Mémoires de Madame la marquise de La Rochejaquelein, 1889/Chapitre II

CHAPITRE II

DEPUIS LE COMMENCEMENT DES ÉTATS GÉNÉRAUX
JUSQU’À L’AFFAIRE DES 5 ET 6 OCTOBRE





Je passerai légèrement sur les événements qui ont eu lieu en 1789. Je n’écris pas l’histoire, c’est bien assez de raconter la mienne ; aussi je ne m’attache qu’à ce qui m’est personnel, ou que j’ai vu. D’ailleurs, dans ce temps, j’étais une enfant.

Versailles était devenu très brillant ; les états généraux y avaient attiré un monde infini, je passai l’été le plus agréable. Maman recevait chez elle, tous les soirs, le duc de Luxembourg[1], président de la noblesse, et une foule de députés du côté droit. Les ducs de Luynes[2] et de Lévis[3] (dont le dernier a depuis réparé ses erreurs par le plus sincère repentir), furent obligés de renoncer à venir chez maman, où ils ne trouvaient que des gens dévoués au Roi.

J’allai voir la procession des états généraux, ainsi que la séance, et plusieurs autres choses remarquables. Je faisais de la musique tous les soirs avec M. le comte d’Astorg[4], officier aux gardes du corps, qui, dans l’émeute de Versailles contre l’archevêque de Paris, avait blessé un homme, et depuis, avec M. de Savonnières[5], qui avait escorté M. Necker aux frontières, lors de son renvoi le 10 juillet ; par ces raisons, il était abhorré des patriotes. M. de Galvimont[6] et plusieurs autres personnes formaient notre concert. Je m’amusais infiniment, tandis que, dans le même salon, on faisait les conversations les plus intéressantes.

Les régiments de Bouillon et de Nassau venaient d’arriver à Versailles, ils étaient logés dans l’Orangerie ; nous fûmes les voir. Le lendemain, mardi 14 juillet, à six heures du soir, un monde étonnant se promenait sur le parterre du Midi, au-dessus de l’Orangerie. Les officiers des régiments faisaient jouer la musique militaire ; on exécutait des allemandes, la joie était sur tous les visages. Je n’oublierai jamais ce moment : quel contraste ! On entend quelques chuchotements. M. de Bonsol[7], officier aux gardes du corps, vient à nous et nous dit : « Rentrez, rentrez, le peuple de Paris est soulevé, il a pris la Bastille, on dit qu’il marche sur Versailles. » La terreur succède à la gaieté, nous retournons dans nos appartements, toute la terrasse devient déserte en un instant.

Je passe les événements qui suivirent ; je dirai seulement une anecdote singulière, que j’ai sue depuis avec certitude. Le jour de la prise de la Bastille, où tout le peuple de Paris criait Vive le duc d’Orléans ! celui-ci, ne sachant prendre aucun parti, fut chez Mme  de Lamballe, sa belle-sœur, à l’hôtel de Toulouse, sous prétexte de lui faire une visite, et, dans le fait, pour se cacher. Elle était incommodée, et elle fit ce qu’elle put pour le congédier ; mais il resta malgré elle, depuis six heures du soir jusqu’à onze, parlant peu, paraissant inquiet, demandant à chaque instant des nouvelles et croyant entendre du bruit à toute minute. Mme  de Lamballe n’eut point l’air de savoir qu’on criait Vive le duc d’Orléans ! et lui-même n’en parla pas. Il paraît que personne ne savait où il était, car pendant tout le temps il ne vint qui que ce fût demander à lui parler.

[Je tiens cette anecdote de la marquise de Las-Cases[8], notre parente, dame d’honneur de la princesse de Lamballe, qui était présente.]

La veille du jour que le Roi alla à Paris, nous passâmes la soirée chez M. le duc de Sérent ; il nous cacha son départ pour les pays étrangers avec les princes, mais il avait les larmes aux yeux, ainsi que sa famille, en nous quittant. Nous restâmes sans nous coucher. Nos fenêtres donnaient sur la rue des Réservoirs, nous étions dans cette partie du château qui touche l’Opéra. Toute la nuit, on entendit des voitures, des chevaux, des signaux pour se reconnaître ; les écuries de M. de Sérent étaient vis-à-vis de nous, nous le vîmes partir en silence, avec les petits princes et sa famille. À la pointe du jour, nous étions à courir dans toutes les galeries, sans savoir ce que nous allions devenir ; nous ne trouvions que des figures effarées et pâles. Les députés accompagnaient le Roi, à la réserve du duc de Luxembourg, forcé de s’éloigner. Tout le monde quittait Versailles. Mon oncle de Lorge, ami, avant l’Assemblée nationale, du duc de Luynes, lui demanda un asile pour nous à Dampierre, château à quatre lieues de la ville ; nous y fûmes à cinq heures du matin ; nous étions plus suspectes que d’autres, par nos opinions et la société que nous recevions. Un courrier vint nous apprendre le retour du Roi ; nous revînmes à Versailles et reprîmes absolument la même vie.

Peu de temps après l’ouverture des états généraux, le Dauphin[9] mourut de rachitisme ; il était de la plus jolie figure, il annonçait un esprit, un caractère, une fierté et une sensibilité qui doivent le faire regretter. Je le voyais sans cesse, étant fort liée avec Mlles  de Mortemart[10], petites-filles du duc d’Harcourt[11], son gouverneur, et élevées par la duchesse[12]. Un seul mot fera connaître combien ce Dauphin était digne d’être aimé : il était dans un état affreux, il ne pouvait plus marcher, et tout son corps n’était qu’une plaie. Il demande un jour qu’on le porte dans le jardin ; Mme  d’Harcourt veut sonner, il lui dit : « Ah, ne sonnez pas ! un tel (un de ses valets de chambre) va venir, il est de service aujourd’hui, il me fait mal. » Mme  d’Harcourt lui répond : « Il fait tout ce qu’il peut pour vous soulager ; il peut être moins adroit que les autres, mais il est aussi attentif, et le refus que vous ferez de son service le désespérera. » Alors le Dauphin s’écrie : « Ah ! sonnez, j’aime bien mieux souffrir que de faire de la peine à un brave homme. » Il était raisonnable comme à quarante ans ; on lui lisait de bons ouvrages d’histoire et de littérature, et ses réflexions étonnaient. Un jour qu’on lui lisait la tragédie de Mérope, à ce vers :

Le premier qui fut roi fut un soldat heureux,


il interrompit le lecteur, en disant « Je n’aime pas ce vers-là. » À sa mort, un de ses valets de chambre, qu’on réveilla pour lui dire : M. le Dauphin n’existe plus, expira dans l’instant de douleur.

Mme [13] et Mlles  de Sérent revinrent six semaines après leur départ. Tout le monde se faisait illusion, à la réserve de maman, qui prévoyait les plus grands malheurs, et d’un bien petit nombre de personnes.

Je fus témoin d’une chose qui me fit de la peine ; je rentrais de me promener, le Roi avait fait venir deux cents chasseurs à Versailles, vers le mois de septembre. C’étaient les chasseurs des Trois-Évêchés, auparavant dragons de Lescure[14], du régiment de mon beau-père. On avait mis toutes les formes constitutionnelles nouvelles pour les faire arriver. Ils se présentent à la grille du Dragon, le peuple s’ameute, ferme la grille, jette des pierres aux chasseurs ; on les laisse là, mourant de faim. Sur les cinq heures, le Roi revient de la chasse ; ils crient : « Vive le Roi ! » et celui-ci passe sans s’arrêter, au lieu de leur dire de le suivre et de les faire entrer par le château. Ainsi, ce pauvre Roi, toujours faible et incertain, perdait chaque jour de sa dignité. Les dragons entrèrent le soir.

Ce fut vers la fin d’août que la garde nationale de Versailles monta la garde au château. De tout temps on plaçait aux portes extérieures une sentinelle des Suisses et une des gardes françaises ; celles-ci désertèrent peu à peu pour se joindre à la populace de Paris. Enfin il n’en resta que sept fidèles, dont un sergent. Ils demeurèrent à leur poste trente-six heures, épuisés de fatigue ; ils se retirèrent en versant des larmes. Le lendemain matin, il se trouva qu’ils étaient partout remplacés par des gardes nationaux ; on fut surpris et affligé ; cependant, par la manière dont cela s’était passé, il semblait qu’on dût leur avoir de l’obligation, puisque les portes avaient été abandonnées. Mais n’aurait-on pas dû le prévoir ? Le Roi n’aurait-il pas pu y remédier, quand on s’aperçut de la désertion ? Les nombreux officiers des gardes françaises n’auraient-ils pas dû s’empresser de prendre le fusil, remplacer leurs soldats, recruter des gens sûrs, etc… ? Du reste, je ne veux pas attaquer ici l’intention des officiers ; ils sont restés fidèles, mais ils auraient dû montrer plus d’énergie. À la vérité, c’est plus la faute de leur commandant que de tout autre ; il était haï et sans talent, homme faible et nul. Le Roi fit officier le sergent resté fidèle, et sergents les six soldats, dans les troupes de ligne.

Le 1er octobre fut le jour du fameux dîner des gardes du corps, offert à la garde nationale de Versailles et aux autres militaires. J’en fus témoin ; il se donnait sur le théâtre de l’Opéra. Tout le monde se rendit dans les loges pour le voir ; à chaque instant entraient des soldats de Flandre, des gardes nationaux, des gardes suisses ; ils se réunissaient pour boire à la santé du Roi. Cette fête parut si touchante, qu’on engagea le Roi et la Reine à s’y rendre ; ils y vinrent, la Reine portant son fils, le nouveau Dauphin. Ils parurent dans les loges, aux acclamations redoublées ; la musique jouait : Ô Richard, ô mon roi ! On décida le Roi à aller sur le théâtre pour faire le tour de la table ; la Reine le suivit et parla à chacun avec sa grâce enchanteresse, qui savait si bien captiver les cœurs ; elle confia successivement le Dauphin à différents gardes du corps. Après une demi-heure au plus, elle se retira avec le Roi. L’ivresse, l’enthousiasme étaient au comble, tout le monde versait des larmes de joie et d’attendrissement ; tous les officiers qui étaient à table sautèrent dans l’orchestre et de là sur l’amphithéâtre, pour gagner plus vite la galerie de l’Opéra et s’y trouver avant le Roi, qui avait fait le tour par les corridors, il semblait que tout ce monde montait à l’assaut ; on poussait des cris confus de : Vive le Roi, vive la Reine, nous les défendrons, nous mourrons pour eux ; qu’on vienne les arracher de nos bras ! Je n’entendis aucune provocation contre l’Assemblée nationale ni le tiers état. Tous les militaires qui avaient suivi le Roi, après s’être retrouvés sur son passage, se mirent à courir sur la terrasse, dans les cours, sous les fenêtres de chaque membre de la famille royale ; ils allèrent de là sous le balcon du Roi, qui y parut. Quoique ce balcon, qui est celui de la cour de marbre, en face de la grille, fût à une très grande élévation, plusieurs militaires s’élancèrent dessus, l’épée à la main, en criant : Vive le Roi ! C’est une chose incroyable, mais cependant très vraie. Le Roi, la Reine étaient en larmes, rien ne fut plus touchant que cette scène.

Il y eut le lendemain un déjeuner des gardes du corps seuls, à leur quartier ; on prétend qu’il fut encore plus vif que le dîner, mais il n’y eut pas de témoins et tout se passa entre eux.

Je me rappellerai toujours que M. le comte de Narbonne-Fritzlar[15] (ainsi surnommé par Louis XV, à la suite de sa belle défense de cette ville), vieux militaire célèbre et non employé, était à Versailles depuis les troubles, espérant être utile, au Roi, Quoique fort âgé, il avait l’agilité d’un jeune homme ; il faisait tous les jours un exercice violent à pied et à cheval, afin de conserver ses forces ; il venait sans cesse chez maman. Il y soupa le 4 octobre ; tout le monde partait du fameux dîner, et les habitants du château de Versailles croyaient être devenus invincibles. Maman lui demanda ce qu’il en pensait, il lui dit à voix basse, mais je l’entendis : « Madame, depuis trois mois je me promène dans la ville et les environs, pour juger les intentions de chacun et les dispositions de défense en cas d’attaque ; il n’y a nul ensemble, nulle prévoyance, nulle précaution, et, si M. de la Fayette veut venir attaquer Versailles, il prendra toute la Cour d’un coup de filet. Je crois bien que, s’il fût venu le soir même du dîner, on se serait battu à merveille, quoique sans ordre ; mais à présent, c’est différent, chacun s’endort et le Roi est perdu. »

Ce fut le lendemain que cette triste vérité fût prouvée. Le Roi était parti pour la chasse ; on commença à dire, sur les trois ou quatre heures, que le peuple de Paris venait attaquer le château ; on ne pouvait croire cette nouvelle. Cependant on fit ranger quelques troupes devant la grille des Ministres, et on envoya avertir le Roi, il chassait dans les bois de Meudon, il reçut ses courriers. Il arriva aussi de Paris un chevalier de Saint-Louis, qui se jeta à ses pieds, l’avertit du danger et se retira sans dire son nom.

Le Roi revint en voiture au grand galop par la Porte Verte et, par conséquent, la grande avenue ; cinq minutes plus tard, il eût été enlevé à la jonction du chemin de Paris, par l’avant-garde de la Fayette, ou plutôt par une troupe de la lie du peuple, hommes et femmes ramassés au hasard. C’eût été très heureux : les volontaires parisiens étaient encore à la barrière, la plupart d’entre eux étaient forcés, et il n’y avait nul ordre dans leur marche. Sitôt qu’on aurait appris l’enlèvement du Roi, les huit cents gardes du corps et les deux cents chasseurs, qui étaient déjà à cheval, auraient volé pour le délivrer, et les Parisiens, surpris de cette brusque attaque, se seraient culbutés les uns sur les autres ; mais par malheur le Roi arriva ; il s’enferma dans son cabinet avec le perfide Necker[16] et ses autres ministres, dont bien peu étaient purs.

On ferma les portes du château ; tout y était en désordre, une foule de personnes couraient les galeries ; il y avait environ deux mille hommes dans le château, la plupart gentilshommes : ils étaient en habit habillé, chapeau sous le bras, n’ayant pour armes que leurs épées, quelques-uns avaient des sabres et des pistolets ; le tout ensemble excitait la pitié : leur bonne volonté et leur ridicule comme militaires. Tout le monde était ahuri. Nous allâmes dans le salon d’Hercule, avec beaucoup de dames, pour voir par la fenêtre ce qui se passait dans les cours : environ six cents hommes ou femmes, et surtout hommes habillés en femmes, étaient sur la place d’Armes ; ils étaient déguenillés, armés les uns de faucilles, les autres de piques. Ils avaient traîné deux petits canons et criaient : Du pain. Tout le monde sait qu’il y avait une disette, feinte au fond, mais très réelle pour le particulier ; elle s’étendait à Paris, Versailles et environs.

Cet amas de misérable était l’avant-garde de Paris : le peuple de Versailles s’y joignait un peu, mais il était encore retenu par l’incertitude.

Les gardes suisses étaient rangés en bataille, à droite sur la place d’Armes, le régiment de Flandre à gauche ; cinquante cavaliers de maréchaussée et les deux cents chasseurs y étaient aussi ; huit cents gardes du corps à cheval se tenaient devant la grille de la cour des Ministres, en dehors ; un piquet de gardes suisses était à chaque porte extérieure, et des gardes du corps à pied, aux portes intérieures.

Nous regardions toutes ces dispositions ; quand nous vîmes un officier des gardes du corps qu’on emportait ; on le fit entrer dans la cour, et on le déposa chez M. de la Luzerne[17], ministre de la Marine et ministre fidèle. C’était M. de Savonnières ; il venait de recevoir au bras une blessure dont il est mort au bout de quatre mois ; il s’était séparé de trois ou quatre pas de sa troupe, il avait été tiré à bout portant. En recevant le coup, il s’écria : « Mes camarades, ne me vengez pas ; attendez les ordres du Roi, défendez-le. » Nous fûmes très saisis de ce spectacle, d’autant plus qu’il y avait plusieurs femmes d’officiers des gardes du corps à la fenêtre, avec nous. Cependant ce ne fut qu’un incident particulier, et on ne fit rien de plus. Il faut l’attribuer à ce que les patriotes en voulaient personnellement à M. de Savonnières, parce qu’il se distinguait par son courage et qu’il avait escorté M. Necker, comme je l’ai déjà dit.

Nous rentrâmes dans notre appartement et en sortîmes plusieurs fois ; il va sans dire que mon père ne quittait pas Monsieur. Tantôt on disait que toute la garde nationale arrivait, tantôt que c’était un faux bruit. Enfin, à neuf heures du soir, nous entendîmes le tocsin que le peuple sonnait. On fit rentrer les gardes du corps dans leur quartier, et, pendant ce temps, on tira sur eux : ce fut en partie ces misérables venus de Paris, dont le nombre augmentait à chaque instant, en partie la garde nationale de Versailles. On ne doit pas oublier que M. Collet, qui en était un des capitaines, se jeta entre le peuple et les gardes du corps et reçut deux coups de fusil : cela fit cesser le feu. Les gardes du corps, qui avaient l’ordre de ne pas riposter, se retirèrent.

Dans le moment où nous entendions les coups de fusil, le tocsin et la générale que le peuple faisait battre, M. de Calvimont, jeune homme de nos parents, entra chez maman et tomba évanoui sans pouvoir proférer un mot. Il était venu à pied de Paris, et avait fait plus de dix lieues pour éviter d’être emmené par le peuple, car on arrêtait tout le monde sur la route et dans les rues ; on forçait hommes et femmes à marcher contre Versailles. M. de Calvimont n’avait pas dîné, il avait toujours couru, entendant les tambours parisiens tout le long du chemin ; arrivant au moment des coups de fusil tirés par les troupes de Versailles sur les gardes du corps, il crut que le combat était commencé. Les portes du château étaient toutes fermées, mais comme il avait été page, il trouva le moyen de pénétrer avec deux de ses amis. Nous fûmes fort effrayées de le voir entrer et s’évanouir ; maman et moi étions seules, mon père était dans la galerie avec les autres gentilshommes pour défendre le Roi. Nous fîmes revenir M. de Calvimont, et sitôt qu’il eut mangé, il se rendit à l’Œil-de-Bœuf. Nous avons su depuis qu’il était d’une association de quatre cents jeunes gens qui avaient proposé plusieurs fois d’enlever le duc d’Orléans ; les ministres ne l’avaient jamais voulu, et il venait non seulement comme les autres pour défendre le Roi, mais aussi pour renouveler ce projet, et il espérait, à l’aide de ceux de ses camarades qu’il pourrait rassembler, prendre le duc d’Orléans.

Il se rendit donc à la galerie et annonça positivement l’arrivée prochaine de M. de la Fayette et de toute la garde nationale de Paris. Grande rumeur. M. le duc d’Ayen[18], capitaine des gardes du corps, était à un coin de l’Œil-de-Bœuf, à se moquer de ceux qui croyaient que son gendre, M. de la Fayette, arrivait. On lui amena M. de Calvimont pour le convaincre ; il lui répondit tranquillement : « Monsieur, vous dites que les troupes ont commencé à se mettre en marche à midi, il est neuf heures, elles devraient être arrivées ; c’est donc qu’elles sont retournées ; tout ce que vous dites n’a pas le sens commun. » Et il ne voulut plus rien entendre. Il y avait aussi, dans l’Œil-de-Bœuf certaines personnes qui ne montraient ni crainte, ni affliction, entre autres Mme  de Staël[19], qui avait un gros bouquet et riait aux éclats.

Le Roi était enfermé avec les ministres, personne ne pouvait le voir, tout était en confusion. Pendant ce temps, on fit entrer dans son cabinet une députation de cette canaille venue de Paris : c’étaient des filles habillées en poissardes ; on lui fit aussi sanctionner des décrets.

Au milieu de ce désordre, nous allons chez Mesdames ; Madame Victoire était chez Madame Adélaïde, nous y entrons, il y avait beaucoup de personnes de leur maison. Mesdames étaient calmes, malgré les cris qu’on poussait au dehors, et montraient beaucoup de courage. [Je crois encore entendre Madame Adélaïde dire noblement : « Nous leur apprendrons à mourir. »] Elles firent fermer seulement les volets, la chambre étant sur la terrasse, au rez-de-chaussée. À chaque instant, on venait donner des nouvelles contradictoires. Le comte de Narbonne-Lara[20], qui depuis a été ministre, alors chevalier d’honneur de Madame Adélaïde et grand ami de M. de la Fayette, arrive à onze heures et demie chez Mesdames ; il venait de l’Œil-de-Bœuf, assure que tout est apaisé, se met à plaisanter sur la peur de chacun ; il parlait encore, quand M. de Thianges[21] ouvre la porte, ainsi que Mme  de Béon[22], en criant : « M. de la Fayette[23] est chez le Roi. » Rien ne peut peindre l’étonnement, le saisissement que causa cette nouvelle ; l’instant d’après, on vint dire que M. de la Fayette, pâle comme la mort, était venu demander seulement la sanction de quelques décrets, et la permission de faire garder le Roi par les volontaires parisiens ; enfin des platitudes qu’on avait la sottise de croire être les seules raisons qui avaient fait marcher tout ce monde sur Versailles. Mesdames se rendirent auprès du Roi.

Maman et moi revînmes dans notre appartement. M. le comte de Montmorin[24], gouverneur de Fontainebleau, ami intime de notre famille, jeune homme cousin du ministre, qui n’avait rien de brillant, mais le plus dévoué au Roi, le plus plein de probité et d’honneur qu’on puisse trouver, entra chez maman ; il lui dit que, depuis quelques jours, on avait refusé de la poudre au régiment de Flandre, dont il était major en second et qu’il commandait (M. de Lusignan[25], colonel, étant député et patriote) ; le régiment n’avait que cinquante cartouches par compagnie (il était arrivé depuis une semaine) ; la garde nationale s’était emparée de ses canons ; malgré ses représentations, le major n’avait pu ni obtenir de la poudre, ni ravoir ses cantons ; les soldats étaient encore fidèles, mais ils commençaient à murmurer, et avec raison ; enfin, chose incroyable, après l’arrivée de M. de la Fayette et de la foule immense des Parisiens, M. de Montmorin venait de recevoir l’ordre des ministres d’enfermer le régiment dans les Petites-Écuries, et d’apporter la clef de la grille ; n’ayant pu trouver la clef, parce qu’on ne la fermait jamais, on lui avait donné l’ordre de mettre un cadenas à la porte. Il s’écriait que le Roi était trahi et il pleurait de rage.

Tous les habitants du château allèrent se coucher ; beaucoup de gentilshommes voulaient passer la nuit dans les galeries, mais le duc d’Ayen les renvoya, ferma les portes, disant qu’il était du dernier ridicule de s’inquiéter. Je ne veux pas oublier une légère circonstance, qui prouve combien on était aveugle et loin de prévoir ce qui devait arriver par la suite. En revenant de chez Mesdames, nous rencontrâmes le duc de Saulx-Tavannes[26], ami de notre famille ; il n’était certainement pas du nombre des traîtres, et il avait autant d’esprit que tout le monde. Il dit à maman : « Eh ! bien ! chacun va se coucher, on dit que tout est fini — Comment, fini ? — Je n’y conçois guère rien ; il paraît que M. de la Fayette ne voulait que faire sanctionner des décrets et que la garde de Paris veillât sur le Roi. — Ah ! dit maman, certainement demain on emmènera la famille royale à Paris. — Cela ne se peut pas, le Roi n’y a pas d’appartement, toutes les Tuileries sont démeublées depuis longtemps, excepté l’appartement de la Reine. » Il nous quitta, chacun s’en alla, et on se coucha.

Mon père, ma mère et Mme  d’Estourmel[27] furent les seuls du château qui veillèrent ; comme nos fenêtres donnaient sur la rue des Réservoirs, et qu’on découvrait de là la place d’Armes et la cour des Ministres, on y voyait mieux l’agitation du peuple que partout ailleurs du château. On avait fait atteler quinze voitures du Roi à huit heures du soir, afin qu’il pût fuir avec ses gardes ; mais, au lieu de leur faire traverser la place d’Armes et les cours, pour de là gagner la terrasse, ce qui était très facile, toutes les troupes étant alors sous les armes, on leur fit prendre le chemin de la grille du Dragon, par les rues, sans escorte ; le peuple les força à retourner, plusieurs écuyers coururent risque de la vie ; on vint dire à ce pauvre Roi que les voitures ne pouvaient arriver au château ; ainsi il fut trahi encore pour cet objet.

On fit ranger les gardes du corps à cheval sur la terrasse pendant la nuit, et peu après on les fit partir pour Rambouillet.

Sur les cinq heures, maman vit beaucoup de peuple courir avec violence par des mouvements tumultueux ; c’était de loin, elle ne put distinguer ce que c’était ; elle sortit de son appartement avec mon père et Mme  d’Estourmel ; ils traversèrent la galerie de l’Opéra pour aller au vestibule de la Chapelle, qui menait à la grande galerie. Ils trouvèrent les portes fermées et tout dans la plus profonde tranquillité ; heureusement ils rentrèrent, car l’instant d’après, la minute avant que le peuple envahît, nos domestiques vinrent dire que les gardes du corps étaient devenus fous ; deux, courant à toutes jambes, avaient voulu entrer, on avait fermé la porte sur eux. Alors maman, ne pouvant plus tenir à ses inquiétudes, demanda à la sentinelle de la garde nationale, qui était à la porte de la cour de l’Opéra, sous ses fenêtres (mais elles étaient élevées à une hauteur énorme sur la rue), ce qui se passait dans la cour des Ministres, où elle voyait toujours le peuple dans la même agitation. Il dit : « Ce sont les gardes du corps, madame, » et il fit signe qu’on leur coupait la tête. Il n’était resté à Versailles que ceux de service, environ deux cents : ils furent poursuivis, plusieurs tués en se défendant en héros, la plupart se sauvèrent par mille déguisements. D’ailleurs on ne cherchait certainement pas à en tuer beaucoup, les meneurs surent bien arrêter le peuple, quand ils le voulurent.

On peut imaginer l’état dans lequel nous étions, en apprenant qu’on tuait les gardes du corps ; plusieurs exempts, qui demeuraient près de notre appartement, vinrent s’y cacher ; nous donnâmes des habits à des gardes qui étaient réfugiés chez nous, nos domestiques en sauvèrent beaucoup. Nous étions dans la plus horrible inquiétude, on pensait voir massacrer toutes les personnes du château ; le peuple et la garde nationale de Paris étaient dans les cours ; on apprit qu’on avait gagné le régiment de Flandre dans la nuit, on avait emporté ses drapeaux. Les soldats les voyant sur la place d’Armes, passèrent par-dessus la grille ; alors on s’empara de chaque soldat, on lui prodigua le vin et l’argent ; ces hommes, indignés de rester sans cartouches, d’avoir eu leurs canons enlevés, d’avoir été enfermés toute la nuit sous clef, furent bientôt gagnés et se mêlèrent au peuple ; ils ne participèrent point cependant aux assassinats.

Profitant de ce que la foule se portait dans les cours et de ce qu’il n’y avait âme qui vive dans la rue des Réservoirs, nous sortons du château ; maman et moi tremblions comme la feuille ; nous nous réfugions dans un petit logement que M. le comte de Crenay[28] avait dans la ville, extrêmement près du château ; nous y restons avec plusieurs personnes venues pour y chercher asile, entre autres des officiers des gardes du corps.

Tout d’un coup nous entendons une fusillade et une canonnade générales et sans ordre, qui partent des cours et durent plus d’une demi-heure ; nous croyions qu’on massacrait tout au château, et nous étions dans le plus cruel état, quand on vint nous dire que c’était une réjouissance, parce que le Roi avait paru sur le grand balcon avec la cocarde et avait consenti à aller demeurer à Paris. Il lui fallait bien obéir : quel consentement ! quelle réjouissance ! Nous retournons au château et de là chez Mesdames. Je leur fais moi-même des cocardes de rubans, nous en prenons toutes ; il y avait dans les antichambres plusieurs de leurs gens, qui étaient de la garde nationale de Versailles et avaient endossé l’uniforme.

Nous montons en voiture avec Mesdames, Mme  de Narbonne[29], Mme  de Chastellux, maman et moi ; nous suivions celle du Roi, mais nous en étions à une grande distance ; une foule immense et le grand nombre des voitures nous séparaient, quoique Mesdames fussent parties en même temps.

Je n’oublierai pas que la Reine, en montant en carrosse et entourée d’une troupe immense de ses assassins, reconnut dans la foule le baron de Ros[30], officier des gardes du corps, déguisé ; elle eut le courage de lui dire tout haut : « Vous irez savoir de ma part des nouvelles de M. de Savonnières, et lui direz toute la part que je prends à son état. » M. de Ros nous le répéta, l’instant d’après. C’est ainsi que je n’écris que ce que j’ai vu ou ai su de la bouche des témoins oculaires, sans parler des faits que d’autres mieux instruits que moi feront passer à la postérité.

Plus de deux mille voitures suivaient le Roi ; on prétendait qu’après son départ on pillerait le château ; aussi le démeublait-on avec une telle précipitation, qu’on jetait jusqu’aux glaces par les fenêtres.

Jamais on n’a vu une confusion pareille à celle de la route de Paris à Versailles. Tout le monde était pêle-mêle ; on voyait des énergumènes, hommes et femmes, qui avaient l’air de furieux ; on entendait les cris répétés de Vive la Nation ! et à chaque instant des coups de fusil partaient au repos, ou peut-être exprès. Nous avions cent hommes de la garde nationale de Paris qui nous entouraient, destinés spécialement pour la voiture de Mesdames ; tout le long de la route, elles leur parlaient avec la plus grande bonté, et même trop grande, en partie par peur, en partie par habitude d’être extrêmement affables ; Madame Adélaïde surtout, par le besoin qu’elle avait d’être toujours en agitation et en mouvement. Nous fûmes cinq heures en route jusqu’à Sèvres ; il avait été accordé à Mesdames d’aller à Bellevue, les cent hommes les y accompagnèrent, et y restèrent pour les garder. Maman, en arrivant, eut une affreuse attaque de nerfs.

  1. Anne-Charles-Sigismond de Montmorency, né le 15 octobre 1737, marquis de Royan, puis duc de Piney-Luxembourg, duc de Châtillon, pair de France, lieutenant général, capitaine des gardes, donna, le 20 août 1789, sa démission de député aux états généraux et émigra. Il mourut à Lisbonne le 13 octobre 1803.
  2. Louis-Joseph-Charles-Amable d’Albert, né le 4 novembre 1748, duc de Luynes et de Chevreuse, pair de France, maréchal de camp, chevalier de Saint-Louis, colonel général des dragons en 1783. Député de la Touraine aux états généraux, il n’émigra point et ne fut pas arrêté. Appelé au Sénat en 1803, il mourut à Paris le 20 mai 1807.
  3. Pierre-Marc-Gaston, duc de Lévis, né à Paris le 7 mars 1764, émigra en 1792, fut blessé à Quiberon, rentra en France en 1808. Pair de France, maréchal de camp, ministre d’État, chevalier des ordres, membre de l’Académie française, il mourut à Paris le 15 février 1830.
  4. Jean-Jacques-Marie, comte d’Astorg, né à Auch le 11 juin 1752, lieutenant des gardes dans la compagnie de Luxembourg, colonel en 1788, commanda un corps de l’armée de Condé. Nommé, en 1815, maréchal de camp, il fut mis à la tête du département de Seine-et-Marne, et retraité, en 1816, comme lieutenant général et commandeur de Saint-Louis ; il mourut à Auch le 28 janvier 1822.
  5. Timoléon-Magdelon-François, marquis de Savonnières, né à Metz le 28 novembre 1740. Enseigne au régiment de Normandie en 1755, major du régiment de Navarre en 1776, chevalier de Saint-Louis, mestre de camp en 1780, lieutenant aux gardes du corps en 1786 ; il eut le bras cassé d’un coup de fusil par un garde national de Versailles, le 5 octobre 1789, et mourut le 9 février suivant.
  6. Jean-Augustin-Armand de Calvimont, né à Villeneuve-d’Agen, baron de Saint-Martial, comte de Saint-Chamarans, page du Roi, puis capitaine dans royal-Piémont, mort à Bordeaux, le 13 février 1812, à l’âge de 50 ans.
  7. Jean-Guillaume-Vincent, comte de Bonsol, né le 1er juin 1751, aux Esseintes près La Réole ; volontaire aux grenadiers de France en 1765, sous-lieutenant en 1767, mestre de camp de cavalerie en 1779, chevalier de Saint-Louis en 1784, lieutenant aux gardes du corps en 1789. Il émigra et fut retraité en 1815 comme lieutenant général et grand-croix de Saint-Louis.
  8. Rose-Raimonde de Budes de Guébriant, née le 31 janvier 1756 au château de Coëtilliau, en Bretagne, mariée, en 1776, à Pierre-Jean, marquis de Las-Cases-Beauvoir, morte le 19 juillet 1810, au château d’Azay-le-Rideau, Indre-et-Loire
  9. Louis-Joseph, fils aîné de Louis XVI, né à Versailles le 22 octobre 1781, mort le 4 juin 1789.
  10. Anne-Victurnienne-Henriette de Rochechouart-Mortemart, née le 7 mai 1773, mariée en 1789 au duc de Croÿ ; Nathalie-Henriette-Victurnienne, née le 23 juin 1774, mariée en 1792 au prince de Beauvau ; Catherine-Victurnienne, née le 4 juin 1776, mariée en 1804 au duc de Crussol : filles de Victurnien de Rochechouart, duc de Mortemart, et d’Anne-Gabrielle d’Harcourt.
  11. François-Henri, comte de Lillebonne, né le 11 janvier 1726, lieutenant général, gouverneur de Normandie, puis du Dauphin ; duc d’Harcourt en 1783, membre de l’Académie Française, mort à Stains, en Angleterre, le 22 juin 1801.
  12. Françoise-Catherine-Scolastique d’Aubusson de la Feuillade, née à Miremont en Périgord, le 2 août 1733, mariée le 13 juin 1752 au comte de Lillebonne, depuis duc d’Harcourt, décédée à Paris le 12 novembre 1815.
  13. Bonne-Marie-Félicité de Montmorency-Luxembourg, née le 18 février 1739, mariée, le 23 janvier 1754, à Armand-Louis, comte, depuis duc de Sérent ; dame d’honneur de Madame la duchesse d’Angoulême ; morte au palais des Tuileries le 14 février 1823.
  14. Le 17e dragons, devenu en 1788 régiment des Évêchés, et ensuite 2e régiment de chasseurs à cheval.
  15. Jean-François de Narbonne-Pelet, né le 31 décembre 1726 à Saint-Paul-Trois-Châteaux, en bas Dauphiné ; lieutenant général, grand-croix de Saint-Louis, il mourut à Paris, le 28 janvier 1804.
  16. Jacques Necker, né à Genève en 1732, d’abord banquier à Paris, fut directeur général des Finances de 1776 à 1781, puis en 1788 et 1789 ; il se retira, en 1790, dans sa terre de Coppet, près Genève, et y mourut en 1804.
  17. César-Henri, comte de la Luzerne, né à Paris le 23 février 1737, lieutenant général en 1784, ministre de la Marine de 1787 à 1790, émigra et mourut en Autriche, à Bernau, près Wells, le 24 mars 1799.
  18. Jean-Louis-Paul-François de Noailles, né le 26 octobre 1739, duc d’Ayen, puis duc de Noailles et pair de France ; lieutenant général en 1784, capitaine des gardes, chevalier de la Toison d’or, membre de l’Académie des sciences, mort à Fontenay-Trésigny, Seine-et-Marne, le 26 octobre 1824.
  19. Anne-Louise-Germaine Necker, née à Paris en 1766, mariée en 1786 au baron de Staël-Holstein, ambassadeur de Suède en France. Exilée de Paris en 1802, puis internée à Coppet, en Suisse, en 1810, elle s’évada en 1812 et mourut à Paris le 14 juillet 1817.
  20. Louis-Marie-Jacques-Amalric de Narbonne-Lara, né le 23 août 1755, à Colorno, duché de Parme ; maréchal de camp et ministre de la Guerre en 1791, plus tard aide de camp de Napoléon, ambassadeur de France ; mort à Torgau, en Saxe, le 17 novembre 1813.
  21. Amable-Gaspard, de la maison de Villelume, né à Doyet, en Bourbonnais, le 27 juillet 1724, comte de Thianges, premier gentilhomme de la chambre du feu roi de Pologne, lieutenant général, grand-croix de Saint-Louis, grand bailli d’épée de Remiremont, premier maître de la garde-robe du comte d’Artois, mort à Jouarre (Seine-et-Marne), le 24 décembre 1800. Il avait épousé Marie-Anne-Jeanne Bernard, fille de Simon-Charles Bernard, seigneur de Ballainvilliers et du comté de Cléry-Créquy, en Picardie.
  22. Marie-Madeleine-Charlotte de Béon, fille de Gabriel-Guillaume, comte de Béon du Massès de Cazeaux, et de Marie-Madeleine-Christine Lombard de Montauroux, avait épousé François-Frédéric, comte de Béon-Béarn, mestre de camp, sous-lieutenant aux gardes du corps, chevalier de Saint-Louis. Elle était dame pour accompagner Madame Adélaïde, et elle épousa en secondes noces, en 1808, Joseph-Marie-Grégoire-Prosper, comte d’Hautpoul.
  23. Marie-Jean-Paul-Roch-Yves-Gilbert Motier, marquis de La Fayette, né le 6 septembre 1757, à Chavagnac, près Brioude, en Auvergne, fit la guerre d’Amérique, fut, en 1789, député aux états généraux, puis commandant de la garde nationale, sortit de France en 1792, y rentra après le 18 brumaire, et mourut à Paris le 19 mai 1834.
  24. Louis-Victoire-Hippolyte Luce, comte de Montmorin Saint-Hérem, né à Fontainebleau le 13 décembre 1762, major, et en 1790 colonel du régiment de Flandre, gouverneur de Fontainebleau, capitaine des chasses. Cité devant le tribunal révolutionnaire le 17 août 1792, acquitté le 31, il fut massacré le 3 septembre dans la prison de la Conciergerie.
  25. Hugues-Thibault-Henri-Jacques, marquis de Lezay-Lusignem, né à Paris le 22 décembre 1749 ; mestre de camp commandant du régiment de Flandre en 1784, chevalier de Saint-Louis, député de Paris aux états généraux, maréchal de camp en 1790, mort en 1815.
  26. Charles-Francois-Casimir, comte de Saulx-Tavannes, né le 11 août 1739, maréchal de camp en 1780, chevalier des ordres, créé duc en 1786, chevalier d’honneur de la Reine, pair en 1814, lieutenant général, mort à Paris le 15 juin 1820.
  27. Philiberte-Renée de Galard de Brassac de Béarn, mariée le 30 avril 1776 à Louis-Marie, marquis d’Estourmel, chevalier de Saint-Louis en 1778, grand bailli de la noblesse du Cambrésis, député aux états généraux, lieutenant général en 1792. La marquise d’Estourmel était dame pour accompagner Madame Victoire ; elle mourut le 13 septembre 1824.
  28. Sébastien-Anne-Julien de Poilvilain, comte de Crenay et de Montaigu, né le 15 septembre 1743, sous-lieutenant aux gendarmes de la garde du Roi, chevalier de Saint-Louis, maréchal de camp, retraité en 1782, maître de la garde-robe de Monsieur, comte de Provence.
  29. Françoise de Chalus-Sensac, mariée, par contrat du 13 juillet 1749, à Jean-François, comte de Narbonne-Lara, créé duc en 1780, grand d’Espagne, premier gentilhomme de l’infant, duc de Parme, maréchal de camp, commandant dans le haut Languedoc. Elle avait été dame du palais de l’infante, duchesse de Parme, et était dame d’honneur de Madame Adélaïde ; elle mourut en 1821.
  30. Augustin-Nicolas-Jean de Ros, né le 16 juin 1742, à Saint-Estève-del-Monastir, dans le Roussillon, capitaine aux milices de Perpignan en 1759, et dans Choiseul-dragons en 1763, sous-lieutenant aux gardes du corps, compagnie écossaise, en 1777, avec le rang de mestre de camp de cavalerie, chevalier de Saint-Louis.