Lexique étymologique du breton moderne/C'H

Texte établi par Faculté des lettres de Rennes, J. Plihon et L. Hervé (p. 169-171).
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C'H

C’hoalen, s. m., sel : pour *hoalen, variante métathétique de haloen. V sous holen et cf. l’évolution de môger.

C’hoanen, s. f., puce, cymr. chwain pl. : paraît dér. d’une rac. SWI « disparaître » (cf. al. schwinden, etc.), de même que a£. fiea et al. floh t< puce » se rattachent à la rac. germ. qui signifie « s’enfuir ».

C’hoaṅt, s. m., désir, mbr. hoant, corn. whans, cymr. chwant, vir. sant, gael. sannt id. : d’un celt. *swand-iio- ppe passé de rac. SWAD « être agréable », sk. scàd-à « doux », gr. *σϝᾱδ-ύ-ς (swâd-u-s) ἁδός (ados) ἡδύς (hêdus) id. et *σϝανδ-άν-ω (swand-an-ô) ἁνδάνω (handanô) « je plais », lat. suāvis ( *suād ui-s, cf. suādère « persuader »), germ. *swôt-i- <( doux », d’où ag. sweet et al. sites, etc.[1]

C’hoar, s. f., sœur, mbr. hoar, corn. huir, cymr. chioaer, vir. siur etjlur id. : d’un celt. *swesor- identique au sk. svàsâ et au lat. soror, et cf. ag. sister, al. schwester> vsl. sestra. etc. (ne manque qu’au grec).

C’hoari, s. m., jeu, cymr. chvoar-aua jouer »etcf. vir. fuir- ec « festin » : supposent un vb. celt. *sicer-ô, « je chante, je fais du bruit, je m’amuse », etc., dér. d’une rac. SWER « bruire », sk. svàr-a-ti <( il bruit », lat. su-surr-u-s « murmure », got. swar-an « bruire »[2], secondairement al. schwirr-en « bruire » et schwar-m « essaim » = ag. sioarm. Cf. choarz.

C’hoarvézout, vb., arriver, survenir, corn. wharfos id. : avec aspiration prothétique[3] . V. sous war et béza, et cf. cymr. cyfar-fod « assemblée ».

C’hoarz, s. m., rire, mbr. huerzin, corn. htoerthin, cymr. chwarddu, vb. « rire » et cf. cymr.. chwyr-nu « ronfler » : soit un celt. *swer-d-ô « je ris », dér. de la même rac. que c’hoari.

C’hoaz, adv., encore, mbr. hoaz, corn. whâth et whêth, cymr. chwaithià. : parait le même mot que br. gwéz > gwéach, soit « [encore] une fois », avec aspiration prothétique. V. sous gwéach.

C’houéac’h, six, mbr. chouech, corn. wheh, cymr. chwech, vir. se, ses et fes id. : d’un celt. *sweks t sk. çâ$, gr. *σϝεξ ϝέξ ἕξ, lat. s« r, got. « a/As (ag. six, al. secAs), lit. szeszi, etc.

C’houék, adj., doux, aimable, corn. whec, cymr. chwêg id. : soit un celt. *swek-o-, dér. d’une rac. SWEK « avoirde la saveur ou de l’odeur » qui ne se retrouve que dans les vieux dialectes germaniques (ags. swaec, « goût, odeur », vhal. swehh-an « avoir de l’odeur », etc.).

C’houéda, vb., vomir, mbr. huedaff, corn. hweda (hwedzha), cymr. chwydu, et cf. cymr. chwyd, vir. sceith, gael. sgeith « vomissement » : d’un celt. *sqeti- t dont il n’existe nulle part d’équivalent sûr.

C’houénia, vb., jeter sur le dos, se jeter sur le dos : dér. de c’houen (vieilli) « couché sur le dos » = ir.fàen, lequel équivaut à un celt. *swino- pour *sup-ino-, ayant le sens du lat. sup-inus et du gr. ὕπ-τιο-ς ; la rac. est SWEP, cf. lat. *sup-ô « je jette » et dis-sup-àre « disséminer » > dmi pare, vsl. sûp-q, « je répands » et s&ti « répandre », etc.

C’houenna, vb., sarcler, mbr. huennat, issu d’un mot *kuenn = cymr. chwyn « mauvaise herbe » : cf. cymr. cy-chwyn, « bouger, marcher », dont l’élément radical se rattache au vir. scend-i-m « je saute » et, par lui, au lat. scandere, « monter, s’élever »[4].

C’houérô, adj., amer (aussi chouert», mbr. hueru, corn. wherow, cymr. chwerw, vir. seri, ir. et gael. searbh id. : d’un celt. *swer-wo-, dont la rac. se retrouve dans lit. soar-ù-s « salé », stlras id., ags. sur > ag. sour et vhal. sû-r > al. sauer « aigre », etc.

C’houervizon, s. m., pissenlit : dér. du précédent.

C’houés, s. f., odeur : forme féminine de 1 c’houèz, et cf. 3 c’houéz.

C’houévrer, s. m., février, corn. hwevral, cymr. chwefrawr > chwefror > chwefrol. Empr. lat. februàrius > febrarius[5].

1 C’houéz, s. m., souffle, mbr. huéz, corn. whyth-e et cymr. chwyth-u « souffler », vir. sét-i-m « je souffle », ir. séidim et gael. séid id : soit un celt. *swiddo-, qui s’analyse en *swiz-dho- (i.-e.), « souffler, siffler », cf. vsl. scisi-ati « siffler » (avec sourde au lieu de sonore) et lat. sîfilus et sïbilus, tous deux pour *swïz-dhlo-, onomatopée primitive probable. Cf. aussi c’houibana et c’houitel.

2 C’houéz, s. m., sueur, mbr. choues, corn. whys, cymr. chwys id. : soit un celt. *swit-so-, dér. de la rac. SWID « transpirer », sk. soid-ya-ti « il sue », gr. *σϝιδί-ω ἰδίω, lat. *svoid-àre > sûddre, ag. sweat « sueur », et to sweat, al. schweiss, et schwitz-en vb., etc.

3 C’houéz, s. f. : le même que c’houés, soit « exhalaison ».

C’houéza, vb., souffler, se gonfler, mbr. huezaff, etc. : dér. de 1 chouéz (de 2 chouéz on a c’houézi « être en sueur »).

C’houézégel, s. f., vessie, ampoule, mbr. huysiguenn, corn. gusigan, cymr. gwysigen > chwysigen. Empr. lat. cèsîca, contaminé par étymologie populaire d’une dérivation de c’houéza.

C’houi, vous, corn. why, cymr. chwi, vbr. hui, vir. si, etc. : d’un celt. *swès, à peu près identique au sk. vas et au lat. vos, mais compliqué de la prothèse qu’accuse le duel gr. σφῶ-ι. Cf. 1 hô, ni et hon.

C’houibana, vb., siffler des lèvres, cymr. chwib <c pipeau » et chwiban w sifflement » : se rattache visiblement au même radical que 1 c’houéz, le b venant peut-être de contamination du lat. sibiltis.

C’houibu, s. m., variante de fubu. V. ce mot.

C’houll, s. m., hanneton, scarabée, mbr. huyl, cymr. chwilen id. : ou abstrait du suivant (br. c’houll-cac’h « fouille-merde », mais alors Tétymologie de ce dernier nous échappe) ; ou empr. ags. wifel > ag. tceevil id. Cf. c’houibu qui militerait en faveur de l’emprunt.

C’houilia, vb., fouiller, cymr. chwilio : dér. de c’houîl dans la seconde hypothèse. Ou empr. fr. ancien foeillier > fouiller ( ?).

C’houiliorez, s. f., frelon : dér. de c’houll ou de c’houilia.

C’houirina, vb., hennir, mbr. c’huirinnai, cymr. gweryru id, et cf. cymr. chwyr-nu, « ronfler, s’ébrouer » : parait se rattacher au même radical que c’hoari et c’hoarz. V. ces mots.

C’houita, vb., être mal à son aise, mbr. huytout. — Étym. inc.

C’houitel, s. f., sifflet, mbr. czulell (mais cf. suta), cymr. chwythell, vir. fet etfetân, ir. et gael. fead id. V. la rac. sous 1 c’houéz.

  1. Aucun rapport dès lors avec koaṅt, mais il serait surprenant que l’étymologie populaire n’en eût pas établi.
  2. Passé au sens de « parler » ou similaire, dans ag. to an-swer « répondre » et to swear = al. schœôr-en « jurer ». — Cf. toutefois cymr. gœarae « jeu ».
  3. On trouvera dans quelques-uns des mots suivants d’autres exemples du même phénomène ; cf. Eruauit, Mém. Soc, Llng*, X, p. 334. — Quant a la formation, on peut comparer le fr. sur-venir.
  4. Conj. Ern. — Se rappeler le proverbe « mauvaise herbe croit toujours ». — L’ag. whynne > « ?/un « mauvaise herbe » est sûrement emprunté au cynirique.
  5. L’f n’est pas devenu c’hw ; m lis, dans la liaison mis *febror, le groupe médial sf a été traité comme sw.