Mémoires de Madame la marquise de La Rochejaquelein, 1889/Dédicace

À MES ENFANTS[1]





C’est à cause de vous, mes chers enfants, que j’ai eu le courage d’achever ces Mémoires, commencés longtemps avant votre naissance, et vingt fois abandonnés. Je me suis fait un triste plaisir de vous raconter les détails glorieux de la vie et de la mort de vos parents. D’autres livres auraient pu vous faire connaître les principales actions par lesquelles ils se sont distingués ; mais j’ai pensé qu’un récit simple, écrit par votre mère, vous inspirerait un sentiment plus tendre et plus filial pour leur honorable mémoire. J’ai regardé aussi comme un devoir de rendre hommage à leurs braves compagnons d’armes. Mais combien de traits m’ont échappé ! Je n’ai eu aucune note. L’impression vive que tant d’événements ont faite sur moi a été ma seule ressource. Loin donc d’avoir pu écrire l’histoire complète de la Vendée, je n’ai pas même raconté tout ce qui s’est passé pendant le temps où j’ai vu la guerre civile. Mille oublis me donnent des regrets. Je n’ai pu et n’ai voulu écrire que ce dont je me rappelais parfaitement, et c’est seulement par ignorance que je passe souvent sous silence ou ne fais qu’indiquer des faits, des actions ou des personnes qui mériteraient à tous égards des éloges. Mon cœur ne sera satisfait que si d’autres, mieux instruits, leur rendent la justice qui leur est due. Je n’ai pu bien savoir que ce qui regardait mes parents et mes amis ; je me suis donc bornée à rappeler, avec une exacte vérité, tout ce dont je conserve le souvenir, et suivant les impressions que j’en ai reçues dans le temps.


Donnissan de la Rochejaquelein.
  1. L’auteur a eu onze enfants. Du premier lit, trois filles, mortes en bas âge pendant la guerre. Du second lit : le marquis Henri, qui a continué la famille ; Louis, tué au Portugal en 1833 ; la comtesse d’Alberlas ; la baronne Le Pays de La Riboisière ; la comtesse de Foucault ; la marquise de Chauvelin ; la marquise de Malet ; la comtesse de Pontac.