Les heures de Paphos, contes moraux/02

(Un sacrificateur de Venus)
(p. Fig.-10).
La Simplicité rustique.
Les Heures de Paphos, contes moraux, 1787 - Figure p-09
Les Heures de Paphos, contes moraux, 1787 - Figure p-09

La Simplicité rustique.



Au bon vieux tems, siecle de la décence,
Avant l’hymen une fille ignorait,
En quoi de l’autre un sêxe differait ;
On etoit sur d’epouser l’innocence.
Contente, pour la fin de l’an
D’epouser son amoureux, Jean :
La jeune et naïve Perrette
Avec lui folâtrait un jour.
Tous deux jouaient à la cachette,
Et Jean se cachait à son tour.
Il entre au fond d’une mazure,
Ou croyant sa retraite sûre,
Et n’être pas sitôt trouvé ;
Tout en guettant il s’évertue
De donner à ses eaux l’issue
Par le Canal accoutumé.
Mais déjà l’agile Perrette

A fureté de coin en coin,
Elle parvient à la cachette
Et voit Jean qui tenait en main
Certain tuïau de taille non menue.
Elle se sauve, et vient tout éperdue,
Trouver sa mere. Ah ! ma bonne maman !
Si vous saviés ce qu’a le pauvre Jean,
Je ne voudrais jamais être sa femme.
Il est blessé : je l’ai vû, sur mon ame.
Hors de son ventre il sort un pros boyau !
Connoissant mieux le prix de ce joujou ;
Rassure-toi, lui répondit sa mere ;
Ce bobo-là, fera bien ton affaire :
Et ce boyau qui ta fait tant de peur,
D’un bon mari fait toute la valeur…
Un mois après, se fit le mariage.
Pendant le bruit d’un rustique festin,
le plaisir nageait parmi des flots de vin ;
Perrette sent désir de connaitre l’usage

Du mal de Jean ; dût-elle le gagner.
Elle fait signe à Jean de s’eloigner…
Elle le suit… il vont dans un bocage ;
les oiseaux par leur tendre ramage
De nos époux célébraient le beau jour ;
Et leur donnaient l’exemple de l’amour
Jean, garçon vif, docile à la nature
Saisit Perrette, et se met en posture
Il n’introduit d’abord qu’un petit bout
De son bobo. Perrette y prend du goût ;
Elle rougit ; s’anime, enfonce, lui dit-elle,
Ah… Ah… encor… enfin, fit si bien la donzelle
Que Jean lui dit : par ma foi, voila tout.
Oh ! vous mentés, répond notre novice ;
Je sens encor là bas un suplément.
Oui ; lui dit-il, mais c’est pour l’ornement,
Et le reste est pour le service.
Ah ! mon ami, reprit-elle, attendrie,
Oblige-moi, mets tout dedans.

Aux gros Monsieux laissons la braverie,
Il n’en faut point aux braves gens.


Les Heures de Paphos, contes moraux, 1787 - Cul-de-lampe
Les Heures de Paphos, contes moraux, 1787 - Cul-de-lampe