Mercure de France (p. 28-29).

VII


Qui peut trouver une femme forte ?
Proverbes, c. xxxi, 10.


Sous les ormes, le chalumeau de la noce fait pleurer la soirée. Le chien a envie du gâteau de la petite fille et ne cessera de le tenir en arrêt que lorsqu’aura disparu la dernière bouchée. Le facteur rural rentre, et sa blouse s’obscurcit à cette heure où tout un pan du ciel étoile commence de s’incliner.

Le poète qui a descendu le sentier de la colline s’essuie le front et regarde. Jamais il n’aura la paix de ces danseurs, de ces mariés, de ce passant. Il songe à Éliézer, à Rébecca allant aux citernes, la cruche au flanc. L’épouse dont les bras s’ouvrent comme un port est-elle destinée au poète qui ne peut, comme Booz, prendre à témoin la haute moisson ? Il ne faut point qu’il prétende à la joie du maître au long de qui la Moabite se couche : mais le poète est celui que ne nomme point l’Histoire, serviteur qui, pour Ruth, laisse tomber des épis.