Les invisibles de Paris (Aimard)/IV/IX

Roy et Geffroy (p. 671-680).
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IX

LA CIGALE

C’était le soir, par un ciel sans étoiles.

Une pluie fine et froide rayait l’atmosphère et tombait dru sur les rares passants que leurs affaires ou leurs plaisirs contraignaient à se hasarder dans les rues boueuses de la grande ville.

Un certain temps venait de s’écouler depuis la disparition du comte de Warrens.

Son enlèvement avait été exécuté avec tant d’adresse et de célérité, que, malgré les recherches les plus assidues, malgré tout l’or semé par eux, les Invisibles n’avaient découvert nul indice qui pût les mettre sur la voie.

Ils avaient pourtant des ramifications dans toutes les classes de la société.

Quoi qu’il en fût, ils se voyaient forcés de reconnaître leur impuissance momentanée et de s’avouer battus à plate couture.

M. Jules et ses adhérents ou ses clients l’emportaient sur eux.

Ils avaient bien, comme compensation, mis la main sur la précieuse cassette, tant refusée au général Macé, le faux duc de Dinan, par le baron de Kirschmark, mais cette compensation était peu de chose auprès de la perte énorme qu’ils essuyaient dans la personne de leur chef.

Et ce chef, quand le perdaient-ils ?

Au moment où il leur était le plus nécessaire, le plus indispensable.

Au moment où il donnait sa liberté pour sauver la leur, sa vie peut-être pour sauver leur vie.

Plusieurs personnes se trouvaient réunies dans le modeste salon du petit appartement de M. Lenoir, situé rue d’Astorg, numéro 35.

Ces personnes causaient avec une grande animation, bien qu’à voix contenue.

Parmi elles, on comptait :

D’abord le maître du logis lui-même, M. Lenoir, ou, si l’on veut, Martial Renaud, qui, certain de la discrétion de ses visiteurs, avait laissé de côté son déguisement ordinaire de commis-voyageur.

Puis sir Harry Mortimer.

Le vicomte de Rioban, encore pâle de ses blessures,

Le comte de San-Lucar,

Le baron d’Entragues,

Karl Schinner, l’intendant de M. de Warrens,

Le vicomte René de Luz, dont la convalescence touchait à son terme,

Le docteur Martel,

Olivier Dubreuil,

Et Adolphe Blancas,

Dix personnes en tout.

Le colonel Martial Renaud, jetant un regard sur la pendule, se leva, s’approcha de la cheminée contre laquelle il s’appuya, et d’un geste il requit le silence de l’assemblée.

Les conversations particulières cessèrent comme par enchantement.

On l’écouta.

— Messieurs, dit le colonel, il y a aujourd’hui vingt jours qu’à l’issue de notre expédition dans le parc de la maison de Belleville mon frère, votre chef, a disparu. C’est en vain que j’ai appelé à mon aide nos agents les plus dévoués, les plus expérimentés ; c’est en vain que nous avons fouillé ce monde nommé Paris dans ses plus secrets repaires : rien ! Nous n’avons rien trouvé !

« Deux de nos plus fidèles compagnons, absents depuis trois jours, n’ont pas reparu.

« Peut-être sont-ils tombés dans quelque guet-apens tendu par nos ennemis, victimes eux-mêmes de leur dévouement et de leur fidélité. Il faut s’attendre à tous les malheurs.

« Ces agents, dont je regrette l’absence et dont je redouté d’avoir à déplorer la perte avant peu, sont la Cigale et Frantz Keller.

Un murmure de sympathie et de regret accueillit ces paroles du colonel.

Il reprit :

— Le cas de la disparition de notre chef est prévu par les statuts de l’Association. Vous le savez, quand une de ses têtes tombe, une autre la remplace immédiatement.

« Dans les vingt jours qui suivent la disparition ou la mort du chef, une réunion des Compagnons de la Lune doit être convoquée dans le logement de l’un d’entre eux.

« Dans cette réunion, se trouvent neuf membres au moins, faisant partie des principaux chefs de l’Association.

« Séance tenante, un chef suprême remplace le chef suprême décédé, un chef provisoire remplace le chef disparu ou absent depuis vingt jours par une cause inconnue.

« Le temps nous presse, messieurs.

« Cette réunion, j’ai pris sur moi de la convoquer.

« Vous avez répondu à mon appel.

« Merci.

« Nous sommes réunis.

« Voici du papier, des plumes, de l’encre.

« Nous allons procéder à l’élection du chef suprême provisoire.

« Mais avant tout jurons, quel que soit ce chef, de lui obéir aveuglément, ainsi que nous obéissions à son prédécesseur.

— Nous le jurons ! fut-il répondu.

On procéda à l’élection.

Les neuf Compagnons de la Lune firent quelques pas en arrière.

Ils formèrent un groupe compact et causèrent quelques instants à voix basse, sans que le colonel Martial Renaud pût entendre un seul mot de leur entretien.


— Edmée, reprit le comte en pressant la jeune fille sur son cœur, vous êtes vaillante, vous m’attendrez.

Le colonel s’était assis devant une table.

Là, à l’aide d’un poignard, il coupait une grande feuille de papier en morceaux d’égale dimension.

Après une courte délibération, sir Harry Mortimer se détacha du groupe des Compagnons de la Lune.

Il se rapprocha de la table, suivi des autres Invisibles, et posant la main sur l’épaule de Martial Renaud :

— Colonel ? lui dit-il.

— Que me voulez-vous, mon ami ?

— Je veux vous dire, colonel, que vous faites là une besogne bien inutile.

— Inutile ? demanda Martial Renaud, qui ne comprenait pas où l’Invisible allait en arriver.

— Oui. Le nouveau chef suprême de notre association est élu à l’unanimité.

— Le chef provisoire ?

— Lui-même.

— Mais je n’ai pas voté.

— Aussi laissez-moi achever… J’ai dit à l’unanimité… j’allais ajouter : moins une voix…, la vôtre.

— Eh bien ?

— Eh bien ! nous espérons, ajouta sir Harry Mortimer, que vous vous rallierez à la majorité.

— Quel est ce chef, mon ami ?

— Notre choix est bon.

— Je n’en doute pas… Ici, je ne vois que des hommes de cœur, des gens d’honneur et d’intelligence… Quel que soit votre choix, pour ma part, je le ratifie d’avance.

— Bien, colonel, nous n’attendions pas moins de vous.

— Et ce chef, son nom ?

— Le colonel Martial Renaud.

— Moi !

— Vous-même.

Le colonel se leva.

Mortimer lui saisit la main et il ajouta :

— Oui, vous. Le plus digne, après votre frère. Nous vous aimons tous, comme nous l’aimions. J’espère que nous reparlerons encore de lui au présent. Nous avons foi en vos talents…

« Vous possédez la plupart des secrets du comte de Warrens, donc, mieux que personne, nous vous jugeons capable de le remplacer.

Martial Renaud hésitait encore.

— D’ailleurs, reprit Mortimer, afin de lever vos derniers scrupules, qui sont une flatterie indirecte à notre endroit, nous vous donnerons la meilleure de foules les raisons pour que vous vous croyiez forcé d’accepter.

— Dites.

— À vous seul…, à vous surtout appartient le bonheur de sauver votre frère ou le droit de le venger. Comptez sur nous, comme nous comptons sur vous.

« À partir de cette heure, en l’absence du comte de Warrens, vous êtes le chef suprême des Invisibles.

Martial Renaud était en proie à une émotion intérieure qu’il surmonta difficilement.

— J’accepte, messieurs, répondit-il. J’accepte la lourde tâche que vous m’imposez. Tous mes efforts tendront à me rendre digne de votre choix. Rioban ?

De Rioban s’approcha.

— Veuillez, je vous prie, dresser un procès-verbal de l’élection, procès-verbal que tous les membres de l’Association présents signeront. Nos statuts l’exigent.

Le vicomte de Rioban obéit.

Chacun signa au bas de l’acte, écrit en double, préparé d’avance, et auquel il ne manquait que le nom de l’élu et ceux des électeurs.

Le colonel Renaud plia soigneusement les deux actes, et il les serra dans la poche du côté de son habit.

Aussitôt qu’il eut fini, on entendit retentir un timbre dans une des pièces voisines.

Le colonel quitta le salon et s’approcha de la porte d’entrée, contre laquelle il appuya son oreille.

Trois coups, à intervalles égaux, furent frappés du dehors contre la porte.

Martial ne bougea pas.

Puis vint un léger grincement produit par le frottement d’une lame de couteau contre le bois.

Martial mit la main sur la clef de la porte.

On frappa deux nouveaux coups plus précipités que les premiers.

Martial ouvrit.

Un homme entra.

Cet homme, c’était la Cigale.

Les vêtements du colosse étaient en lambeaux.

Ils ruisselaient comme si leur propriétaire était sorti un instant auparavant de la rivière.

Chacun de ses pas laissait une trace boueuse sur le parquet.

Il paraissait brisé de fatigue, et s’appuyait en marchant sur un énorme gourdin, ayant beaucoup plus de conformité avec une massue qu’avec un stick.

Malgré la fatigue qui l’écrasait, son visage rayonnait de joie.

À tel point, qu’en apercevant cette honnête, brave et joyeuse figure le colonel fut pris de confiance et crut son frère retrouvé.

— Enfin, te voilà ! s’écria-t-il.

— Mais, oui, mon colonel, répondit le géant.

— Sois le bienvenu.

— Je veux bien.

— As-tu des nouvelles ?

— Dame… oui.

— De bonnes nouvelles ?… Réponds.

— De toutes fraîches… au moins… Quoi ! on a ce qu’on peut, et ce n’est pas sans peine.

— Certaines ?

— Pardi… Sans ça… je ne serais pas ici.

— Je te crois… Viens.

— Où ça ?

— On t’attend…

— Au salon ?

— Oui.

— Qui ça ?

— Des amis… des frères… des chefs ?

— Je ne peux pas entrer comme ça ?

— Nigaud !

— Laissez-moi monter dans ma soupente. Je me changerai en deux temps.

— Bah ! nous avons bien d’autres chats à fouetter, vieux coquet… J’ai ici tout ce dont tu peux avoir besoin plus tard ; viens toujours.

— Ah ! c’est comme ça ?… Allons-y, mon colonel.

Et la Cigale suivit résolument le colonel Martial Renaud, qui l’introduisit dans le salon.

Les Compagnons de la Lune accueillirent de leur mieux, et avec des cris de joie, le brave débardeur.

On l’entoura. On le fêta.

Le colosse ne savait plus où donner de la tête.

En pénétrant dans le salon, soit saisissement causé par une transition trop violente du froid au chaud, soit toute autre cause connue de lui seul, la Cigale pâlit affreusement et chancela sur sa base.

Si on ne s’était précipité pour le soutenir, il serait certainement tombé tout de son long sur le parquet.

— Qu’y a-t-il, mon vieux ? demanda Martial Renaud. Tu vas te trouver mal comme une petite maîtresse, toi, un homme, un vrai homme ! Es-tu blessé ?

— Non, mon colonel.

— C’est la fatigue alors ?…

— Faites excuse… C’est peut-être ben ça… Mais je vas vous dire… Mâtin de chien ! jura-t-il en s’appuyant d’une main sur la table et de l’autre sur son bâton.

— Qu’as-tu enfin ?

— C’est bête comme tout, voyez-vous… ; mais, il n’y a pas, il n’y a pas… faut céder à la nature, quoi !…

— Parle.

— J’ai fait près de quinze lieues aujourd’hui sur mes paturons.

— À pied ?

— Ma foi, oui ! Et ça creuse, quinze lieues, surtout quand on n’a pas mangé depuis deux jours.

— Que dis-tu là, malheureux !…

— La vérité… quoi !

— Tu es resté deux jours… à jeun ?

— Quarante-huit heures tout au long, mon colonel.

On s’empressa autour du brave colosse.

On lui donna des vêtements secs.

On le força à s’asseoir, à se reposer.

Martial Renaud, qui venait de courir au buffet placé dans la salle à manger, revint chargé de tout ce qu’il avait trouvé, un pâté, une moitié de gigot, un pain de quatre livres.

Le vicomte de Rioban portait deux bouteilles de vin, des verres, des couteaux, des assiettes, tout ce qu’il fallait enfin pour mettre le couvert de leur fidèle et dévoué compagnon.

C’était un spectacle touchant que celui de cet ouvrier, de ce rude serviteur, servi par ses maîtres, ses supérieurs, tous gentilshommes ou grands de la terre.

L’égalité, tel est le plus beau résultat de la sainte association.

— Tiens, gredin, mange !… Tiens, misérable, bois ! dit en riant le colonel. Mange et bois tout ce qu’il te plaira ; quand il n’y en aura plus, il y en aura encore.

La Cigale faisait des manières.

— Oh ! mon colonel… je n’oserai jamais !

— Veux-tu bien manger tout de suite ! Tu nous fais attendre, et nous brûlons de t’interroger aussitôt que tu seras à même de nous répondre.

La Cigale se dressa subitement et saluant militairement :

— Interrogez, mon colonel, dit-il, je suis prêt.

On fut obligé d’employer une demi-violence pour le forcer à s’asseoir de nouveau.

Il ne se mit à manger que parce qu’on lui promit de ne l’écouter qu’après son repas.

— C’est bien pour vous obéir, allez…, fit-il respectueusement, tout en sentant une grande attraction vers les mets succulents étalés sur la table, auxquels Rioban et Mortimer venaient d’ajouter une troisième bouteille de vin, un jambonneau et un second pain de quatre livres.

Le colonel Renaud riait d’avance de la surprise de ses hôtes.

Il connaissait l’appétit du colosse.

Il savait que, pour peu qu’on ne l’arrêtât point dans son élan, la Cigale ne laisserait pas une miette de pain, un morceau de viande, une larme de vin.

Il fit signe aux neuf autres Invisibles de le laisser fonctionner à son aise.

— Va toujours…, va, mon gars, va, mange à ta faim.

Et la Cigale allait toujours.

Et la Cigale mangeait à sa faim.

Les Invisibles le servaient à l’envi.

Ils remplissaient son verre, coupaient sa viande, lui cassaient son pain.

Le débardeur était servi à souhait, comme dans un conte de fées.

Rendons-lui cette justice, le géant se laissait faire avec une docilité charmante.

Il avait mis tout amour-propre de côté.

Chacune des personnes qui se trouvaient là était pour lui une vieille connaissance.

Il n’avait que des amis dans l’assemblée.

Quelques minutes se passèrent ainsi, pendant lesquelles on n’entendit d’autre bruit que celui de ses deux puissantes mâchoires broyant, brisant, déchirant et avalant tout ce qu’on leur présentait.

— C’est plaisir de l’inviter à sa table, n’est-ce pas, messieurs ? disait Martial Renaud en riant.

— Le fait est, mon colonel, que j’avais rudement faim ! Je peux l’avouer maintenant.

— Cette franchise te fait honneur !… Ah çà, voyons, mon brave…, ta faim est un peu calmée, hein ?

— Un peu… oui… bien peu… mais ça peut aller comme ça tout de même.

— Peux-tu répondre à mes questions ?

— Pardi !

— Tout en continuant à manger…, bien entendu.

— Allez votre train… cane me gênera pas, répliqua le colosse engouffrant un tiers du jambonneau…, d’autant que je ne suis ici que pour la chose…

— Bien.

— J’attends, mon colonel.

Il vida une seconde bouteille.

On l’admirait.

Il s’arrêta pour encourager l’interrogatoire de Martial Renaud.

— Allez-y, fit-il. J’y suis.

— Tu as fait quinze lieues aujourd’hui, m’as-tu dit ? N’est-ce pas ?

— Pied à pied, pouce à talon, talon à pouce, répondit-il.

— D’où viens-tu ?

— Ah ! voilà ! Je ne sais pas.

— Comment, tu ne le sais pas ?

— Ma foi non… mais ne vous inquiétez pas… je vas vous raconter la chose tout de même… Je viens d’une maison qui se trouve seule dans la campagne.

— Quelle campagne ?

— Je vous dirai ça demain…, quand je saurai son nom. Je retomberai sur mes pattes à cet endroit-là. Soyez tranquille.

— Je suis tranquille… Mange.

La Cigale engloutit le reste du pâté, et il entama la troisième bouteille de bordeaux.

Sur une invitation muette du colonel, toutes les conversations particulières avaient cessé.

Les Invisibles écoutaient l’entretien du colonel et de la Cigale avec le plus vif intérêt.

Martial Renaud reprit :

— Qu’étais-tu allé faire dans cette maison ? Y es-tu entré ?

— Non, mon colonel. Je n’ai pas pu. Mais c’est égal !…

— Égal… en quoi ?

— J’ai mon idée.

— Raconte-la.

— Plus tard… on verra !

— Enfin… pourquoi es-tu allé là ?

— Ah ! voilà… mon colonel… je suivais une piste.

— Une piste ?

— Oui… vous savez bien…, comme disent les Peaux-Rouges et les peaux blanches d’Amérique.

— Bien… Mais quelle piste suivais-tu ?

— Est-ce que je pouvais en suivre deux ?

— C’était celle de mon frère ?

— Du capitaine…, Pardi, oui !

Il but le reste de la dernière bouteille.

— Tu as trouvé la trace du capitaine ? s’écria Martial, avec un transport de joie.

— Je l’ai trouvée… Je l’ai… non.

— Que disais-tu donc ?

— Ce n’est pas moi qui l’ai trouvée… mais, enfin, il n’y a pas de mal… C’est tout de même…

— Explique-toi…

— Que qu’ça fait ? Pourvu que ça y soit… et ça y est.

— Il a donc quitté Paris ?

— On le lui a fait quitter… oui.

— Depuis combien de temps ?

— Il y a au moins quatre jours.

— Et tu l’as vu ?

— Je n’en suis pas bien sûr…, mais je le crois.

Le colonel, tout en ne saisissant pas bien le sens énigmatique des réponses de la Cigale, savait qu’il ne fallait jamais lui en demander trop.

L’intelligence du géant ne suivait jamais que la ligne de conduite qu’il s’était tracée.

Un écart, une route de traverse, un point d’orgue inattendu, et il perdait la carte.

Il continua son interrogatoire en y mettant toutes les précautions oratoires imaginables.

— Tu as bien agi… Mais, dis-moi…, pourquoi n’avoir pas suivi cette piste jusqu’au bout ?

— Il ne fallait donc pas accourir vous prévenir, vous raconter ce que j’avais fait ?

— Mais, malheureux ! maintenant que tu n’es plus là, cette piste, le fruit de tes peines, va être perdue de nouveau ?

— Ah ! ouiche !

— Parviendrons-nous à la retrouver ?

La Cigale regarda le colonel avec une expression de pitié d’autant plus marquée, qu’elle se mêlait à un respect inaltérable pour le frère de son capitaine.

Il avala les bribes du repas qu’on lui avait offert, s’essuya les lèvres, jeta un regard triomphant sur cette table qu’il venait de si bien nettoyer, et se levant il dit au colonel :

— Merci de votre déjeuner, mon colonel… Mais faites excuse… vous ne connaissez pas votre vieux la Cigale… Il n’aurait pas mangé de si bon cœur s’il n’avait pas été sûr de retrouver la piste en question, quand il lui plaira de la retrouver.

— Ainsi ?

— Ainsi, j’ai pris mes précautions… et quand je prends mes précautions il n’y a pas de danger que je sois mordu.

Cela dit, il s’assit majestueusement et il attendit la fin de son interrogatoire.