Lettres à un ami sur l’office divin de l’Église catholique orthodoxe d’Orient/II/Lettre troisième


Lettres à un ami sur l’office divin de l’Église catholique orthodoxe d’Orient (Письма о Богослуженіи Восточной Каѳолической Церкви)
Traduction par le Prince Nicolas Galitzin.
Imprimerie française (p. 90-103).


LETTRE TROISIÈME.


Ma dernière lettre était remplie de morceaux choisis, que j’ai recueillis parmi les cantiques qui font partie de l’office des trois semaines qui précèdent le carême. Ainsi vous pouvez déjà apprécier le genre de beautés que renferment nos livres d’Église, dont nous avons généralement une si imparfaite connaissance. Ne vous rebutez point de cette lecture ; outre le mérite extrinsèque de cette poésie sacrée, elle possède le bien plus grand avantage encore de disposer l’âme à accepter tout ce qui peut lui être bon et salutaire. Nous voilà maintenant arrivés à la première grande semaine du carême. En suivant la route que l’Église nous a tracée, la transition ne sera pas pour nous aussi brusque qu’elle l’est habituellement après les plaisirs bruyants qui remplissent le carnaval, usage que nous avons fort mal à propos emprunté à l’Occident.

Autrefois les saints Pères, avides de rompre les liens qui les attachaient au monde pour pouvoir se livrer plus exclusivement à la contemplation des choses saintes, avaient l’habitude de consacrer la première semaine du carême à la retraite et au silence. Comme en toute entreprise difficile, le premier pas est toujours d’une grande importance, plusieurs d’entre eux s’éloignaient même dans les déserts les plus sauvages pour y passer tout le temps du carême. Nous avons aussi conservé l’antique et pieux usage de se visiter pendant la semaine du carnaval pour se demander mutuellement pardon de nos fautes, avant de faire pénitence, mais cet usage a dégénéré en festins, divertissements et promenades.

Un grand et pieux solitaire, saint André de Crète, compatriote et presque contemporain de saint Jean Damascène, que ses vertus firent remarquer dans la Palestine d’abord, puis comme apôtre de la foi au concile œcuménique de Constantinople, et finalement sur le siége archiépiscopal de Crète, saint André, dis-je, composa, dans le silence de sa caverne, un admirable cantique de pénitence, que l’Église a accepté avec amour. Elle en a prescrit la lecture deux fois pendant le cours du grand carême, parce qu’il exprime fidèlement la contrition d’âme du vrai chrétien. On le lit par sections aux complies des quatre premiers jours de la première semaine, puis en entier à l’office matinal du jeudi de la cinquième semaine ; cette fois, on y ajoute encore un petit cantique à l’honneur de Marie d’Égypte, ce modèle de perfection offert à tout pécheur repentant, qui veut se convertir avec le secours de la grâce.

De tous les morceaux d’éloquence spirituelle, dont nos livres d’offices sont remplis, le plus long et le plus remarquable est sans contredit le grand cantique de saint André de Crète : dans ses aperçus élevés, il embrasse à la fois les deux Testaments, il présente d’une manière tout à fait particulière quelques-unes des grandes figures de l’histoire sainte, il prend occasion de leurs chutes mêmes pour nous fournir des sujets d’édification, et nous arrache des larmes par les larmes qu’il leur fait verser. Chaque chant commence par une supplication, après quoi nous voyons défiler, comme à une revue mystique, nos premiers parents, les patriarches, les juges, les rois et les prophètes de l’ancienne alliance, unis entre eux par une chaîne de profondes pensées ; puis, comme exténué sous le poids de ses contemplations, le poêle du désert revient à la prière et va puiser dans l’Évangile des expressions capables de rendre les élans de son âme vers Dieu. Tout le neuvième chant, qui couronne ce cantique, est exclusivement consacré à la mémoire de la vie terrestre du Rédempteur. Il serait trop long de reproduire ici toute cette œuvre sublime ; mais je vous en ferai connaîtra quelques passages frappants, pour que désormais vous assistiez avec plus d’attention à cette lecture :

« Par où commencerai-je à pleurer mon odieuse vie de péchés ? Mes sanglots, ô Jésus-Christ, seront-ils le commencement d’une vie meilleure ? Toutefois dans votre miséricorde, accordez-moi la rémission de mes nombreux péchés. »

« Âme misérable, va avec ta chair, va te confesser au Créateur de toutes choses, tremble à la vue de ton abrutissement passé, va offrir à Dieu des larmes sincères de pénitence. » Tel est le prélude des lamentations de saint André de Crète, et le chœur qui personnifie tous les assistants, répond à chaque verset d’une voix plaintive : « faites-moi miséricorde, mon Dieu, faites-moi miséricorde ! »

Puis de sa bouche découlent des paroles accusatrices pleines d’amertume, mais en même temps d’une portée spirituelle très-élevée :

« Nous nous sommes empressés d’imiter dans son crime notre premier père Adam : ainsi que lui, nous avons reconnu notre nudité devant Dieu ; au lieu d’une Ève réelle, nous nous en sommes créé une autre en pensée, par notre concupiscence, qui attire par la saveur du fruit, pour ne nous en laisser que l’amertume. Nous avons surpassé Caïn dans le meurtre, en nous faisant les meurtriers de la conscience de notre âme, et nous n’avons pas à offrir à Dieu comme Abel un sacrifice pur et une vie sans reproche. »

« Cieux, prêtez l’oreille, et je parlerai ; terre, dictez-moi des accents de repentir et de louanges à Dieu. »

« Mon âme, c’est toi, toi seule qui a ouvert toutes les dignes qui retenaient la colère de Dieu ; tu es cause qu’elle a submergé mon corps et mon existence, comme jadis fut submergée la terre et tout ce qui était en dehors de l’arche du salut. »

Après cet effrayant tableau du déluge de nos passions, il appelle l’âme misérable, qui n’a point hérité de la bénédiction de Sem, ni de l’empire étendu de Japhet, il l’appelle de la terre payenne de Haran, séjour du péché, dans la terre promise de l’incorruptibilité, il lui ordonne d’être ainsi qu’Abraham, libre pèlerin dans le monde, de concevoir en pensée un nouveau sacrifice d’Isaac et de l’offrir en holocauste à Dieu, en tâchant d’être dans les mêmes dispositions de cœur, d’éviter que l’attrait de la sensualité, comme une nouvelle Agar, n’enfante un nouvel Ismaël, la sécurité dans le péché, qui doit être banni de la maison de Dieu. Il offre aussi comme modèle, la vie paisible du pontife de Dieu, Melchisedech, ce roi solitaire, que fut une image de Jésus-Christ ; il ordonne de fuir, comme le feu de Sodome, les convoitises de la chair dont les feux se réveillent, et de ne point tourner ses regards en arrière, de peur d’être transformé, comme la femme de Loth, en une statue de sel, mais de chercher son salut dans la montagne de Ségor.

« Ta fin est proche, ô mon âme, ta fin s’avance, et tu restes impassible, tu ne te prépares point ; le temps s’écoule, le juge n’est pas loin, il est à la porte ; tes jours s’évanouissent comme un songe, comme une fleur éphémère : pourquoi toutes ces vaines agitations ? »

La vision de Jacob et sa carrière de douleurs sont représentées en termes expressifs :

« L’échelle qu’un des grands patriarches vit autrefois en songe, ô mon âme, est l’emblème d’une ascension active et d’une élévation spirituelle : si donc tu veux entrer dans une vie active, spirituelle et contemplative, régénère-toi. » — « Sous la figure des deux épouses de Jacob, tu dois comprendre une vie double, active et contemplative : Lia, comme la femme féconde, représente l’activité, Rachel, comme la femme de douleur — la contemplation ; sans travail, il n’est point de succès, ni pour l’activité ni pour la contemplation. »

Et voilà que la grande figure de Moïse paraît aussi pour confondre notre âme, qui n’a pas tué l’égyptien, meurtrier du fils d’Israël, ainsi que l’a fait Moïse, c.-à.-d. qu’elle n’a pas fait mourir en elle le sentiment de convoitise sous lequel l’âme spirituelle souffre et gémit ; comment donc s’établira-t-elle par la pénitence, dans la solitude du renoncement aux passions, pour contempler Dieu, que Moïse a vu dans le buisson ardent ? — La baguette dont il frappa la mer était une figure de la divine croix « à l’aide de laquelle toi aussi, mon âme, tu peux accomplir de grandes choses. » — « Que mes pleurs soient comme la pleine de Siloam, » s’écrie l’auteur du cantique, pénétré de l’immensité des destinées divines qui se déroulent devant lui, « puissé-je aussi laver les prunelles de mon cœur pour vous voir en pensée, ô lumière éternelle ! » — Les rois de Juda et les prophètes d’Israël descendent successivement des degrés de leur trône, ou sortent de fond de leurs antres solitaires pour venir, à la voix d’André de Crète, converser avec l’âme pénitente et l’édifier par leurs saints exemples. Qu’elle est majestueuse, dans les versets de ce cantique, cette succession des oints du Seigneur qui, comme des guides de l’ancienne loi, la conduisent vers la nouvelle, afin qu’elle ne préfère point les puits des pensées de Chanaan aux sources de la pierre d’où jaillit la sagesse divine.

« David, choisi pour régner, a été oint avec une corne d’huile sainte, et toi, mon âme, si tu aspires au royaume d’en haut, oins-toi de larmes, au lieu de saint chrême. »

Ensuite il lui présente de terribles exemples dans Saül et Absalon, dans Salomon, qui perdit la sagesse, dans Roboam et dans Jéroboam qui partagèrent le royaume, dans le lépreux sacrilége Osias et dans l’impie Achab, persécuteur des prophètes.

« Si, à son exemple, tu rejettes les paroles d’Élie de Thesbé, alors, devant toi aussi, ô mon âme, le ciel se fermera, et tu seras atteinte de la famine envoyée par Dieu ; mais rends-toi semblable à la veuve de Sarepta et nourris l’âme du prophète. »

« Tel qu’un homme qui se réveille après un songe, j’ai vu mes jours dissipés, et je pleure sur ma couche comme le roi Ézéchias, en implorant quelques années de vie de plus ; mais quel autre Isaïe t’apparaîtra, ô mon âme, sinon le Dieu de tous ? »

Après avoir passé en revue tout l’Ancien Testament, l’auteur du cantique élève enfin ses oraisons vers l’auteur de la vie ; il crie comme le larron : « Souvenez-vous de moi » ; il dit comme le publicain : « Mon Dieu, ayez pitié de moi pécheur » ; imitant la chananéenne et les aveugles dans leur persévérance, il répète avec eux : « ayez pitié de moi, fils de David. » Comme Madelaine, il répand des larmes au lieu de nard sur la tête et les pieds de Jésus, il pleure amèrement sur lui-même, comme Marthe et Marié ont pleuré sur Lazare.

« La loi est impuissante, l’Évangile triomphe, le Christ s’est fait homme, il appelle à la pénitence les larrons et les adultères ; mon âme, repens-toi : la porte du royaume est déjà ouverte : les publicains, les pharisiens et les pécheurs repentants s’y précipitent avant toi. »

Puis, lorsque saisi d’une sorte de frémissement religieux, il suit de loin le Sauveur dans ses miracles, et qu’après s’être attendri sur chacun des actes de sa vie terrestre, il arrive enfin au moment du terrible holocauste, sa force d’âme semble défaillir, et, ensemble avec toute la création, il reste muet sur le Calvaire ébranlé, après qu’il s’est écrié une dernière fois : « Ô mon juge, vous à qui rien de ce qui est en moi n’est caché, vous qui avez promis de revenir avec vos anges pour juger l’univers, daignez alors, ô Jésus, me regarder d’un œil favorable et m’accorder ma grâce : déployez sur moi les trésors de votre munificence, car, plus que tout autre être créé, j’ai péché devant vous. »

En suivant avec attention la lecture de cet admirable cantique, le cœur s’écriera involontairement : « Seigneur ! si nous n’avions vos saints pour intercesseurs, si ce n’était votre bonté qui veut bien avoir compassion de nous, comment oserions entonner des cantiques devant vous, notre Sauveur, que les anges ne font que glorifier sans cesse. »

Cette dernière prière est placée par l’Église tout de suite après le psaume Laudate chanté à l’office du soir ; entre chaque verset de ce psaume, le chœur fait entendre cette supplication touchante : « Seigneur Dieu des armées, assistez-nous, car, hormis vous, nous ne connaissons point d’autre refuge dans nos peines ; Seigneur Dieu des armées, assistez-nous ! » Cet office du soir, particulièrement réservé pour le grand carême, s’appelle Méphimones, du grec Μεθ ημών ο Θεός, ou Dieu est avec nous, parce que ces dernières paroles y sont souvent répétées.

À tous les offices du soir et du matin, on lit, pendant tout le carême, les livres de l’Ancien Testament. Ainsi, dès le premier office de vêpres, on lit aux fidèles la Genèse et les Proverbes de Salomon, qui nous enseigne, que la crainte du Seigneur est le commencement de la sagesse. Le premier de ces livres, tout historique, nous apprend notre origine élevée, et nous initie aux destinées primitives du monde ; l’autre, purement moral, est un guide pour toutes les circonstances de la vie. À sexte l’Ancien et le Nouveau Testament se trouvent, pour ainsi dire, réunis dans la lecture d’Isaïe, prophète et évangéliste à la fois, puisqu’il parle du Rédempteur annoncé, comme s’il avait déjà paru de son temps :

« Cieux, écoutez ; terre, prêtez l’oreille, le Seigneur a parlé : j’ai nourri des enfants, je les ai élevés, et ils se sont révoltés contre moi. Le taureau connaît son maître, l’âne son étable : Israël m’a méconnu ; mon peuple est sans intelligence !… Lavez-vous, purifiez-vous, faites disparaître de mes yeux la malice de vos pensées : cessez de pratiquer l’injustice. Apprenez à faire le bien, aimez la justice, relevez l’opprimé, protégez l’orphelin, défendez la veuve. Et venez et disputons nos droits, dit le Seigneur ; et si vos péchés seraient aussi rouges que l’écarlate et le vermillon, ils deviendront comme la neige ou la toison la plus blanche. »

Ensuite, après s’être élevé contre le vieil homme de l’Ancien Testament, et passant à la joyeuse espérance que donne le nouvel homme du Nouveau Testament, le prophète dit :

« Dans les derniers temps, la montagne où habite le Seigneur, sera élevée au-dessus des collines sur le sommet des montagnes ; toutes les nations y accourront en foule. Et les peuples iront et diront : venez et montons à la montagne du Dieu de Jacob, et il nous enseignera ses voies et nous marcherons dans ses sentiers : car la loi sortira de Sion, et la parole du Seigneur de Jérusalem ; et le Seigneur jugera les nations, et il accusera la multitude des peuples. »

Le mercredi de cette grande semaine on célébre la première messe des présanctifiés avec vêpres ; dans ma première lettre je vous ai déjà fait connaître cette liturgie dans tous ses détails. La première fois qu’on dit cette messe du grand carême, on chante des versets touchants qui disposent particulièrement l’âme à la prière :

« Ô mes frères, que notre jeûne corporel soit aussi accompagné d’un jeûne spirituel : délions tout nœud d’iniquité, déchirons tout écrit injuste, donnons du pain à ceux qui ont faim, et introduisons dans nos maisons ceux qui n’ont point d’abri, afin que nous puissions nous rendre dignes de mériter les grands bienfaits de notre Seigneur Dieu Jésus-Christ. » — « S’il est quelque vertu, s’il est quelque louange à distribuer, elles appartiennent aux saints. Ils ont présenté leur cou devant le glaive à cause de vous, Seigneur, qui avez abaissé les cieux pour descendre vers nous ; ils ont versé leur sang à cause de vous, qui vous êtes exténué pour nous et avez pris la forme de serviteur ; pour imiter votre pauvreté, ils se sont humiliés jusqu’à souffrir la mort. Ayez pitié de nous, Seigneur, par égard pour leur prières et par la grandeur de vos miséricordes. »

Mais particulièrement remarquables sont les proverbes instructifs de Salomon, qu’on lit en ce jour :

« Mon fils, si tu prêtes à la sagesse une oreille attentive, si tu inclines ton cœur à la prudence, si tu invoques l’intelligence, si tu implores la sagesse, si tu la cherches comme l’argent, si tu la découvres comme un trésor caché ; alors tu comprendras la crainte du Seigneur, et tu auras la connaissance de Dieu : car le Seigneur donne la sagesse, de sa bouche se répandent et la prudence et le savoir… Si la sagesse entre dans ton cœur, si la science est la joie de ton âme, la vigilance te gardera et la prudence te défendra… Les bons habiteront la terre et les justes s’y affermiront, mais les impies en seront retranchés, et les pervers seront exterminés à jamais. » La lecture journalière de la Genèse suit l’ordre observé dans le livre, mais il est à remarquer que pendant les jours de messe, c.-à.-d. lorsqu’il y a le plus de monde à l’église, on en lit deux fragments qui traitent de la destinée du genre humain : le mercredi, c’est la création de l’homme à l’image et ressemblance de Dieu, et le vendredi, c’est sa funeste désobéissance et son expulsion du paradis. En outre le vendredi, avant la fin de la messe, on apporte au milieu de l’église et on bénit ce qu’on nomme Colive, c.-à.-d. semences de blé bouilli avec des fruits secs, et on chante un cantique en mémoire de saint Théodore Tyron, qui combattit et subit le martyre pendant les jours de persécution. Quand Julien l’Apostat, pour outrager les chrétiens, se fut avisé de commander que tous les vivres qui se vendaient aux marchés de Constantinople fussent arrosés du sang des victimes sacrifiées aux idoles, alors saint Théodore apparut en songe au patriarche, et, pour préserver les fidèles de cette souillure, il lui conseilla d’user en secret de cette nourriture frugale : depuis lors l’Église a réglé qu’on commémorait annuellement le souvenir de ce bienfait.

Une autre cruelle persécution a donné lieu à la cérémonie, par laquelle se termine l’office de cette grande semaine : je veux parler du dimanche de l’orthodoxie, premier du grand carême. Le culte des images, attaqué par Léon d’Isaure, fut rétabli par le septième concile œcuménique tenu à Nicée ; la paix et la prospérité ne furent rendues que pour peu de temps à l’Église d’Orient ; bientôt de nouveaux iconoclastes s’élevèrent parmi les souverains de Constantinople, et Théophile, le dernier d’entre eux, fut le plus acharné.

Après lui, sa pieuse épouse, l’impératrice Théodora, resta avec son fils en bas âge, Michel, régente de cet empire ébranlé par les hérésies : alors, on fit choix pour le siége patriarcal de St. Méthodius, célèbre confesseur de la foi pendant les persécutions, et d’accord avec lui, on assembla un concile à Constantinople afin de rétablir la paix dans l’Église. Les images et les ornements qui avaient été enlevés des églises par les impies, furent solennellement réinstallés. La mémoire de cet heureux événement fut dès lors célébrée par des prières en faveur des défenseurs de l’orthodoxie tant morts que vivants, et par des excommunications, semblables à celles qui ont été lancées à d’autres époques contre différents hérétiques que l’Église a dû condamner en termes énergiques, parce que ces impies menaçaient d’ébranler l’édifice même de la foi. Elle n’accomplit du reste ce pénible devoir que par un sentiment de charité, afin de sauver des milliers d’âmes sans expérience, en leur dévoilant de perverses séductions ; elle suit en cela l’exemple donné par l’apôtre St. Paul, et se sert de ses propres expressions : « quand nous-mêmes ou un ange des cieux viendrait vous annoncer une autre Évangile que celui que nous vous avons annoncé, qu’il soit anathème. » Ainsi a parlé l’apôtre des gentils dans son épître aux Galates (Ch. 1. v. 8) avant de raconter sa conversion, qui de persécuteur de l’Église le fit apôtre de la foi ; je vous conseille de relire encore une fois cette épître si forte de conviction. Cette commémoration éternelle des pieux souverains et des patriarches de l’Église tant grecque que russe, cette excommunication solennellement prononcée à haute voix contre les apostats, pratiquée depuis ce temps jusqu’à nos jours, a lieu au commencement de la Quadragésime ; c’est comme une image instructive de la future séparation des agneaux d’avec les boucs au dernier jour par le pasteur céleste lui-même, notre Seigneur Jésus-Christ.