Lettres à sa marraine/25 janvier 1916

Gallimard (p. 65-66).


Aux armées 25 janvier 1916



Ma chère marraine, copiez-moi les « sonnets nonchalants » et me les envoyez, voulez-vous ? Ils me récréeront et me toucheront sans aucun doute.

Je n’ai pas lu « Les rencontres de M. de Bréot » de Régnier mais la monotonie de cet auteur de talent mais trop convenu, sinon trop châtié, m’a toujours éloigné de sa prose et je n’aime de lui que ses premiers vers et notamment un joli poème intitulé : « La Galère ». Pour ce qui est de Rosny, il n’est pas assez châtié précisément et je trouve que les premiers ouvrages des deux Rosny étaient supérieurs à ceux de l’aîné seul, un peu trop populaire à mon sens. Quand ils étaient deux, les Rosny n’étaient pas sans intérêt ; leur style scientifique avait quelque chose de rigolo, une écriture artiste pour l’école du soir.

Je baise vos mains de rêve. Votre

Guillaume Apollinaire.