moy à moy-mefiie, à moins que ce ne füt pour plaifanter, avant que de : m’expofer l’ordre qu’on : avoit de me retenir : Car enfin

. comme.je "ne connoiflois pas en+ core le caraétere de l’efprit de læ : Dame, je ne voyois rien qui me

arut naturel dans cette rencon- tre, jen paffay la plus mauvaife. puit que j’eufle jamais euë » & quelques efperances que me vou- Jut donner Madame du Prat qui en jageoit bien mieux que may, j£ ne püs m’empefcher de trembler, & redouter les amis de Madame

— d’Englefc, juuesà ce qu’il fut jour : i

. A la verité ce gtand trouble Ye

diffipa le lendemain à la feconde vifite que nous receufmes de la

Marquife auffi-toft qu’on l’eût ha-

billéc ; Madame du Pratqui aun’ tres-bel efprit, commença à pe- netrer le talent d’une Dame fex- : traordinaiut ; Aprez beaucoup de : se D 6 que84 Laviedé Hewriette | ueftions, elle jugea à pro de Le rendre hide pour boues & de luy découvrir que j’eftois celle dont elle avoit une compafs fion figenereufe, Elle s’eftoit figu- réexcomme cela pouvoiteftre, que le recit de mes malheurs, fait de la bouche : du Marquis de Saint ftienne, avoit infpiré un amour de mere pour Moy à cette pitoya< ble Marquife, 3 ten Effet, on n’a jamais eu tant dé joye qu’elle en eut quand on luy apprit monnôm, & cette ma- nicre de me retrouver me rendant encore plus precieufe pour elle, je crus qu’elle m’étoufferoit en, m’embraffant, Je me refolusdeux — ’jours aprez à profiter de Paventu- re, fansattendre que le Marquis de Birague, qui de di qu’il en eut, perdit bien-toft le fouvenir de mes Charmes pour renoüer avec fà Da- me de Molière : Je ne l’en blâme pas, il n’eft pas le feul homme bien. : amou8plvie dé Moliere, 8 amoureux ou qui penfe l’eftre, qui en ait ufé de mefme quelquesfois. Jeloüay le Ciel du nouveau. fe- cours qu’il m’avoit_ envoyé fi à propos ; & je m’éloignay de Bor- deaux avec plus de fatisfaétion & moins de crainte que je n’y eftois venuë. La Marquife m’accabla de careffes & de louanges par lesche. mins, & j’en receus des marques d’une tendrefle fi’preffante, que ce fût àcette fois que je la regar- day comme fi elle eût efté ma ve- ritable mere. Pourtant je neluy fis pas plaifir de luy en donner le nom ; elle me-dit que fon cœur m’en avoïüoit, mais que fon vifage n’y pouvoit çonfentir ; & en effet, il confervoit depuis plus de2$.ans, une jeunefle qui rendoit cette

ualité incompatible avec luy : Ainf il falut fe retrancher au feul nom de fa fœur, dont. je témoi- gnay que j’eftois contente & enco- re. trop honorée. ; Enfin nous ar+

| rivâmes à Paris, — Nous ’86 La’vie de Henriètter — Nous y demeurâmes’jufques aprez cette Entrée magnifique de leurs Majeftez, qui y avoit atti- rédes yeux de toutes les parties de l’Europe & dans une efpace de temps fi confiderable, & avec une telle fœur, voftre Altefles’ima- gine bien qu’il pourroit eftre encor. arrivé des chofes aflez curieufés, mais elles ne me regarderent point,. tout fut prefque pour Ja Marquife de Seville, —que javois priée de me faire Voir à peu de gens jufques à ce que nous fuffions à Bruxelles. Si j’excepte d’y avoir veu un amy de Monfieur de Guif dépuile, & proreftant de’me faire Souveraine fije le voulois ; d’enavoir refufé le lendemain des pendans d’oreilles de grand prix, & d’avoir mieux aimé écoutertoûjours Pamour in- fortuné d’Engtefac dans l’exil, que celuy d’un : homme qui : m’offroit def belles chofes ; il ne m’y arri. Va. rien. d’extraordinaire. Je ne

l. : nom Splvie de Moliere. 87

nomme pag CÈ foûpiranit » Madame, voftre Alteffe fçait de qui je veux parler, & qu’il fe voulut vanger de moy parle choix d’une Damoifel- le qui ne fut pas fi dépoûtée que je Pavois etté. :

Un mois aprés je vis les murs de Bruxelles. Ma nouvelle fœur m’y mena en triomphe. J’y fus pendant plus de quinze jours la matiere de cent recits d’aventures, tous pro- noncez par la.Dame en termes choifis. T out ce qu’il y eut de com-

. plaifant à la Cour, adora les rai- fons qu’elle voulut donner de mon adoption ; quelques-uns mefme luy exagererent la refflemblance de nos perfonnes pour la juftifier d’a- vantage ; mais je ne fçay ficelà luy pleût autant que le refte.

afin > Madame, j”ÿ demeuray deux ans au milieu des fleurettes Efpagnoles, & Flamandes ; mais : de peur d’importuner voftre Altef- fe parunetrop longue leéture, &

l pour 88 La vie de Henriette

pour reprendre moy-mefme un peu d’haleine, jen’entreprendray | . de vous faire recit de ce quim’ar— | riva là de remarquable, non plus que celuy du ie de mes aven- tures, qu’à la premiere occafion que j’auray d’écrire à voftre Al. tele ; Je la fupplie tres humble- ment de me croire fa tres-humble : fervante,

HS D : M.

Fin de la premiere Partie,

MEMOIRES
DE LA VIE
DE
HENRIETTE-SYLVIE
DE MOLIERE.

Seconde Partie.



A PARIS
Chez Claude Barbin, au
Palais, sur le second Perron
de la Sainte Chappelle.

M. DC. LXXII.
Avec Privilege du Roy.

MEMOIRES

DE LA VIE DE HENRIETTE - SYLVIE

DE MOLIERE.

2 Es premieres vifites que je ® reccus dans Bruxelles, fu- . rent celles du Prince d’A- remberg, & du Duc d’Ar- fcot, Princes certainement dignes de’ la plus haute eftime, dontles belles ualitez meriteroient de briller à la our de France. Le Duc de Croüy les fuivit ; le Prince de Ligne, lebon homme Dom Anthoine de Cordouë,. & mille autresles imiterent ; & enfin le Gouverneur luy-mefmne , qui mal- gré fa grave majefté, s’en retourna € plus dängereufement bleflé.

Je ne puis pañler fous filence, une chofe aflez particuliere, que l’excés de f pañion luy fit faire.

Comme il m’aimoit bien fort, & u’il crût que fes années avoient be- din du fecours de fa liberalité, pour pouvoir toucher mon cœur ; il fe re- fotut de me tenter par cette voye, &. . commença mefine à le faire en Ga- lant parfait. J’avois prisun extrême plaifir à voir un petit caroffe qui me

  1. fembloit d’une invention nouvelle

& tres-propre; Il me vint vifiterle lendemain, & comme j'en parlois encor en fa prefence, il mé dit: Vou- lez-vous en joüer un avec moy con- tre quelque autre chofe ? Je le veux, ’ luy répondis-je ; mais que mettray-je . au jeu contre voftre Excellence , qui puiffe eftre de cette valeur? Il dit qu’il ne vouloit qu’un peu de mon eftime; & aufli-toft, moy qui en eus toûjours un fonds inépuifable _ pour tousles honneftes gens, raillant avec ma gayeté ordinaire, jelepris au mot, & je joüay le caroffe. Ille | perdit;'je luy gagnay de plus les che. vaux, le Cocher ,les Laquais, leur entretien, & jufques à la paille de Pécurie pour trois ans. Îl mefit joüer le lendemain, afin que je perdif- fe ce que je mettrois au jeu, & je le perdis eneffct ; " il m’en de- manda le payement dés le foir mef- me par un billet écrit en Caftillan, qui s’expliquoit affez bien ; mais quand il vid que le mot d’eftimeen mon François, ne fignifoit pas la mé- me chofe qu’en fa prétention Efpa- gnole, il me rembarqua au jeu pour luy donner encore f revan- ge. I1me regrgna le caroffe, les che- vaux, le Cocher, les Laquais, & la paille ; & depuis je ne lercvis plus.

Cela n’empefcha pas que je ne fufe fe vifitée par quelques-autres de la: Nation, qui ne m’eneftimerent pas moins; & entre tous ceux-là, le vieux Dom Francifco Gonfales de Mené. ze, homme de qualité &’d’efprit, deux fois veuf, & pour la troifiéme fois à remarier, fut celuy qui s’atta- cha le plus obftinément à ma conquéte, & qui enfin y reüffit. Il fre toit de cette illuftre famille de : Menéze, dont parlent fi avantageufe. ment les Hiftoires d’Efpagne & de Portugal : Le defir de fervir fon Prin- ce dans les Pays-bas, l’y avoit tranf- planté avec fes richefles ; ilcft vray u’on adjoûtoit à cela que amour une premiere femme qu’il y épou- fa parinclination, y avoit contribué autant quelerefte,

Je me voyois de mon cofté fans — parens, au moins qu’il me fuft per- mis de connoiftre ; je n’avois eu au- cune nouvelle du Comte d’Englefac depuis troisans, quoy que j’eufñle é- crit plufieurs lettres à celuy qui m’en avoit rendu de fa part lors que j’étois encore dans le Convent d’Avignon : D’ailleurs la Marquife de Seville, en- core que mon mariage avecunautre Amant, luy paruft blefer les regles des aventures heroïques, s’en relà- choit neantmoins pour me confeiller de ne pas laifier efchaper ce vieil Ef pagnol. Que vous diray. je ? fes cin- quante mille livres de rente & fes pierreries, m’ouvrirent lés yeux, & aiderent à me perfuader qu’Englefac m'avoit effacée de fa memoire. J'é- coutay la propofition qu’il me fit de m’époufer ; tout fut conclu , & la, ceremonie achevée en moins de dix. jours. Lee bon homme me fit auffi- toit apres un train de Princefle; ilme donna des François pour la plus-' art de mes domeftiques ; & enfin’ il n'oublia rien pourmerendre heu- . reufe, au moins en apparence.

Mais, Madame, une fi grande for- tune me devoit-elle arriver fans mé-. lange detraverfes? Non fans doute, : ” cela eût efté direétement contraire à la fin pour laquelle il fembloit queje fuffe née. Au milieu de tant de feli- cité, qui donnoitde la jaloufie aux uns, & de la fatisfaétion aux autres, je receus un déplaifir qui en empoi- fonna la fuirte pour long-temps. ‘ Englefac que j’avois crû infidelle, ou plû-toft que j’avois crû mort; vint à Bruxelles trois ou quatre mois aprés mon mariage. Ce pauvre Gentilhomme ( dont l'amour fubfftoit toûjours dans toute fa force quoy que par les artifices de fa mere, 1l eut luy-mefme receu aucune de mes nouvelles depuis trois ans) ve- hoit de vifiter toutes les Cours des Princes. Il eftoit entré de la Savoye dans la Suiffe ; il avoit penetré en Allemagne, il y avoit demeurè quel- ques mois à fa Cour Imperiale ; ilen eftoit revenu par **#il vous y avoit veu, Madame, & y avoit receu de : tous les Princes de voftre illuftre Maifon, mille marques de bonté; Enfin tout plein des efperances qu’on luy donnoit de temps en temps d’obtenir fa grace , il s’eftoit r’appro- ché de Paris par les Païs-bas,& pour eftre plus prés de fes amis qui entre- prenoient fon affaire à la Cour : Quel fut le premier objet qui Ÿ prefenta à fes yeux , commeil ne faifoit que defcendre de cheval? Sa Maîtrefle mariée ; 6 Dieu ! quel fpeétacle pour luy ! Frappé comme d'un coup de foudre à cette veuë , & aprés s’eftre fait dire les particularitez de fa difgrace il voulut de douleur fe jetter ſur fon épée , & c'en eftoit fait, fans la promptitude avec laquelle fon Va- let de chambre l’en empefcha. Mais ce domeftique fidelle & affeétioné le retint, rompit ce torrent impc- tueux defes premiers mouvemens;. & ayant découvert dés le jour fui- vant qu’il faloit encore quelques Of ficiers François au Marquis de Me. ‘néze, il remitentierement cetefprit par les efperances qu’il luy donna,de le mettre au plûtoft en eftat de me reprocher mon inconftance ; Enfin. illuy mit à la tefte de fe fervir de cette occafion pour venir demeurer auprés de moy. L’amoureux Com- te n’écoutant que fon dépit , fe dé. guifa fufifamment pour fe rendre propre à un tel employ ,dans un lieu où on ne le connoifloit pas; & le. vieux Menéze qui vouloit tous gens de bonne mine à fon fervice , le trou- va d’abord à fon gré , & l’arrefta. Je me fus jamais plus eftonnée que lors que voulant envifager ce nouveau Maître-d’Hoftel qui nous fervoit, je vis que c’eftoit ce malheureux En- glefac.

Helas Madame ! j’en fremis enco. re au fimple fouvenir. Cette puiflan- ce fecrete qui enchaifne les cœurs, & qui les rattache toûjours à ce qu’ils aimcnt,malgré toutes les rufes que la fortune employe fouvent pour les en feparer, me fit rougir & pälir vingt fois en un moment : elle me traita alors avec tant de barbarie, que ne pouvant plus refifter à fa violence, je demeuray infenfiblement éva- nouïe entre les bras du vieux Gonfa- es. J'eftais alors bicnheureufe d'e., ftre mariée, & de ce qu’on pouvoit attribuer cet accident à quelque cho- fe qui empefcha fes foupçons, en le contentant par une autre imagina- tion à fon avantage : car il nyarien de plus certain que cela euft produit le plus mefchant effet du monde. Je revins, mais je ne voulus point de- meurer pluslong temps à la veuë de cét imprudent, qui cftoit prefque en auſſi mauvais eſtat que moy ; & ayant prié le Marquis de me faire mettre au lit, je m’y tins tout le reſte du jour avec les plus grandes inquietudes qui pûſſent affliger un eſprit comme le mien.

J’avois de la vertu, & j’en eus toûjours, quoy qu’ait oſé publier au contraire la médiſance d’un ſiecle corrompu, & la rage de mes ennemis. Ainſi cette rencontre impreveuë d’un homme que j’avois aimé & que je ne pouvois encore haïr, partageoit cruellement mes reſolutions, & me déchiroit l’ame. Je ne voulois pas qu’il fuſt venu à Bruxelles & neantmoins j’eſtois bien aiſe de l’avoir retrouvé ; tantoſt je me faſchois contre luy de ce qu’il m’expoſoit à des perils manifeſtes ; tantoſt de ce qu’il avoit eu la baſſeſſe de ſe ſoûmettre à prendre un tel employ ; il me ſembloit qu’il y avoit mille autres moyens de me voir : & de me parler : Puis je voulois en cette meſme action, trouver les preuves indubitables de la force de ſon amour, & j’admirois ce que cette paſſion eſtoit capable de nous faire entreprendre.

Je demeuray avec ces penſées juſques à ce que j’en fus divertie par la Marquiſe de Seville, qui ayant appris mon indiſpoſition, eſtoit venuë : pour me viſiter, & cela fut cauſe que je n’y ſongeay plus juſques à la nuit que je priay le Marquis Menéze de me laifler ſeule, fous pretexte de vouloir prendre quelque remede ; mais c’eſtoit en effet pour avoir le temps de faire confidence de tout à une fille Françoiſe que j’avois depuis deux ans à mon ſervice, & pour qui je n’avois rien de caché. Je luy demanday ſon avis, & elle ne ſe trouva pas moins embarraſſée que moy : Nous refolûmes pourtant que je parlerois le plûtoſt que je pourrois au Comte, de peur que li je le maltraitois, il ne vint à découvrir par quelque douleur extravagante, ce qu’il eſtoit de la derniere importance de bien cacher au vieux Marquis ; Page:Villedieu - Mémoires de la vie de Henriette Sylvie de Molière, 1672.pdf/105 Page:Villedieu - Mémoires de la vie de Henriette Sylvie de Molière, 1672.pdf/106 Page:Villedieu - Mémoires de la vie de Henriette Sylvie de Molière, 1672.pdf/107 Page:Villedieu - Mémoires de la vie de Henriette Sylvie de Molière, 1672.pdf/108 Page:Villedieu - Mémoires de la vie de Henriette Sylvie de Molière, 1672.pdf/109 Page:Villedieu - Mémoires de la vie de Henriette Sylvie de Molière, 1672.pdf/110 Page:Villedieu - Mémoires de la vie de Henriette Sylvie de Molière, 1672.pdf/111 Page:Villedieu - Mémoires de la vie de Henriette Sylvie de Molière, 1672.pdf/112 Page:Villedieu - Mémoires de la vie de Henriette Sylvie de Molière, 1672.pdf/113 Page:Villedieu - 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MEMOIRES
DE LA VIE
DE
HENRIETTE-SYLVIE
DE MOLIERE.

TROISIÈME PARTIE.



A PARIS
Chez Claude Barbin, au Palais,
sur le second Perron de
la Sainte Chappelle.

M. DC. LXXII.
Avec Privilege du Roy.
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MEMOIRES
DE LA VIE
DE
HENRIETTE-SYLVIE
DE MOLIERE.

Quatriéme Partie.



A PARIS
Chez Claude Barbin, au Palais,
sur le second Perron de
la Sainte Chappelle.

M. DC. LXXII.
Avec Privilege du Roy.
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