Les moteurs à gaz/Moteur Otto

L. Boulanger (Le livre pour tous no 95p. 25-28).

MOTEUR OTTO

Pour sa nouvelle machine, qui ne date que de 1877, M. Otto est revenu à la disposition horizontale, et son moteur a les mêmes apparences et les mêmes organes qu’une machine à vapeur à simple effet : piston, cylindre, bielle et arbre coudé. Seulement il en diffère par la construction du cylindre qui est ouvert d’un côté, et naturellement par son alimentation, qui est l’air et le gaz mélangés, en proportions variables comme nous le verrons plus loin.

L’air est emmagasiné dans un réservoir à air qui se trouve sous le moteur ; le gaz arrive par un tuyau de conduite muni d’un robinet, permettant de régler son admission.

Le piston, dont la tige est, comme dans tous les moteurs, en connexion par bielle et manivelle, avec un arbre sur lequel est calé un fort volant, n’affecte pas de disposition particulière. Seulement il ne va pas jusqu’à l’extrémité du cylindre, car lorsqu’il est à bout de course il laisse, entre lui et le fond, du cylindre, un espace qu’on appelle chambre de compression.

Derrière le fond du cylindre est l’appareil de distribution c’est-à-dire un tiroir mû par une bielle, qui reçoit son action d’une transmission prise sur l’arbre moteur, par l’intermédiaire d’engrenages, car le tiroir ne doit pas faire le même nombre d’oscillations que le piston.

Un premier coup de piston en avant aspire dans la chambre de compression un mélange d’air et de gaz. Revenant en arrière, le piston refoule et comprime ce mélange dans la chambre de compression ; au même instant le tiroir démasque un filet de gaz allumé qui enflamme le mélange ; les gaz se dilatent et il s’ensuit une élévation de température qui produit une augmentation considérable de pression. Celle-ci, agissant alors sur le piston, le pousse au bout de sa course et constitue la force motrice.

Revenant une deuxième fois en arrière, le piston chasse devant lui les produits de la combustion, qui sont détendus, refroidis, et qui s’échappent dans l’atmosphère par un tuyau spécial.

Et ainsi de suite, tant que la machine est en marche, ce qui donne par conséquent une inflammation pour deux coups de piston, et explique le diamètre relativement considérable donné au volant, puisque c’est la force réelle qui s’y accumule, qui fournit le travail de la compression.

La régularisation de la machine se fait par un appareil d’une disposition spéciale, qui intercepte l’arrivée du gaz, et conséquemment suspend l’inflammation, quand la vitesse acquise dépasse la vitesse normale.

M. Otto a, d’ailleurs, trouvé un moyen de faire marcher sa machine en quelque sorte à détente, par la décroissance régulière des pressions, qu’il obtient par le ralentissement relatif, apporté à la combustion de mélange.

Ce ralentissement est dû à la composition de la masse gazeuse soumise à l’inflammation ; qui varie selon les périodes du travail.

Ainsi, grâce à la disposition des lumières du tiroir, il s’introduit d’abord dans le cylindre un mélange composé de 1 partie de gaz et de 15 d’air ; c’est le mélange faiblement explosif, auquel succède un mélange de 7 parties d’air contre 1 partie de gaz qui est dit : fortement explosif. Mais cela n’est d’aucune difficulté dans la pratique, car les mélanges s’opèrent automatiquement dans le cylindre.

La consommation du gaz d’éclairage est en moyenne de 750 litres par heure et par force de cheval, pour les machines puissantes ; un peu plus pour les petits moteurs, mais elle ne dépasse jamais un mètre cube, ce qu’il est facile de vérifier d’ailleurs, en plaçant un compteur spécial entre le moteur et la conduite principale.

La consommation d’eau, sur laquelle il faut compter aussi, car il en faut pour refroidir le cylindre, est de 30 à 50 litres par heure et par force de cheval ; cette eau peut être emmagasinée dans un réservoir, mais il vaut mieux faire un

Moteur à gaz Otto.
branchement sur une conduite d’eau forcée ; c’est, du reste, indispensable quand la force du moteur est de plus de 10 chevaux, car il faut alors disposer d’un courant d’eau froide.

Comme on le voit, c’est extrêmement simple, peu encombrant, et surtout économique, puisque la machine, qui n’a pas besoin d’être tenue en pression, comme un moteur à vapeur, ne dépense que si elle travaille : on ouvre le robinet du gaz quand on veut la mettre en train, on le ferme quand on veut l’arrêter et tout est dit.

Et c’est la raison du succès de cet appareil, qui est déjà, bien qu’il n’existe que depuis peu, répandu par milliers dans l’industrie française, où les moteurs de 25 chevaux ne sont pas rares ; on en voit même quelques-uns de 50 chevaux.