Lettre 774, 1680 (Sévigné)

1680

774. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

À Paris, mercredi 24e janvier.

Voilà une bouffée de mal qui dure longtemps, ma chère fille, et que je comprends qui doit être bien triste 1680 et bien incommode. Il n’y a personne qui ne connoisse quelque douleur d’estomac ; celle que vous sentez est plus piquante et plus pesante, et cela se passe dans un endroit si intérieur et si intime[1], c’est tellement soi qui souffre, que j’admire et j’ai toujours admiré votre douceur et votre patience ; je ne crois point qu’une autre pût soutenir ce mal comme vous[2]. Je vois que ce n’est pas le repos qui vous manque : on vous ménage fort bien ; les promenades sont placées par les plus beaux jours du monde : c’est donc de votre poitrine, de votre sang, de votre poumon que vient tout le mal. Je suis bien heureuse que le conseil que j’ai donné, de la part de Fagon, de manger davantage, ait réussi[3]. Cette sorte de régime, pour les personnes délicates, s’introduit beaucoup. Vous êtes en lieu de prendre vos résolutions sur le lait.

M. de Grignan me fait[4] un grand plaisir de me parler de mon petit marquis : je sens beaucoup d’amitié pour lui ; pour Pauline il faut de la passion, elle me paroît toute charmante. M. de Mesmes m’en parla l’autre jour sur ce ton ; il semble qu’il vienne de la quitter : je lui montrai[5] ses deux lettres, qui sont encore dans ma poche ; il entra là dedans comme un amant, mais il est fort jaloux du Coadjuteur ; le mari et la femme sont encore 1680 pleins[6] du souvenir de votre bonne réception. Mlle de la Bazinière[7] est en religion, tout auprès de Mme de la Fayette[8] : quelques intérêts de famille, et une très-désagréable humeur, ont causé cette retraite, où elle s’ennuie fort. Mon fils est perdu, vous pouvez faire dire votre messe à saint Antoine de Pade[9] : il n’est pas encore revenu à Nantes. Pour avoir trop à dire là-dessus, je ne dis rien. Il y a deux mois qu’il seroit ici, s’il avoit retranché de son voyage les jours qu’il a donnés aux plaisirs charmants qu’il a trouvés en basse Bretagne. Il est allé passer les Rois à cinquante lieues de Nantes ; il a passé par Saint-Brieux, dont l’évêque[10] est nommé à l’évêché de Poitiers. Je regarde toujours ce qui se passe pour les évêchés, à cause de notre bel abbé. La maison[11] part jeudi pour aller au-devant de cette princesse, dont la physionomie ne promettoit pas tant de bonheur. Celle qui vous aime tant[12] me paroît bien aimable de conserver si longtemps et de si loin un si bon goût. Mme de Solre[13] n’est point à Paris : je crois qu’elle auroit envoyé ici, ou que j’aurois entendu parler d’elle.


1680 Mme la princesse de Conti est toujours charmante : elle se trouva si mal la nuit de ses noces à cause d’un dévoiement[14], qu’on a jeté son bonnet par-dessus les moulins, et l’on n’a vu goutte. Elle se porte bien, et l’on dit des merveilles de sa belle âme[15] et de la générosité de M. le prince de Conti : il jette l’argent héroïquement ; il a des bontés d’Henri IV, des procédés du chevalier Bayard, et des justices de Sylla[16] : on conte cinq ou six choses admirables. Mme de Bury a été reçue du Roi au delà de ce qu’on pensoit : il lui a recommandé la conduite de sa fille[17] ; il la nomme toujours ainsi, et l’aime chèrement. Il donne deux mille écus de pension à cette Bury, et des le jour même elle entra[18] dans le carrosse de la Reine : cette sauce rend cette place des meilleures ; ce qui viendra de l’hôtel de Conti seront des présents ; mais elle est au Roi. C’est à Mme de Langeron à voir si elle pourra rentrer dans ses droits du carrosse, qu’elle a perdus par l’hôtel de Condé[19]. Il est difficile de juger de l’effet des conduites ; Mme de Bury, à cinquante lieues

1680 de Paris[20], est enlevée pour mettre dans une place que l’on a rendue fort bonne. Mme de Saint-Géran, en mangeant[21] tous les gratins des poêlons des petits enfants, n’attrape rien ; Monsieur de Saint-Brieux, dans son diocèse[22], est transporté à Poitiers, qu’il souhaitoit ; d’autres, en rang d’oignon tous les jours à la messe du Roi, n’ont rien : quelle conséquence peut-on tirer, sinon que tout va comme il plaît à Dieu[23] ? Pauline et moi suivons[24] cette opinion perverse ; elle vous a répondu dans ce sens. Monsieur de Saint-Omer[25] est guéri de l’Anglois ; Mme la duchesse de Saint-Aignan[26] en est morte : il est vrai qu’on lui donna[27] à l’agonie. Son mari est revenu du Havre en poste sur les vieilles ailes de son vieux amour[28] : il arriva comme elle expiroit ; il lui baisa la main, fit des cris, poussa des sanglots, et nous va donner d’une Sierra Morena[29] 1680 dans sa retraite et son deuil[30]. Voilà Mme de Livry[31] très-affligée : elle perd tout.

J’ai vu les Chaulnes, qui ont reçu avec reconnoissance votre souvenir et vos remerciements[32]. J’ai embrassé Mme de Coulanges ; elle vous rembrasse[33], et me paroît fort aise de votre espèce de commerce. Elle a été à Saint-Germain, toujours fort caressée, fort gâtée. Elle étoit mal avec la comtesse de Gramont[34] ; l’abbé Têtu, quoiqu’il ne la voie plus, n’a pas laissé de vouloir faire cette paix : il l’a faite.

Monsieur le Dauphin demande à M. de Montausier quand Madame la Dauphine sera grosse ? Ils seront mariés demain à Munich ; il est, je crois, persuadé qu’elle pourra l’être en arrivant à Sélestat. C’est le prince son frère[35] qui l’épouse. On a envoyé[36] des habits magnifiques, que l’Électeur avoit demandés[37] pour lui et pour sa sœur ; mais en bien moindre quantité qu’il ne vouloit, parce que rien n’est égal aux magnificences que la maréchale de Rochefort porte à cette princesse. La dame d’honneur, les dames d’atour, les filles, la gouvernante[38], et toute la 1680 maison part demain. Mme de Coulanges est aujourd’hui dans le tourbillon de leur départ ; elles sont toutes à Paris.

Voici une histoire bien tragique. Cette pauvre Bertillac[39] est devenue passionnée, pour ses péchés passés, de l’insensible Caderousse[40] :


Il l’a vue s’enflammer et non pas se défendre[41].


D’abord il a été au fait, et lui a fait mettre en gage ses perles, pour soutenir un peu la bassette. Il alla[42] chez Mme de Quintin[43] avec mille louis qu’il fit sonner ; sa reconnoissance l’obligea de dire d’où ils venoient. Elle a été si excessivement saisie de ce procédé[44], qu’elle en est devenue une image de Benoît, comme elle l’a été[45] autrefois ; et le sang et les esprits ne courant plus, elle est devenue enflée[46] et gangrenée, de sorte qu’elle est à l’agonie[47].


1680 Nous y passâmes hier, le petit Coulanges et moi : on attend qu’elle expire ; elle est mal pleurée ; le père et le mari voudroient qu’elle fût déjà sous terre. Il n’y a pas deux opinions sur la cause de sa mort[48]. Mme de Frontenac en est toute honteuse[49] aussi bien que tout le sexe, qui devroit déchirer Caderousse comme Orphée. Je ne ferai jamais mon héros d’un si malhonnête homme[50] ; j’ai le même chagrin contre lui, que Mme de Coulanges contre la Fare[51] : elle ne le salue plus, et dit qu’il l’a trompée[52]. Il n’y a qu’elle qui se plaigne ; la Sablière a pris son parti en jolie et spirituelle personne[53]. Ce n’est pas pour le même sujet que je hais Caderousse, comme vous voyez ; car même il ne m’a pas trompée[54].

1680

Mercredi, à dix heures du soir.

Ma grosse lettre est partie ; mais quand il y a de grandes nouvelles, il faut les écrire, quoique vous puissiez les savoir par d’autres. Je vous dirai donc que Mme la comtesse de Soissons[55]est partie cette nuit pour Liège, ou pour quelque autre endroit qui ne soit point la France. La Voisin[56]l’a extrêmement marquée, et je pense que Sa Majesté lui a donné charitablement le temps de se retirer. M. de Luxembourg s’est mis volontairement à la Bastille, et se croit assez innocent pour prendre ce ton[57]. On parle de Mme de Tingry[58], de plusieurs autres encore ; mais c’est un chaos, et je vous mande ce qui est positif ; à vendredi le reste.

On a trompeté Madame la Comtesse à trois briefs jours, c’est-à-dire qu’on lui va faire son procès par contumace. Le Roi dit à Mme de Carignan[59] : « Madame, j’ai bien voulu que Madame la Comtesse se soit sauvée ; peut-être en rendrai-je un jour compte à Dieu et à mes peuples. » Et pour son appartement[60], que Mme de Carignan demandoit, le Roi lui dit qu’il en avoit disposé[61].


  1. Lettre 774 (revue en très-grande partie sur une ancienne copie.) — 1. Perrin, dans sa seconde édition (1754), a ainsi abrégé ce membre de phrase : « mais celle que vous sentez se passe dans un endroit si intérieur et si intime, etc. »
  2. 2. Ce dernier membre de phrase ne se trouve point dans l’impression de 1754 ; cette édition, en revanche, donne seule la fin de l’alinéa, depuis : « Je vois… »
  3. 3. Voyez la lettre du 8 décembre précédent, p. 134.
  4. 4. « M’a fait. » (Édition de 1754.)
  5. 5. Ce membre de phrase et le suivant, jusqu’à : « du Coadjuteur, » n’ont pas été reproduits par Perrin dans sa seconde édition (1754).
  6. 6. « Tout pleins. » (Édition de 1754.)
  7. 7. Voyez plus haut, p. 113, note 64.
  8. 8. Sans doute au couvent du Calvaire. Voyez tome III, p. 230, note 3.
  9. 9. Saint Antoine de Padoue, franciscain portugais, mort en 1231, à l’àge de trente-six ans, canonisé dès 1232. On l’invoque pour retrouver les choses égarées. — Perrin, dans sa seconde édition (1754), a supprimé la plaisanterie et resserré ainsi la phrase : « Mon fils n’est point encore à Nantes. »9. Saint Antoine de Padoue, franciscain portugais, mort en 1231, à l’àge de trente-six ans, canonisé dès 1232. On l’invoque pour retrouver les choses égarées. — Perrin, dans sa seconde édition (1754), a supprimé la plaisanterie et resserré ainsi la phrase : « Mon fils n’est point encore à Nantes. »
  10. 10. Hardouin Fortin de la Hoguette, évêque de Saint-Brieux depuis le 3 mai 1676, fut nommé par le Roi, le 19 janvier 1680, à l’évêché de Poitiers, et occupa ce siège jusqu’en 1685.
  11. 11 La maison de la Dauphine : voyez la note 9 de la lettre précédente. — Le texte de 1754 donne demain, au lieu de jeudi.
  12. 12. Anne-Elisabeth de Lorraine, princesse de Vaudemont. (Note de Perrin.)
  13. 13. Anne-Marie-Françoise de Bournonville fille d’Alexandre prince de Bournonville et de Jeanne-Ernestine-Françoise d’Aremberg. Elle épousa en 1672 Philippe-Emmanuel-Ferdinand de Croy, comte de Solre, lieutenant général des armées du Roi. Voyez la lettre du 7 janvier 1689. — Cette phrase n’est pas dans l’édition de 1734.
  14. 14. « Si mal la nuit de ses noces d’un dévoiement. » (Édition de 1754.)
  15. 15. « De la belle âme. » (Ibidem.)
  16. 16. Il y a Sylla (Silla) dans notre manuscrit, dans les impressions de 1726 et dans les deux éditions de Perrin. Grouvelle a conjecturé qu’il fallait lire Sully. Ce qui suit, jusqu’à : « Monsieur de Saint-Brieux, » manque dans l’édition de Rouen {1726), qui, de même que celle de la Haye et notre ancienne copie, ne commence cette lettre qu’à ce troisième alinéa : « Mme la princesse de Conti. »
  17. 17. Les deux éditions de Perrin (1734 et 1754) répètent ici : « sa fille. »
  18. 18. « Qui dès le jour même entra, etc. » (Édition de 1764.)
  19. 19. Voyez plus haut, p. 171, note 14.
  20. 20. Voyez ci-dessus, p. 195 et 196, et la note 13.
  21. 21. Les mots en mangeant ont été sautés dans notre copie.
  22. 22. Dans l’édition de Rouen (1726) : « de son diocèse. »
  23. 23. Ce qui suit, jusqu’à la fin de l’alinéa, manque, ainsi que le paragraphe suivant tout entier, dans le texte de Rouen (1726).
  24. 24. « Nous suivons. » (Édition de 1754.)
  25. 25. Voyez la lettre du 17 janvier précédent, p. 198. — Dans l’édition de la Haye (1726) : « est guéri de **. »
  26. 26. Antoinette, fille de Nicolas Servien, seigneur de Montigny, conseiller du Roi en ses conseils d’État et privé et trésorier de ses parties casuelles, et de Marie Groulart de la Cour. Elle épousa en 1633 le duc de Saint-Aignan, dont elle fut la première femme, et mourut le 22 janvier 1680, à l’âge de soixante-trois ans. Six mois après, le duc se remaria. Voyez la lettre de Bussy, du 25 Juin suivant.
  27. 27. Dans l’édition de la Haye (1726) : « qu’on le lui donna. » Dans la seconde édition de Perrin : « qu’on lui donna ce remède. »
  28. 28. C’est le texte du manuscrit ; dans toutes les éditions : « son vieil amour. »
  29. 20 Allusion à la sévère pénitence que fit don Quichotte dans la Sierra Morena, en l’honneur de l’incomparable Dulcinée du Toboso. (Note de l’édition de 1818.)
  30. 30. « Et dans son deuil. » (Édition de 1754.)
  31. 31. Marie-Antoinette de Beauvilliers, femme de Louis Sanguin, marquis de Livry.
  32. 32. Cette première phrase n’est pas dans l’édition de 1754, qui commence ainsi la suivante : « J’ai vu Mme de Coulanges. »
  33. 33. Dans notre manuscrit et dans les deux éditions de Perrin : « elle vous embrasse. »
  34. 34. Voyez la lettre du 24 novembre 1679, p. 97 et 98.
  35. 35. « C’est l’électeur son frère. » (Édition de 1734.) — Le mariage ne fut célébré à Munich que le 28 au soir. Voyez la Gazette du 10 février.
  36. 36. « On a envoyé d’ici. » (Éditions de 1734 et de 1754.)
  37. 37. « Qu’il avoit demandés. » (Édition de 1734.)
  38. 38. « La gouvernante, les hommes. » (Éditions de 1734 et de 1754.) — Voyez la note 9 de la lettre précédente, p. 205.
  39. 39. Anne-Louise Habert, fille de Henri-Louis Habert de Montmor et de Marie-Henriette de Buade de Frontenac, et sœur de l’abbé de Montmor (voyez tome II, p. 138, note 14). Elle avait épousé en 1666 Nicolas-Jehannot de Barthillat (qu’on appelait aussi Bertillac), lieutenant général des armées du Roi, gouverneur de Rocroy. — Les deux éditions de Perrin ne donnent que la première lettre de ce nom, et, à la ligne suivante, de celui de Caderousse.
  40. 40. Voyez tome I, p. 493, note 5, et la Notice, p. 102. Caderousse mourut le 28 février 1730, à l’âge de quatre-vingt-cinq ans.
  41. 41. Ce vers n’est pas dans l’édition de Rouen (1726). L’édition de 1754 seule donne le masculin : « Il l’a vu. »
  42. 42. « On le vit arriver. » (Édition de 1754.)
  43. 43. Voyez tome IV, p. 251, note 4.
  44. 44. « Ce procédé a si excessivement saisi la B… » (Édition de 1754.)
  45. 45. « Comme elle a été. » {Éditions de 1734 et de 1754.) – Benoît était un artiste célèbre pour les figures de cire. — Dans le manuscrit, et dans l’édition de la Haye (1726), on lit : « un image. »
  46. 46. « Elle est actuellement enflée. » (Édition de 1764.)
  47. 47. Bussy écrit à la Rivière, sous la date du 17 février 1680 : « Caderousse, étant allé, dès le soir même, dans la maison ou il avoit perdu la veille, dit, avec un air dédaigneux qu’on dit qu’il a, à quelqu’un qui lui demandoit ce qu’il venoit faire là, n’ayant pas un quart d’écu, que les gens comme lui ne manquoient jamais de ressource, et que la bonne femme Bertillac n’avoit plus ni bagues ni joyaux. À la vérité, il ne voyoit pas que Mme de Bertillac étoit dans l’alcôve de la chambre avec la maîtresse du logis. Vous pouvez vous imaginer ce que put penser une femme passionnée qui se voit traiter de la sorte. Elle tomba en défaillance, et comme elle fut revenue, on la porta dans son carrosse, et de là dans son lit, où elle est morte quatre jours après. »
  48. 48. « Sur cette belle cause de sa mort. » (Édition de 1754.)
  49. 49. « En paroît honteuse. » (Ibidem.)
  50. 50. « Je ne ferai jamais mon héros d’un tel homme. » (Édition de Rouen, 1726.) — « Je n’en ferai jamais mon héros. » (Éditions de 1734 et de 1754.)
  51. 51. Voyez plus haut, p. 108, et la note 38.
  52. 52. La fin de cette phrase n’est pas dans l’édition de Rouen (1726), non plus que la phrase suivante.
  53. 53. Voyez la lettre du 14 juillet suivant.
  54. 54. La lettre finit à ces mots dans le texte de 1734. Les éditions de Rouen et de la Haye qui n’ont pas non plus le post-scriptum daté du mercredi, à dix heures du soir, ajoutent ici un alinéa qui forme la fin de la lettre du 8 avril 1676 (tome IV, p. 400). — Le premier paragraphe du post-scriptum n’est que dans l’impression de 1754.
  55. 55. Olympe Mancini (voyez tome II, p. 501, note 6). Sur sa fuite et son procès, voyez les Nièces de Mazarin par Amédee Renée.
  56. 56. On instruisait l’affaire des poisons. Catherine Deshayes, femme d’Antoine Montvoisin, connue sous le nom de la Voisin, la Vigoureux, la Bosse, un prêtre nommé Étienne Guibourg, Adam Cœuvret, dit le Sage, et d’autres scélérats obscurs, tiraient l’horoscope, et mettaient en pratique les funestes secrets que leur avaient légués Sainte-Croix et la Brinvilliers. On n’entendait parler que de morts subites et d’empoisonnements. Le Roi, voulant mettre un terme à ces crimes, attribua, par lettres patentes du 7 avril 1679, la connaissance exclusive du crime de poison à la chambre de l’Arsenal, qu’il avait créée à cet effet, et qui était composée de conseillers d’État et de maîtres des requêtes. Une grande partie des pièces originales de ce procès est conservée parmi les manuscrits de la bibliothèque de l’Arsenal. L’éditeur y a puisé des éclaircissements. (Note de l’édition de 1818, à la lettre suivante.)
  57. 57. Pour le maréchal de Luxembourg, compromis dans l’affaire des poisons, voyez l’Histoire de Louvois par M. Rousset, tome II, p. 562 et suivantes.
  58. 58. Voyez tome III, p. 509, note 2, et les Mémoires de Saint-Simon, tome I, p. 136 et 137. La princesse de Tingry ou Tingris, dame du palais de la Reine, mourut le 16 juillet 1706 (voyez à cette date le Journal de Dangeau et une addition de Saint-Simon). « Elle vécut, dit Saint-Simon dans ses Mémoires (tome V, p. 195), longtemps fort délaissée, et dans de grands scrupules sur ses vœux, et d’avoir changé son voile contre un tabouret. »
  59. 59. Marie de Bourbon, fille de Charles comte de Soissons, avait épousé le 10 octobre 1624 Thomas-François de Savoie, prince de Carignan, cinquième fils du duc Charles-Emmanuel Ier, dont elle resta veuve le 22 janvier 1656. Elle mourut le 4 juin 1692, à quatre-vingt-sept ans. Elle était belle-mère de la comtesse de Soissons.
  60. 60. La comtesse de Soissons avait conservé aux Tuileries, dans l’un des pavillons, au premier étage, l’appartement de la surintendante de la maison de la Reine : elle avait cependant cessé d’exercer cette charge au mois d’avril 1679. Le Roi l’avait fait prier de s’en démettre entre ses mains ; la Reine joignit sa prière à celle du Roi, et la comtesse donna son consentement en recevant deux cent mille écus (voyez la Correspondance de Bussy tome IV, p. 344 et 345). Le Roi voulait donner cette charge à Mme de Montespan, et voici quel était le motif de cette libéralité pour une maîtresse dont la faveur commençait à décliner : M. de Montespan ne voulant rien recevoir, on ne pouvait le faire duc et donner à sa femme le tabouret des duchesses ; on supposa que la charge de surintendante emportait ce droit avec elle. Voyez Saint-Simon, tome VI, p. 442. (Note de l’édition de 1818.)
  61. 61. « Il répondit qu’il y avoit pourvu. » (Édition de 1754.)