Lettres. — II (1883-1887)
Texte établi par G. Jean-Aubry, Mercure de France (Œuvres complètes de Jules Laforgue. Tome Vp. 122-123).
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CVI

À THÉOPHILE YSAYE

Baden-Baden, [mai 1885 (?)]
Mon cher Théo,

Comment donc ! Pourquoi ne reçois-je plus de lettres ? Un malheur t’est-il arrivé ? Ton silence m’est inexplicable. Si le destin le veut, je pense que nous serons le 15 de ce mois à Babelsberg. Je rentrerai avec plaisir à Berlin. Mais au nom de tout ce qui nous reste de foi, donne-moi de tes nouvelles, dix lignes suffisent. Ma vie est toujours affreusement la même. J’entre dans une période d’apathie, c’est pourquoi je me suis payé un néologisme : je me « madréporise ». Mon Dieu ! J’aimerais vous voir vous « madréporiser », comme je me « madréporise », moi : vous vous en étonneriez.

J’ai reçu un cadeau de l’Impératrice, un thermomètre enchâssé dans une clef. J’en suis flatté.

Mon cher, mon vieux camarade, donne-moi de tes nouvelles ou tu me feras de la peine. Entendu. Je t’embrasse.

Jules.