Lucien Leuwen (ed. Martineau)/Chapitre 56

Texte établi par Henri MartineauLe Divan (Volume IIIp. 207-238).


CHAPITRE LVI


M. Leuwen revint tout joyeux de son élection dans le département de l’Aveyron.

— L’air est chaud, les perdrix excellentes, et les hommes plaisants. Un de mes honorables commettants m’a chargé de lui envoyer quatre paires de bottes bien confectionnées ; je dois commencer par étudier le mérite des bottiers de Paris, il faut un ouvrage élégant, mais qui pourtant ne soit pas dépourvu de solidité. Quand enfin j’aurai trouvé ce bottier parfait, je lui remettrai la vieille botte que M. de Malpas a bien voulu me confier. J’ai aussi un embranchement de route royale de cinq quarts de lieue de longueur pour conduire à la maison de campagne de M. Castanet, que j’ai juré d’obtenir de M. le ministre de l’Intérieur, en tout cinquante-trois commissions, outre celles qu’on m’a promises par lettre.

M. Leuwen continua à raconter à madame Leuwen et à son fils les moyens adroits par lesquels il avait obtenu une majorité triomphante de sept voix[1].

— Enfin, je ne me suis pas ennuyé un instant dans ce département, et si j’y avais eu ma femme, j’aurais été parfaitement heureux. Il y a bien des années que je n’avais parlé aussi longtemps à un aussi grand nombre d’ennuyeux, aussi suis-je saturé d’ennui officiel et de platitudes à dire ou à entendre sur le gouvernement. Aucun de ces benêts du juste milieu, répétant sans les comprendre les phrases de Guizot ou de Thiers, ne peut me donner en écus le prix de l’ennui mortel que sa présence m’inspire. Quand je quitte ces gens-là, je suis encore bête pour une heure ou deux, je m’ennuie mortellement.

— S’ils étaient plus coquins ou au moins fanatiques, dit madame Leuwen, ils ne seraient pas si ennuyeux.

— Maintenant, conte-moi tes aventures de Champagnier et de Caen, dit M. Leuwen à son fils.

— Voulez-vous mon histoire longue ou courte ?

— Longue, dit madame Leuwen. Elle m’a fort amusée, je l’entendrai une seconde fois avec plaisir. Je suis curieuse, dit-elle à son mari, de voir ce que vous en penserez.

— Eh bien ! dit M. Leuwen d’un air plaisamment résigné, il est dix heures trois quarts, qu’on fasse du punch, et raconte.

Madame Leuwen fit un signe au valet de chambre, et la porte fut fermée. Lucien expédia en cinq minutes l’avanie de Blois et l’élection de Champagnier (« C’est à Caen que j’aurais eu besoin de vos conseils »), et il raconta longuement tout ce que nous avons longuement raconté aux lecteurs.

Vers le milieu du récit, M. Leuwen commença à faire des questions.

— Plus de détails, plus de détails, disait-il à son fils, il n’y a d’originalité et de vérité que dans les détails…

— Et voilà comment ton ministre t’a traité à ton retour ! dit M. Leuwen à minuit et demi. Il paraissait vivement piqué.

— Ai-je bien ou mal agi ? dit Lucien. En vérité, je l’ignore. Sur le champ de bataille, dans la vivacité de l’action je croyais avoir mille fois raison mais ici les doutes se présentent en foule.

— Et moi, je n’en ai pas, dit madame Leuwen. Tu t’es conduit comme le plus brave homme aurait pu faire. À quarante ans, tu eusses mis plus de mesure dans ta conduite avec ce petit homme de lettres de préfet, car la haine de l’homme de lettres est presque aussi dangereuse que celle du prêtre, mais aussi à quarante ans tu eusses été moins vif et moins hardi dans tes démarches auprès de MM. Disjonval et Le Canu… etc., etc.

Madame Leuwen avait l’air de solliciter l’approbation de M. Leuwen qui ne disait rien, et de plaider en faveur de son fils.

— Je vais m’insurger contre mon avocat, dit Lucien. Ce qui est fait est fait, et je me moque parfaitement du Brid’oison de la rue de Grenelle. Mais mon orgueil est alarmé ; quelle opinion dois-je avoir de moi-même ? Ai-je quelque valeur, voilà ce que je vous demande, dit-il à son père. Je ne vous demande pas si vous avez de l’amitié pour moi, et ce que vous direz dans le monde. J’ai pu altérer les faits en ma faveur en vous les racontant, et alors les mesures que j’ai prises d’après ces faits seraient justifiées à mon insu. Je vous assure que M. Coffe n’est point ennuyeux.

— Il me fait l’effet d’un méchant.

— Maman, vous vous trompez ; ce n’est qu’un homme découragé. S’il avait quatre cents francs de rente, il se retirerait dans les roches de la Sainte-Baume, à quelques lieues de Marseille.

— Que ne se fait-il moine ?

— Il croit qu’il n’y a pas de Dieu, ou que s’il y en a un, il est méchant.

— Cela n’est pas si bête, dit M. Leuwen.

— Mais cela est plus méchant, dit madame Leuwen, et me confirme dans mon horreur pour lui.

— C’est bien maladroit à moi, dit Lucien, car je voulais obtenir de mon père qu’il entendît le récit de ma campagne fait par ce fidèle aide de camp, qui souvent n’a pas été de la même opinion que moi. Et jamais je n’obtiendrai une seconde séance de mon père si vous ne sollicitez pas avec moi, dit-il en se tournant vers sa mère.

— Pas du tout, cela m’intéresse, cela me ramène sur mes lauriers de l’Aveyron, où j’ai eu cinq voix de légitimistes, dont deux au moins croient s’être damnés en prêtant serment, mais je leur ai juré de parler contre ce serment, et ainsi ferais-je, car c’est un vol.

— Oh ! mon ami, c’est tout ce que je crains, dit madame Leuwen. Et votre poitrine ?

— Je m’immolerai pour la patrie et pour mes deux ultras, à qui j’ai fait commander par leur confesseur de prêter serment et de me donner leurs voix. Si votre Coffe veut dîner demain avec nous…, sommes-nous seuls ? dit-il à sa femme.

— Nous avions un demi-engagement chez madame de Thémines.

— Nous dînerons ici, nous trois et M. Coffe. S’il est du genre ennuyeux, comme je le crains, il sera moins ennuyeux à table. La porte sera fermée, et nous serons servis par Anselme.

Lucien amena Coffe, non sans peine.

— Vous verrez un dîner qui coûterait quarante francs par tête chez Baleine, du Rocher de Cancale, et même à ce prix Baleine ne serait pas sûr de réussir.

— Va pour le dîner de quarante francs, c’est à peu près le taux de ma pension pour un mois.

Coffe, par la froideur et la simplicité de son récit, fit la conquête de M. Leuwen.

— Ah ! que je vous remercie, monsieur, de n’être pas gascon, lui dit le député de l’Aveyron. J’ai une indigestion de hâbleurs, de ces gens qui sont toujours sûrs du succès du lendemain, sauf à vous répondre une platitude quand, le lendemain, vous leur reprochez la défaite.

M. Leuwen fit beaucoup de questions à Coffe. Madame Leuwen fut enchantée d’une troisième édition des prouesses de son fils. Et à neuf heures, comme Coffe voulait se retirer, M. Leuwen insista pour le conduire dans sa loge à l’Opéra. Avant la fin de la soirée, M. Leuwen lui dit :

— Je suis bien fâché que vous soyez au ministère. Je vous aurais offert une place de quatre mille francs chez moi. Depuis la mort de ce pauvre Van Peters, je ne travaille pas assez, et depuis la sotte conduite du comte de Vaize à l’égard de ce héros-là, je me sens une velléité de faire six semaines de demi-opposition. Je suis bien loin d’être sûr de réussir, ma réputation d’esprit ébouriffera mes collègues, et je ne puis réussir qu’en me faisant une escouade de quinze ou vingt députés… Il est vrai que, d’un autre côté, mes opinions ne gêneront pas les leurs… Quelques sottises qu’ils veuillent, je penserai comme eux et je les dirai… Mais, morbleu, monsieur de Vaize, vous me paierez votre sottise envers ce jeune héros. Et il serait indigne de moi de me venger comme votre banquier… Toute vengeance coûte à qui se venge, ajouta M. Leuwen se parlant tout haut à soi-même, mais comme banquier je ne puis pas sacrifier un iota sur la probité. Ainsi, de belles affaires s’il y a lieu, comme si nous étions amis intimes…

Et il tomba dans la rêverie. Lucien, qui trouvait la séance de politique un peu longue, aperçut mademoiselle Raimonde dans une loge au cinquième et disparut.

— Aux armes ! dit tout à coup M. Leuwen à Coffe en sortant de sa rêverie. Il faut agir.

— Je n’ai pas de montre, dit Coffe froidement. M. votre fils m’a tiré de Sainte-Pélagie… Il ne résista pas à la vanité d’ajouter : Dans ma faillite, j’ai placé ma montre dans mon bilan.

— Parfaitement honnête, parfaitement honnête, mon cher Coffe, dit M. Leuwen d’un air distrait. Il ajouta plus sérieusement : Puis-je compter sur un silence éternel ? Je vous demande de ne prononcer jamais ni mon nom, ni celui de mon fils.

— C’est ma coutume, je vous le promets.

— Faites-moi l’honneur de venir dîner demain chez moi. S’il y a du monde, je ferai servir dans ma chambre ; nous se serons que trois, mon fils et vous, monsieur. Votre raison sage et ferme me plaît beaucoup, et je désire vivement trouver grâce devant votre misanthropie, si toutefois vous êtes misanthrope.

— Oui, monsieur, par trop aimer les hommes.

Quinze jours après, le changement opéré chez M. Leuwen étonnait ses amis : il faisait sa société habituelle de trente ou quarante députés nouvellement élus et les plus sots. L’incroyable, c’est qu’il ne les persifflait jamais. Un des diplomates amis de Leuwen eut des inquiétudes sérieuses : il n’est plus insolent envers les sots, il leur parle sérieusement, son caractère change, nous allons le perdre.

M. Leuwen allait assidûment chez M. de Vaize, les jours où le ministre recevait les députés. Trois ou quatre affaires de télégraphe se présentèrent, et il servit admirablement les intérêts du ministre.

« Enfin, je suis venu à bout de ce caractère de fer, disait M. de Vaize. Je l’ai maté, se disait-il en se frottant les mains, il ne fallait qu’oser. Je n’ai pas fait son fils lieutenant, et il est à mes pieds. »

Le résultat de ce beau raisonnement fut un petit air de supériorité pris par le ministre à l’égard de M. Leuwen qui n’échappa point à ce dernier et fit ses délices. Comme M. de Vaize ne faisait pas sa société de gens d’esprit, et pour cause, il ne sut point l’étonnement que causait le changement d’habitudes de M. Leuwen parmi ces hommes actifs et fins qui font leur fortune par le gouvernement régnant.

Ces gens d’esprit qui dînaient habituellement chez lui ne furent plus invités ; il leur donna un dîner ou deux chez le restaurateur. Il n’invita plus de femmes, et chaque jour il avait cinq ou six députés à dîner. Madame Leuwen ne revenait pas de son étonnement. Il leur disait d’étranges choses, comme :

— Ce dîner, que je vous prie d’accepter toutes les fois que vous ne serez pas invité chez les ministres ou chez le roi, coûterait mieux de vingt francs par tête chez le meilleur restaurateur. Par exemple, voilà un turbot…

Et là-dessus l’histoire du turbot, l’énonciation du prix qu’il avait coûté (et qu’il inventait, car il ne savait pas ces choses-là).

— Mais lundi passé, ce même turbot, ajoutait M. Leuwen, quand je dis le même, non, celui-ci s’agitait dans la mer de la Manche, mais enfin un turbot de même poids et aussi frais, eût coûté dix francs de moins.

Il évitait d’arrêter les yeux sur ceux de sa femme quand il débitait de ces belles choses.

M. Leuwen ménageait avec beaucoup d’art l’attention de ses députés. Presque toujours il leur faisait part de réflexions comme celle sur le turbot, ou, s’il racontait des anecdotes, c’étaient des cochers de fiacre qui, à minuit, emmenaient dans la campagne des imprudents qui, ne connaissant pas les rues de Paris, hasardent de se retirer à cette heure[2].

L’étonnement de madame Leuwen était extrême, mais elle n’osait interroger son mari. La réponse eût été une plaisanterie.

M. Leuwen réservait toutes les forces de l’esprit de ses députés pour cette idée difficile qu’il leur faisait conclure de mille faits différents ou que quelquefois il osait leur présenter directement :

— L’union fait la force. Si ce principe est vrai partout, il l’est surtout dans les assemblées délibérantes. Il n’y a d’exception que quand on a un Mirabeau, mais qui est-ce qui est Mirabeau ? Pas moi pour un. Nous compterons pour quelque chose si aucun de nous ne tient avec opiniâtreté à sa façon de voir. Nous sommes vingt amis, eh bien ! il faut que chacun de nous pense comme pense la majorité, qui est de onze. Demain, on mettra un article de loi en délibération dans la Chambre ; eh bien ! après dîner, ici, entre nous, mettons en délibération cet article de loi. Pour moi, je n’ai d’avantage sur vous que d’étudier les roueries de Paris depuis quarante-cinq ans. Je sacrifierai toujours mon opinion à celle de la majorité de mes amis, car enfin, quatre yeux y voient mieux que deux. Nous mettrons en délibération l’opinion qu’il faudra avoir demain ; si nous sommes vingt, comme je l’espère, et que onze se déclarent pour oui, il faut absolument que les neuf autres disent oui, quand même ils seraient passionnément attachés au non. C’est là le secret de notre force. Si jamais nous arrivons à réunir trente voix sûres sur tous les sujets, les ministres n’auront plus aucune grâce à vous refuser. Nous ferons un petit mémorandum de la chose que chacun de nous désire le plus obtenir pour sa famille (je parle de choses faisables). Quand chacun de nous aura obtenu de la peur des ministres une grâce à peu près de la même valeur, nous passerons à une seconde liste. Que dites-vous, messieurs, de ce plan de campagne législative ?

M. Leuwen avait choisi les vingt députés les plus dénués d’amis et de relations, les plus étonnés du séjour de Paris, les plus lourds de génie, pour leur expliquer cette théorie et pour les inviter à dîner. Ils étaient presque tous du Midi, Auvergnats ou gens habitant sur la ligne de Perpignan à Bordeaux. Il n’y avait d’exception que pour M. N…, de Nancy, que son fils lui avait présenté. La grande affaire de M. Leuwen était de ne pas offenser leur amour-propre ; quoique cédant en tout et partout, il n’y réussissait pas toujours. Il avait un coin de bouche moqueur qui les effarouchait, deux ou trois trouvèrent qu’il avait l’air de se moquer d’eux et s’éloignèrent de ses dîners. Il les remplaça heureusement par ces députés à trois fils et quatre filles, et qui prétendent bien placer leurs fils et leurs gendres.

Un mois à peu près après l’ouverture de la session et après une vingtaine de dîners, il jugea sa troupe assez aguerrie pour la mener au feu. Un jour, après un excellent dîner, il les fit passer dans une chambre à part et voter gravement sur une question de peu d’importance que l’on devait discuter le lendemain. Malgré toute la peine qu’il se donna, à la vérité d’une façon très indirecte et avec beaucoup de prudence, pour faire comprendre de quoi il s’agissait à ses députés, au nombre de dix-neuf, douze votèrent pour le côté absurde de la question. M. Leuwen leur avait promis d’avance de parler en faveur de l’opinion de la majorité. À la vue de cette absurdité, il eut une faiblesse humaine, il chercha à éclairer sa majorité par des explications qui durèrent une bonne heure et demie ; il fut repoussé avec perte, ses députés lui parlèrent conscience. Le lendemain, intrépidement, et pour son début à la Chambre, il soutint une sottise palpable ; il fut tympanisé dans tous les journaux à peu près sans exception, mais sa petite troupe lui sut un gré infini.

Nous supprimons les détails, infinis aussi, des soins que lui coûtait la conscience de ce troupeau de fidèles Périgourdins, Auvergnats, etc. Il ne voulut pas qu’on les lui séduisît, et il allait quelquefois avec eux chercher une chambre garnie ou marchander chez les tailleurs qui vendent des pantalons tout faits dans les passages. S’il eût osé, il les eût logés comme il les nourrissait à peu près.

Avec des soins de tous les jours, mais qui par leur extrême nouveauté l’amusaient, il arriva rapidement à vingt-neuf voix. Alors, M. Leuwen prit le parti de n’inviter jamais à dîner un député qui ne fût pas des vingt-neuf, et presque chaque jour de séance il en ramenait de la Chambre une grande berline pleine. Un journaliste, son ami, feignit de l’attaquer et proclama l’existence de la Légion du Midi, forte de vingt-neuf voix. Mais le ministre paie-t-il cette nouvelle réunion Piet ? se demandait le journaliste.

La seconde fois que la Légion du Midi eut l’occasion de se montrer, révéler son existence, comme lui disait M. Leuwen, la veille, après dîner, M. Leuwen les fit délibérer. Fidèles à leur instinct, sur vingt-neuf voix présentes dix-neuf furent pour le côté absurde de la question. Le lendemain, M. Leuwen monta à la tribune, et le parti absurde l’emporta dans la Chambre à une majorité de huit voix. Le lendemain, nouvelles diatribes contre la Légion du Midi.

M. Leuwen les conjurait en vain depuis un mois de prendre la parole, aucun n’osait, et en vérité ne pouvait. M. Leuwen avait des amis aux Finances, il distribua parmi ses vingt-huit fidèles une direction de postes dans un village du Languedoc et deux distributions de tabac. Trois jours après, il essaya de ne pas mettre en délibération, apparemment faute de temps, une question à laquelle un ministre mettait un intérêt personnel. Ce ministre arrive à la Chambre en grand uniforme, radieux et sûr de son fait ; il va serrer la main à ses amis principaux, reçoit les autres à son banc et, se retournant vers ses bancs fidèles, les caresse du regard. Le rapporteur paraît, et conclut en faveur du ministre. Un juste milieu furibond lui succède, et appuie le rapporteur. La Chambre s’ennuyait et allait approuver le rapport à une forte majorité. Les députés amis de M. Leuwen le regardaient à sa place, tout près des ministres, ne sachant que penser. M. Leuwen monte à la tribune, libre de son opinion. Malgré la faiblesse de sa voix, il obtient une attention religieuse. Il est vrai que, dès le début de son discours, il trouve trois ou quatre traits fins et méchants. Le premier fit sourire quinze ou vingt députés voisins de la tribune, le second fit rire d’une façon sensible et produisit un murmure de plaisir, la Chambre se réveillait, le troisième, à la vérité fort méchant, fit rire aux éclats. Le ministre intéressé demanda la parole et parla sans succès. M. le comte de Vaize, accoutumé à l’attention de la Chambre, vint au secours de son collègue. C’était ce que M. Leuwen souhaitait avec passion depuis deux mois ; il alla supplier un collègue de lui céder son tour. Comme le ministre comte de Vaize avait répondu assez bien à une des plaisanteries de M. Leuwen, celui-ci demande la parole pour un fait personnel. Le président la lui refuse. M. Leuwen se récrie, et la Chambre lui accorde la parole au lieu d’un autre député qui cède son tour.

Ce second discours fut un triomphe pour M. Leuwen ; il se livra à toute sa méchanceté et trouva contre M. de Vaize des traits d’autant plus cruels qu’ils étaient inattaquables dans la forme. Huit ou dix fois, toute la Chambre éclata de rire, trois ou quatre fois, elle le couvrit de bravos. Comme la voix de M. Leuwen était très faible, on eût entendu, pendant qu’il parlait, voler une mouche dans la salle. Ce fut un succès comme ceux que l’aimable Andrieux obtenait jadis aux séances publiques de l’Académie. M. de Vaize s’agitait sur son banc et faisait signe tour à tour aux riches banquiers membres de la Chambre et amis de M. Leuwen. Il était furieux, il parla de duel à ses collègues.

— Contre une telle voix ? lui dit le ministre de la Guerre. L’odieux serait si exorbitant, si vous tuiez ce petit vieillard, qu’il retomberait sur le ministère tout entier.

Le succès de M. Leuwen passa toutes ses espérances. Son discours était le débordement d’un cœur ulcéré qui s’est retenu deux mois de suite et qui, pour parvenir à la vengeance, s’est dévoué à l’ennui le plus plat. Son discours, si l’on peut appeler ainsi une diatribe méchante, piquante, charmante, mais qui n’avait guère le sens commun, marqua la séance la plus agréable que la session eût offerte jusque-là. Personne ne put se faire écouter après qu’il fut descendu de la tribune.

Il n’était que quatre heures et demie ; après un moment de conversation, tous les députés s’en allèrent et laissèrent seul avec le président le lourd juste milieu qui essayait de combattre avec des raisons la brillante improvisation de M. Leuwen. Il alla se mettre au lit, il était horriblement fatigué. Mais il fut un peu ranimé le soir, vers les neuf heures, quand il eut ouvert sa porte. Les compliments pleuvaient, des députés qui ne lui avaient jamais parlé venaient le féliciter et lui serrer la main.

— Demain, si vous m’accordez la parole, je coulerai à fond le sujet.

— Mais, mon ami, vous voulez donc vous tuer ! » répétait madame Leuwen, fort inquiète.

La plupart des journalistes vinrent dans la soirée lui demander son discours, il leur montra une carte à jouer sur laquelle il avait écrit cinq idées à développer. Quand les journalistes virent que le discours était réellement improvisé, leur admiration fut sans bornes. Le nom de Mirabeau fut prononcé sans rire.

M. Leuwen répondit à cette louange, qu’il prétendait être une injure, avec un esprit charmant.

— Vous parlez encore à la Chambre ! s’écria un journaliste homme d’esprit. Et, parbleu, cela ne sera pas perdu : j’ai bonne mémoire.

Et il se mit à griffonner sur une table ce que M. Leuwen venait d’ajouter. M. Leuwen, se voyant imprimé tout vif, lui dit trois ou quatre beaux sarcasmes sur M. le comte de Vaize qui lui étaient venus depuis la séance.

À dix heures, le sténographe du Moniteur vint apporter à M. Leuwen son discours à corriger.

— Nous faisions comme cela pour le général Foy.

Ce mot enchanta l’auteur.

« Cela me dispense de reparler demain », pensa-t-il ; et il ajouta à son discours cinq ou six phrases de bon sens profond, dessinant clairement l’opinion qu’il voulait faire prévaloir.

Ce qu’il y avait de plaisant, c’était l’enchantement des députés de sa réunion qui assistèrent à ce triomphe toute la soirée. Ils croyaient tous avoir parlé, ils lui fournissaient des raisonnements qu’il aurait pu faire valoir, et il admirait ces arguments avec sérieux.

— D’ici à un mois, monsieur votre fils sera commis à cheval, dit-il à l’oreille de l’un d’eux. Et le vôtre chef de bureau à la sous-préfecture, dit-il à un autre.

Le lendemain matin, Lucien faisait une drôle de mine dans son bureau, à vingt pas de la table où écrivait le comte de Vaize, sans doute furibond. Son Excellence put entendre le bruit que faisaient en entrant dans le couloir les vingt ou trente commis qui vinrent voir Lucien et lui parler du talent de son père.

Le comte de Vaize était hors de lui. Quoique les affaires l’exigeassent, il ne put prendre sur soi de voir Lucien. Vers les deux heures, il partit pour le Château. À peine fut-il sorti que la jeune comtesse fit appeler Lucien.

— Ah ! monsieur, vous voulez donc nous perdre ? Le ministre est hors de lui, il n’a pu fermer l’œil. Vous serez lieutenant, vous aurez la croix, mais donnez-nous du temps.

La comtesse de Vaize était elle-même fort pâle. Lucien fut charmant pour elle, presque tendre, il la consola de son mieux et lui persuada ce qui était vrai, c’est qu’il n’avait pas la moindre idée de l’attaque projetée par son père.

— Je puis vous jurer, madame, que depuis six semaines mon père ne m’a pas parlé une seule fois sur un ton sérieux. Depuis le long récit de mes aventures à Caen, nous n’avons parlé de rien.

— Ah ! Caen, nom fatal ! M. de Vaize sent bien tous ses torts. Il devait vous récompenser autrement. Mais aujourd’hui, il dit que c’est impossible, après une levée de boucliers aussi atroce.

— Madame la comtesse, dit Lucien d’un air très doux, le fils d’un député opposant peut être désagréable à voir. Si ma démission pouvait être agréable au ministre…

— Ah ! monsieur, s’écria la comtesse en l’interrompant, ne croyez point cela. Mon mari ne me pardonnerait jamais s’il savait que ma conversation avec vous a été maladroite au point de vous faire prononcer ce mot, désolant pour lui et pour moi. Ah ! c’est bien plutôt de conciliation qu’il s’agit. Ah ! quoi que puisse dire monsieur votre père, ne nous abandonnez jamais.

Et cette jolie femme se mit à pleurer tout à fait.

« Il n’est jamais de victoire, même celle de tribune, pensa Lucien, qui ne fasse répandre des larmes. »

Lucien consola de son mieux la jeune comtesse, mais en séparant avec soin ce qu’il devait à une jolie femme de ce qui devait être répété à l’homme qui l’avait maltraité à son retour de Caen. Car, évidemment, cette jeune femme lui parlait par ordre de son mari. Il revint sur cette idée :

— Mon père est amoureux de politique et passe sa vie avec des députés ennuyeux, il ne m’a pas adressé la parole depuis six semaines.

Après ce succès, M. Leuwen passa huit jours au lit. Un jour de repos aurait suffi, mais il connaissait son pays, où le charlatanisme à côté du mérite est comme le zéro à la droite d’un chiffre et décuple sa valeur. Ce fut au lit que M. Leuwen reçut les félicitations de plus de cent membres de la Chambre. Il refusa huit ou dix membres non dépourvus de talent qui voulaient s’enrôler dans la Légion du Midi.

— Nous sommes plutôt une réunion d’amis qu’une société de politique… Votez avec nous, secondez-nous pendant la session, et si cette fantaisie, qui nous honore, vous dure encore l’année prochaine, ces messieurs, accoutumés à vous voir partager nos manières de voir, toutes de conscience, iront eux-mêmes vous engager à venir à nos dîners de bons garçons.

« Il faut déjà le comble de l’abnégation et de l’adresse pour mener vingt-huit de ces oisons-là, pensait M. Leuwen, que serait-ce s’ils étaient quarante ou cinquante, et encore des gens d’esprit, dont chacun voudrait être mon lieutenant, et bientôt évincer son capitaine ? »

[Les justes milieux un peu fins même accouraient. Ils ne pouvaient se figurer qu’un banquier riche fît sérieusement de l’opposition.

M. de Vaize était allé voir M. de Beausobre, et je ne voudrais pas jurer qu’il ne fut pas question entre ces deux ministres irrités de susciter un duel fatal à Lucien.]

Ce qui faisait la nouveauté et le succès de la position de M. Leuwen, c’est qu’il donnait à dîner à ses collègues avec son argent, ce qui, de mémoire de Chambre, n’était encore arrivé à personne. M. Piet, jadis, avait eu un dîner célèbre, mais l’État payait.

Le surlendemain du succès de M. Leuwen, le télégraphe apporta d’Espagne une nouvelle qui devait probablement faire baisser les fonds. Le ministre hésita beaucoup à faire donner l’avis ordinaire à son banquier.

« Ce serait un nouveau triomphe pour lui, se dit M. de Vaize, que de me voir piqué au point de négliger mes intérêts… Mais halte-là ! Serait-il capable de me trahir ? Il n’y a pas d’apparence. »

Il fit appeler Lucien et, sans presque le regarder en face, lui donna l’avis à transmettre à son père. L’affaire se fit comme à l’ordinaire, et M. Leuwen en profita pour envoyer à M. de Vaize, le surlendemain, après le rachat des rentes, le bénéfice de cette dernière opération et le restant de bénéfice des trois ou quatre opérations précédentes, de telle sorte qu’à quelques centaines de francs près, la maison Leuwen ne dut rien au comte de Vaize.

Les discours de M. Leuwen ne méritaient point ce nom, ils n’étaient pas éloquents, n’affectaient point de gravité, c’était du bavardage de société piquant et rapide, et M. Leuwen n’admettait jamais la périphrase parlementaire.

— Le style noble me tuerait, disait-il un jour à son fils. D’abord, je ne pourrais plus improviser, je serais obligé de travailler, et je ne travaillerais pas dans le genre littéraire pour un empire… Je ne croyais pas qu’il fût si facile d’avoir du succès.

Coffe était en grande faveur auprès de l’illustre député, faveur basée sur cette grande qualité : il n’est pas gascon. M. Leuwen l’employait à faire des recherches. M. de Vaize destitua Coffe de son petit emploi de cent louis.

— Voilà qui est de bien mauvais goût, s’écria M. Leuwen ; il envoya quatre mille francs à Coffe.

À sa seconde sortie, il alla chez le ministre des Finances, qu’il connaissait de longue main.

— Eh bien ! parlerez-vous contre moi ? dit ce ministre en riant.

— Certainement à moins que vous ne répariez la sottise de votre collègue le comte de Vaize.

Et il raconta au ministre des Finances l’histoire de cet homme de mérite.

Le ministre, homme de sens et tout positif, ne fit pas de questions sur M. Coffe.

— On dit que le comte de Vaize a employé monsieur votre fils dans nos élections, et que ce fut M. Leuwen fils qui fut attaqué par l’émeute à Blois.

— Il a eu cet honneur-là.

— Et je n’ai point vu son nom sur la liste des gratifications apportée au Conseil.

— Mon fils avait effacé son nom et porté celui de M. Coffe pour cent louis, je crois. Mais ce pauvre Coffe n’est pas heureux au ministère de l’Intérieur.

— Ce pauvre de Vaize a du talent et parle bien à la Chambre, mais il manque tout à fait de tact. Voilà une belle économie qu’il a faite là aux dépens de M. Coffe !

Huit jours après, M. Coffe était sous-chef aux Finances avec six mille francs d’appointements et la condition expresse de ne jamais paraître au ministère.

— Êtes-vous content ? dit le ministre des Finances, à la Chambre, à M. Leuwen.

— Oui, de vous.

Quinze jours après, dans une discussion où le ministre de l’Intérieur venait d’avoir un beau succès, au moment où l’on allait voter, la Chambre était toute en conversations, et l’on disait de toutes parts autour de M. Leuwen :

— Majorité de quatre-vingts ou cent voix !

Il monta à la tribune et débuta par parler de son âge et de sa faible voix. Le silence le plus profond régna à l’instant.

M. Leuwen fit un discours de dix minutes, serré, raisonné, après quoi, pendant cinq minutes, il se moqua des raisonnements du comte de Vaize, et la Chambre, si silencieuse, murmura de plaisir cinq ou six fois.

— Aux voix ! aux voix ! crièrent en interrompant M. Leuwen trois ou quatre juste milieu imbéciles, empressés comme aboyeurs.

— Eh bien ! oui, aux voix ! messieurs les interrupteurs. Je vous en défie ! Et, pour vous laisser le temps de voter, je descends de la tribune. Aux voix, messieurs ! cria-t-il avec sa petite voix en passant devant les ministres.

La Chambre tout entière et les tribunes éclatèrent de rire. En vain le président prétendait-il qu’il était trop tard pour aller aux voix.

Il n’est pas cinq heures, cria M. Leuwen de sa place. D’ailleurs, si vous ne voulez pas nous laisser voter, je remonte à la tribune demain. Aux voix !

Le président fut forcé de laisser voter, et le ministère l’emporta à la majorité de une voix.

Le soir, les ministres dînèrent ensemble, pour laver la tête à M. de Vaize. Le ministre des Finances se chargea de l’exécuter. Il raconta à ses collègues l’aventure de Coffe, l’émeute de Blois… M. Leuwen et son fils occupèrent tout le dîner de ces graves personnages. Le ministre des Affaires étrangères et M. de Vaize s’opposèrent fortement à toute réconciliation. On se moqua d’eux, on les força de tout avouer, l’aventure de Kortis avec M. de Beausobre, l’élection de Caen mal payée par M. de Vaize, et enfin malgré leur colère, à leur massimo dispello, le ministre de la Guerre alla le soir même chez le Roi et fit signer deux ordonnances, la première nommant Lucien Leuwen lieutenant d’état-major, la seconde lui accordant la croix pour blessure reçue à Blois dans l’exercice d’une mission à lui confiée.

À onze heures, les ordonnances furent signées, avant minuit M. Leuwen en avait une expédition avec un billet aimable du ministre des Finances.

À une heure du matin, ce ministre avait un mot de M. Leuwen qui demandait huit petites places et remerciait très fraîchement des grâces incroyables accordées à son fils.

Le lendemain, à la Chambre, le ministre des Finances lui dit :

— Cher ami, il ne faut pas être insatiable.

— En ce cas, cher ami, il faut être patient.

Et M. Leuwen se fit inscrire pour avoir la parole le lendemain. Il invita à dîner tous ses amis pour le soir même.

— Messieurs, dit-il en se mettant à table, voici une petite liste de places que j’ai demandées à M. le ministre des Finances, qui a cru me fermer la bouche en donnant la croix à mon fils. Mais si avant quatre heures, demain, nous n’avons pas cinq au moins de ces emplois qui vous sont dus si justement, nous compterons nos vingt-neuf boules noires et onze autres qui me sont promises dans la salle, et qui font quarante, et de plus je m’engagerai sur notre bon ministre de l’Intérieur qui, avec M. de Beausobre, s’oppose seul à nos demandes. Qu’en pensez-vous, messieurs ?

Et, sous prétexte d’interroger ces messieurs sur la question en discussion le lendemain, il la leur apprit.

À dix heures, il alla à l’Opéra. Il avait engagé son fils à attacher sa croix à son habit d’uniforme, qu’il ne portait jamais. À l’Opéra, il fit avertir le ministre, sans qu’il parût y être pour rien, de son projet de parler le lendemain et des quarante voix déjà sûres.

À quatre heures, à la Chambre, un quart d’heure avant que l’objet à l’ordre du jour ne fût proposé, le ministre des Finances lui annonça que cinq des places étaient accordées.

— La parole de Votre Excellence est de l’or en barre pour moi, mais les cinq députés pères de famille dont j’ai épousé les intérêts savent qu’ils ont pour ennemis MM. de Beausobre et de Vaize. Ils désireraient un avis officiel, et seront incrédules jusque-là.

— Leuwen, ceci est trop fort ! dit le ministre ; et il rougit jusqu’au blanc des yeux. De Vaize a raison, vous irriteriez des…

— Eh bien ! la guerre ! dit Leuwen. Et un quart d’heure après il était à la tribune.

On alla aux voix, le ministère eut une majorité de trente-sept voix, laquelle fut jugée fort alarmante, et enfin M. Leuwen eut cet honneur que le conseil des ministres, présidé par le roi, délibéra sur son compte, et longuement. Le comte de Beausobre proposa de lui faire peur.

— C’est un homme d’humeur, dit le ministre des Finances ; son associé Van Peters me l’a souvent dit. Quelquefois il a les vues les plus nettes des choses, en d’autres moments, pour satisfaire un caprice, il sacrifierait sa fortune et lui avec. Si nous l’irritons, sa faconde épigrammatique prendra une nouvelle vigueur, et à force de dire cent mauvaises pointes il en trouvera une bonne, ou du moins qui sera adoptée pour telle par les ennemis du roi.

— On peut l’attaquer dans son fils, dit le comte de Beausobre, ce petit sot grave que l’on vient de faire lieutenant.

— Ce n’est pas on, monsieur le comte, dit le ministre de la Guerre ; c’est moi qui, par métier, dois me connaître en bravoure, qui l’ai fait lieutenant. Quand il était sous-lieutenant de lanciers, il a pu être peu poli, un soir, chez vous, en cherchant le comte de Vaize pour lui rendre compte de l’affaire Kortis par lui fort bien arrangée…

— Comment ! peu poli ! dit le comte. Un polisson…

On dit : peu poli, dit le ministre de la Guerre en pesant sur le on ; on ajoute même des détails, des offres de démission, on raconte toute la scène, et à des gens qui s’en souviennent !

Et le vieux guerrier élevait la voix.

— Il me semble, dit le roi, qu’il y a des lieux et des moments où il vaudrait mieux discuter raisonnablement, ne pas tomber dans des personnalités, et surtout ne point élever la voix.

— Sire, dit le comte de Beausobre, le respect que je dois à Votre Majesté me ferme la bouche, mais partout ailleurs…

— Votre Excellence trouvera mon adresse dans l’Almanach royal, dit le ministre de la Guerre.

De telles scènes se renouvelaient tous les mois dans le conseil. La réunion des trois lettres R, O, I a perdu tout son talisman à Paris.

Une foule de demi-sots, qu’on appelait alors l’opposition dynastique et qui se laissait guider par quelques hommes d’une ambition indécise qui auraient pu et n’avaient pas voulu être ministres de Louis-Philippe, firent faire des ouvertures à M. Leuwen. Il fut profondément étonné.

« Il y a donc quelqu’un qui prend au sérieux mon bavardage parlementaire ? J’ai donc de l’influence, de la consistance ? Il le faut bien, puisqu’un grand parti, ou, pour parler plus vrai, une grande fraction de la Chambre me propose un traité d’alliance. »

M. Leuwen eut de l’ambition parlementaire pour la première fois de sa vie. Mais cela lui parut si ridicule qu’il n’osa pas en parler même à sa femme, qui, jusque-là, avait eu jusqu’à ses moindres pensées.

  1. Un peu plus haut Stendhal avait indiqué une majorité de deux voix seulement. N. D. L. E.
  2. Modèle : me figurer M. Gérard donnant à dîner à Chenavas.