Livre de raison de la famille Fontainemarie/Avertissement

Livre de raison de la famille Fontainemarie (p. 5-8).
LIVRE DE RAISON
de la
FAMILLE FONTAINEMARIE


1640—1774



publié par
PHILIPPE TAMIZEY DE LARROQUE



AVERTISSEMENT


M. Charles de Ribbe a tout dit sur les livres de raison en général, et M. Georges Tholin a tout dit sur les livres de raisons de l’Agenais en particulier. Ne voulant pas revenir sur un sujet épuisé par les deux savants écrivains, je renverrai mes lecteurs aux nombreux ouvrages de l’un[1], au petit volume de l’autre[2], et je me contenterai de présenter en quelques mots aux amis des intimes récits du bon vieux temps, les rédacteurs successifs du journal que je viens mettre en lumière.

1. Le premier de ces rédacteurs est Jacques de Fontainemarie, natif de la ville de Marmande : qui devint en 1660 conseiller à la Cour des aides et finances de Guyenne, et qui mourut doyen de cette compagnie, le 18 septembre 1708. Ce magistrat fut le grand homme de la famille. Son récit embrasse la période comprise entre les années 1640 et 1708.

2. Le second rédacteur est le fils ainé de Jacques de Fontainemarie il portait le prénom de François. Né à Bordeaux en 1663, il mourut à Marmande en 1741, après avoir, comme son père, longtemps siégé à la Cour des aides de Guyenne. Son journal s’étend de l’année 1663 à l’année 1730.

3. Ce journal fut continué, de 1741 à 1750, par la veuve de François de Fontainemarie, Marie-Marguerite Boutin.

4. Le quatrième et dernier rédacteur est Jean Baptiste de Fontainemarie, fils de François, né à Marmande en 1723, mort dans cette ville en 1780. Comme son père, comme son grand-père, il appartint en qualité de conseiller, à la Cour des aides de Guyenne. Son journal remonte jusqu’en 1720 et descend jusqu’en 1774.

Ces récits qui, dans leur ensemble, forment l’histoire d’une famille pendant plus de cent trente ans, présentent diverses sortes d’intérêt. Fidèle miroir des mœurs du passé, le livre de raison des Fontainemarie nous révèle, ou du moins nous rappelle, des côtés bien curieux de la vie de nos pères. La sincérité des chroniqueurs, qui semblent se transmettre de main en main la même simple et naïve plume, nous permet de lire jusqu’au fond de leurs âmes, et ceux qui sont jaloux d’interroger le document humain, trouveront dans les mémoires de cette série d’honnêtes gens un attachant sujet d’étude.

Considéré au point de vue de l’histoire régionale, le recueil fournit divers renseignements qui ne sont pas à dédaigner, soit en ce qui regarde cette Cour des aides de Guyenne où, pendant plus d’un siècle, la famille de Fontainemarie fut si brillamment représentée, soit en ce qui regarde un assez grand nombre de villes de l’Agenais et du Bordelais, notamment Agen, Blanquefort, Cocumont, Fauillet, Gontaud, Izon, La Réole, Libourne, Marmande[3], Tonneins, Tournon, Vayres, Villeneuve-sur-Lot. Mais c’est l’histoire de Bordeaux qui tient le plus de place dans notre livre de raison, lequel pourrait passer pour un supplément à la Chronique Bourdeloise. Je citerai particulièrement les détails relatifs à l’entrée du maréchal d’Albret dans la capitale de la Guyenne (31 mai 1671), à l’émeute qui ensanglanta les rues de cette ville (27 mars 1675). etc.

J’aime à l’espérer, le journal des Fontainemarie sera plus qu’une lecture intéressante : il sera une lecture salutaire. En un temps où trop de publications égarent les esprits et les cœurs, puisse ce modeste recueil, où resplendissent les beaux sentiments et les nobles exemples, être fortifiant, bienfaisant pour tous ceux qui daigneront le parcourir ! Un proverbe indien glorifie l’homme qui a fait pousser un seul brin d’herbe. N’est-ce pas encourageant pour celui qui, s’occupant d’une culture mille fois plus précieuse, aurait fait éclore une seule vertu[4] !

Ph. Tamizey de Larroque.
  1. On trouvera la liste complète de ces ouvrages dans l’essai de bibliographie des livres de raison qui figure à la suite des récits de la famille de Fontainemarie, essai que l’obligeante amitié de M. de Ribbe m’a tant aidé à étoffer.
  2. Le livre de raison des Daurée d’Agen. Texte précédé d’une étude sur quelques livres de raison des anciennes familles de l’Agenais (Agen, imprimerie Ve Lamy, 1880). Madame la comtesse Marie de Raymond avait demandé à M. Tholin cette publication, dont elle paya les frais avec son habituelle générosité. C’est là un des meilleurs titres de notre amie si regrettée à la reconnaissance de ceux qui ont le culte des vieux souvenirs.
  3. Les récits de MM. de Fontainemarie complètent en une foule de petits points la monographie publiée en 1872, sous les auspices du Conseil général de Lot-et-Garonne, par celui qui écrit ces lignes.
  4. Le livre de raison et divers autres documents utilisés dans les notes, m’ont été gracieusement communiqués par M. Maurice Boisvert, maire de Beaupuy, membre du Conseil général de Lot-et-Garonne, et descendant des Fontainemarie par sa grand’mère. En exprimant ici ma plus vive reconnaissance au fils d’un homme qui fut pour moi un ami dévoué, il m’est doux de constater que, dans la famille Boisvert, la bonté parfaite est une qualité héréditaire. Je dois aussi diverses excellentes indications à M. le docteur d’Antin, M. Gustave de Colombet, qui l’un et l’autre se rattachent par d’étroits liens de parenté à la famille de Fontainemarie, à M. l’abbé Alis, curé de Xaintrailles, à M. A. Communay, ancien président de la Société des Archives historiques du département de la Gironde, à M. le comte Albert d’Auber de Peyrelongue, et je prie ces obligeants et aimables auxiliaires d’agréer mes plus chaleureux remerciements.