Lettres à la princesse/Lettre209

Lettres à la princesse, Texte établi par Jules TroubatMichel Lévy frères, éditeurs (p. 283-284).

CCIX

Ce samedi.
Princesse,

Je tremble toujours quand je vois toutes ces fêtes monstres[1] : la folie a tant de chances de s’y glisser[2] !

Pour moi, ce sont moins les fous encore qui m’indignent que les sots, ces avocats en robe qui, la veille, insultent un hôte, compromettent la France et font une gaminerie indigne dans le parvis même ou siége la justice[3]. Oh ! la logique n’est pas notre fort. Espérons qu’il y aura une réaction tout à côté de la sottise. Nous payerons nous toujours de déclamations ? — Tout ce qui se passe d’ailleurs, vu de loin et par un moine (le moine malgré lui que je suis), n’est certes pas sans grandeur ; c’est un spectacle unique, et je ne puis m’empêcher de croire que la civilisation au sens le plus élevé y gagnera.

Je cherche à deviner quelques-unes de vos pensées, Princesse, et à me mettre en harmonie avec elles.

Je mets à vos pieds, Princesse, l’hommage de mon tendre et respectueux attachement.


  1. L’Exposition universelle de 1867, et tout ce qu’elle entraînait de manifestations et de réjouissances officielles.
  2. Allusion à l’attentat de Berezowski contre l’empereur de Russie, après la revue du bois de Boulogne (6 juin 1867).
  3. On avait crié : Vive la Pologne ! sur le passage du czar, pendant sa visite au palais de justice.