Mémoires d’une ex-palladiste parfaite, initiée, indépendante/03/Chapitre I

chapitre 1er 

Lucifer au Sanctum Regnum

(Suite)




Au sujet de cette manifestation de Lucifer le 8 avril 1889, manifestation qui fut pour moi la première du prétendu Dieu-Bon, je dois répondre à une objection que j’attendais. Elle s’est produite par la plume d’un écrivain qu’on m’a dit être un savant orientaliste, M. Le Chartier ; son article, paru dans un journal catholique du Midi, m’a été envoyé de diverses parts, avec vives protestations, par des amis, lecteurs de mes Mémoires.

La voici, cette objection :

« Il est évident que Miss Diana Vaughan ne fut qu’un sujet entre les mains des criminels opérateurs de Charleston. Autosuggestionnée par ses propres désirs de jeune femme ardemment vivante, entrainée ou mieux exténuée par la privation de nourriture et de sommeil, surexcitée par une infusion qui possédait les propriétés narcotiques et exhilarantes du haschisch, elle tomba dans un état de rêve et crut voir Lucifer tel qu’elle l’avait désiré. Cette vision fascina la pauvre femme et troubla, pour de longues années, son système cérébral. »

Pourront raisonner ainsi ceux qui, n’étant au courant de rien, se contentent de quelques lignes lues et ne prennent la peine de voir ni ce qui a été écrit avant, ni ce qui a été écrit après.

M. Le Chartier est, peut-être, le parangon des philologues ; les Burnouf, les Max Muller, les Schlegel, les Silvestre de Sacy, les Bentley, les Tychsen, les Pearce, les Buxtorf, simples ignorants auprès de lui, n’auraient pas réussi à traduire, sans doute, avec sa maëstria et son habile sagacité, l’indéchiffrable Gennaïth-Menngog ; en tout cas, sa raffinée science des langues orientales est fort au-dessus de ma compétence ; mais, dans mon cas qu’il a étudié si légèrement, M. Le Chartier parle ni plus ni moins comme tant de personnes qui n’ont jamais eu aucune relation avec le surnaturel, qui n’ont jamais assisté seulement à la plus anodine apparition.

Il fallait lire mon récit jusqu’à la fin ; car j’ai dit, en toute loyauté, ce que je suis certaine de n’avoir pas vu. J’ai expliqué où l’illusion commence, dans de telles œuvres démoniaques. Mais cette illusion est bien due au diable, non à ce que M. Le Chartier appelle entraînement, surexcitation.

Pourquoi ai-je donné l’emploi et le régime des trois journées qui précédèrent ma présentation à Lucifer ? — Parce que, en matière aussi grave, je me fais scrupule de dire tout ce qui est nécessaire à la manifestation de la vérité ; parce que, en tête de mes Mémoires, j’ai inscrit pour épigraphe : « Ceci est une œuvre de bonne foi ».

Or, la loyauté appelle la loyauté. Alors : il ne faut pas me faire dire plus que je n’ai dit ; il ne faut pas non plus assimiler à du haschisch une infusion de chènevis.

Privation de nourriture ; l’expression est inexacte. Combien d’ordres religieux, dans lesquels on ne fait qu’un seul repas par jour, et cela durant l’année entière ? Nullement hallucinés, les membres de ces ordres, mais vraiment sains de corps et d’esprit.

Pendant deux jours ne faire qu’un repas léger, éviter de se surcharger l’estomac, cela n’est point s’exténuer, même si pour un troisième jour on ne recourt qu’à une boisson, — laquelle, dans le cas cité, est un fortifiant. — Excellente acuité des sens, perception très nette par un cerveau libre, esprit bien dégagé ; voilà le résultat de ce régime, attendu qu’il s’agit d’une préparation de trois jours seulement.

Oui, il est des charlatans du magisme qui recourent à de coupables pratiques pour procurer eux-mêmes à leurs victimes de véritables hallucinations. Je renvoie M. Le Chartier à leurs livres. S’agit-il de l’évocation d’une personne tendrement aimée, la préparation dans l’isolement est de quatorze jours au minimum ; vingt-un jours pour nourrir sa pensée dans l’attente de l’apparition d’un personnage célèbre, et ces vingt-un jours au régime strictement végétal, avec jeûne sévère pendant les sept derniers.

On reconnaîtra qu’aucune assimilation n’est possible entre cela et le régime que j’ai rapporté.

Quant au haschisch, ah ! oui, parlons-en. Le chanvre dont le chènevis est la graine, est en effet une des bases du haschisch ; mais où le haschisch est-il fabriqué avec du chènevis ?… C’est la résine du chanvre que l’on extrait de la plante même, et non de la graine ; cette résine, qui suintait de l’épiderme du chanvre et s’était accumulée à la surface, une fois obtenue par râclement de la plante ou par d’autres procédés, on la mêle alors à de l’opium, à de la cannelle, à du musc et à de l’essence de roses, et voilà le haschisch ; voilà l’infâme drogue qui, avalée en pilules ou délayée dans du thé, donne une ivresse accompagnée de visions fantastiques. Je me garde bien d’indiquer les doses, afin qu’on ne puisse user de ce qui vient d’être écrit ici ; d’ailleurs, l’opium ne se délivre pas sans ordonnance d’un médecin.

Une simple infusion de chènevis est inoffensive. J’ai dit, avec précision, que je ne bus aucun vin, pas de vin du tout. Or, sans obtenir les effets du haschisch, on peut, il est vrai, surexciter le cerveau au moyen du chènevis ; mais comment ? Avec du vin dans lequel on a fait bouillir (je ne dirai pas la close) du chènevis trituré, mêlé à plusieurs têtes de pavots noirs. Bien plus : il faut s’enivrer avec ce vin, non pas une fois, mais trois fois, pour s’entraîner, et c’est seulement à partir de la troisième fois que l’ivresse s’accompagne d’hallucinations.

Je n’ai jamais pris de boisson de ce genre, encore moins du haschisch. Le chènevis lui-même, non mêlé aux pavots, non bouilli dans le vin, ne peut occasionner aucun désordre cérébral. Cela est connu. Dans plusieurs régions occidentales de la Russie, le chènevis entre dans l’alimentation ; les gens qui en usent ne deviennent nullement des hallucinés.

La diminution de sommeil, portant sur deux nuits en tout, peut-elle vraiment, comme M. Le Chartier l’insinue, peut-elle exténuer le corps et surexciter le cerveau, au point de provoquer chez le sujet une longue série de fausses visions ?… Ce point de l’argumentation ne supporte pas l’examen.

Nombreuses sont les personnes qui se contentent quotidiennement de six heures ou même cinq heures de sommeil, sans que leur santé en souffre le moins du monde ; surtout, celles qui se vouent à la prière.

Je prendrai pour exemple la vie intérieure telle qu’elle est réglée dans un grand nombre de couvents, où l’on prie jusqu’à sept heures par jour, et davantage encore. Là, le dernier office divin de la journée (matines et laudes), ayant lieu à 9 heures du soir, est suivi, à 10 heures et demie, de la pénitence commune, avec examen, et c’est donc à 11 heures seulement qu’on se couche. À 4 heures et demie du matin, le réveil est sonné, afin qu’à 5 heures toute la communauté soit au chœur pour l’oraison, immédiatement suivie du premier office divin (petites heures). Voilà donc cinq heures et demie de sommeil seulement.

Pour ma part, mon ordinaire a toujours été de six heures, et je m’en trouve très bien. Alors, parce qu’il m’arriverait, comme en avril 1889 à Charleston, de prendre la moitié de mon sommeil normal, deux nuits de suite, il en résulterait pour moi une exténuation qui serait l’une des causes de trouble de mes facultés intellectuelles, et ce trouble mental serait tellement profond qu’il durerait de longues années ?… En vérité, avancer cela, c’est se moquer du public. Combien de malheureuses ouvrières, lors d’un travail pressé, passent plusieurs nuits blanches, complètes, sans que ces veillées consécutives amènent le moindre désordre dans leur cerveau ! Le résultat, au contraire, est que ces pauvres femmes ont quelque difficulté ensuite à reprendre l’habitude de leur sommeil régulier.

Il est prouvé, d’autre part, que le sommeil coupé, loin d’affaiblir l’esprit, lui donne une plus grande lucidité. Des écrivains, travaillant à une œuvre où ils mettaient toute leur âme, ont employé ce procédé avec succès : dormir leur temps normal, mais en faisant interrompre leur sommeil à deux ou trois reprises, le cerveau étant toujours mieux dispos au moment du réveil. On cite des hommes de génie qui avaient pris ce procédé pour règle. C’est aussi la règle dans divers ordres religieux : réveil au milieu de la nuit, sommeil interrompu pour la prière commune à la chapelle du monastère.

Que l’on examine sérieusement, et non en fantaisiste, le régime de mes trois jours de préparation à ma présentation à Lucifer : la diminution de nourriture et de sommeil est réglée de façon à ne produire aucun affaiblissement du corps ni de l’esprit ; je n’ai absorbé d’une manière ou d’une autre, aucun narcotique ; l’alimentation et la boisson prises, loin de m’alourdir, me dégagèrent l’estomac et le cerveau. Je me suis trouvée ainsi dans les meilleures conditions de lucidité.

Si j’ai chancelé en me rendant au Sanctum Regnum, ce n’est nullement par suite de faiblesse, mais par l’effet de l’émotion, ainsi que je l’ai dit… Et quelle émotion toute naturelle, en pareille circonstance !… Pour juger comme il convient, il faut se représenter la pensée qui me dominait alors : j’allais contempler face à face celui que je croyais être le Dieu-Bon, j’allais le voir paraître devant moi, il en avait donné la promesse ; j’allais l’adorer visible, lui parler et l’entendre. Qui n’aurait pas été ému à l’approche de ce solennel moment ?…

Enfin, tout mon récit est net, les détails utiles ne manquent pas. Or, des rêves d’ivresse par le haschisch et autres préparations analogues, il ne reste, on le sait, que souvenirs confus. Le fumeur d’opium, l’amateur de haschisch sortent de leur sommeil peuplé de visions fantastiques, les membres brisés, dans un état d’hébêtement qui ne se dissipe que peu à peu.

À la première période d’une hallucination de cette sorte, l’individu qui a pris la funeste drogue ne dort pas ; son excitation se traduit par une extrême loquacité ; il a déjà des visions, mais elles sont très animées. Puis, seconde période, ses yeux s’éteignent, il s’engourdit et les illusions prennent une forme douce, voluptueuse. Voilà ce qui est rapporté par tous les auteurs qui ont étudié en Asie les amateurs de haschisch et autres fous s’adonnant à l’ivresse opiacée.

Rien de semblable dans mon fait du 8 avril 1889 ; tout le contraire, même. Qu’on relise mes précédentes pages. Sous l’influence d’une infusion possédant les propriétés du haschisch, j’aurais été dans la plus grande agitation pendant mes premières heures au Sanctum Regnum ; relisez, relisez ces impressions, vivaces dans ma mémoire, que j’ai transcrites sans recherche, comme si elles étaient d’hier.

Dans le genre d’hallucination auquel on voudrait faire croire, nul souvenir précis. L’amateur retourne à son haschisch, parce qu’il sait qu’il lui donne en songe plus ou moins mouvementé les éblouissements de la richesse et des grandeurs et les coupables plaisirs où s’abrutissent les seigneurs et maîtres asiatiques ; mais il lui est impossible à son réveil de reconstituer en sa pensée le détail de ses illusions, contrairement à ce qui a lieu le plus souvent après un songe de sommeil naturel.

La vérité est donc bien ce que j’ai écrit : aucun sommeil, aucun état de rêve pour moi ; apparition très réelle de Lucifer, mais apparition suivie bientôt de possession, au cours de laquelle le suprême imposteur s’est joué de moi en me procurant cette illusion spéciale qui est l’illusion diabolique surnaturelle, et qui n’a rien à voir avec l’hallucination naturelle pathologique.

La meilleure preuve de l’erreur de M. Le Chartier est dans le numéro 2 du {{corr|Palladium|Palladium} ; ce numéro de la revue luciférienne, ainsi que les autres, a été mis à la disposition de mes abonnés ecclésiastiques, et l’on ne saurait prétendre qu’il a été imprimé pour les besoins de la cause. On y lit le récit de mes deux premières apparitions d’Asmodée, alors que j’avais seize ans, c’est-à-dire neuf ans avant que se manifesta à moi le prince des démons : aucun régime spécial, aucune préparation ; ni cette première fois ni la deuxième, je n’attendais Asmodée et ne savais pas même qui il était. Ces deux faits antérieurs renversent donc aussi le système de M. Le Chartier. Et j’en pourrais citer encore plusieurs autres !…

J’ai dit que j’attendais cette objection. Dès le lendemain de ma conversion, une feuille maçonnique de Paris a essayé de me faire passer pour folle. « Cette femme n’est qu’une hallucinée ! » habile mot d’ordre pour ôter d’avance tout crédit à ce qu’on sait que je peux dire. Mais je ne m’attendais pas à voir M. Le Chartier, qui est catholique, m’a-t-on affirmé, emboîter le pas au journal dont la S▽ Sophie Walder est collaboratrice. Quoi qu’il en soit, ma réponse à son argumentation est, je crois, complète ; la reproduiront, j’aime à l’espérer, les journaux catholiques qui ont reproduit l’article du savant orientaliste.

Au surplus, M. Le Chartier a vraiment abusé du droit de critique. Je ne lui en veux pas, néanmoins, et comme chrétienne, et parce qu’il a dépassé le but, dans sa conclusion.

À l’en croire, ma conversion, « seconde phase de l’horrible suggestion » commencée en 1889 à Charleston, pourrait bien être, non à la gloire de Dieu, mais au bénéfice de la franc-maçonnerie.

Oui, cette énormité a été écrite : ma conversion n’est pas l’œuvre de la grâce ; elle est l’œuvre des chefs de la secte.

Me voilà d’accord avec Lemmi !!!

« Rodrigue, qui l’eut dit ? — Chimène, qui l’eût cru ? »

Cette hypothèse de conclusion n’est pas bien d’accord avec le reste. En effet, une hallucinée ne mérite aucune créance, soit ; du moins, elle est absolument sincère. Si je suis une fausse convertie, ma sincérité de folle qui s’imagine avoir vu disparaît, — à moins que Lemmi lui-même, grand hypnotiseur, m’ait suggéré d’abord de le combattre et de contribuer à le démasquer (car je suis bien pour quelque chose, n’est-ce pas ? dans le déluge de tuiles qui pleut sur sa tête depuis deux ans), et ensuite d’avoir la foi chrétienne, de devenir catholique.

Risible, la conclusion de M. Le Chartier ; néanmoins, les énormités sont bien accueillies quelquefois par certains esprits. Je m’attends à tout : je sais que déjà des pièges ont été tendus, où l’on espère me voir tomber.

Voici donc ce que le traducteur du Gennaïth-Menngog écrit, à mon propos :

« Le but principal de la franc-maçonnerie étant de faciliter et de masquer l’œuvre des juifs, il lui faut de temps en temps de ces conversions éclatantes, qui frappent les imaginations et détournent l’attention des esprits. C’est une transformation moderne de l’antique cérémonie du bouc émissaire, »

Et, à l’appui de son insinuation, il ajoute immédiatement une citation, qu’il dit tirer du discours du Lieutenant Grand Commandeur au récipiendaire Souverain Grand Inspecteur Général, 33e degré du Rite Écossais :

« Si les circonstances rendaient indispensable l’intervention directe de l’Ordre, choisissez et désignez à l’avance le Frère (ou la Sœur) qui doit être victime de cette immixtion et jouer le rôle de bouc émissaire, pour que son sacrifice, fait publiquement, avec le retentissement le plus grand possible, rende à l’Ordre son innocence sans tache. »

C’est donc la haute-maçonnerie qui donne à ma conversion le plus grand retentissement possible ?… En vérité, voilà le cas de dire que l’on apprend tous les jours quelque chose de nouveau.

Eh bien, la phrase citée appartient à l’un des rituels du 33e degré ; mais on va voir si elle s’applique à ce que M. Le Chartier insinue. Elle est dans le discours du Souverain Commandeur Grand-Maître, et non du Lieutenant Grand Commandeur. Afin que mes lecteurs en aient le vrai sens, je reprends la citation en la complétant par les lignes dont elle est précédée dans ce rituel (rituel en usage pour les réceptions de 33e avec l’anneau)


« Ayez soin de faire exagérer la forme des protestations contre le régime social, politique, économique et religieux actuel, de manière à pouvoir, une fois le terrain populaire soulevé et remué par ces exagérations, y semer nos véritables doctrines qui auront ainsi un caractère véritablement modéré.

» Évitez néanmoins, avec le plus grand soin, de trop pencher du côté du prolétariat ; car le prolétariat réclame, mais ne rapporte pas.

» Notre véritable objectif est les classes dirigeantes, dont l’instruction superficielle et l’ambition inconsidérée constituent, pour nos doctrines, le milieu le plus favorable à leur développement.

» Évitez toujours, et en vertu des mêmes principes, de mêler l’Ordre d’une manière directe à quoi que ce soit, et en conséquence, découragez de toutes vos forces les publications maçonniques.

» Mais si les circonstances rendaient indispensable l’intervention directe de l’Ordre, choisissez et désignez à l’avance le Frère qui doit être victime de cette immixtion et jouer le rôle de bouc émissaire, pour que son sacrifice, fait publiquement avec le retentissement le plus grand possible, rende à l’Ordre son innocence sans tache. L’Ordre doit rester immaculé, inaccessible au soupçon. »


Vous avez lu ?… S’agit-il des cas de conversions quelconques ?…

On dit au récipiendaire : — Pour nous imposer à la politique des gouvernants, travaillons à faire éclater un mouvement populaire contre l’ordre social actuel, sans compromettre la franc-maçonnerie par des publications officielles ; poussons les révolutionnaires profanes à exagérer leur hostilité contre le régime de la société moderne, mais ne nous montrons pas, nous, trop favorables aux prolétaires. Si pourtant survient une absolue nécessité de faire intervenir la franc-maçonnerie dans le mouvement, désignons l’un de nos Frères qui parlera publiquement comme franc-maçon pour déterminer l’agitation, le soulèvement populaire ; nous serons toujours à temps de le désavouer ; à peine l’action engagée, nous le jetterons par-dessus bord avec le plus grand éclat possible, et les classes dirigeantes, dont nous devons être les inspirateurs secrets, nous croiront innocents comme l’agneau.

À quelle affaire de ce genre ai-je été mêlée ? Dans quelle nation ai-je excité le peuple à la rébellion ? Quel est le jour où les chefs de la haute-maçonnerie m’ont désavouée avec éclat ?

Je n’ai été désavouée qu’une fois, et en secret ; non par les chefs de la haute-maçonnerie, mais par le comité indépendant de Londres ; non pour avoir prêché la révolution sociale, dont j’ai toujours été adversaire, mais parce que mes amis Indépendants prétendaient que j’allais trop loin dans mes attaques contre Lemmi.

L’éclat donné à ce désaveu l’a été par moi ; je n’ai pas été expulsée de la maçonnerie et traitée en bouc émissaire, c’est moi qui ai jeté ma démission à la tête de mes ex-Frères ; le retentissement donné à cet incident l’a été par la presse antimaçonnique.

Exactement : la citation de M. Le Chartier ne s’applique pas à mon cas ; car c’est tout le contraire qui s’est passé, et le discours du rituel des 33es avec l’anneau ne vise aucunement le fait de conversions fictives éclatantes, à produire par ruse pour faciliter et masquer l’œuvre des juifs.

Et c’est moi qui ai été traitée de sujette aux rêveries d’autosuggestion ! c’est moi qui suis représentée comme ayant le cerveau troublé !…

Laissons M. Le Chartier. Que le lecteur m’excuse. Ce qu’il désire, c’est le récit des actes du Palladisme et des faits relatifs à ma venue à la sainte religion du Christ ; la polémique détournerait l’intérêt de mon œuvre. Pour cette fois, je n’ai pu réfréner en moi le besoin de faire justice d’iniques insinuations. Désormais, je laisserai dire ; car peu doit m’importer, après tout, que les uns m’insultent et que les autres clabaudent !

Je demandais à Dieu la croix de l’humiliation. Un catholique s’est levé pour insinuer, dans les colonnes d’un journal, que je jouais peut-être un rôle pour le compte de Lemmi.

Voilà, certes, un sanglant outrage… Merci, mon Dieu !