Lyndamine ou l’Optimisme des pays chauds/2

Giovane Della Rosa (J. Gay) (p. 31-61).
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CHAPITRE II

ENTRÉE DE LYNDAMINE CHEZ MADAME JOLICON


Dans le même instant qu’Émilie se retira avec son protecteur, je fus appelée dans l’appartement de madame Jolicon (c’est le nom de ma maîtresse).

— Lyndamine, dit-elle, j’ai besoin d’une femme de chambre ; vous êtes jolie et vous me paraissez avoir de la propreté : voyez si vous voulez entrer à mon service ; votre fortune dépend de votre réponse.

Elle fut bientôt faite. Que n’eus-je pas accepté pour être sûre d’un morceau de pain ?

— Je suis contente, ma chère enfant, dit-elle ; regardez-vous désormais comme la confidente d’une femme qui aime le plaisir et qui souhaite de vous faire du bien. Vous êtes fatiguée, il est juste que vous dormiez. Voici dans cette chambre un lit qui vous est destiné, et une montre qui vous indiquera l’heure. Demain, à dix heures du matin, éveillez-moi ; vous entrerez en exercice, et vous bénirez votre rencontre.

Le lendemain matin, à l’heure assignée, j’approche du lit de ma nouvelle maîtresse pour la réveiller. Ses draps étaient à terre ; sa chemise était relevée jusque sur les reins, et elle était couchée sur le côté de manière qu’une cuisse était à deux pieds de l’autre. J’eus le temps de satisfaire ma curiosité et de voir un gros cul dont chaque fesse pesait au moins dix livres ; de l’autre, dans le centre d’un poil grisâtre à demi frisé, une fente à lèvres épaisses, à demi ouverte, et la main droite auprès de l’orifice, comme pour en défendre ou en protéger l’entrée. J’admirai tout bas ; je me doutai que ma belle dame aimait le plaisir, comme elle m’en avait prévenue (c’était, en effet, une appareilleuse). Je me remis sur le devant du lit et je l’éveillai.

À son réveil, elle fit l’étonnée.

— M’avez-vous découverte, Lyndamine ? me dit-elle en colère.

— Moi, madame ! répondis-je, Dieu m’en garde !

Sans aller plus loin, elle relève la jambe droite et m’ordonne de regarder si son anus est sans crottes. C’était du nouveau ; mais il fallait bien s’humilier jusque-là.

— Il est propre, dis-je.

— Fort bien ; prends un peigne sur ma toilette.

Je le prends, et ma belle s’étend sur les fesses.

— Peigne cette toison, Lyndamine.

Je ne connaissais pas encore cette cérémonie, et je parus étonnée.

— Hé, dis-moi, mon enfant, s’écria-t-elle en riant, est-ce que tu n’as point du poil à ton minon ? Voyons-y, parbleu !

Elle me saisit à l’instant par le cotillon, m’entraîne à ses côtés et met en vue tous mes appas.

— Diable ! ajouta-t-elle, ta palatine vaut presque la mienne, ma fille ; tu ne la peignes donc jamais ?

— Je n’en sais pas si long, madame.

— Oh ! bien, il faut faire la toilette au minon et à la tête ; l’un et l’autre ont mille occasions de figurer, et l’on est dédaignée lorsqu’on n’est point parée ; ainsi tu le peigneras, ma petite, dès que ma toilette sera finie.

Je mis le cul de ma maîtresse sur la cuvette sacrée ; je peignai sa toison et lui donnai un air de noblesse qui devait appâter les connaisseurs. Elle en fut satisfaite, admira mes talents et m’ordonna de me peigner à mon tour sous ses yeux.

Pendant cette drôle d’opération, elle me dit en riant que j’avais un fort joli petit minon et que cela pourrait servir dans le besoin. Elle se fit ensuite habiller, apporter du chocolat, qu’elle daigna partager avec moi, paya notre dépense, monta dans sa voiture, où je l’accompagnai, et nous partîmes pour sa tendre patrie.

Pendant la route, qui ne fut que de six heures, je n’eus pas le temps de m’ennuyer ; tous mes sens furent en convulsion.

— Un cul te fait donc peur ? reprit maman ; avoue-le, n’en avais-tu jamais vu ?

— Cela est vrai, dis-je, mais je me doutais bien pourtant qu’un cul ne différait pas d’un cul.

— Peut-être, s’écrie-t-elle vivement ; oh ! ton cul et le mien ont deux fesses, sans doute ; mais il y a fesses et fesses, et cela seul fait courir ou dédaigner une femme. Ne sais-tu pas l’histoire de Vénus belles fesses ? Après tout, nous verrons les tiennes à l’aise lorsque nous serons arrivées. Mais comme il faut s’amuser pendant le voyage et que je n’aime que les amusements solides, c’est sérieusement que je t’assure du bien-être dont je te trouve digne. Reste une seule difficulté qui rompra peut-être toutes nos mesures. Tu ne me connais que par mes premiers bienfaits ; cependant ta confiance est sans réserve : qu’attends-tu donc de ma générosité ?

— Maman, dis-je d’un ton ferme et modeste, vous avez avec moi partagé votre pain, et vous avez promis de ne pas m’abandonner. Je suis au mieux et votre servante pour la vie.

— Fort bien, répond-elle ; mais tu ne sais aucun métier, et chez moi l’on doit gagner sa vie. À quel emploi t’occuperai-je ?

J’avais déjà prévu que sous elle je devais commercer de mes charmes ; mais je la laissai venir, et je lui demandai ce qu’elle prétendait faire de moi.

— Obéiras-tu si je te le dis ? reprit-elle avec la sensation de la joie.

— Oui, décidément, soyez ma mère ; mon corps et mon âme sont dans vos mains.

— Garde ton âme ; elle n’est qu’à Dieu et à toi. Si tu m’abandonnes ton corps, je prétends en disposer en le nourrissant bien.

— Comment donc disposerez-vous de mon corps ?

— Lyndamine, tu joues l’ignorante ; mais il faut être sincère. Ton premier travail sur mon corps et sur le tien t’annonce que le plaisir public est mon objet et doit être celui qu’il te faut remplir. Crois-tu que je t’accorde l’innocence que tu veux affecter ? Tu te tromperais. Je me connais en filles. Plus d’un mâle a caressé cette petite fente que j’examinais en silence pendant que tu en peignais le contour. Dis-je la vérité ? Ta fortune dépend de ton aveu.

La crainte d’être replongée dans la misère et la force de la vérité m’arrachèrent mon secret et me firent trahir mon honneur. Je répondis en balbutiant que le hasard et les circonstances m’avaient fait essayer…

— Eh ! ne va pas plus loin, dit madame Jolicon. Es-tu satisfaite des plaisirs que l’on t’a donnés ? J’en suis persuadée ; mais t’a-t-on instruite des noms sublimes qui concernent l’état que tu veux embrasser et que tu dois savoir ? Prends garde de me mentir. D’avance je lirai ta science dans tes yeux. Toute fille à mon service doit être instruite de son catéchisme. Écoute et réponds.


Cul de lampe de fin de paragraphe
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CATÉCHISME

DE MADAME JOLICON


Demande. — Ma fille, qu’est-ce qu’un vit ?

Réponse. — C’est une cheville que le mâle porte au cul.

D. — À quoi sert cet outil singulier ?

R. — C’est un instrument par lequel il s’unit avec une femelle.

D. — À merveille ; mais quel est le véritable nom de ce centre de réunion, et de l’action qui les unit ?

R. — Le point de réunion s’appelle un con, une fente, une bouche, etc. Quant aux termes qui signifient l’opération, je les ignore.

D. — Ma fille, retenez-le bien, cela s’appelle foutre, selon nos rubriques : le vit fout, le con est foutu. Combien ton petit con l’a-t-il été de fois ?

R. — Passons là-dessus. Il n’est pas encore à son terme.

Les questions se seraient multipliées si nous eussions été plus loin des portes de la ville.

— Je ferai des efforts pour toi, me dit fort simplement madame Jolicon. Sois bonne enfant. Tu vas voir tout à l’heure une jolie petite fille qui sait au mieux son catéchisme et qui perfectionnera mes premières instructions. Ou je me trompe fort, ou tu te soumettras tous les messieurs que tu voudras embrasser : mais prends garde, il faut du choix en tout, et je ne prétends pas que tu te laisses foutre par tous les vits bandants. Minette, qui sera bientôt ton amie, te mettra au fait ; et à nous trois, nous creuserons plus d’une bourse. Nous ferons d’excellents repas, et tout sera au mieux.

Pendant cette conversation intéressante, nous arrivâmes au logis de maman, où Minette l’attendait impatiemment.

— Minette, dit-elle en descendant de voiture, donne la main à cette jeune fille, je la mets sous ta direction ; elle ne sait guère encore que l’A B C de son catéchisme. Mais je réponds de ses dispositions, et sous deux jours elle sera sur le bon ton. Fais-nous boire et manger ; nous avons besoin pour le présent de cette nécessaire réparation.

Pour faire babiller une femme et pour apprendre tout ce qu’elle a dans l’âme, il ne faut que donner à son sang la moindre effervescence. Deux ou trois verres d’un champagne mousseux que nous présenta Minette, et qu’elle but avec nous, ouvrirent nos bouches. Le ton de la gêne fut banni ; l’on parla le langage du bordel, et je m’en tirai de façon à prouver à madame Jolicon que j’étais reconnaissante de ses bontés.

— Que s’est-il passé de nouveau pendant mon absence ? demanda cette dame à Minette.

— Ma foi, maman, répond-elle, je n’ai vu qu’un pauvre abbé, que je n’ai jamais pu mettre en humeur ; en vain l’ai-je pris aux fesses, aux couilles : en vain a-t-il promené ses mains et son nez à l’entour de l’autel, son pauvre engin n’a pu parvenir jusqu’aux premiers pas du sanctuaire. Dans ma rage, je l’ai fourbi à deux mains, et n’ai pu réussir, qu’après une demi-heure, à le rendre passable.

« — Fous vite » lui ai-je dit alors.

Il est bien entré, mais sur-le-champ il est retombé sur son repos. J’en eusse été pour mes frais, sans la précaution que j’avais prise de lui faire compter d’avance dix écus.

— Autant de gagné, mon enfant, s’écria la maman ; mais, en vérité, je voudrais que l’on coupât le vit de tous ces bougres qui ont la rage de foutre, et que le plus beau con ne peut éveiller. Chassez-moi tous ces mâtins-là, nous aurons assez d’autres bonnes pratiques à satisfaire, et je prétends que vous ayez beaucoup de plaisir en gagnant beaucoup d’argent. N’est-il venu que cela ?

— Pardonnez-moi, ajouta Minette, l’évêque de M***, qui vous a foutue autrefois, s’est montré pour savoir si vous aviez du nouveau. Je lui ai répondu que je serais son fait s’il payait bien.

— Non pas, mignonne, a-t-il riposté hautement, ton con est trop usé. La maman n’en a-t-elle pas d’autre ?

— Ma foi, monseigneur, ai-je dit en bonne conscience, mon con vaut votre vit au moins ; mais qu’à cela ne tienne : maman arrive bientôt et rapportera des minois appétissants ; revenez lundi.

— C’est-à-dire demain, a remarqué maman. Lyndamine, voilà de quoi t’affriander ; aie soin du morceau. C’est un vit précieux qu’un vit d’évêque : cela paye au quadruple, et tu seras au mieux. Qu’en dis-tu ?

Je répondis que Sa Grandeur, d’après le rapport de Minette, serait un peu courte ; mais que j’en essayerais ; qu’ayant plusieurs cas de conscience à lui proposer, je lui ferais débiter dans nos intermèdes toute sa théologie.

— Cela sera donc amusant, s’écrièrent maman et Minette ; le prélat voudra du secret ; mais du moins tu nous répéteras la leçon.

— Oh ! comptez-y, leur dis-je ; je veux essayer de la science de son docteur. Vous n’aurez pas de son suc, mais vous aurez du moins de ses principes, en attendant mieux.

Monseigneur ne manqua pas de se présenter le lendemain en habit à boutons d’or et l’épée au côté. Maman fut l’introductrice, et je fus appelée. À ma vue, Sa Grandeur se rabaissa, me trouva jolie, voulut d’abord me caresser, et ne fut retenue que par le prix que je mis à son choix.

— Vingt louis, dit-il ; mais cela est fort, ma charmante.

— Rien de fait, monseigneur. Un con aussi propre et aussi chaud que le mien en vaut cent ; et si vous n’étiez pas aussi bel homme, je ferais encore plus la renchérie.

— Mais est-il bien vrai que tu es propre ?

— Pardieu ! vous foutez-vous de moi, monseigneur ? L’on va apporter deux cuvettes ; dans l’une je me laverai le con ; dans l’autre vous embaumerez votre vit : nous serons sûrs alors de notre fait. En voulez-vous ? Sans cela je vais ailleurs ; les affaires me pressent.

Il fallut souscrire. Les cuvettes furent apportées, l’essence fut prodiguée. Nous lavons ensemble nos outils, et tout se disposait à nous mettre au mieux.

Pour honorer la croix d’or et enflammer les flasques agrès de Sa Grandeur, je la conduisis dans la chambre la plus secrète et la plus voluptueuse du parthénon : elle brûlait. À peines fûmes-nous entrés :

— Je regorge, dit-il, ma chère enfant ; mets-toi donc vite à cul nu.

— À cul nu ! quoi ! c’est au cul que vous en voulez ? Ce n’est pas mon cul pourtant que vous caresserez pour cette fois.

— Veux-tu finir, me dit-il vivement, et en relevant sa chemise par-devant (car il faut remarquer que monseigneur s’était déjà débarrassé de ses culottes.)

Lorsque j’aperçus ce pauvre engin, qu’il croyait vigoureux et qui saillait à peine de quatre pouces, je fus tentée de le renvoyer à son séminaire ; mais je pensai qu’il fallait d’abord faire payer les vingt louis et débiter des leçons. Je me radoucis.

— Comptons, monseigneur, lui dis-je, votre bourse est la meilleure clef du temple. Quand j’aurai reçu le prix d’avance, vous ordonnerez de mon service.

Les louis furent comptés et noblement acceptés. Tandis que je les versais dans ma poche, monseigneur tente de m’enfiler par derrière. Je me refusai à ses désirs.

— Vous avez payé pour foutre, dis-je insolemment ; or, un vit ne fout que des cons : donc c’est par devant que..... Il m’arrête.

— Voilà de nos femelles, s’écrie-t-il ; l’on n’est pas le maître de leurs faveurs avec son argent ! Eh ! parbleu, je veux foutre le con et le cul ; mais il me plaît de voir d’abord et de graisser ton cul. Que vas-tu répondre ?


Cul de lampe de fin de paragraphe
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ARTICLE II

Éloge et prérogatives du cul.


— Monseigneur, dis-je, je vous avoue que mon cul mérite vos hommages ; mais non…

Je crus qu’il allait me battre.

— Comment ! sacrebleu ! (Sa Grandeur était en colère), tu ne fais que ce modeste aveu ? Apprends que rien n’est plus beau qu’un cul, que rien n’est plus noble dans la société et plus respecté dans le rituel de la religion. Je veux voir ton cul, en deux mots.

J’étais payée pour le satisfaire ; je mis à l’air mon postérieur ; mon homme à l’instant se plonge sur mes fesses, les parcourt, les sépare, disserte sur leur blancheur, leur satin, leur rondeur. Il me parut enthousiasmé de mon cul, dont je faisais si peu de cas. Je pris la liberté de le lui dire, et de lui demander s’il aurait autant de plaisir de caresser le cul d’un mâle ?

— Ah ! petit diable, répond-il, vous voulez me tenter. Tous les culs sont beaux pour moi ; mais pour le présent, je m’arrête sur le vôtre. Courbez-vous au pied de ce prie-Dieu, l’opération n’en sera que plus sainte. Bon, comme cela, écartez les jambes ; au mieux.

Je faisais l’exercice, et je riais d’un grand cœur. Enfin le bougre pointe le trou du cul, essaie de l’enfoncer, et me fait souffrir gratis. J’eus entre mes fesses la libation qu’il voulait verser dans mon rectum ; et monseigneur, débandé, en devint plus raisonnable : j’en devins aussi plus exigeante.

— Vous voilà donc content, lui dis-je ! reste maintenant à savoir si vous me prouverez la noblesse du cul ; c’est à ce pivot que je tiens ; et jusqu’à vos preuves, Sa Grandeur, qui bande fort mal, n’aura pas la gloire d’avoir essayé l’enfoncement d’un cul. Soyez sûr que ma douille sera close. Parlez donc et montrez d’abord ce cul pontifical que vous regardez comme une merveille.

Sa Grandeur, pour trancher toute difficulté, jette sa chemise de côté, et me présente un cul à demi couvert de poil, mais presque sans fesses. Tout ce que j’entrevis de plus honnête, c’est un entrefesson aussi velu que l’outil antérieur. Cela plaît au femmes et ne me déplut pas.

— Au diable soit ce fameux cul ! dis-je pour l’animer ; que fait donc ce vilain cul à la religion ? que cela qui porte des crottes a-t-il donc de si noble ?

— De si noble ! s’écrie-t-il ; tu ne connais donc pas les prérogatives de la noblesse ? Avant-hier la duchesse de Hesse a obtenu un tabouret chez la reine. Qu’est-ce à dire ? sinon que la Reine a honoré le cul d’une duchesse. Le prince de Prusse, depuis quelque temps, s’est assis sur le trône. Qu’est-ce à dire ? sinon que le cul du prince de Prusse s’est placé sur un fauteuil destiné pour le cul royal de la Prusse. Ne dit-on pas dans ton propre pays que les magistrats ont le cul sur les fleurs de lis pour porter tous les impertinents arrêts qui condamnent au feu quiconque a le bon sens ? Aussi voit-on bien qu’ils jugent par le cul. Si leur cerveau s’en mêlait, leurs arrêts seraient plus raisonnés. Si tu me demandes que font les culs à la religion, je répondrai que tu ne sais pas même ton catéchisme. Un misérable curé à son siège dans son église : id est, la place de son cul. Ma chaise épiscopale n’est placée si haut que pour exalter l’éminence de mon cul. Enfin, le Saint-Siège, dont tous les jours on te cite les sacrées décisions, ne sont que des décisions du cul ; puisqu’un siège en tout pays est la place d’un cul. Tu respectes, cependant ; l’univers entier (urbi et orbi), adore les bulles, les brefs, tous les canons émanés du Vatican : en bon français, du saint cul. Et tu oses demander si l’on respecte un cul ? La seule observation que je fais ici, c’est qu’il ne s’agit que d’un cul mâle, que j’invite tous les soirs à baiser respectueusement. Pour moi, j’aimerais mieux le cul d’une seconde papesse Jeanne qui me semblerait bien plus beau et plus appétissant : mais sans porter si loin mes augustes vœux, c’est à ton gros cul que je me borne, et le vieux cul qui donne des brefs à Rome ne serait pas si fâché de prendre ses bulles entre tes fesses et de gouverner l’univers à l’ordre du canon que ton charmant cul pourrait faire ronfler.

J’étouffais et je n’osais rire. J’étais cependant charmée d’entendre qu’il rendait aux culs femelles l’hommage qu’il leur devait. Quant à votre cul, messieurs et messeigneurs, qui n’avez que la gloire du tabouret, ou d’une place au fond de Saint-Pierre de Rome, le défende qui voudra. Votre insolent cul est d’ordinaire fort sale, très puant et plus impuissant encore, du moins si j’en juge par celui de mon pauvre évêque, qui n’en obtient aucun ressort en faveur du voisin.

Reprenons notre narration.


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ARTICLE III

Apologie des droits de l’amour.


Monseigneur ne prend plus la défense des culs. Son faible outil n’en veut plus à mon cul. Il m’ordonne en conséquence de l’asseoir sur mon lit, et il s’empare du devant.

Il examine d’abord la rondeur de mes cuisses, prend rigoureusement la mesure de la porte qu’il veut franchir.

— Mais, dit-il, tu es aussi velue que moi !

— Par ma foi, répondis-je, l’idée est nouvelle ! Vous avez du poil de la tête aux pieds, et vous ne voulez pas que j’en aie au con ; en bonne justice, il m’en faut au con autant que vous en avez sur tout le corps. Si ma décision, par hasard, vous déplaît, régnez, monseigneur, régnez sur mon cul. Vous le pouvez bien, puisque vous osez régner par le vôtre. Du reste, votre misérable cheville me fait tant de pitié que, si je n’avais compassion de vous, je vous renverrais à ces culs pourris qui fatiguent en cour les tabourets, et qui dédaigneraient votre douzil.

Ces derniers mots firent si cruellement rengainer mon pauvre prélat, que je ne pus entrevoir son vit. Je le crus absolument nul, et la charité m’engagea à le réveiller.

— Parlez donc, monseigneur, dis-je d’un ton familier (j’avais acquis le droit de ne pas me gêner) ; je ne vous reproche pas les caresses que vous avez faites à mon cul ; il ne les a pas reçues sans mérite, et d’ailleurs un cul vous paraît une pièce si sublime que l’on dirait même en théologie que tout est créé pour les culs. Vivent donc les culs ! je n’en parlerait plus ; mais vous prétendez encore piler le divin mortier ! et cela me donne des scrupules nouveaux. Rappelez-vous donc que vous avez condamné au célibat des moines vigoureux, des prêtres bouillants, de jolies petites nonnes, que réclament les droits de la nature. Vous devez l’exemple, enfin, et je ne puis vous pardonner de vouloir foutre, tandis que vous prescrivez le jeûne le plus cruel à des braves gens qui foutraient plus vigoureusement que votre molle Grandeur.

— Ne gronde donc pas, charmante, répond-il en me chatouillant les fesses et le con, je vais m’expliquer. Dans l’espèce humaine, ainsi que dans les autres espèces animales, chacun a ses besoins. En conviens-tu ?

— Oui, ensuite.

— Ensuite, c’est que mes besoins m’entraînent vers une femme. Puis-je me refuser à l’instinct de la nature ? J’en suis les saintes lois en tout. L’humeur me suffoque, et je me fais purger. Le sang abonde dans mes veines ; Dieu veut sans doute que je le garde, puisqu’il ne lui a ménagé aucune issue. Pourtant je me fais saigner, et personne ne le trouve mauvais. Que ferais-je de cette liqueur bouillante qui gonfle mes couilles, qui bande mon vit avec une force qui m’étouffe ? Oh ! cette précieuse liqueur a son issue. Mon vit en est le canal naturel ; c’est donc par là qu’il faut que je me décharge de ce poids surabondant et douloureux : la nature me l’inspire ; mais elle me fait en même temps désirer de la verser dans le réservoir qui lui est destiné. J’ai le bonheur de le rencontrer ; et l’aimable enfant qui le porte veut bien se prêter à mes vœux et tempérer avec mon suc ses propres besoins. Lui fais-je tort ? Non, sans doute ; elle dispose de son bien en obéissant à la nature. Suis-je coupable moi-même ? Cela ne peut être. Sans avoir jamais vu ni femelles, ni cons, mon vit bande et souhaite un canal qui le reçoive. Il devine que ce canal est entre les jambes d’un être dont le visage a mille grâces. Je m’y porte avec une espèce de fureur, et nous nous rendons un service réciproque ordonné par la nature, puisque la nature veut que nous expulsions toutes les humeurs surabondantes qui gênent ses ressorts. Je vais plus loin, et j’ajoute que si le moyen de se soulager manque aux deux sexes, chacun doit choisir le plus commode et le plus prompt de tous les remèdes. Une fille chaude et qui n’a point à ses ordres des pistons, peut donc s’en faire un avec son gros doigt, ou mieux encore avec un de ces instruments mignons que l’on appelle les singes du vit. Un mâle, par la même raison, peut entre ses mains pressurer un vit trop raide et lui faire rendre un peu de son huile. Sans cette double ressource, un célibataire qui serait ardent lèverait publiquement les jupes de la première femme. Ces pauvres filles que l’on infibule si chrétiennement ouvriraient leurs jambes au premier vit qui lèverait la crête. La société serait donc troublée : ou les deux sexes seraient condamnés à la douleur et souvent à la rage. Il serait sans doute un moyen facile de prévenir ce désordre, mais n’espérons pas que cette recette prenne ; l’on tient trop aux plus sots préjugés. Reste donc la mienne, dont il semble que le beau monde soit convenu ; par là les deux sexes sont à l’aise. Je ne plains que ces charmantes recluses dont je me plairais à caresser les secrets appas, mais que notre ordre laisse à la faible vigueur d’un directeur, lorsque le scandale n’est pas à craindre, ou à la cruelle ressource du godmiché, que les vieilles nonnes leur ravissent dans leur impuissante fureur.

Ici Sa Grandeur s’arrêta, et je repris ainsi :

— Je me doutais bien, monseigneur, que tous nos prélats à talons rouges pensaient, parlaient tout bas, comme vous ; mais je n’eusse jamais cru que cet aveu eut été fait sur le con d’une fille que vous traiterez de putain, ou, pour conserver la décence des termes, de fille publique, qui ne se doit à aucun secret. Me voici maintenant dispensée de défendre tout haut l’honneur d’un évêque qui me sonde en secret, et je vais apprendre au public qu’un évêque veut foutre tout comme un autre.

— Que dis-tu ? morbleu ! s’écrie Sa Grandeur. Gardons les dehors, ma bonne amie. Je te donne encore six louis si tu me promets de fermer la bouche supérieure et de rouvrir la mignonne. Seras-tu satisfaite ?

Je l’étais beaucoup de ses principes ; six nouveaux louis achevèrent de me convaincre, et je permis à monseigneur d’exploiter mes pays chauds pour la seconde fois. Le pauvre homme s’en tira très faiblement, ne me donna pas le moindre plaisir, et ne se releva qu’après avoir honoré de quelques tapes mes fesses, qu’il trouvait admirables.

— Tout n’est pas au mieux, monseigneur, lui dis-je ; mon petit a jeûné ; mais vous avez versé de l’or dans ma bourse ; l’un compense l’autre, et tout n’est pas si mal.

Madame Jolicon et la jalouse Minette s’impatientaient sérieusement de la longueur de notre scène. Elles entrèrent chez moi dès que Sa Grandeur en fut sortie, et me demandèrent de ses nouvelles. Je leur répétai ses maximes, comme je m’y étais engagée ; elles s’en étaient doutées ; mon certificat les décida et fut la base de notre nouveau plan de vie.

— Un célibataire aime autant les plaisirs qu’un autre homme, dit en concluant prudemment la bonne maman, mais il n’ose manger partout de la pomme. Ménageons donc aux célibataires vos belles pommes. Nous ferons fortune avec eux, et nous nous enivrerons de plaisir. Fiez-vous-en à mon expérience.

ARTICLE IV

Exploits secrets et réception de deux nouvelles sœurs.


À la fin de la conversation que je venais de terminer, Minette et moi nous priâmes madame Jolicon d’être toujours notre mère, et nous prîmes ensemble un verre d’extrait de genièvre, dont j’avais besoin ; notre maman fut ensuite à la découverte des chalands, et nous nous enfermâmes toutes deux. Or, devinez quel fut notre plaisir ? Je vous en défie, et ma sincérité va vous en faire le récit. Nous nous dépouillâmes et nous parcourûmes avec autant de feu que si nous eussions été d’un sexe différent. Les tétons, la gorge, le cul, le con, tout fut examiné.

— Nous sommes bien sottes, dit Minette, attrapons la maman et montrons-lui notre ardeur pour faire valoir son parthénon.

— De quoi s’agit-il ?

— Tu sais friser et je frise assez passablement. Parbleu ! nous avons assez de poils pour l’orner ; amusons-nous à cela. Lorsque maman reviendra, nous lui ferons le cadeau de deux cons frisés, et de joie elle nous embrassera.

Cette idée originale me plut, et j’ajoutai que nous pouvions donner à cette frisure des figures grotesques, si nous avions le poil assez long. Il fallut le passer au peigne, et la belle Minette n’y gagna pas ; mais elle fit noblement ce sacrifice de l’amour-propre, me frisa selon mon dessein, et j’employai tout mon art pour tirer le plus charmant parti de sa toison.

À l’arrivée de maman, je lui montrai une assez jolie fente, traversée diamétralement de trois gros vits, dont les coudions reposaient sur le bord de mes lèvres. Minette lui fit voir un con couronné de quatre cons réguliers dont chacun semblait inviter à la jouissance. Jolicon rit comme une folle de cette scène et me pria d’imaginer aussi le parti que l’on pourrait tirer de son taillis. Dès que je l’eus vu :

— Maman, lui dis-je, votre bijou est merveilleusement entouré ; ce serait un meurtre d’en dénaturer le charmant bosquet ; laissons-le tel qu’il est.

— Je t’entends, coquine, répond-elle en riant : mais apprends qu’il est des sots qui aiment un con sans poil, et que les sots ne sont pas si rares que mon poil. Quoi qu’il en soit, je ne serais fâchée ni d’être toute velue, ni d’être tout con, je gagnerais de la tête aux pieds. Heureusement pour moi, vous avez le poil assez beau, assez long, assez touffu, pour le plier sous les lois de la plus fine volupté ; et vous voulez bien le façonner pour me plaire. Je vous en remercie, et je vous promets que je n’épargnerai rien pour vous procurer le bien-être et le plaisir.

Je crus d’abord que la maman ne voulait que nous flatter ; nous eûmes de puissantes preuves qu’elle veillait au solide, puisque dès le lendemain nous comptâmes plus d’agréables que nous ne pouvions en fournir, et que le soir même il nous arriva deux jolies filles dont j’avais presque envie d’être jalouse. Vous voudrez, mon cher lecteur, savoir le pourquoi. Je vais vous satisfaire en deux mots, et je continuerai mon histoire.

Fanny et Julie (ce sont les noms de nos deux nymphes) se présentèrent avec grâce devant leurs futures compagnes, et nous firent un petit compliment qu’une fille reçoit d’autant mieux qu’il chatouille davantage son amour-propre. Nous y répondîmes de manière à les satisfaire, et nous leur proposâmes de mesurer nos charmes, non pas pour mépriser les moins séduisants, mais pour être sûres de leur valeur relative, afin de nous distribuer selon le goût et le caprice de nos messieurs.

Fanny donna le premier exemple : tous ses appas furent étalés. Dieux ! que je fus enchantée ! Imaginez-vous que ses fesses saillaient de plus de six pouces. La profondeur de la gouttière était proportionnelle à la saillie de ces globes ravissants. C’est bien le plus beau cul que l’on puisse admirer. À quoi pensait mon voluptueux évêque, d’être absent ? Lorsqu’elle se tourna sur le devant je fus encore plus humiliée. Un noir d’ébène donnait à la plus ample toison une majesté capable de réveiller le plus vieux mufti ; j’eus de la peine en m’en approchant à distinguer dans le centre de ce superbe taillis ces lèvres de carmin qui font tourner la tête aux hommes, et qu’elle savait ouvrir et fermer avec un art qui n’appartient qu’à Fanny.

Julie, moins grande et plus blonde, montra conséquemment une peau satinée ; mais deux fesses communes, si je les compare au divin cul de Fanny. Elle fut piquée de ne pas entendre d’exclamations lorsqu’elle les présenta. Pour se venger elle mit les mains sur sa fente en se retournant, comme pour nous apprendre que son derrière ne méritait pas nos mépris, et que le sacré portique de l’amour ne serait présenté qu’à nos vœux. Cette ruse, que je devinai, me piqua. Je sautai sur ses mains, et j’appelai Minette, qui lui rendit autant de justice que moi. Sa délicieuse bouche est taillée merveilleusement. Le bosquet qui la défend est d’une couleur douce, que bien des connaisseurs préfèrent à ce sombre noir, que moi-même je n’aimerais pas si j’étais mâle ; mais il ne faut pas disputer des goûts. Celui-ci aime la brune, celui-là préfère la blonde. Nos élégants Français donnent insolemment la palme à la négresse, qui pue ; il est vrai qu’elle est chaude. N’en parlons plus.

Pendant une semaine entière, nous reçûmes les hommages d’une foule de cavaliers, que nous mîmes au régime, parce que chacun devait passer à son rang, ils firent tous merveille et payèrent bien. Nous n’eûmes de plaintes à former que contre un polisson, qui paraissait honnête, et qui donna la vérole à la pauvre Julie ; en moins de deux heures son teint changea, ses jolis petits tétons perdirent leur ressort ; l’entrée de son carquois fut couverte de pustules : elle nous faisait horreur. Nous l’aimions trop pour ne pas la soulager, et, à force de soins, nous réussîmes à la guérir. Elle le fut à peine que nous songeâmes à nous préserver de ce détestable fléau. Nous plaidâmes la cause commune au tribunal de la maman. Son intérêt personnel et la justice de nos plaintes l’engagèrent à rendre une ordonnance, qui fut affichée à la porte de nos appartements secrets. Et ordre fut donné à la tourière de n’introduire aucun cavalier qui ne l’eût lue, méditée et ne se fût soumis aux peines y portées ? Elle est trop précieuse pour de jolies filles, trop essentielle à la police de la plupart des parthénons, trop honorable à l’équité de madame Jolicon, pour que je la passe sous silence.

La voici transcrite sans ratures et dûment contrôlée. Je respecte assez le nom des contrôleurs pour le taire.


Cul de lampe de fin de paragraphe
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Bannière de début de chapitre
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ORDONNANCE

DE MADAME JOLICON


Nous, Magdeleine Jolicon, impératrice du premier bordel de Vénus, directrice de tous les cons, pourvoyeuse éclairée des plus jolies filles, juge née des vits, couillons et lieux circonvoisins, gouvernante de tous les pays chauds d’aucuns mâles et femelles de notre obéissance, à tous et chacun de nos sujets, SALUT !

Vu la requête à nous présentée par la nommée Julie, fille charmante et digne de toute notre protection, tendante à ce que le premier venu, sous prétexte d’un louis, ne la foute qu’après visite faite de ses agrès ; vu encore la plainte jointe à la requête et à nous présentée par les nommées Fanny, Minette et Lyndamine, disant que Julie requérante avait innocemment donné du plaisir et reçu les beaux feux d’un quidam qui, en revanche, l’avait honorée de certains présents, appelés chancre, chaude pisse, vérole et autres dons qui eussent pourri l’un des plus aimables cons de notre dépendance, sans les soins assidus qu’elles se sont donnés pour rendre à cette jolie fille sa première noblesse : Vu encore le rapport circonstancié de Long-vit qui personnellement attaque Gâte-con ; conclusions du visiteur de nos culs ; tout considéré et notre conseil consulté, avons déclaré, statué, ordonné ; déclarons, statuons, ordonnons, voulons et nous plaît ce qui suit :

CODE

DU BORDEL DE CYTHÈRE


article premier. — Il est ordonné à la sœur Foutanges, tourière de notre couvent, de refuser la porte à quiconque ne consignera pas quatre louis pour répondre à ses hauts faits, et de la visite que nous entendons faire de toute sa personne avant d’être introduit dans notre sanctuaire, sauf à lui rendre une portion de la consignation selon les conventions fixées ci-après.

II. — Il est ordonné que toutes filles de notre juridiction auront à s’approvisionner sur-le-champ de peignes pour friser leur poil, de pâte d’amande pour adoucir leurs fesses, de cuvettes d’eau de senteur pour embaumer leur con, sous peine d’être fouettées publiquement pour la première fois, privées de vits pour la seconde, et chassées pour la troisième.

III. — Il est ordonné que tout cavalier qui se présentera, outre la consignation ci-dessus, sera tenu de comparoir par-devant nous et notre conseil, pour exhiber ses pièces, que scrupuleusement nous examinerons, et de nous déclarer, s’il veut foutre un cul ou un con, afin que, d’après notre visite et son choix, nous fixions les prix et appelions nos sujets.

IV. — Outre la propreté des couilles et du vit que nous recommandons à nos chalands, ils feront preuve par-devant notre conseil de leur vigueur, et nous ordonnons que le plus faible vit bandera, du moins, de quatre pouces trois dixièmes ; sans quoi il sera dédaigné et la consignation perdue.

V. — Quiconque voudra foutre un cul ne pourra foutre le con d’aucune de nos filles, à moins qu’au prix fixé par nous pour un cul, il ne paye d’avance le double fixé pour le con ; voulons bien, pour ne point surcharger nos amés et féaux chalands, plus exiger pour un joli cul, pour un con ferme et étroit, que pour un cul flasque et un con large, vu que l’on n’est pas le maître de ses caprices, et que, selon les saisons, nous nous contentons nous-mêmes d’un vit sans force, et qu’ensuite nous désirons le plus fort et le plus dru.

VI. — Les prix sont différents, selon la diversité des figures. Il est d’abord statué que tout cavalier n’entrera qu’à cul nu dans notre foutoir. S’il veut jouir de l’une de nos filles à cul nu, il payera le quadruple de celui qui fera simplement lever les cottes sur le derrière ou sur le devant. Notre humble modestie a dicté cet article équitable.

VII. — L’on ne foutra que de nuit et à tâtons. Les outils n’ont pas besoin de lumière pour se joindre. Si quelque cavalier en exige pour contempler les appas de sa belle, il payera le double du prix fixé pour la nuit.

VIII. — Le cul de nos aimables sujettes sera payé six livres ; leur con, un louis. Ordonnons en outre que leur jeunesse et la couleur du poil augmenteront le prix. Le poil noir vaudra douze livres de plus que le tarif général ; le brun en vaudra dix et le gris deux. Le poil blond vaudra dix écus en sus, attendu que nous sommes dûment instruites du goût de nos messieurs pour les cons à poil blond. Nous ne donnerons aucun prix au poil rouge : nous l’excluons pour jamais de notre domaine.

IX. — Un con neuf, outre le prix déjà fixé, sera d’abord payé douze louis, quelle que soit l’ampleur et la couleur de son poil. Ce prix diminuera selon le nombre des vits qui l’auront sondé. Statuons, en conséquence, qu’il sera dressé un tableau où le nom de nos sujettes sera inscrit sur une colonne ; et sur une suivante le nombre de fois qu’elles auront été fourbies ; nous nous chargeons de l’exactitude de cet article.

X. — Seconde visite sera faite des couilles et des vits dans notre anti-foutoir, et quiconque sera impuissant aura le fouet de la main de toutes nos sujettes, et sera chassé comme un lâche. Ordonnons en outre que quiconque aura du mal au vit sera rigoureusement écouillonné. L’honneur de notre empire exige irrévocablement cette cruelle précaution.

XI. — Sur les quatre louis consignés ès-mains de la sœur tourière, trois seront rendus au cavalier qui lui présentera un certificat scellé de notre sceau, et lui donnera un coup de vit pour la repaître. Un seul louis sera remis à quiconque lui refusera ce faible trait de l’amour, à moins que, fatiguée de plaisir, elle n’accorde une dispense, ce dont nous lui octroyons le pouvoir.

XII. — La sœur tourière fera lire la présente ordonnance à tous ceux ou celles qui se présenteront, et suivra notre présent règlement dans toute sa force, sous peine pour elle d’être dépilée par l’une de nos filles, exploitée par le premier vérolé qu’elle admettra, en pleine cour, et avec toutes nos malédictions, dont l’expulsion sera le terme.

Si, donnons en mandement à tous maquereaux, raccrocheurs de femelles, tourières et introductrices de nos antres sacrés, filles que nous gouvernons et autres à venir, qu’ils aient à exécuter et faire exécuter notre présente ordonnance, sous les peines arbitraires que nous jugerons à propos d’infliger ; car tel est notre plaisir.

Donné à Cythère, dans notre premier foutoir, l’an douzième de notre surintendance.

Signé : JOLICON

Et, plus bas :

BEAUVIT.

Cette sage ordonnance nous mit à couvert de tous les maux qu’éprouvent tant de millions de filles, dont tous les talents, pour vivre, se bornent à bien exprimer le suc vital. Tous les fourbisseurs à semaine craignirent pour leur vit ; un seul osa s’exposer et fut gravement châtré. Cette nécessaire rigueur effraya nos élégants à toute sauce, et nous ne vîmes que d’honnêtes gens. Le barreau, les sciences, le ministère, la finance, le clergé nous donnèrent de délicieuses pratiques. La plus grande de mes malices sera de rappeler quelques traits de ces états divers ; et ma conséquence la plus générale sera toujours que tout a été au mieux pour moi et du moins très bien pour nos jolis messieurs qui n’ont pas eu lieu de se plaindre de nos ébats amoureux. C’est toujours beaucoup de les avoir garantis du danger qu’on court dans les parthénons.


Cul de lampe de fin de paragraphe
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