Lettre de Saint-Évremond à la duchesse Mazarin (« L’affreuse retraite dont vous me parlez… »)


XCII. Billet à la duchesse Mazarin, 1698.


BILLET À LA MÊME1.
(1698.)

L’affreuse retraite dont vous me parlez ne la sauroit être pour vous, plus que pour moi. Quand vous êtes contente, je suis satisfait: quand vous avez à vous plaindre de votre condition, c’est un sujet de me plaindre de la mienne. J’attends de votre fermeté, que vous souffrirez encore quelque temps, le mechant état de vos affaires ; et de votre bon sens, que l’illusion des faux biens imaginaires ne prendra aucun pouvoir sur votre esprit. Espérez, Madame ; vos embarras finiront. Quittez la bière, buvez votre vin, et faites venir à Mustapha2 ses inspirations ordinaires, quand il a bu. Cela vaut mieux contre la mauvaise fortune que la Consolation de Sénèque à Marcia3.


NOTES DE L’ÉDITEUR

1. Dernier billet connu de Saint-Évremond à la duchesse.

2. Jeune turc, au service de la duchesse.

3. Mme de Mazarin est morte le 20 juin 1699, à Chelsey. Voy. l’Histoire de Saint-Évremond et les lettres qui suivent au marquis de Canaples.