Les souvenez-vous/C’est un grand chagrin

H. Falque (p. 123-125).

C’EST UN GRAND CHAGRIN

C’est un grand chagrin presque irréparable
D’avoir méconnu l’amour véritable

D’un cœur qui s’offrait à nous, plein de foi,
Dans toute sa fougue et tout son émoi.


Oh ! savoir que l’on aggrava la peine
Qui tremblait au fond d’une vie humaine.

Que sur le beau rêve qui frissonnait
Et qui voulait vivre et qui se donnait

On a mis des pleurs, jour par jour, sans trêve
Parce que c’était de l’amour, ce rêve !…

Mais on aurait pu, comme eût fait Jésus,
Calmer ce cœur las qui n’en pouvait plus ;

Puisqu’il était seul, tout seul en ce monde,
On devait bercer sa peine profonde,

Et, surtout, comprendre qu’il ne faut pas
Juger, quand soi-même l’on n’aime pas,

Et que la sagesse plus sage eût dit :
Pourquoi pleurez-vous, mon pauvre petit ?

Oh ! ne pleurez pas, croyez que sur terre
Il y a plus lourd en fait de misère :


Qu’aurez-vous après avoir tant pleuré ?
Guérissez plutôt ce cœur déchiré.

Pour le mieux guérir je viens à votre aide.
Votre mal est grand ; mais j’ai le remède,

Le seul, le sacré, le vrai… si clément
Qu’il dépassera tout votre tourment :

C’est l’amour de Dieu !… C’est Dieu !… sa parole
À la fois soutient, relève et console.

Qu’il me serait doux que ce cœur meurtri
Au jardin d’amour divin fût guéri…

Oh ! Pourquoi n’avoir pas dit à celui qui pleure
Ce que je lui dirais s’il pleurait à cette heure ?

Pourquoi ce soir ai-je si bien compris ceci ?
Pourquoi, pourquoi ?…
— Mon Dieu, c’est que je pleure aussi.