Lettres de Pline le Jeune/Tome premier/Panckoucke 1826/VIII. À Tranquille

Traduction par Louis de Sacy revue et corrigée par Jules Pierrot.
éditeur Panckoucke (p. 195-197).
VIII.
Pline à Tranquille.

Votre air de cérémonie avec moi ne se dément point, quand vous me priez, avec tant de circonspection, de vouloir bien faire passer à Césennius Silvanus, votre proche parent, la charge de tribun[1] que j’ai obtenue pour vous de Neratius Marcellus. Je n’aurai pas moins de plaisir à vous mettre en état de donner cette place, qu’à vous la voir remplir vous-même. Je ne crois point qu’il soit raisonnable d’envier à ceux que l’on veut élever aux honneurs, le titre de bienfaiteur, qui seul vaut mieux que tous les honneurs ensemble. Je sais même qu’il est aussi glorieux de répandre les grâces, que de les mériter : vous aurez à la fois cette double gloire, si vous cédez à un autre[2] une dignité, où votre mérite vous avait appelé. Je sens d’ailleurs que ma gloire est intéressée dans le service que je vous rends : on saura, par votre exemple, que mes amis peuvent non-seulement exercer la charge de tribun, mais même la donner. Je vous obéis donc avec plaisir dans une chose si honorable. Heureusement votre nom n’a point encore été porté sur le rôle public : ainsi nous avons la liberté de mettre, à la place, celui de Silvanus. Puisse-t-il être aussi sensible à cette grâce, qu’il reçoit de vous, que vous l’êtes à ce petit service que je vous rends ! Adieu.


  1. La charge de tribun. Le traducteur, travestissant, selon son usage, les noms de charges et de dignités romaines en noms tout à fait modernes, rendait tribunatum par la charge de colonel.
  2. À un autre. L’édition de Schæfer porte aliis, et j’ai adopté cette leçon.