Lettre 322, 1673 (Sévigné)

Texte établi par Monmerqué, Hachette (3p. 207-208).
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1673

322. — DU COMTE DE BUSSY RABUTIN À MADAME DE SÉVIGNÉ.

Je fus huit mois sans ouïr parler de Mme de Sévigné (voyez la lettre 305, p. 165), après lesquels je lui écrivis celle-ci.

À Bussy, ce 26e juin 1673.

Il m’ennuie fort, Madame, de n’avoir aucune nouvelle de vous depuis que vous arrivâtes en Provence : quand vous seriez en l’autre monde je n’en aurois pas moins. Est-ce qu’on ne songe plus qu’à ce qu’on voit, quand on est en Provence ? Mandez-le-moi, je vous prie, parce qu’en ce cas-là je vous irois trouver, et j’aimerois mieux me mettre au hasard de me brouiller à la cour, où je n’ai plus rien à ménager, que de n’entendre jamais parler de vous. Raillerie à part, Madame, mandez-moi de vos nouvelles. Je suis en peine aussi de n’en avoir aucune de notre ami[1]. Quelqu’un m’a dit qu’il étoit dans une dévotion extrême. Si c’étoit cela qui l’empêchât d’avoir commerce avec moi, j’aimerois autant qu’il fût déjà en paradis. Mandez-moi ce que vous en savez[2].


  1. Lettre 322. — 1. De Corbinelli.
  2. 2. Pour les lettres échangées entre Bussy et sa cousine depuis la fin de juin 1673 jusqu’au 7 octobre 1676, nous avons collationné deux copies qui sont toutes deux de la main de Bussy : celle qui appartient à M. le marquis de Laguiche et que nous continuons à suivre, et celle que contient un manuscrit de la bibliothèque de l’Institut. Ce manuscrit, évidemment moins fidèle et où Bussy a retouché et retravaillé, non pas seulement ses lettres, mais encore celles de Mme de Sévigné et de ses autres correspondants, nous offre pour la lettre 322 de nombreuses et considérables variantes. — À la date, 30e juin pour 26e juin ; à la première ligne, aucunes nouvelles au pluriel ; à la deuxième ligne, êtes pour arrivâtes. À partir de la seconde phrase, jusqu’à l’avant-dernière de la lettre, et surtout jusqu’à la fin du premier alinéa, le texte est tout différent : « Est-ce qu’on ne revient plus de Provence quand on y est ? Mandez-le-moi, je vous prie, parce qu’en ce cas-là je vous irois trouver. Le Roi, qui ne m’a défendu que la cour et Paris, trouveroit aussi bon que je fusse en Provence qu’en Bourgogne. Raillerie à part, mandez-moi de vos nouvelles, et où je pourrai vous envoyer quelque projet de généalogie de notre maison, que je serai bien aise de vous faire voir, et à l’abbé de Coulanges, pour en avoir vos avis. Je suis bien en peine de n’avoir aucunes nouvelles de notre ami Corbinelli. On m’a dit qu’il étoit dan$ une dévotion extraordinaire. » En outre, la dernière phrase : « Mandez-moi ce que vous en savez, » manque dans le manuscrit de l’Institut.