Mélite
(Édition Marty-Laveaux 1910)
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ACTE II.


――――――


SCÈNE PREMIÈRE.


ÉRASTE



Je l’avois bien prévu, que ce cœur infidèle 102
Ne se défendroit point des yeux de ma cruelle,
Qui traite mille amants avec mille mépris,
Et n’a point de faveurs que pour le dernier pris.
Sitôt qu’il l’aborda, je lus sur son visage 103
De sa déloyauté l’infaillible présage ;
Un inconnu frisson dans mon corps épandu
Me donna les avis de ce que j’ai perdu 104.
Depuis, cette volage évite ma rencontre,
Ou si malgré ses soins le hasard me la montre,
Si je puis l’aborder, son discours se confond,
Son esprit en désordre à peine me répond ;
Une réflexion vers le traître qu’elle aime
Presque à tous les moments le ramène en lui-même 105 ;
Et tout rêveur qu’il est, il n’a point de soucis
Qu’un soupir ne trahisse au seul nom de Tircis.
Lors, par le prompt effet d’un changement étrange,
Son silence rompu se déborde en louange.
Elle remarque en lui tant de perfections,
Que les moins éclairés verroient ses passions 106.
Sa bouche ne se plaît qu’en cette flatterie,
Et tout autre propos lui rend sa rêverie.
Cependant chaque jour au discours attachés 107,
Ils ne retiennent plus leurs sentiments cachés :
Ils ont des rendez-vous où l’amour les assemble ;
Encore hier sur le soir je les surpris ensemble ;
Encor tout de nouveau je la vois qui l’attend.
Que cet œil assuré marque un esprit content !
Perds tout respect, Éraste, et tout soin de lui plaire 108 ;
Rends, sans plus différer, ta vengeance exemplaire ;
Mais il vaut mieux t’en rire, et pour dernier effort
Lui montrer en raillant combien elle a de tort.


――――――


SCÈNE II.


ÉRASTE, MÉLITE.


ÉRASTE.


Quoi ! seule et sans Tircis ! vraiment c’est un prodige,
Et ce nouvel amant déjà trop vous néglige,
Laissant ainsi couler la belle occasion 109
De vous conter l’excès de son affection.


MÉLITE.


Vous savez que son âme en est fort dépourvue 110.


ÉRASTE.


Toutefois, ce dit-on, depuis qu’il vous a vue 111,
Il en porte dans l’âme un si doux souvenir,
Qu’il n’a plus de plaisirs qu’à vous entretenir.


MÉLITE.


Il a lieu de s’y plaire avec quelque justice :
L’amour ainsi qu’à lui me paroît un supplice ;
Et sa froideur, qu’augmente un si lourd entretien,
Le résout d’autant mieux à n’aimer jamais rien.


ÉRASTE.


Dites : à n’aimer rien que la belle Mélite.


MÉLITE.


Pour tant de vanité j’ai trop peu de mérite.


ÉRASTE.


En faut-il tant avoir pour ce nouveau venu ?


MÉLITE.


Un peu plus que pour vous.


ÉRASTE.


Un peu plus que pour vous._De vrai, j’ai reconnu,
Vous ayant pu servir deux ans, et davantage,
Qu’il faut si peu que rien à toucher mon courage.


MÉLITE.


Encor si peu que c’est vous étant refusé,
Présumez comme ailleurs vous serez méprisé.


ÉRASTE.


Vos mépris ne sont pas de grande conséquence,
Et ne vaudront jamais la peine que j'y pense ;
Sachant qu'il vous voyoit, je m'étois bien douté
Que je ne serois plus que fort mal écouté.


MÉLITE.


Sans que mes actions de plus près j'examine,
À la meilleure humeur je fais meilleure mine,
Et s'il m'osoit tenir de semblables discours,
Nous romprions ensemble avant qu'il fût deux jours.


ÉRASTE.


Si chaque objet nouveau de même vous engage,
Il changera bientôt d'humeur et de langage 112.
Caressé maintenant aussitôt qu'aperçu,
Qu'auroit-il à se plaindre, étant si bien reçu ?


MÉLITE.


Éraste, voyez-vous, trêve de jalousie ;
Purgez votre cerveau de cette frénésie ;
Laissez en liberté mes inclinations.
Qui vous a fait censeur de mes affections ?
Est-ce à votre chagrin que j'en dois rendre conte 113 ?


ÉRASTE.


Non, mais j'ai malgré moi pour vous un peu de honte
De ce qu'on dit partout du trop de privauté 114
Que déjà vous souffrez à sa témérité.


MÉLITE.


Ne soyez en souci que de ce qui vous touche.


ÉRASTE.


Le moyen, sans regret, de vous voir si farouche
Aux légitimes vœux de tant de gens d’honneur,
Et d’ailleurs si facile à ceux d’un suborneur ?


MÉLITE.


Ce n’est pas contre lui qu’il faut en ma présence
Lâcher les traits jaloux de votre médisance.
Adieu : souvenez-vous que ces mots insensés
L’avanceront chez moi plus que vous ne pensez.


――――――


SCÈNE III.


ÉRASTE.



C’est là donc ce qu’enfin me gardoit ton caprice 115 ?
C’est ce que j’ai gagné par deux ans de service ?
C’est ainsi que mon feu s’étant trop abaissé
D’un outrageux mépris se voit récompensé ?
Tu m’oses préférer un traître qui te flatte 116 ;
Mais dans ta lâcheté ne crois pas que j’éclate,
Et que par la grandeur de mes ressentiments
Je laisse aller au jour celle de mes tourments.
Un aveu si public qu’en feroit ma colère
Enfleroit trop l’orgueil de ton âme légère
Et me convaincroit trop de ce désir abjet 117
Qui m’a fait soupirer pour un indigne objet.
Je saurai me venger, mais avec l’apparence
De n’avoir pour tous deux que de l’indifférence.
Il fut toujours permis de tirer sa raison
D’une infidélité par une trahison.
Tiens, déloyal ami, tiens ton âme assurée
Que ton heur surprenant aura peu de durée,
Et que par une adresse égale à tes forfaits
Je mettrai le désordre où tu crois voir la paix.
L’esprit fourbe et vénal d’un voisin de Mélite
Donnera prompte issue à ce que je médite.
À servir qui l’achète il est toujours tout prêt,
Et ne voit rien d’injuste où brille l’intérêt.
Allons sans perdre temps lui payer ma vengeance,
Et la pistole en main presser sa diligence.


――――――


SCÈNE IV.


TIRCIS, CLORIS.



TIRCIS.


Ma sœur, un mot d’avis sur un méchant sonnet
Que je viens de brouiller dedans mon cabinet.


CLORIS.


C’est à quelque beauté que ta muse l’adresse ?


TIRCIS.


En faveur d’un ami je flatte sa maîtresse.
Vois si tu le connois, et si, parlant pour lui,
J’ai su m’accommoder aux passions d’autrui.


SONNET.


Après l’œil de Mélite il n’est rien d’admirable…


CLORIS.


Ah ! frère, il n’en faut plus.


TIRCIS.


Ah ! frère, il n’en faut plus._Tu n’es pas supportable
De me rompre sitôt.


CLORIS.


De me rompre sitôt._C’étoit sans y penser ;
Achève.


TIRCIS.


Achève_Tais-toi donc, je vais recommencer.


SONNET118.


Après l’œil de Mélite il n’est rien d’admirable ;
Il n’est rien de solide après ma loyauté.
Mon feu, comme son teint, se rend incomparable,
Et je suis en amour ce qu’elle est en beauté.


Quoi que puisse à mes sens offrir la nouveauté,
Mon cœur à tous ses traits demeure invulnérable,
Et bien qu’elle ait au sien la même cruauté.
Ma foi pour ses rigueurs n’en est pas moins durable.


C’est donc avec raison que mon extrême ardeur
Trouve chez cette belle une extrême froideur,
Et que sans être aimé je brûle pour Mélite ;


Car de ce que les Dieux, nous envoyant au jour,
Donnèrent pour nous deux d’amour et de mérite,
Elle a tout le mérite, et moi j’ai tout l’amour.


CLORIS.


Tu l’as fait pour Éraste ?


TIRCIS.


Tu l’as fait pour Éraste ?_Oui, j’ai dépeint sa flamme,


CLORIS.


Comme tu la ressens peut-être dans ton âme ?


TIRCIS.


Tu sais mieux qui je suis, et que ma libre humeur
N’a de part en mes vers que celle de rimeur.


CLORIS.


Pauvre frère, vois-tu, ton silence t’abuse ;
De la langue ou des yeux, n’importe qui t’accuse 119 :
Les tiens m’avoient bien dit malgré toi que ton cœur
Soupiroit sous les lois de quelque objet vainqueur ;
Mais j’ignorois encor qui tenoit ta franchise 120,
Et le nom de Mélite a causé ma surprise,
Sitôt qu’au premier vers ton sonnet m’a fait voir
Ce que depuis huit jours je brûlois de savoir.


TIRCIS.


Tu crois donc que j’en tiens ?


CLORIS.


Tu crois donc que j’en tiens ?_Fort avant.


TIRCIS.


Tu crois donc que j’en tiens ? Fort avant._Pour Mélite ?


CLORIS.


Pour Mélite, et de plus que ta flamme n’excite
Au cœur de cette belle aucun embrasement 121.


TIRCIS.


Qui t’en a tant appris ? mon sonnet ?


CLORIS.


Qui t’en a tant appris ? mon sonnet ?_Justement.


TIRCIS.


Et c’est ce qui te trompe avec tes conjectures,
Et par où ta finesse a mal pris ses mesures.
Un visage jamais ne m’auroit arrêté,
S’il falloit que l’amour fût tout de mon côté.
Ma rime seulement est un portrait fidèle
De ce qu’Éraste souffre en servant cette belle ;
Mais quand je l’entretiens de mon affection,
J’en ai toujours assez de satisfaction.


CLORIS.


Montre, si tu dis vrai, quelque peu plus de joie,
Et rends-toi moins rêveur, afin que je te croie.


TIRCIS.


Je rêve, et mon esprit ne s’en peut exempter ;
Car sitôt que je viens à me représenter
Qu’une vieille amitié de mon amour s’irrite,
Qu’Éraste s’en offense et s’oppose à Mélite 122,
Tantôt je suis ami, tantôt je suis rival,
Et toujours balancé d’un contre-poids égal,
J’ai honte de me voir insensible ou perfide :
Si l’amour m’enhardit, l’amitié m’intimide.
Entre ces mouvements mon esprit partagé
Ne sait duquel des deux il doit prendre congé.


CLORIS.


Voilà bien des détours pour dire, au bout du conte,
Que c’est contre ton gré que l’amour te surmonte.
Tu présumes par là me le persuader ;
Mais ce n’est pas ainsi qu’on m’en donne à garder 123.
À la mode du temps, quand nous servons quelque autre,
C’est seulement alors qu’il n’y va rien du nôtre 124.
Chacun en son affaire est son meilleur ami 125,
Et tout autre intérêt ne touche qu’à demi.


TIRCIS.


Que du foudre à tes yeux j’éprouve la furie,
Si rien que ce rival cause ma rêverie !


CLORIS.


C’est donc assurément son bien qui t’est suspect :
Son bien te fait rêver, et non pas son respect,
Et toute amitié bas, tu crains que sa richesse
En dépit de tes feux n’obtienne ta maîtresse 126.


TIRCIS.


Tu devines, ma sœur : cela me fait mourir.


CLORIS.


Ce sont vaines frayeurs dont je veux te guérir 127.
Depuis quand ton Éraste en tient-il pour Mélite ?


TIRCIS.


Il rend depuis deux ans hommage à son mérite.


CLORIS.


Mais dit-il les grands mots ? parle-t-il d’épouser ?


TIRCIS.


Presque à chaque moment.


CLORIS.


Presque à chaque moment._Laisse-le donc jaser.
Ce malheureux amant ne vaut pas qu’on le craigne ;
Quelque riche qu’il soit, Mélite le dédaigne :
Puisqu’on voit sans effet deux ans d’affection,
Tu ne dois plus douter de son aversion ;
Le temps ne la rendra que plus grande et plus forte.
On prend soudain au mot les hommes de sa sorte 128,
Et sans rien hasarder à la moindre longueur,
On leur donne la main dès qu’ils offrent le cœur.


TIRCIS.


Sa mère peut agir de puissance absolue.


CLORIS.


Crois que déjà l’affaire en seroit résolue,
Et qu’il auroit déjà de quoi se contenter,
Si sa mère étoit femme à la violenter.


TIRCIS.


Ma crainte diminue et ma douleur s’apaise 129 ;
Mais si je t’abandonne, excuse mon trop d’aise.
Avec cette lumière et ma dextérité,
J’en veux aller savoir toute la vérité.
Adieu.


CLORIS.


Adieu._Moi, je m’en vais paisiblement attendre 130
Le retour désiré du paresseux Philandre.
Un moment de froideur lui fera souvenir 131
Qu’il faut une autre fois tarder moins à venir.


――――――


SCÈNE V.


ÉRASTE, CLITON.



ÉRASTE, lui donnant une lettre 132.


Va-t’en chercher Philandre, et dis-lui que Mélite 133
A dedans ce billet sa passion décrite ;
Dis-lui que sa pudeur ne sauroit plus cacher
Un feu qui la consume et qu’elle tient si cher 134.
Mais prends garde surtout à bien jouer ton rôle :
Remarque sa couleur, son maintien, sa parole ;
Vois si dans la lecture un peu d’émotion
Ne te montrera rien de son intention.


CLITON.


Cela vaut fait, Monsieur.


ÉRASTE.


Cela vaut fait, Monsieur._Mais après ce message 135
Sache avec tant d’adresse ébranler son courage,
Que tu viennes à bout de sa fidélité.


CLITON.


Monsieur, reposez-vous sur ma subtilité ;
Il faudra malgré lui qu’il donne dans le piége :
Ma tête sur ce point vous servira de plége 136 ;
Mais aussi vous savez…


ÉRASTE.


Mais aussi vous savez…_Oui, va, sois diligent 137.
Ces âmes du commun n’ont pour but que l’argent 138 ;
Et je n’ai que trop vu par mon expérience…
Mais tu reviens bientôt 139 ?


CLITON.


Mais tu reviens bientôt__?_Donnez-vous patience,
Monsieur; il ne nous faut qu’un moment de loisir 140,
Et vous pourrez vous-même en avoir le plaisir.


ÉRASTE.


Comment ?


CLITON.


Comment ?_De ce carfour j’ai vu venir Philandre.
Cachez-vous en ce coin, et de là sachez prendre
L’occasion commode à seconder mes coups :
Par là nous le tenons. Le voici ; sauvez-vous 141.


――――――


SCÈNE VI.


PHILANDRE, ÉRASTE, CLITON.



PHILANDRE.
(Éraste est caché et les écoute 142.)


Quelle réception me fera ma maîtresse ?
Le moyen d’excuser une telle paresse ?


CLITON.


Monsieur, tout à propos je vous rencontre ici,
Expressément chargé de vous rendre ceci.


PHILANDRE.


Qu’est-ce ?


CLITON.


Qu’est-ce ?_Vous allez voir, en lisant cette lettre,
Ce qu’un homme jamais n’oseroit se promettre 143 ;
Ouvrez-la seulement.


PHILANDRE.


Ouvrez-la seulement._Va, tu n’es qu’un conteur.


CLITON.


Je veux mourir au cas qu’on me trouve menteur.


lettre supposée de mélite à philandre.

Malgré le devoir et la bienséance du sexe, celle-ci m’échappe en faveur de vos mérites, pour vous apprendre que c’est Mélite qui vous écrit, et qui vous aime. Si elle est assez heureuse pour recevoir de vous une réciproque affection, contentez-vous de cet entretien par lettres, jusques à ce qu’elle ait 144 ôté de l’esprit de sa mère quelques personnes qui n’y sont que trop bien pour son contentement.


ÉRASTE, feignant d’avoir lu la lettre par-dessus son épaule 145.


C’est donc la vérité que la belle Mélite
Fait du brave Philandre une louable élite,
Et qu’il obtient ainsi de sa seule vertu
Ce qu’Éraste et Tircis ont en vain débattu !
Vraiment dans un tel choix mon regret diminue ;
Outre qu’une froideur depuis peu survenue,
De tant de vœux perdus ayant su me lasser 146,
N’attendoit qu’un prétexte à m’en débarrasser.


PHILANDRE.


Me dis-tu que Tircis brûle pour cette belle ?


ÉRASTE.


Il en meurt.


PHILANDRE.


Il en meurt._Ce courage à l’amour si rebelle ?


ÉRASTE.


Lui-même.


PHILANDRE.


Lui-même._Si ton cœur ne tient plus qu’à demi 147,
Tu peux le retirer en faveur d’un ami 148 ;
Sinon, pour mon regard ne cesse de prétendre :
Étant pris une fois, je ne suis plus à prendre.
Tout ce que je puis faire à ce beau feu naissant 149,
C’est de m’en revancher par un zèle impuissant 150 ;
Et ma Cloris la prie, afin de s’en distraire,
De tourner, s’il se peut, sa flamme vers son frère 151.


ÉRASTE.


Auprès de sa beauté qu’est-ce que ta Cloris ?


PHILANDRE.


Un peu plus de respect pour ce que je chéris.


ÉRASTE.


Je veux qu’elle ait en soi quelque chose d’aimable ;
Mais enfin à Mélite est-elle comparable 152 ?


PHILANDRE.


Qu’elle le soit ou non, je n’examine pas
Si des deux l’une ou l’autre a plus ou moins d’appas.
J’aime l’une ; et mon cœur pour toute autre insensible 153


ÉRASTE.


Avise toutefois, le prétexte est plausible.


PHILANDRE.


J’en serois mal voulu des hommes et des Dieux.


ÉRASTE.


On pardonne aisément à qui trouve son mieux.


PHILANDRE.


Mais en quoi gît ce mieux ?


ÉRASTE.


Mais en quoi gît ce mieux ?_En esprit, en richesse 154.


PHILANDRE.


Ô le honteux motif à changer de maîtresse !


ÉRASTE.


En amour.


PHILANDRE.


En amour._Cloris m’aime, et si je m’y connoi,
Rien ne peut égaler celui qu’elle a pour moi.


ÉRASTE.


Tu te détromperas, si tu veux prendre garde
À ce qu’à ton sujet l’une et l’autre hasarde.
L’une en t’aimant s’expose au péril d’un mépris :
L’autre ne t’aime point que tu n’en sois épris ;
L’une t’aime engagé vers une autre moins belle :
L’autre se rend sensible à qui n’aime rien qu’elle ;
L’une au desçu 155 des siens te montre son ardeur,
Et l’autre après leur choix quitte un peu sa froideur ;
L’une…


PHILANDRE.


L’une…_Adieu : des raisons de si peu d’importance
Ne pourroient en un siècle ébranler ma constance 156.
(Il dit ce vers à Cliton tout bas 157.)
Dans deux heures d’ici tu viendras me revoir.


CLITON.


Disposez librement de mon petit pouvoir.


ÉRASTE, seul 158


Il a beau déguiser, il a goûté l’amorce ;
Cloris déjà sur lui n’a presque plus de force :
Ainsi je suis deux fois vengé du ravisseur,
Ruinant tout ensemble et le frère et la sœur.


――――――


SCÈNE VII.


TIRCIS, ÉRASTE, MÉLITE.



TIRCIS.


Éraste, arrête un peu.


ÉRASTE.


Éraste, arrête un peu._Que me veux- tu ?


TIRCIS.


Éraste, arrête un peu. Que me veux- tu ?_Te rendre
Ce sonnet que pour toi j’ai promis d’entreprendre 159.


MÉLITE, au travers d’une jalousie, cependant qu’Éraste
lit le sonnet 160.


Que font-ils là tous deux ? qu’ont-ils à démêler ?
Ce jaloux à la fin le pourra quereller :
Du moins les compliments, dont peut-être ils se jouent,
Sont des civilités qu’en l’âme ils désavouent.


TIRCIS.161


J’y donne une raison de ton sort inhumain.
Allons, je le veux voir présenter de ta main
À ce charmant objet dont ton âme est blessée 162.


ÉRASTE, lui rendant son sonnet 163.


Une autre fois, Tircis ; quelque affaire pressée
Fait que je ne saurois pour l’heure m’en charger.
Tu trouveras ailleurs un meilleur messager.


TIRCIS, seul.


La belle humeur de l’homme ! Ô Dieux, quel personnage !
Quel ami j’avois fait de ce plaisant visage !
Une mine froncée, un regard de travers,
C’est le remercîment que j’aurai de mes vers.
Je manque, à mon avis, d’assurance ou d’adresse,
Pour les donner moi-même à sa jeune maîtresse,
Et prendre ainsi le temps de dire à sa beauté
L’empire que ses yeux ont sur ma liberté.
Je pense l’entrevoir par cette jalousie :
Oui, mon âme de joie en est toute saisie 164.
Hélas ! et le moyen de pouvoir lui parler 165,
Si mon premier aspect l’oblige à s’en aller ?
Que cette joie est courte, et qu’elle est cher vendue 166 !
Toutefois tout va bien, la voilà descendue.
Ses regards pleins de feu s’entendent avec moi 167 ;
Que dis-je ? en s’avançant elle m’appelle à soi.


――――――


SCÈNE VIII168.


TIRCIS, MÉLITE.



MÉLITE.


Eh bien ! qu’avez-vous fait de votre compagnie ?


TIRCIS.


Je ne puis rien juger de ce qui l’a bannie 169 :
À peine ai-je eu loisir de lui dire deux mots,
Qu’aussitôt le fantasque, en me tournant le dos,
S’est échappé de moi.


MÉLITE.


S’est échappé de moi._Sans doute il m’aura vue,
Et c’est de là que vient cette fuite imprévue 170.


TIRCIS.


Vous aimant comme il fait, qui l’eût jamais pensé ?


MÉLITE.


Vous ne savez donc rien de ce qui s’est passé ?


TIRCIS.


J’aimerois beaucoup mieux savoir ce qui se passe,
Et la part qu’a Tircis en votre bonne grâce.


MÉLITE.


Meilleure aucunement qu’Éraste ne voudroit.
Je n’ai jamais connu d’amant si maladroit ;
Il ne sauroit souffrir qu’autre que lui m’approche.
Dieux ! qu’à votre sujet il m’a fait de reproche !
Vous ne sauriez me voir sans le désobliger.


TIRCIS.


Et de tous mes soucis c’est là le plus léger.
Toute une légion de rivaux de sa sorte
Ne divertiroit pas 171 l’amour que je vous porte,
Qui ne craindra jamais les humeurs d’un jaloux.


MÉLITE.


Aussi le croit-il bien, ou je me trompe.


TIRCIS.


Aussi le croit-il bien, ou je me trompe. _Et vous ?


MÉLITE.


Bien que cette croyance à quelque erreur m’expose 172,
Pour lui faire dépit, j’en croirai quelque chose.


TIRCIS.


Mais afin qu’il reçût un entier déplaisir,
Il faudroit que nos cœurs n’eussent plus qu’un désir,
Et quitter ces discours de volontés sujettes 173,
Qui ne sont point de mise en l’état où vous êtes.
Vous-même consultez un moment vos appas 174,
Songez à leurs effets, et ne présumez pas
Avoir sur tous les cœurs un pouvoir si suprême 175,
Sans qu’il vous soit permis d’en user sur vous-même.
Un si digne sujet ne reçoit point de loi,
De règle, ni d’avis, d’un autre que de soi.


MÉLITE.


Ton mérite, plus fort que ta raison flatteuse,
Me rend, je le confesse, un peu moins scrupuleuse.
Je dois tout à ma mère, et pour tout autre amant
Je voudrois tout remettre à son commandement 176 ;
Mais attendre pour toi l’effet de sa puissance,
Sans te rien témoigner que par obéissance,
Tircis, ce seroit trop : tes rares qualités
Dispensent mon devoir de ces formalités 177.


TIRCIS.


Que d’amour et de joie un tel aveu me donne !


MÉLITE.


C’est peut-être en trop dire, et me montrer trop bonne ;
Mais par là tu peux voir que mon affection
Prend confiance entière en ta discrétion.


TIRCIS.


Vous la verrez toujours, dans un respect sincère,
Attacher mon bonheur à celui de vous plaire,
N’avoir point d’autre soin, n’avoir point d’autre esprit ;
Et si vous en voulez un serment par écrit,
Ce sonnet que pour vous vient de tracer ma flamme
Vous fera voir à nu jusqu’au fond de mon âme.


MÉLITE.
.


Garde bien ton sonnet, et pense qu’aujourd’hui
Mélite veut te croire autant et plus que lui 178.
Je le prends toutefois comme un précieux gage
Du pouvoir que mes yeux ont pris sur ton courage.
Adieu : sois-moi fidèle en dépit du jaloux.


TIRCIS.179


Ô ciel ! jamais amant eut-il un sort plus doux ?


Acte I

Acte II

Acte III


102. Var. Je l’avois bien prévu que cette âme infidèle, (1633-57)

103. Var. Même dès leur abord, je lus sur son visage, (1633-57)

104. Var. [Me donna les avis de ce que j’ai perdu ;]
Mais hélas ! qui pourroit gauchir sa destinée l ?
Son immuable loi dans le ciel burinée
Nous fait si bien courir après notre malheur,
Que j’ai donné moi-même accès à ce voleur :
Le perfide qu’il est me doit sa connoissance ;
C’est moi qui l’ai conduit et mis en sa puissance ;
C’est moi qui l’engageant à ce froid compliment,
Ai jeté de mes maux le premier fondement.
[Depuis, cette volage évite ma rencontre.] (1633-57)

105. Var. Presques à tous moments le ramène en lui-même, (1633-68)

106. Var. Que les moins avisés verroient ses passions. (1633-60)

107. Var. Cependant chaque jour au babil attachés. (1633-57)
Var. Cependant chaque jour aux discours attachés. (1660-68)

108. Var. Sus donc, perds tout respect et tout soin de lui plaire,
Et rends dessus le champ ta vengeance exemplaire.
Non, il vaut mieux s’en rire, et pour dernier effort. (1633-57)

109. Var. De laisser perdre ainsi la belle occasion. (1648)

110. Var. Vous savez que son âme en est trop dépourvue. (1657)

111. Var. [Toutefois, ce dit-on, depuis qu’il vous a vue,]
Ses chemins par ici s’adressent tous les jours.
Et ses plus grands plaisirs ne sont qu’en vos discours.
mél. Et ce n’est pas aussi sans cause qu’il les prise,
Puisqu’outre que l’amour comme lui je méprise,
Sa froideur, que redouble un si lourd entretien. (1633-57)

112. Var. Il ne tardera guère à changer de langage. (1633-57)

113. Var. Vraiment, c'est bien à vous que j'en dois rendre conte m.
ér. Aussi j'ai seulement pour vous un peu de honte. (1633-57)

114. Var. Qu'on murmure partout du trop de privauté. (1633-60)

115. Var. C’est là donc ce qu’enfin me gardoit ta malice. (1633-57)
Var. C’est là donc ce qu’enfin me gardoit mon caprice. (1660)

116. Var. Tu me préfères donc un traître qui te flatte ?
Inconstante beauté, lâche, perfide, ingrate,
De qui le choix brutal se porte au plus mal fait ;
Tu l’estimes à faux, tu verras à l’effet.
Par le peu de rapport que nous avons ensemble,
Qu’un honnête homme et lui n’ont rien qui se ressemble
Que dis-je, tu verras ? Il vaut autant que mort :
Ma valeur, mon dépit, ma flamme en sont d’accord.
Il suffit ; les destins bandés à me déplaire
Ne l’arracheroient pas à ma juste colère.
Tu démordras, parjure, et ta déloyauté
Maudira mille fois sa fatale beauté.
Si tu peux te résoudre à mourir en brave homme,
Dès demain un cartel l’heure et le lieu te nomme.
Insensé que je suis ! hélas, où me réduit
Ce mouvement bouillant dont l’ardeur me séduit ?
Quel transport déréglé ! Quelle étrange échappée !
Avec un affronteur mesurer mon épée !
C’est bien contre un brigand qu’il me faut hasarder
Contre un traître qu’à peine on devroit regarder !
Lui faisant trop d’honneur, moi-même je m’abuse ;
C’est contre lui qu’il faut n’employer que la ruse ;
[Il fut toujours permis de tirer sa raison
D’une infidélité par une trahison.]
Vis doncques, déloyal, vis, mais en assurance
Que tout va désormais tromper ton espérance,
Que tes meilleurs amis s’armeront contre toi,
Et te rendront encor plus malheureux que moi.
J’en sais l’invention, qu’un voisin de Mélite
Exécutera trop aussitôt que prescrite.
Pour n’être qu’un maraud, il est assez subtil.

SCÈNE IV.

ÉRASTE, CLITON.

ér. Holà ! hau ! vieil ami. clit. Monsieur, que vous plaît-il ?
ér. Me voudrois-tu servir en quelque bonne affaire ?
clit. Dans un empêchement fort extraordinaire.
Je ne puis m’éloigner un seul moment d’ici.
ér. Va, tu n’y perdras rien, et d’avance voici
Une part des effets qui suivent mes paroles.
clit. Allons, malaisément gagne-t-on dix pistoles n ! (1633-57)

117. Ce mot est toujours écrit ainsi par Corneille, qui ne fait en cela que se conformer à l’usage général de son temps. Voyez le Lexique.

118. Ce sonnet, composé, d’après Thomas Corneille, avant la comédie elle-même (voyez ci-dessus, p. 126), a été imprimé pour la première fois en 1682, à la page 167 des Meslanges poétiques qui suivent Clitandre. Ce texte primitif ne présente qu’une variante sans importance ; le vers 487 commence ainsi :
Et quoiqu’elle ait, etc.

119. Var. De la langue, des yeux, n’importe qui t’accuse. (1657 et 60)

120. C’est-à-dire qui t’avait captivé. Franchise, dans le sens de liberté. Voyez le Lexique.

121. Var. Dedans cette maîtresse aucun embrasement. (1633-60)

122. Var. Qu’Éraste m’en retire et s’oppose à Mélite. (1633)

123. Var. Mais ce n’est pas ainsi qu’on m’en baille à garder. (1633-57)

124. Var. C’est seulement alors qu’il n’y a rien du nôtre o (1657-63)

125. Var. Un chacun à soi-même est son meilleur ami. (1633-57)

126. Var. En dépit de tes feux n’emporte ta maîtresse. (1633)

127. Var. Vaine frayeur pourtant dont je veux te guérir.
tirs. M’en guérir ! clor. Laisse faire : Éraste sert Mélite,
Non pas ? mais depuis quand p ? tirs. Depuis qu’il la visite
Deux ans se sont passés. clor. Mais dedans ses discours
Parle-t-il d’épouser ? tirs. Oui, presque tous les jours.
clor. Donc, sans l’appréhender, poursuis ton q entreprise :
Avecque tout son bien Mélite le méprise.
[Puisqu’on voit sans effet deux ans d’affection]. (1633-57)
Var. Ce sont vaines frayeurs dont je te veux guérir. (1660)

128. Var. On prend au premier bond les hommes de sa sorte r,
De crainte qu’à la longue ils n’éteignent leur feu s.
tirs. Mais il faut redouter une mère. clor. Aussi peu.
tirs. Sa puissance pourtant sur elle est absolue.
clor. Oui, mais déjà l’affaire en seroit résolue,
Et ton rival auroit de quoi se contenter. (1633-57)

129. Var. Pour de si bons avis il faut que je te baise. (1633)

130. Var. Adieu._Moi, je m’en vais dans le logis attendre. (1633-57)

131. Var. Un baiser refusé lui fera souvenir. (1633-48)
Var. Un moment de froideur le fera souvenir. (1633 et 64)

132. Var. Il baille une lettre à Cliton. (1633, en marge.) — Il lui donne une lettre. (1663, en marge.)

133. Var. Cours vite chez Philandre, et dis-lui que Mélite
A dedans ce papier sa passion décrite. (1633-57)

134. Var. Un feu qui la consomme et qu’elle tient si cher. (1633 et 48-67)

135. Var. Cela vaut fait, Monsieur._Mais avec ton message
Tâche si dextrement de tourner son courage. (1633-64)

136. Var. Ma tête sur ce point me servira de plége t. (1657)

137. En marge, dans l’édition de 1633 : Cliton rentre.

138. Var. Ces âmes du commun font tout pour de l’argent,
Et sans prendre intérêt au dessein de personne,
Leur service et leur foi sont à qui plus leur donne.
Quand ils sont éblouis de ce traître métal,
Ils ne distinguent plus le bien d’avec le mal ;
Le seul espoir du gain règle leur conscience.
Mais tu reviens bientôt, est-ce fait ? clit. Patience,
Monsieur ; en vous donnant un moment de loisir,
Il ne tiendra qu’à vous d’en avoir le plaisir. (1633-57)

139. En marge, dans l’édition de 1633 : Cliton ressort brusquement.

140. Var. Monsieur ; il ne vous faut qu’un moment de loisir. (1660-68)

141. En marge, dans l’édition de 1633: Philandre paroit et Éraste se cache.

142. Ces mots manquent dans les éditions de 1633, de 1644 et de 1652-60 ; ils sont remplacés, dans celle de 1648, par ceux-ci : cependant qu’Érasle est caché.

143. Var. Ce qu’un homme jamais ne s’oseroit promettre ;
Ouvrez-la seulement. phil. Tu n’es rien qu’un conteur. (1633-57)

144. Ainsi dans les éditions de 1633-48, de 1657 et de 1682 ; aye dans celles de 1652, de 1654 et de 1660-68. — Voyez plus haut, p. 109, note 1.

145. Var. Cependant que Philandre lit, Éraste s’approche par derrière, et feignant d’avoir lu par-dessus son épaule, il lui saisit la main encore pleine de la lettre toute déployée. (1633, en marge.) — Il feint d’avoir lu la lettre par-dessus l’épaule de Philandre. (1663, en marge.)

146. Var. Portoit nos deux esprits à s’entre-négliger,
Si bien que je cherchois par où m’en dégager. (1633-57)

147. Var. Lui-même._Si ton feu commence à te lasser. (1633)
Var. Lui-même._Si ton feu commence à se lasser. (1644-57)

148. Var. Pour un si bon ami tu peux y renoncer. (1633-57)
Var. Tu peux le retirer pour un si bon ami. (1660-64)

149. Var. Tout ce que je puis faire à son brasier naissant, (1633-68)

150. Var. C’est de le revancher par un zèle impuissant. (1633-57)

151. Var. De tourner ce qu’elle a de flamme vers son frère. (1633-57)

152. Var. Mais la peux-tu juger à l’autre comparable ?
phil. Soit comparable ou non, je n’examine pas. (1633-57)

153. Var. J’ai promis d’aimer l’une, et c’est où je m’arrête.
ér. Avise toutefois, le prétexte est honnête, (1633-57)

154. Var. Mais en quoi gît ce mieux ?_Ce mieux gît en richesse.
phil. Ô le sale motif à changer de maîtresse !
ér. En amour. phil. Ma Cloris m’aime si chèrement.
Qu’un plus parfait amour ne se voit nullement.
ér. Tu le verras assez, si tu veux prendre garde. (1633-57)

155. À l’insu. Voyez le Lexique.

156. Var. N’ont rien qui soit bastant d’ébranler ma constance. (1633)

157. Var. Il dit ce dernier vers comme à l’oreille de Cliton, et rentre, tous deux chacun de leur côté. (1633, en marge.) — À Cliton, tout bas. (1644-60)

158. À la place du mot seul ou seule, après le nom d’un personnage, on lit constamment, en marge, dans l’édition de 1663 : Il est seul, elle est seule. Nous n’avons remarqué qu’une exception à cet usage. La première fois que cette indication se trouve dans Mélite, c’est-à-dire à la fin de la scène iii du Ier acte, l’édition de 1663 ne porte en marge que le mot même du texte : seul.

159. Var. Ce sonnet que pour toi je promis d’entreprendre. (1633-60)

160. Var. Elle parolt au travers d’une jalousie, et dit ces vers cependant qu’Éraste lit le sonnet tout bas. (1633, en marge.) — Elle les regarde à travers une jalousie cependant qu’Éraste lit le sonnet. (1663, en marge.)

161. En marge, dans l’édition de 1633 : Il montre du doigt la fin de son sonnet à Éraste.

162. Var. À ce divin objet dont ton âme est blessée. (1633-57)

163. Var. Feignant de lui rendre son sonnet, il le fait choir et Tirsis le ramasse. (1633, en marge.) Il lui rend le sonnet. (1663, en marge.)

164. En marge, dans l’édition de 1633 : Mélite se retire de la jalousie et descend.

165. Var. Hélas ! et le moyen de lui pouvoir parler. (1633-57)

166. Var. Que d’un petit coup d’œil l’aise m’est cher vendue ! (1633-57)

167. Var. Ses regards pleins de feux s’entendent avec moi. (1633-68)

168. Dans les éditions antérieures à 1660, cette scène et la précédente n’en forment qu’une.

169. Dans certains exemplaires de l’édition de 1633, notamment dans celui de la Bibliothèque impériale qui est marqué Y, ce vers est dit par Mélite et non par Tircis, dont le couplet ne commence qu’au vers suivant.

170. Var. Et c’est de là que vient cette fuite impourvue. (1633)

171. C’est-à-dire, suivant le sens étymologique du mot, ne détournerait pas. Voyez le Lexique.

172. Var. Bien que ce soit un heur où prétendre je n’ose. (1633-57)

173. Volontés sujettes, volontés soumises à une mère. La réponse de Mélile éclaircit parfaitement ce que cette expression pourrait avoir d’obscur.

174. Var. Consultez seulement avecque vos appas. (1633-57)
Var. Consultez en vous-même un moment vos appas. (1660)

175. Var. Avoir sur tout le monde un pouvoir si suprême. (1633-57)

176. Var. Je m’en voudrois remettre à son commandement. (1633-60)

177. Var. [Dispensent mon devoir de ces formalités.]
tirs. Souffre donc qu’un baiser cueilli dessus ta bouche
M’assure entièrement que mon amour te touche.
mél. Ma parole suffit. tirs. Ah ! j’entends bien que c’est :
Un peu de violence en t’excusant te plaît.
mél. Folâtre, j’aime mieux abandonner la place,
Car tu sais dérober avec si bonne grâce
Que bien que ton larcin me fâche infiniment,
Je ne puis rien donner à mon ressentiment.
tirs. Auparavant l’adieu reçois de ma constance
Dedans ce peu devers l’éternelle assurance.
mél. Garde bien ton papier, et pense qu’aujourd’hui (1633-48)

178. Var. [Mélite veut te croire autant et plus que lui u.]
tirsis. Il lui coule le sonnet dans le sein, comme elle se dérobe v.
Par ce refus mignard qui porte un sens contraire.
Ton feu m’instruit assez de ce que je dois faire.
Ô ciel ! je ne crois pas que sous ton large tour
Un mortel eut jamais tant d’heur ni tant d’amour. (1633-48)

179. Var. tircis, seul. (1652-60)


l. Mais il faut que chacun suive sa destinée. (1644-57)

m. Voyez la note relative à la première variante de la page 150.

n. Après ce vers commence, sous le titre de scène v, notre scène iv, entre Tircis et Cloris.

o. Au sujet de cette leçon, qui figure, comme on le voit, dans plusieurs éditions, on lit dans les Fautes notables survenues pendant l’impression (édit de 1663, tome I, p. ix) : « Qu’il n’y a rien, » lisez : « qu’il n’y va rien. »

p. Mais sais-tu depuis quand ? (1654)

q. Son pour ton, dans l’édition de 1657, est évidemment une faute.

r. On prend au premier bond les hommes de la sorte. (1652-57)
On prend soudain au mot les hommes de la sorte. (1660)

s. De peur qu’avec le temps ils n’éteignent leur feu. (1644-57)

t. De caution, de gage. Voyez le Lexique.

u. Mélite te veut croire autant et plus que lui. (1652-64)

v. tirsis, lui coulant le sonnet dans le bras. (1644 et 48)