Les principaux monuments funéraires/Andrieux

ANDRIEUX.




Andrieux (François-Guillaume-Jean-Stanislas) naquit à Strasbourg (Bas-Rhin), le 6 mai 1759.

Élève au collège du cardinal Lemoine, à Paris ; maître-clerc d’un procureur au Châtelet ; secrétaire de M. le duc d’Uzès ; avocat ; chef de division à la liquidation générale, en 1791 ; membre de la Cour de Cassation, en 1794 ; député au Conseil des Cinq-Cents, pour le département de la Seine, en l’an vi ; membre du Tribunat, en l’an viii ; éliminé, en l’an x, par l’ombrageuse politique du Premier Consul, à qui M. Andrieux avait dit ce mot profond, et devenu célèbre : « On ne s’appuie que sur ce qui résiste ; » refusant les fonctions de censeur que lui offrait le ministre Fouché ; professeur à l’École Polytechnique, en 1804 ; professeur au collège de France, depuis 1814 jusqu’en 1833 ; membre de l’Institut, depuis la fondation, en 1795, et secrétaire perpétuel de l’Académie Française, en 1829 ; pendant cette longue carrière, et dans ces fonctions si diverses, M. Andrieux a toujours montré la même supériorité d’intelligence et de raison, les mêmes principes d’inébranlable probité, la même indépendance d’opinions, le même caractère de bonté, de grâce et de noblesse, le même dévouement à ses devoirs et à son pays.

Les loisirs que ses fonctions lui laissaient, il les a consacrés à des ouvrages littéraires. Ami de Collin-d’Harleville et de Picard, il a commencé sa carrière dramatique, en 1782 et 1787, par la jolie comédie d’Anaximandre, et par les Étourdis, l’un des chefs-d’œuvre de la scène française, et il l’a terminée, à une distance de près de cinquante ans, en septembre 1830, par la tragédie de Brutus. Dans son théâtre, on remarque encore le Trésor et Molière avec ses amis, joués en 1804 ; le Vieux Fat, en 1810 ; la Comédienne, en 1816 ; le Manteau, en 1826.

Ses contes et ses poésies philosophiques, depuis le Meunier de Sans-Souci et l’Épître au Pape jusqu’au discours sur la Perfectibilité, l’ont fait considérer comme le digne et dernier représentant du siècle de Voltaire.

Mais tous ces ouvrages n’étaient pour lui que de simples délassemens ; ce qu’il préférait, ce qu’il regardait comme sa vocation, comme l’œuvre de sa vie, son Cours de Littérature, fera son plus beau titre de gloire.

Pendant trente ans, à l’École Polytechnique, comme au collège de France, cet inimitable professeur n’a cessé de charmer et d’instruire une brave, loyale et studieuse jeunesse, comme il l’appelait lui-même, et ces cinq ou six cents jeunes gens qui chaque année venaient avidement recueillir ses éloquentes paroles, chaque année remportaient dans les différentes parties de la France, avec de féconds principes de goût, de raison et de morale, le tendre et respectueux souvenir de leur ami, de leur maître. Quel citoyen a rendu de plus grands services à son pays ? La France reconnaissante placera son nom à côté de celui du bon Rollin.

La vie de M. Andrieux fut celle du véritable homme de lettres, avec toute sa dignité, son indépendance chérie, et ses pures et nobles jouissances. Le 10 mai 1833, à l’âge de soixante-quatorze ans, il s’est doucement éteint dans les bras de ses enfans.

La jeunesse de toutes les écoles l’a suivi religieusement au cimetière du Père Lachaise, où il a été inhumé. Les élèves de cette École Polytechnique qu’il avait tant aimée ont porté eux-mêmes son cercueil, et M. Droz a vivement ému l’assemblée en adressant à son ami de touchans et derniers adieux.

Son monument, de forme carrée, et en marbre blanc, est élevé sur une base en pierre, et surmonté d’une corniche. Sur la façade est sculptée en creux une couronne de laurier, avec cette inscription au milieu ;

ANDRIEUX,
de l’académie
française.

Au-dessous, ses filles ont fait graver ces quatre vers, extraits d’un conte que leur père avait composé pour elles pendant leur enfance :

Que ne peut-on racheter a prix d’or
Un rien si grand, une tête si chère !
Que n’avons-nous a donner un trésor ?
Nous l’offririons pour revoir notre père !

Andrieux,
L’Alchimiste et ses enfans.

Ce monument a été exécuté sur les dessins et sous la direction de M. Théodore Labrouste, architecte, frère de l’un des gendres de M. Andrieux.